Auto-ethnographie  (Octobre 2021) :

Je mets en ligne un nouveau site Internet « Education populaire conscientisante ». Il vient s’ajouter aux nombreux sites internet que j’ai déjà mis en ligne où je mets à disposition gratuitement le produit de mon travail. Seulement voilà au bout de deux ou trois jours, le site n’est toujours pas référencé par « Google ». Je m’inquiète : est-ce que je n’ai pas décoché par erreur la mention « indexation moteur de recherche » ? Plus moyen de revenir en arrière sur la plateforme que j’utilise pour modifier cet état de fait. J’essaie de faire le référencement manuel auprès de « Google », mais je n’y parviens pas. On me demande un certificat que je ne sais pas comment valider. Sans doutes parce que je passe par une plateforme pour mettre en ligne mon site internet et donc que je ne contrôle pas tout le processus. Quelques jours après, je constate que le site Internet commence à être automatiquement indexé.

Méditation philosophique :

Cette expérience illustre notre rapport à la technique fait à la fois d’ambivalence et de dépendance. Internet nous permet de partager gratuitement des informations avec des millions de personnes de part le monde. Mais en même temps, ce travail mis en ligne gratuitement ne fait qu’alimenter l’économie de la donnée personnelle dont Google est l’inventeur (Cf. Zuboff, L’âge du capitalisme de surveillance).

Nous savons et nous sommes conscients de ce que représente « Google » en termes de captation de nos données intimes et de marchandisation de nos existences. Pourtant, son poids quasi hégémonique en tant que moteur de recherche, nous rend dépendant de ce moteur si nous voulons que notre travail existe publiquement sur Internet, que nous puissions espérer qu’au hasard de leurs recherches des personnes puissent découvrir notre travail.

Ainsi la conscience de l’aliénation ne suffit pas. Il faut également posséder les moyens matériels d’y résister.

Cette dépendance est certes constituée dans ce cas aussi par le recours à une plateforme propriétaire et non pas intégralement en logiciel libre. La dépendance provient ici aussi du manque de compétence technique.

Mais elle provient aussi de l’économie de la gratuité. A partir du moment où ce qu’on met en ligne y est mis gratuitement à disposition, il devient plus difficile d’accepter en plus de payer. Ce serait travailler gratuitement et en plus payer pour faire exister ce travail gratuit. Dès lors, le risque est de tomber dans l’économie de la marchandisation de la donnée personnelle.

Néanmoins, même le logiciel libre n’échappe pas à une économie de production. S’il y a un travail, il est illusoire de penser que ne se mettra pas en place un modèle économique pour tenter de rémunérer ce travail. (Cf. François Elie, L’économie du logiciel libre, 2009).

Ainsi, dans mon cas, le loisir de mettre en ligne gratuitement des contenus sur Internet m’est donné par le fait que je dispose d’un emploi comme fonctionnaire.