Lire et Ecrire

Galerie de portraits par les 1°ES2

Lors de la visite virtuelle du musée des Beaux-Arts de Rouen, les élèves de ES2 sont partis à la recherche du modèle parfait qui allait leur permettre de composer la galerie de Portraits imaginaires de leur classe. La récolte a été riche  et les rencontres surprenantes : Extraits !

Nous attendions dans la salle où l’obscurité commençait à s’installer. Puis, nous  entendîmes un son,  une ombre passant devant la fenêtre. La porte s’ouvrit  et apparut le professeur. Celui-ci entra dans le plus grand des calmes et accrocha son manteau, prenant soin de ne pas y faire de plis. Il passa ensuite entre les rangs d’un pas si léger que l’on aurait pu croire qu’il n’y avait que son âme paisible sous son ample habit. Il se dirigea vers l’armoire,  saisit un briquet, des allumettes, de l’amadou et quelques bougies. Le professeur retourna à son bureau où tel un magicien, il fit apparaître une lumière d’un bleu éclatant ; d’elle,  il fit s’embrasser les bougies du chandelier irradiant de lumière la salle.

Démocrite contempla un moment le fruit de son œuvre. Puis, il commença à faire le tour du bureau ; la main effleurant, caressant l’un des coins, le bois ferme semblait ramollir sous une telle douceur. Il passa devant les bougies faisant reluire ses manches d’ocre et arriva à l’autre extrémité du bureau où il s’arrêta.  Il tourna la tête vers nous. Nous aperçûmes alors son visage, ridé de ses expériences et illuminé de son savoir acquis au cour de ses nombreux voyages. Il  nous regardait, du noir profond de ses yeux brillants qui ne pouvaient attendre de nous raconter l’un des périples dont on devinait qu’il  allait être passionnant.

  Il commença le récit de l’un de ses voyages avec le sourire dont émanait tout le plaisir de raconter, d’instruire, de partager tous ces détails que ses yeux avaient pu voir. Il dirigea sa main vers le globe terrestre et tout en racontant, nous montrait les lieux de ses périples. La passion avec laquelle il racontait ses aventures était si grande que l’on pouvait humer l’atmosphère de la contrée  décrite. Il nous fit d’abord découvrir l’Égypte soulignant de ses mains, l’immensité des pyramides et de ses paroles, le savoir géométrique de ces prêtres égyptiens qui, par la force de leurs théorèmes  et calculs les ont érigées. Puis, il nous  emmena vers les étoiles, la science des Perses dont il nous exposait leurs moindres significations. Il nous raconta la philosophie indienne des  gymnosophistes dont les mœurs et mode de vie sont des plus atypiques. Il n’hésita pas à nous faire ensuite traverser la méditerranée pour rejoindre Athènes où nous conversâmes avec le grand Socrate. Tous ses récits étaient ponctués d’anecdotes et de rires si contagieux que la salle se transformait en une joyeuse choral.

Le rire est le propre d l’homme mais Démocrite en faisait le propre de la vie

Maxime Delafenêtre

DVelazquez_RireDeDemocrite_MdeZarobe

Peintre : Diego Velázquez Titre : Démocrite Date : Vers 1630 Dimensions : 101 × 81 cm

Portrait d’une étudiante : « Jenkins ! Ton café »

[21 mars : Apparemment le début d’un nouveau printemps. Les étudiants savourent les premières brises… légères. Les hommes séduisent, les femmes se pavanent, dénudent leurs épaules et leurs jambes encore blanches de la période passée. Tous semblent aussi aveuglés par un bonheur utopique et inexistant]

Peintre : Claude-Marie Dubufe Titre : Portrait de Madame Francis Vaussard Date : 1837 Type : Huile sur toile Dimensions : 130 x 97 cm

Peintre : Claude-Marie Dubufe   Titre : Portrait de Madame Francis Vaussard , 1837

« Jenkins ! Ton café ! »

La voix stridente de la vieille derrière son comptoir tira la jeune brune de son écriture, le temps de quelques secondes. Ses sourcils bruns parfaitement dessinés se froncèrent, juste le temps de prendre conscience qu’on l’appelait à travers cette salle bondée, comme toujours. La jeune femme verrouilla son cellulaire ; coinça une mèche brune et raide qui retombait sur son front laiteux. Elle prit le temps de la replacer juste avant de resserrer son écharpe bordeaux comme pour se protéger pendant cette traversée de la salle.

Une fois rendue au comptoir pour saisir la tasse de café noir qu’elle commandait chaque soir sur les coups de dix-huit heures trente, la jeune femme se rassit sur la banquette en cuir vert olive collée au fond du bar, quasiment à la porte grise donnant sur les toilettes.

Installée, son téléphone devant elle, sa tasse dans une main ; l’étudiante verrouilla son regard sur les allées et venues des clients qui révisaient, avant de rentrer chez-eux. Certains semblaient épuisés après une journée de cours éprouvante ; ce qui n’était pas son cas. La brune n’étudiait pas réellement. Elle aurait dû…. mais  si elle avait été acceptée dans cet établissement, c’était parce que  papa était un ami du premier ministre. Elle n’en tirait aucune gloire et détestait l’école. D’autres étudiants au contraire avaient l’air plein d’énergie. On les entendait rire d’un bout à l’autre de la salle, ce qui n’était pas son cas, non plus. Elle enviait secrètement ces gens qui paraissaient constamment heureux.

Kiara croisa les jambes sous la table et reposa sa tasse de café encore bien trop chaud. Elle souffla lentement sur la fumée qui s’en échappait et finalement reprit ses esquisses minutieusement.   

Bientôt vingt-heures et elle était encore là, assise sur sa banquette à taper frénétiquement sur les touches de son clavier. Sa tasse, quant à elle, était vide depuis plus d’une bonne heure et elle n’avait rien commandé de plus. Kiara n’avait besoin de rien si ce n’était dessiner en paix, sans être dérangée. Tous les habitués du bar savaient cela depuis la première heure où elle avait franchi la porte. Il y avait déjà quatre ans de cela. Dessiner était un besoin  comme un fumeur avait besoin de cigarettes. Je soupirai face à cet élan de concentration. Cette femme que je ne connaissais qu’à peine possédait quelque chose de réellement captivant. Chacun de ses gestes étaient calculés avec précision, passion.

 [À quelle heure Kiara Jenkins disparaîtrait-elle du restaurant sans donner aucune nouvelle ? Qui croisera peut-être cette jeune femme fantomatique dans les rues bondées de la ville ?]

Finalement, la brune se redressa et quitta le restaurant. Elle rassembla rapidement ses affaires dans son petit sac-à-dos, jetant des regards furtifs vers l’extérieur. Son sac eut à peine le temps de se réfugier contre son épaule qu’elle avait déjà quitté les lieux. Un doux parfum de vanille embauma alors mes narines, cette odeur me remémora les quelques heures passées à la regarder. Je ne pus me retenir d’esquisser un léger sourire.

Ilona Lebars.

 

LA BELLE ZELIE

Zélie est une jeune fille bourgeoise, chrétienne, aimable et toujours préoccupée par la santé de ses proches. Orpheline depuis ses deux ans, elle a été recueillie par Madame de la Floralys qui lui a offert un logement, de l’amour, mais en aucun cas elle n’a été une figure d’autorité. Depuis, Zélie a gardé un regard et un caractère enfantin.

Certains vous diront que cette jeune fille n’a rien d’extraordinaire. Pour moi, c’est tout le contraire. C’est une magnifique personne, tant par sa beauté, son intelligence que sa bonté.

Il ne peut y avoir plus belle personne qu’elle.
En effet, sa physionomie est telle qu’on ne peut en détacher le regard. Son visage est mis en valeur par des yeux pétillants de malice, d’un noir profond. Elle a l’art de coiffer ses cheveux pour dégager son joli minois. Sa mine est encadrée de magnifiques boucles brunes retombant avec légèreté sur ses épaules. Sa bouche, pulpeuse et rouge, laisse apparaître un large sourire d’ange, à faire chavirer n’importe quel cœur, même le plus dur. Son teint parfait et blanc, fait ressortir ses lèvres et pâlir de jalousie toutes les dames de la haute société. Sa taille fine, sa généreuse poitrine et ses grandes jambes élancées suscitent la convoitise de toute la gente féminine.

Il ne peut y avoir plus intelligente qu’elle.
De ce fait, elle a appris des meilleurs professeurs. Son intellect est à l’égal de celui du plus grandiose philosophe. Déjà, à l’âge de onze ans, elle prend part aux discussions des adultes, non sans se faire gentiment réprimander par Madame de la Floralys. A dix-sept ans, elle débute des débats pouvant se finir au levé du soleil.
Elle impressionne les plus grands, tant par sa culture sur chaque domaine, que par sa philosophie prononcée. Ses pensées, si profondes, peuvent vous faire perdre la tête. A toutes les questions qu’on lui pose, elle trouve une réponse si élaborée qu’on en oublie l’interrogation posée.

Il ne peut y avoir plus charitable qu’elle.
Ainsi, chaque jour, elle se rend à l’hospice pour aider les sœurs à s’occuper des malades. Elle offre à ceux-ci une douceur, une gentillesse et un bonheur infinis. Elle leur donne tout l’espoir dont ils ont besoin pour guérir ou s’en aller en paix. Dans ce cas-ci, elle les accompagne jusqu’à la fin, remplaçant une famille absente.
Chaque soir d’automne et d’hiver, elle sort distribuer de la soupe chaude aux personnes à la rue. Elle propose à des familles de loger chez elle où ils auront un lit et un repas complet et chaud.
Que demande-t-elle en contre partie ? Juste un sourire sincère et aimant
Certains vous diront que cette jeune fille n’a rien d’extraordinaire. Pour moi c’est tout le contraire.

Eva Valleran,

Jean-Auguste-Dominique Ingres . 1806 Dimensions : 59 x 49 cm

Jean-Auguste-Dominique Ingres . 1806
Dimensions : 59 x 49 cm

 

Ma mère, mon modèle 

La narratrice dont la famille habite dans les Vosges, nous évoque un triste souvenir qui a touché toute sa famille et surtout sa mère. Il s’agit de l’enterrement du père de la narratrice.

Je me souviens du jour où ma mère est entrée dans la chambre que je partageais avec ma sœur, elle avait le regard vide et le visage pâle. Elle avait pris la décision de nous annoncer cette nouvelle de façon imagée, et elle nous dit alors avec une voix douce , Papa est parti rejoindre les étoiles. Ma sœur et moi étions touchées par ses mots, elle nous prouvait qu’elle tenait à nous et qu’elle ne voulait pas qu’on ait le cœur brisé : c’était une belle preuve d’amour.

Le jour de l’enterrement,  ma mère était vêtue d’une longue robe noire, un fin voile tombait délicatement sur ses épaules et laissait apparaître son visage amaigri. Malgré ses traits marqués par de nombreuses nuits sans sommeil et ses yeux rougis par les larmes, elle était pour moi la plus belle. Ma mère était la femme la plus courageuse que je n’ai jamais connue car elle ne montrait jamais son chagrin, elle allait toujours de l’avant . De plus,  elle détenait toutes les qualités du monde : c’était mon modèle.

Elle s’approcha du cercueil de papa et s’agenouilla. Elle y resta recueillie de longues minutes puis se retourna vers nous et le reste de la famille qui avait fait le déplacement. Elle avait les yeux rouges mais elle les essuya et déclara avec un large sourire, ce n’est qu’un au revoir. Lorsqu’elle prononça ces mots, mon cœur s’accéléra, la voir sourire me donna des frissons. Je regardais autour de moi,  tout le monde pleurait. Je ne comprenais pas pourquoi car devant nous se tenait un ange, le plus beau, le plus céleste à mes yeux.

J’avais certes perdu un être cher mais je gardais le plus important : l’amour de ma mère.

Victoire Lenormand,

D_1889_2

Alfred Agache, l’Enigme, 1888. Dimensions : 280 × 169 cm . Musée des Beaux-Arts à Rouen