Commentaire de l’article de F. Laplantine et premières réflexions sur ma pratique

Quel sens donner aux mots « différence », « décentration », « ethnocentrisme » ?

Comment l’être humain a-t-il la possibilité de penser, de vivre l’altérité?

Laplantine, dans cet extrait, nous invite à réfléchir à cette « problématique de la différence ». En tant qu’anthropologue, il est d’autant plus conscient de l’importance mais aussi de la complexité d’une rencontre avec l’Autre pour accéder à son système de sens. Il invite chacun à dépasser sa tendance ethnocentrique, réflexe presque « naturel » selon Lévi Strauss. L’ethnocentrisme relève de «différentes formes : [la dévalorisation, la négation de l’autre et ou le repli sur soi] que prend le refus de la diversité des cultures.» (Yves SUAUDEAU, « ETHNOCENTRISME  », Encyclopædia Universalis [en ligne]) Par quel mécanisme intellectuel homme peut-il lutter contree frein à la rencontre avec l’Autre?

Laplantine estime que l’homme (en l’occurrence l’observateur), par un mouvement de décentration de soi, doit s’extraire de ses conceptions normatives pour ne pas compromettre son rapport avec l’Autre. Réfléchir et déconstruire ses propres préjugés et stéréotypes, semblent deux étapes essentielles, pour envisager la relation avec une personne différente, de manière la plus « neutre » possible (dans le sens de la neutralité axiologique). Dans ce sens, «cet état initial de détachement » constitue « un avantage pour se rapprocher de sociétés différentes », affirme Lévi Strauss. Laplantine définit un double intérêt à la décentration : découvrir et donner du sens aux structures fondatrices d’une autre société mais également s’interroger sur notre propre fonctionnement sociétal. Parce que l’on prend généralement pour acquis ce que l’on vit, prendre du recul et se confronter à la différence, redessine cet état de fait pour devenir un état à questionner.

Pourquoi cette démarche, en plus de nous permettre de comprendre l’autre, nous amène-t-elle à nous comprendre nous-mêmes ?

C’est par une démarche réflexive et compréhensive que je peux, non seulement, interroger les constituants qui fondent ma propre identité mais également me construire en tant qu’être social. Cette confrontation avec l’altérité me donne une matière à réfléchir sur mes propres actions et représentations. En essayant de rechercher les sources de mes manières d’agir et de penser (en interrogeant mon parcours de vie, par exemple), j’apprends à mieux me connaître et à me construire. Ainsi, les relations que j’entretiens avec autrui n’est pas sans lien avec le rapport que j’entretiens avec moi-même.

Comment, en tant qu’enseignant, puis-je mettre en œuvre cette approche dans ma classe ? Autour de quelles activités précises ?

J’ai été à mettre en œuvre cette approche et à réfléchir à cette problématique de la différence, tout d’abord, en tant qu’AVS. Cette expérience a été déterminante pour la suite de mon parcours d’enseignante. Confrontée pour la première fois à une situation de handicap (trouble du spectre autistique), une des principales difficultés pour pouvoir échanger et partager avec mon élève a été d’établir un contact avec elle. Cette dernière fuyait (dans tous les sens du termes) toute interaction sociale et était non verbale (au début de la rencontre). Dès lors, il a été nécessaire, dans mon cas, d’opérer une réelle décentration par rapport à ma façon de fonctionner et d’interagir avec l’autre. Interroger mes propres pratiques sociales (celles qui me paraissaient « naturelles ») et essayer de découvrir et de comprendre une autre manière d’appréhender le monde a été primordial. Une réflexion s’est, également , engagée quant à son inclusion dans la classe (classe de MS). Le constat est que, dans l’ensemble, mon élève faisait réellement partie du groupe classe même si les échanges entre ses pairs étaient fluctuants. Finalement, les enfants vivaient avec sa différence plus qu’ils ne la pensaient (cela ne veut pas dire qu’ils ne se posaient pas certaines questions…) C’est un véritable processus qui s’est mis en place avec l’aide d’un certain nombre d’acteurs : la famille, la collègue AVS et l’enseignante.

En tant qu’enseignante de maternelle, il semble essentiel de proposer un cadre dans lequel mes élèves vont pouvoir découvrir, appréhender et vivre la différence, au quotidien.  Cette confrontation à l’altérité va être déterminante dans leur construction de leur personnalité.  Rappelons que, compte tenu de l’âge de mes élèves (entre trois et quatre ans), leurs capacités de décentration ne sont pas encore mises en place, ils restent encore très égocentrés. Pour une partie de mes élèves (PS), c’est la première fois qu’ils sont confrontés à l’altérité : avec leurs pairs et avec le monde des adultes (autres que ceux de leur univers familial). De plus, ayant un élève d’origine étrangère (un PS), dont la langue maternelle n’est pas le français, un travail spécifique avec lui a commencé à être mis en place. A la lecture de mon diagnostic partagé, un des points soulignés est qu’il est important que je propose des situations langagières plus importantes pour mes élèves de PS. Cette situation me permet de réfléchir, concrètement, à cette problématique de l’altérité et des compétences interculturelles au sein de ma classe.