Film : Into the wild

(Réalisateur : Sean Penn, 2008)

Résumé: Tout juste diplômé de l’université, Christopher McCandless, 22 ans, est promis à un brillant avenir. Pourtant, tournant le dos à l’existence confortable et sans surprise qui l’attend, le jeune homme décide de prendre la route en laissant tout derrière lui.

Au bout de son voyage, Christopher atteindra son but ultime en s’aventurant seul dans les étendues sauvages de l’Alaska pour vivre en totale communion avec la nature.

Commentaire :

Into the wild est un film paradigmatique sur le projet existentiel de vivre une vie authentique.

On y retrouve les présupposés sociaux les plus souvent présents dans cette aspiration. La subjectivité dont il est question est celle d’un jeune homme blanc des classes moyennes. L’aspiration à l’authenticité pour une femme se pose-t-elle de la même manière ? Les personnes des classes populaires peuvent-elles aspirer à vivre une vie authentique dégagée des impératifs matériels ? Ect… Autant de points qui ne sont pas interrogés.

L’authenticité est ici identifiée à la confrontation de la subjectivité avec la nature sauvage (« wilderness »). Si comme Charles Taylor l’affirme la recherche d’authenticité est une aspiration de l’individu moderne, l’identification de cette aspiration avec une vie plus proche de la nature, est présente aussi bien chez des auteurs comme Rousseau que Thoreau.

La vie sociale est vue chez Rousseau comme productrice d’une perversion du moi (« l’amour propre ») liée aux sentiments sociaux : jalousie, désir de reconnaissance, hypocrisie… Néanmoins, lorsqu’on y réfléchi cette critique des conventions sociales se trouve déjà dans l’Antiquité chez les cyniques, école philosophiques qui était ouverte aux femmes.

La vie sociale peut-être également identifiée au divertissement qui nous éloigne de nous même. C’est le cas pour par exemple pour Blaise Pascal.

La vie moderne est également perçue comme un lieu d’artificialisation de l’existence avec la technique moderne. Plus la vie de l’individu moderne s’artificialise, plus émerge « le sentiment de la nature » : l’impression de s’éloigner de la nature sauvage et le désir de la retrouver.

De ce fait, la nature sauvage permettrait au sujet moderne de se confronter à la dimension existentielle de la subjectivité, loin du divertissement.

Néanmoins, ce que Christopher découvre au fond de sa quête, c’est la solitude existentielle renforcée par l’absence d’intersubjectivité. Que vaut l’expérience subjective du monde, si elle ne peut pas être partagée avec d’autres ?

Mais cette découverte a un prix tragique, elle arrive trop tard….

Une certaine tendance des penseurs de l’existence est d’orienter la vie authentique vers la solitude. En effet, les relations sociales seraient toujours une menace pour l’authenticité du moi : Rousseau, Sartre…

Mais cette position n’est pas partagée par tous les philosophies existentiels. Karl Jaspers, au contraire, met en avant l’importance de la communication et donc en définitif de l’intersubjectivité comme constitutive de la subjectivité  : «  L’être humain ne se trouve lui-même qu’avec l’autre être humain, et jamais par le seul savoir. Nous ne devenons nous-mêmes que dans la mesure où l’autre devient lui-même, nous ne devenons libres que dans la mesure où l’autre le devient aussi. »