« Raconte moi une histoire »

 L’Institution Rey serait-elle touchée par le bovarysme?

Après la section littéraire, les élèves de seconde 4 explorent l’œuvre mythique de Flaubert parue en 1857, « Mme Bovary ». Une fois la découverte de Yonville et de Charles effectuées, nos écrivains en devenir se lancent dans la rédaction d’un roman grâce à une correspondance inter-établissement.

Ce projet, marquant une alliance entre REY (Mme HARTOUT) et les élèves de SAINT-THOMAS D’AQUIN (Mme BERENGER), dans l’ORNE, se déroule de septembre 2016 à avril 2017 et a pour objectif la construction d’un univers romanesque à deux voix grâce à la rédaction de lettres échangées régulièrement.

ETAPE 1 : Le questionnaire de Proust ou l’art de se présenter sans mentionner son identité.

Marcel_Proust_1900          Les élèves ont répondu aux questions regroupées dans trois thématiques : « Ma description physique et morale », « Mes désirs d’évasion », « Mes goûts artistiques ».
Deux sujets rédactionnels complétaient ce questionnement. Le premier se référait à un personnage qu’ils admiraient. Enfin, un événement honteux devait être raconté aux correspondants.
Les élèves sont désignés par des lettres.

(Annexe 1 : Questionnaire de Proust de B)

Annexe 1 questionnaire de B

Etape 2 : La construction d’un univers romanesque ainsi que la rédaction de l’incipit.

Les élèves devaient imaginer leur correspondant entrant dans la classe en tenant compte de ses réponses au questionnaire (cf étape 1). Nos romanciers narrent la scène de rencontre en point de vue interne puisqu’ils doivent donner l’impression d’être dans la classe. Ces derniers tomberont sous le charme de ce nouvel élève, double de Charles Bovary. Tout doit être décrit excepté le visage car un chapeau le cache.

-> Vous verrez que le chapeau a son importance !!!!!!!!!!!

Grâce à ce blog, je vous propose de suivre un roman écrit par Elina SADOUNI (2nd 4). L’auteur vous invite à découvrir l’histoire de Sasha.

Bonne lecture !!!!!!!!!

CHAPITRE I

                      Surveillés par Monsieur Bory, notre professeur d’anglais, nous avons commencé les exercices. Tous semblaient sérieux et faisaient de leur mieux pour comprendre, répondre, argumenter de façon la plus claire et la plus rapide possible, sauf moi. De mon coté, je les observais réfléchir, écrire, jouer avec leur stylo et croisais de temps à autre le regard de mon professeur qui m’incitait à commencer. Cependant, je lui avais répondu gentiment par un sourire pour ensuite tourner mon regard vers le paysage à ma gauche. Ayant été à coté de la fenêtre, je pouvais vite me divertir par ce qui s’y trouvait de l’autre coté. Il s’y dressait un parking, pas très grand, de quoi garer dix voitures peut-être. Cet espace entouré de pelouse possède deux places handicapées.

Au bout de cinq minutes de contemplation, je m’étais de nouveau concentrée sur mes camarades aussi studieux que… le soleil en Normandie ? Je sais, la comparaison était assez nul mais il fallait voir les choses en face : ils n’étaient plus du tout concentrés ! Je jetai un regard circulaire et vis plus de la moitié des élèves de ma classe en train de regarder autour d’eux, de jouer avec leur stylo ou leur ciseau, de parler avec leur voisin et j’en passe. Les regarder devenait de plus en plus ennuyeux…

De ce fait, je décidais de m’intéresser à la classe et à sa décoration. C’est une assez grande salle peinte en blanc pour y faire rentrer une classe de 34 personnes voire 36, avec leur enseignant sans manquer d’espaces. Une porte violette située à chaque extrémité du mur qui se dressait à quelques mètres à ma droite. Sur ce même mur était accroché un panneau marron où sont affichées les informations importantes ou du moins celles jugées importantes. Sur celui d’à coté, se trouve un tableau où les consignes sont écrites :

« Pas de documents autorisé. Les réponses sont à faire sur le polycopié. »

A gauche du tableau se tenait une armoire un peu vieille et en face de celui ci, le bureau du professeur nous faisait face. Je trouvais la classe trop terne, trop neutre, trop… sans émotion en résumer. On aurait dû accrocher des posters, pas comme ceux qu’un ou qu’une adolescente accroche sur les siens. Mais au moins des posters qui servent de prospectus, ce n’est qu’un exemple.

J’avais été stoppé dans mon élan d’artiste quand la porte s’était ouverte pour laisser place au directeur suivi d’une silhouette svelte et musclée, sûrement sportif, que je ne connaissais pas ou du moins que je n’avais jamais vu auparavant. Un garçon.

Je n’accordais pas particulièrement d’importance au sexe opposé. Mais là, ce fut comme une apparition.

Il s’était avancé pour affronter les regards interrogateurs de la classe. Le jeune homme se tenait droit, la tête légèrement baissée. Etait-il timide ? Surement. Il était grand, plus grand que moi en tout cas, environ 1m75 j’aurais dis, mais aussi mince. Vêtu d’un t-shirt blanc surmonté d’un large sweat à capuche. Celle-ci étant très grande, je ne pus apercevoir son visage. Et sa tête baissée n’avait arrangé en rien tout cela. Son jean bleu marine collait à ses hanches pour finir sur des baskets blanches. Le tout faisait de lui un homme totalement irrésistible.

J’avais gravé son souvenir dans ma mémoire, mes premières impressions, mes premiers sentiments.

Une envie m’avait prise de plonger mes pupilles dans les siennes pour sentir une connexion nous relier. Mais ce genre de chose, on ne le voit seulement dans les films et pour couronner le tout, cette maudite capuche m’empêchait tout accès à ses yeux.

Il s’était mis ensuite à se présenter à ses futurs camarades :

  • Salut, je m’appelle Sasha.

Le proviseur le coupa afin de poursuivre son allocution :

  • Il a emménagé dans cette ville pour des raisons personnelles. Je compte, donc, sur vous pour l’accueillir comme il se doit.

Un brouhaha de bavardage s’était fait entendre à la fin de cette phrase. Plusieurs questions me vinrent aux oreilles :

« Tu crois qu’il a une copine ? » murmura une fille derrière moi.

« Tu penses qu’il vient d’où ? » questionna un garçon.

« Il est pas mal, ne trouves-tu pas ? » demanda une de mes camarade de l’autre coté de la classe.

Le chef d’établissement avait mis fin à tout ce bruit. Pendant ce temps, je l’avais observé silencieusement. Tous ses gestes avaient semblé plus gracieux que les précédents et tellement mystérieux. Je voulais tout savoir de ce personnage ses secrets, ses passions, ses pensées, son caractère, ses habitudes.

 

Chapitre II

Je n’arrête pas d’y repenser. Ce nouveau avec sa grande capuche noire. Il était tel qu’au début, nous ne pouvions voir son visage qui semblait si beau mais qui était en fait horrible. Ce moment où il s’était présenté au professeur et où elle avait enlevé sa capuche fut un instant tragique et révélateur pour ma vie de lycéen. Ce garçon est tout ce qu’il y a de plus détestable, il est égocentrique et prétentieux. C’est vrai, il répond à toutes les questions qui lui sont posé aussi personnelles qu’elles soient, sans aucune gêne. Comme si c’était une star qui se devait de révéler toutes les informations le concernant à ses fans. Où est ce qu’il se croit ? Non, ce n’est pas la bonne question à poser, la vraie question c’est : Pour qui est ce qu’il se prend ? vous ne le croirez jamais mais en plus de faire part à n’importe qui de ses moindres petits problèmes, il a l’audace de faire du fayotage envers les enseignants qui ont pitié de lui. Ce n’est pas parce qu’il vit seul qu’il est forcément à plaindre. J’ai également entendu dire qu’il avait une sœur et, qu’à cause de ça, il n’appréciait guère rester avec des filles de son âge, moins ou un plus âgée qu’elle. Seulement ça ne tient pas debout. Et il n’y a pas que ça, dans le lycée, mais surtout en classe, toutes sortes de choses sont dites à son sujet : c’est un nouvel abandonné par ses parents et, ne pouvant supporter les regards pleins de « compassion » de ses anciens camarades. Il avait, apparemment, décidé de déménager, seul. Il y en a aussi qui dise que sa sœur, ayant 18 ans autrement dit deux de plus que lui, l’aurait traumatisé.

Je range mes affaires étalées sur la table afin de sortir pour me diriger vers ma salle de classe actuelle, la Re3. Comme à mon habitude, je prends tout mon temps de façon à ne pas arriver trop en avance et m’arrête au seuil de la porte. Pourquoi ? allez-vous me demander. Car une scène des plus étranges est en train de se jouer à l’intérieur de cette même salle : un Sasha énervé contre le reste de la classe. Le discours tenu par celui qui était seul face à une armée d’élèves confondus et presque identique. Intriguée, je franchis le seuil de la porte pour entendre ou plutôt pour écouter les paroles de Sasha, furieux. Il semblait passer toute sa colère sur ses camarades en disant :

« Ma vie ne vous regarde en rien, et puis vos rumeurs ne sont que des légendes urbaines, des Bla Bla totalement faux et sans importance. Vous croyez tout savoir de ma vie ? Non ! Ça aussi c’est totalement faux, le peu de choses que vous savez de moi, c’est quoi ? Que je vis seul et que j’ai une sœur de 18 ans. Puis c’est tout et ce n’est certainement pas suffisant pour raconter toutes ces choses. Vous voulez savoir autre chose sur moi ? D’accord, il n’y a pas de soucis. Pourquoi je vis seul ? Parce que je ne peux tout simplement plus supporter mes parents, ils m’étouffaient. Je n’ai aucune complicité et aucune relation fraternelle avec ma sœur, il est vrai mais elle ne m’a certainement pas traumatisée ! J’ai déménagé car je ne voulais plus les revoir, c’est tout. »

Non seulement il était prétentieux mais en plus il aimait se donner en spectacle, c’est pathétique. Pour autant, un désir inexpliqué me poussait à connaître cette âme désespérée. En effet, ce garçon me renvoyait une image de moi-même qu’il faudra que je vous expose.

Si l’on poursuit l’adage de Montaigne, je dirai « parce que c’était lui, parce que c’était moi ».

 

La rédaction du roman se poursuit puisque nous rédigeons, actuellement, le chapitre III. De plus, l’étape 3 de cette correspondance inter-établissement vous sera bientôt révélée. Patience!!!!

One thought on “« Raconte moi une histoire »

  1. Je ne pensais pas que ce serait toujours sur le site du lycée.
    Que de nostalgie de relire ces écrits, même si je me dis que j’aurais pu y mettre plus du mien et d’attention.

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