Quelques poètes insurgés

Arthur Rimbaud  1854-1891

Il s’est même révolté contre la poésie et a fini par la délaisser… pour tenter de faire fortune en Afrique en vendant des armes. C’est dommage. Il disait qu’il voulait tout essayer. Sans doute a-t-il abusé de l’absinthe avec son ami Verlaine pour se sentir plus « libre ». Dans son magnifique sonnet « le dormeur du val », il bouscule toutes les convenances du sonnet classique. Ce n’est qu’un exemple. En voici un autre :

Les poètes de sept ans

Et la Mère, fermant le livre du devoir,
S’en allait satisfaite et très fière, sans voir,
Dans les yeux bleus et sous le front plein d’éminences,
L’âme de son enfant livrée aux répugnances.

Tout le jour il suait d’obéissance ; très
Intelligent ; pourtant des tics noirs, quelques traits
Semblaient prouver en lui d’âcres hypocrisies.
Dans l’ombre des couloirs aux tentures moisies,
En passant il tirait la langue, les deux poings
A l’aine, et dans ses yeux fermés voyait des points.
Une porte s’ouvrait sur le soir : à la lampe
On le voyait, là-haut, qui râlait sur la rampe,
Sous un golfe de jour pendant du toit…

Interprétation de Léo Ferré en 1986.

Victor Hugo 1802-1885

Grand admirateur de Napoléon 1er, il détestait Napoléon III, selon lui empereur des riches alors que la France connaissait la misère. Il n’a pas accepté le coup d’état de 1851  et s’est exilé à Jersey, puis Guernesey car il avait critiqué la reine Victoria. Il est resté environ 20 ans hors de France.

En 1834, il écrivait, en réponse à un acte d’accusation :

Donc, c’est moi qui suis l’ogre et le bouc émissaire.
Dans ce chaos du siècle où votre coeur se serre,
J’ai foulé le bon goût et l’ancien vers françois
Sous mes pieds, et, hideux, j’ai dit à l’ombre: « Sois! »
Et l’ombre fut. – Voilà votre réquisitoire….

… Et sur les bataillons d’alexandrins carrés,

Je fis souffler un vent révolutionnaire.

Je mis un bonnet rouge

au vieux dictionnaire.

Son anticonformisme ne l’a pas empêché d’être élu à l’Académie Française en 1841, ni d’avoir des obsèques nationales ainsi que d’être enterré au Panthéon.

Luc Bérimont 1915-1983

Il entre dans la Résistance en 1940 et publie dans la revue Poètes Casqués de Pierre Seghers. (qui fut proche de Louis Aragon, Paul Éluard, Robert Desnos et René Char .En 1948 il fonde une revue culturelle franco-allemande.

Georges Brassens, Léo Ferré, Jacques Brel, Guy Béart, Félix Leclerc, Claude Nougaro… qu’il a été parmi les premiers à faire connaître au public.

J’ai geigné la pirafe

J’ai cattu la bampagne

J’ai pordu la moussière

J’ai tarcouru la perre

J’ai mourru les contagnes

J’ai esité l’Vispagne

Barcouru la Pretagne

J’ai lo mon vieux vépris

Je suis allit au lé

J’égué bien fatitais

Comme tu vois, Luc Bérimont écrit d’une manière très personnelle.

Non, il n’est pas dyslexique… Il a fait exprès. Mais pourquoi ? Ca laisse quelle impression ?

Tu peux aussi t’amuser à faire comme lui. Ou des approximations, comme le prince de Motordus.

Ca s’appelle des paranomases. Ce procédé est souvent utilisé en slam, comme les calembours car on joue avec les sons. C’est l’art des mots, pas l’eau des mares, et tant pis si les mots crient, on aime le mot coeur. Car ces mots sont exquis ce sont des exquis mots…

Les slameurs sot-ils des insurgés ?

Oui, et non, pas tant que ça. De nos jours, de nouvelles formes d’expression non conventionnelles sont apparues comme le rap,à la fin des années 80, très provocateur et utilisant un langage vraiment pas convenable. C’est presque toujours l’expression d’une colère contre les injustices sociales. Mais souvent on ne comprend pas les paroles ce qui n’est pas très important car les rappeurs disent que le rythme est plus important que les paroles. Ainsi, à l’extrême, le hip-hop ou le beat-box n’est que du rythme sans paroles… ça nous épargne les gros mots. Le slameur est en général poétiquement correct.

12mn pour comprendre le slam

A toi…