Vous trouverez ici le compte-rendu des rencontres que nous avons effectué dans le cadre de la Prépa

Entrevue avec le réalisateur Jimmy Laporal-Trésor

Entrevue avec Jimmy Laporal-Trésor, réalisateur du film « Les Rascals », par Johane Hulin et Camille de Lavergne

Dans le cadre du label CaMéo au cinéma de Mérignac, des élèves du lycée Fernand Daguin ont assisté à une séance, le 27 janvier 2023, du film Les Rascales, de Jimmy Laporal-Trésor, sorti en 2023. Les élèves ont ensuite eu l’occasion de débattre avec le réalisateur et de lui poser des questions.

Photo : Jimmy Laporal-Trésor, Camille de Lavergne et Johane Hulin (tous droits réservés)

Pourquoi s’être lancé dans le cinéma ? 

J’ai toujours aimé raconter des histoires. Au départ je faisais des petites BD, et ensuite je me suis lancé dans le jeu de rôle, surtout comme maître de jeu. J’écrivais des scénarios et je me renseignais sur les univers que je voulais créer. Un autre aspect important du jeu de rôle, est de réussir à tenir en haleine les joueurs. C’est tout cela qui m’a donné le goût pour la narration. La création d’un lien avec le spectateur est essentielle pour moi. Au départ, je me suis lancé dans le cinéma comme scénariste. Après j’ai voulu raconter des histoires autrement, à travers des images.

Dans ce film, justement, qu’avez vous mis en place pour capter l’attention du spectateur ?

J’ai tout de suite cassé le 4e mur. Avec cette première scène qui change soudainement de ton et où la caméra est agressée, malmenée comme Rico l’est : le spectateur est impliqué. Après ce moment, je replace le spectateur dans une situation de confort, pour qu’il baisse sa garde. J’ai besoin qu’il soit désarmé au moment de la scène du disquaire. Mon travail est toujours de placer le spectateur au bon endroit, émotionnellement, par rapport à ce qui se passe. Il y aussi la scène du fourgon de police : le personnage est en impuissance total. La caméra est, elle aussi, coincée dans le van : le spectateur est impuissant. Il ressent donc la même détresse que Mandale.

Le personnage de Rudy attire l’attention, on voit qu’il est différent, il a une sensibilité… Pourquoi avoir choisi de faire un personnage qui casse les codes du dur à cuir ?

Dès le départ, avec mes co-scénaristes, on concevait l’histoire comme une tragédie antique : un personnage est condamné par le sort. On a ici un personnage qui n’a pas sa place dans sa famille, ni dans sa bande de copains, ni dans la société. Il est déjà condamné par essence à ne pas avoir de place dans ce monde. J’ai construit Frédérique et Rudy en miroir : Frédérique, elle, épouse tout de suite la réponse violente mais regrette plus tard et essaie de faire le chemin inverse. Rudy, lui, essaie de rejeter cette violence au maximum mais finalement y succombe. C’est la tragédie sociétale.

Au niveau du casting aviez-vous des attentes particulières ?

Je n’avais pas de critère précis en tête pour trouver des acteurs, à part peut-être l’oralité. Les jeunes des années 80 s’exprimaient différemment des jeunes d’aujourd’hui, il fallait retrouver des personnes en capacité de s’exprimer avec ce ton, qui puisse nous rappeler l’ancien temps. J’avais cette envie de retrouver ce phrasé neutre de l’époque, proche de celui de Souchon, avec des phrases bien construites. Mon but est de dépayser et de faire vivre au spectateur un véritable voyage dans le temps. J’ai écarté de nombreux comédiens talentueux, car ils parlaient trop comme les jeunes d’aujourd’hui. Je cherchais bien sûr, de bons acteurs avec des individualités fortes, mais je cherchais aussi une alchimie naturelle entre eux lorsqu’on les faisait jouer ensemble.

Est-ce qu’il y a un film, un livre, un auteur qui vous à inspiré pour ce film, au niveau des plans par exemple ?

Deux films m’ont vraiment inspiré, surtout pour la direction artistique du film : « Tchao Pantin » de Claude Berri, tourné en 83, qui a été un des rares réalisateurs à montrer Paris différemment de la ville qu’on avait l’habitude de voir à l’écran. Dans les films des années 80, on retrouve un Paris clinquant, brillant, qui nous ramène à des années 80 sur lesquelles on à tendance à fantasmer. Berri montre au contraire une ville sale, sombre, poisseuse, beaucoup plus proche de la réalité de l’époque. Je me suis inspiré des éclairages, de ses lumières rouges et vertes, ainsi que de l’éclairage extérieur. A l’époque, en ville, les lumières étaient plus blanches, nous avons donc du changer les ampoules pour retrouver l’atmosphère et l’ambiance des années 80.

Dans le deuxième film, « Moi Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée » d’Uli Edel, je me suis inspiré de l’image froide et bleutée. Nous avons donc utilisé ce filtre bleu pour refroidir l’image. Les films des années 80 sont généralement haut en couleur, avec des images très chaleureuses, j’avais vraiment envie de casser ce fétichisme.

A l’aide de quoi avez-vous  pu recréer les années 80 ?

Pour les vêtements, c’était le plus simple, il a simplement suffi de retrouver des témoignages photographiques dans des livres, des catalogues de l’époque ou encore des sites qui permettent de retrouver de vieilles photos de classe. Les reportages, ou les images de l’INA nous ont aussi beaucoup aidés, notamment pour les costumes et les coiffures. De même pour les décors, il faut des références qui permettent d’avoir une idée de la topographie des lieux des années 80. Il y a ensuite un gros travail de repérage pour trouver des bâtiments et un travail de crédulité, pour qu’ils paraissent un maximum authentique.

Liberté d’expression et de la presse : Rencontre avec Sakher EDRIS

9 juin 2021

Rencontre avec Sakher EDRIS

Dans le classement mondial de la liberté de la presse en 2020, le Syrie figure à la 174ème position (sur 180).
Aujourd’hui au Lycée Fernand Daguin à Mérignac, le journaliste syrien anglophone Sakher EDRIS vient converser avec les élèves de la préparation à Sciences PO Bordeaux JPPJV.
Rencontre.

Avant toute chose, il est primordial de présenter la Syrie. Pays d’Asie de l’Ouest situé sur la côte orientale de la Mer Méditerranée, sa capitale est Damas.

En quelques mots, Sakher EDRIS nous présente son pays…

La Syrie est un pays riche d’histoire. Son sol a été foulé par maintes civilisations : Sumériens, Chaldéens, Assyriens, Cananéens, Babyloniens…

Mais depuis 2011, la guerre civile syrienne cause des ravages. Celle-ci débute dans le contexte du Printemps arabe par des manifestations majoritairement pacifiques en faveur de la démocratie contre le régime baasiste. Ces protestations pacifiques durent 6 à 7 mois, mais elles sont rapidement brutalement réprimées, et le gouvernement libère des extrémistes de prison. Le conflit dégénère alors violemment. Depuis, des milliers de victimes ont été recensées. De nombreux massacres, crimes de guerre et crimes contre l’humanité ont été commis, principalement par le régime syrien et l’État islamique.

Depuis 1970, c’est donc la famille El-Assad qui possède le pouvoir. Le fils de Hafez el-Assad, Bachar el-Assad, lui succède en 2000. Il est encore à ce jour au pouvoir, et a été « réélu » le 26 mai 2021…

Le journaliste rappelle ironiquement en quelque mots l’absurdité de ce vote.

« No one dares put « no » under the eyes of the political police. »

Sakher a vécu de très près la guerre civile. Son père, opposant de Hafez el -Assad, a été emprisonné pendant 18 ans ainsi que son oncle, le père de sa mère.

« Just imagine. How many years you lose just because of your political opinion! »

Comment les journalistes syriens ont fait face à cette situation critique ?

Sakher : « Une association de journalistes syriens a été créée. Ce sont des médias et journalistes libres dont la plupart vivent en exil. C’est ce qu’on appelle la diaspora. En 2017 cette association a intégré la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), dont le siège est a Bruxelles. Ce partenariat a agacé le gouvernement syrien. L’AJS a été exposée à beaucoup de tentatives de corruption pour essayer de contrôler les leaders de cette association, les soudoyer pour avoir le contrôle des médias. »

« The UN stopped counting. Entire families, entire names disappeared. »

Qu’en est-il des journalistes syriens à l’heure actuelle ?

Sakher : « Officiellement, entre 2011 et 2019, 455 professionnels des médias ont été tué, dont 314 par le gouvernement syrien lui-même. Il y a aussi eu 1082 violations contre les journalistes entre 2011 et 2017. Et encore, ce ne sont que les chiffres officiels. En réalité, il y en a encore plus. »

« People are tortured and killed. »
« What we really want ? To enjoy voting, electing. »

Pensez-vous qu’un jour les Syriens pourront bénéficier à nouveau de leur liberté ?

Sakher : « Oui, un jour, ils pourront. Tant qu’il y a des personnes dans la révolution, il y a de l’espoir. Maximilien Robespierre, un des pères de la Révolution Française, est finalement devenu un extrémiste pendant la période de la Terreur. Et que lui est-il arrivé ? Il a été tué. »

Comment peut-on continuer de se battre pour la liberté d’expression depuis l’Europe ?

Sakher : « Par des moyens pacifiques, comme des campagnes de sensibilisation. Le fait d’en parler est déjà une aide conséquente. Avertir les personnes de ce qu’il se passe est primordial. »
Le journaliste Edris est lui-même impliqué dans une campagne de sensibilisation pour la cause des prisonniers politiques syriens.
« We don’t want to fight with weapons. Fight by voices and peace. »

Pouvez-vous nous parler de votre parcours un peu plus en détails ?

Sakher : « Je suis né en Syrie. En 1974, ils ont pris mon père alors que je n’avais que 1 an. Imaginez combien d’années vous perdez jute à cause de votre opinion politique ! Je suis parti juste après mon bac. Partir, ce n’est pas compliqué en soi. C’est le régime qui vous met sous pression et qui rend les choses compliquées. J’ai travaillé à Dubaï, où j’ai écrit contre le régime. Puis j’ai voulu retourner à Damas. Mais un de mes collègues s’est fait emmener à l’aéroport, et on ne l’a jamais revu. Finalement, je me suis rendu en France. »

Pourquoi avoir choisi de venir à Paris ?

Sakher : « J’ai agi vite, en seulement quelques jours. C’était très difficile. Si ce n’était que moi, je serais allé au Royaume-Uni, mais les choix étaient très limités. Je suis donc allé à Paris, la capitale, une ville cosmopolite. C’était plus facile pour moi d’y parler anglais. »

Les fake news est un sujet qui refait souvent surface. Qu’en pensez-vous ?

Sakher : « Il existe plusieurs types de fake news. Il y a l’« appât à clics » des articles avec des titres vendant des informations extraordinaires pour de l’argent. C’est souvent risible, par exemple : « Une vache pleure en se rendant à l’abattoir ». Il y a aussi la propagande : quand on voit une star ou une personnalité qu’on apprécie utiliser un certain produit, on sera tenté de l’acheter. Mais parfois les fake news sont plus sournoises : le journalisme « biaisé » est un danger car les journaux concernés ne s’expriment pas vraiment, ils ne sont pas neutres. Indirectement, ils soutiennent des personnes en concurrence avec d’autres, ce n’est pas objectif. Enfin, certains journaux arborent de gros titres mensongers, et comme les lecteurs ne vont pas forcément plus en profondeur, ils ne retiennent que ça. »

Que conseillez vous pour éviter d’être trompé par les fake news ?

Sakher : « Il faut être attentif aux mails qu’on reçoit, et aux sources. De plus, ce n’est pas parce que des médias ont une certaine renommée qui en principe garantit l’absence de fake news qu’il ne peut pas en avoir. Il existe des sites pour vérifier l’authenticité des informations que l’on consulte, comme factcheck.org. »

How to spot fake news ?

Sakher nous rappelle l’importance de se poser les bonnes questions pour ne pas se laisser piéger et lutter contre la désinformation.

« Fake news cannot be underestimated. They kill, as with Samuel Patty »

Des conseils pour ceux qui envisagent des études de journalisme ?

Sakher : « Lisez beaucoup. Essayez de savoir un peu de tout sur tout, il faut être curieux. »

« People who tell the truth are under attack. »
« In journalism, you have to ask, not to be asked »
« Don’t compromise your values »
« Freedom is a responsibility. You cannot insult people and say : it’s my freedom »

Cette intervention, c’était l’occasion d’ouvrir les yeux sur ce problème majeur et malheureusement croissant dans certains pays : le manque de liberté d’expression, et plus particulièrement le manque de liberté de la presse. Un des grands enjeux contemporains est de sensibiliser les personnes, mais aussi de s’informer sur ce fléau qui est une atteinte à la liberté de milliers de personnes, et pas seulement en Syrie, mais aussi en Iran, en Libye ou au Yémen par exemple. C’était aussi l’occasion de rappeler l’importance de vérifier ses sources pour ne pas croire ou diffuser des informations erronées.

Mais plus que de porter un nouveau regard sur le monde extérieur, Sakher nous a appris à remettre en question notre propre façon de penser, sorte d’écho à l’étude des Essais de Montaigne cette année. En effet, si la Syrie occupe la 174 ème place sur 180 dans classement mondial de la liberté de la presse, la France est en 34 ème position, ce qui peut paraître étrange pour un pays qui a fait de sa devise la liberté. Reporters sans frontières explique cette position dans le classement entre autres par les violences récurrentes contre les journalistes pendant les manifestations. Plusieurs journalistes ont été blessés par des tirs de LBD (lanceurs de balles de défense), de grenades lacrymogènes ou par des coups de matraque. D’autres ont été la cible d’interpellations arbitraires ou ont vu leur matériel de reportage saisi. Une bien mauvaise position pour le soi-disant pays des droits de l’Homme… Voir de tels outrages à la liberté de la presse dans son propre pays nous a donné envie d’agir, de La Liberté de la presse dans le monde en 2018, selon Reporters sans frontières passer à l’action. En libérant la parole et par des actes citoyens réfléchis, nous pouvons
faire avancer les choses.

Un grand merci à Monsieur Sakher EDRIS, mais aussi à Monsieur Panko, à la mairie de Mérignac et plus particulièrement à Monsieur Loïc Farnier, ainsi qu’à La Maison des Journalistes.

Photos : Lican Maëna
Rédaction et mise en page : Moreno Anaëlle

9 juin 2021

Rencontre avec “Paroles d’exil” le 2 février 2022

Les élèves de la prépa JPPJV ont rencontré le 02 février 2022 l’association de Sciences Po Bordeaux, “Paroles d’exil”. Celle-ci a pour but de sensibiliser la population à la question de la migration en effectuant notamment des interventions dans les lycées.

Ce fut le cas à cette date, puisque trois membres de l’association ont donné la parole à Shadi Mattar, réfugié syrien de 30 ans. Ce dernier a traversé la guerre civile qui a commencé en 2011 sous Bachar Al-Assad et qui a pour contexte la révolution du Printemps Arabe qui débute en 2010 et qui touche de nombreux pays du Moyen-Orient. Après avoir rappelé le régime politique en place dans le pays et l’arrivée du parti Baas en mars 1963, Shadi Mattar a raconté son histoire et celle de sa ville qui s’est vue ensevelie sous les bombes et soumise à la terreur.

En effet, il est originaire de Daraya, ville située à une dizaine de kilomètres de Damas. En raison de sa proximité avec la capitale, Daraya a été particulièrement touchée et peu de temps après le début du siège effectué par l’armée en 2012, une grande partie de sa population a fui principalement en direction de la frontière turque. Shadi Mattar a de ce fait été une victime directe de ce conflit armé. Alors que près de 90% de la ville est détruite, Shadi Mattar et une partie de ses proches font le choix de rester, et de se battre jusqu’au bout.

Ainsi, M. Mattar qui a suivi une formation de reporter nous a expliqué que sa caméra l’a véritablement sauvé et est devenue pour lui une arme, symbole de son opposition à Bachar Al-Assad. Effectivement, pour lui, filmer les atrocités commises par le régime dictatorial permet de sensibiliser et de constituer une preuve directe des violences faites à l’encontre de milliers de civils. Il nous a dans cette optique projeté certaines de ses séquences qui illustrent l’état de crise de la ville et la grande précarité qui en découlait.

Il précise en plus de cela avoir été contacté en 2012 par la journaliste franco-iranienne, Delphine Minoui à la suite d’un post sur son compte Facebook, celui de la mystérieuse photo d’une bibliothèque souterraine en plein cœur de la guerre civile. Effectivement, M. Mattar et des amis à lui ont eu pour projet de récupérer les ouvrages abandonnés dans les bâtiments bombardés et de les rassembler dans un sous-sol, destiné à tous. Cet acte de résistance exceptionnel a intrigué Delphine Minoui et a marqué le début de longues années d’échanges ayant abouti au livre Les passeurs de livres de Daraya, publié en 2017 ainsi qu’au film documentaire “Daraya, la bibliothèque sous les bombes” sorti en 2018.

Ces deux œuvres ont connu un important succès et ont permis de faire connaître l’histoire incroyable de Shadi Mattar. Lors de cette rencontre, il nous a expliqué que les livres représentaient pour de nombreux habitants de la ville une lueur d’espoir et une ouverture sur le monde à l’heure d’un siège qui les coupaient de tout. Ils lisaient ainsi L’alchimiste de Paulo Coelho mais aussi des ouvrages de développement personnel à l’américaine, et ces lectures leur donnaient du courage, de la force et surtout du rêve.

Cette rencontre a été hautement enrichissante, et les mots de Shadi Mattar étaient particulièrement émouvants. Son histoire et son projet de recueillir les livres dans les ruines, évoqués dans les œuvres de Delphine Minoui sont inspirants. Il nous a par ailleurs raconté son parcours héroïque avec une grande humilité et a mis l’accent sur l’importance de l’amitié et de l’amour en temps de crise. En réponse à nos interrogations respectives, il nous a expliqué travailler aujourd’hui en tant que reporter en France et qu’il s’apprêtait à suivre une formation à Paris.

Ainsi, “Paroles d’exil” qui est né en tant que projet de 3ème année de plusieurs étudiants de l’IEP de Sciences Po Bordeaux donne la voix à des hommes, des femmes aux destins particuliers et qui ont dû fuir leur pays pour diverses raisons. Ce projet est remarquable et permet d’éveiller les consciences et de rappeler que l’immigration n’est jamais un véritable choix et qu’il nous faut avant tout se mettre à la place des migrants afin de mieux les comprendre.

Julie Colliou, TG07, cheffe de la rubrique “on a lu”

 

Témoignage de Martin Chaumont, ancien élève de Daguin, en dernière année de master à Sciences Po Bordeaux !

Le 30 novembre 2021, nous avons eu l’opportunité de rencontrer la délégation de Sciences Po Bordeaux dont faisait partie Martin Chaumon,t un ancien élève de notre Lycée Fernand Daguin ayant fait partie de la prépa JPPJV et étant aujourd’hui en cinquième année dans le master Carrière Administrative de l’IEP de Bordeaux. Suite à cette rencontre, j’ai décidé de lui envoyer un mail pour lui demander un témoignage de son parcours qui pourrait être source d’inspiration pour les élèves ayant la volonté d’intégrer l’institut d’études politiques de Bordeaux. Pour guider son témoignage je lui ai envoyé une série de question telle que :

Pourquoi as-tu participé à la prépa JPPJV ?

Qu’est-ce qu’elle t’as apporté ?

Comment s’est passé ton intégration ?

Est-ce que Sciences po a finalement répondu à tes attentes ?

Au niveau des horaires et de la vie étudiante notamment.

Et voici sa réponse :

« Je m’appelle Martin Chaumont, j’ai 23 ans et j’ai intégré Sciences Po Bordeaux en 2016 après avoir suivi la prépa JPPJV à Daguin pendant ma Terminale.

J’étais dans ce qui s’appelait à l’époque la filière Scientifique, en section européenne. Je n’avais pas réellement d’idée précise quant à mon projet professionnel. La seule intuition que j’avais était que le droit m’attirait, alors que je ne l’avais jamais pratiqué. Je ressentais vraiment l’inconfort de cette période où on a l’impression que chacun de nos choix sont décisifs et définitifs et qu’on n’a pas encore assez vécu pour les faire sereinement. Quoi qu’il en soit, j’ai décidé par imitation de camarades en filières Economique et Sociale d’intégrer la prépa JPPJV « au moins pour voir », sans savoir précisément ce qu’était un IEP.

A partir de là, j’ai pu bénéficier des cours bien spécifiques dispensés par la prépa, et de la motivation supplémentaire qui va avec pour être plus performant dans la scolarité à court terme, le Bac bien en tête. Pour la petite anecdote, le sujet d’Histoire qui est tombé le jour du concours était quasiment au mot près un sujet que l’on avait travaillé un mercredi après-midi. Même si ce ne sont aujourd’hui plus les mêmes procédures, les prépas JPPJV (et celle de Daguin en particulier) sont pour moi avant tout l’opportunité de s’entourer de professeurs qui ont à cœur que l’on réussisse.

Les courts instants passés les mercredi après-midi sont de réels courts particuliers qui donnent des avantages considérables par rapport à ceux qui ne les suivent pas, que ce soit pour le concours de Sciences Po Bordeaux ou pour toute autre filière que vous suivrez à la suite de votre Bac. C’est encore plus vrai maintenant grâce au Centre de Ressources Numériques.

Lorsque j’ai été admis, j’avais déjà mis de côté mes ambitions de droit à la suite de discussions concernant mon orientation avec un professeur d’Histoire du dispositif.

Le soulagement a vite cédé la place à de nombreux doutes : est-ce que j’aurai le niveau nécessaire ? Saurai-je m’intégrer dans la vie étudiante ? Trouverai-je ma place à Sciences Po Bordeaux ?

Rétrospectivement, force est de constater que ces doutes n’avaient pas réellement lieu d’être. Dès les premiers jours de la première année, l’intégration s’est faite sereinement et facilement. Tout est mis en place du côté de l’IEP, étudiants comme administration, pour qu’elle se passe sans encombre et créer un véritable corps de promo.

J’ai dû m’adapter à ces disciplines nouvelles qu’étaient l’économie, la sociologie, le droit, tout en composant avec les modalités bien spécifiques des IEP : les conférences de méthode et les cours magistraux. Les cours d’introduction couplés aux travaux de groupe m’ont permis de rattraper le retard que je pensais infini dans les sciences sociales et j’ai pu rapidement m’impliquer dans des associations comme le Bureau des Elèves, ou de nombreuses associations sportives. L’autonomie que permet le volume horaire de cours (entre 20 et 25 heures de cours par semaine, le gros du travail se faisant à la BU ou chez soi) autorise une vie étudiante riche et stimulante, au-delà du scolaire.

Pour la faire brève, j’ai pu par le biais de l’école rencontrer des camarades que je n’aurais jamais croisés ailleurs, dans des conditions de travail que l’université nous envie littéralement. J’ai pu réaliser une année d’étude à Istanbul, accompagné d’anciens étudiants et de l’administration qui a fait en sorte que nous ne soyons pas lâchés dans la nature. J’ai pu affiner mon projet durant ma troisième année, et m’orienter vers une année de césure dans l’armée avant ma quatrième année.

Aujourd’hui en cinquième année dans le master Carrière Administrative, je sais que je suis outillé pour réussir les concours qui m’attirent, et que mon profil, dont le diplôme de Sciences Po Bordeaux est l’illustration mais dont mes compétences acquises sont le fond, ouvre un nombre faramineux de portes et d’opportunités.

Si j’avais un conseil à donner à des lycéens, ce serait d’oser se donner les moyens. Le Baccalauréat et son contrôle continu rend la période du lycée certainement plus stressante que jamais. Il ne faut pour autant pas perdre en tête qu’il ne s’agit que d’un point de passage vers d’autres perspectives plus personnelles. Profitez de l’environnement que vous avez autour de vous, notamment des professeurs volontaires, pour vous questionner et saisir les opportunités. Les seules opportunités qu’on rate sont celles qu’on ne saisit pas. »

 

Merci à Martin Chaumont pour ce témoignage très enrichissant se terminant sur une magnifique phrase philosophique emplie d’espoir.

Si vous avez certaines questions à lui soumettre vous pouvez le contacter à l’adresse suivante : martin.chaumont33@gmail.com

 

Maëna Lican,

Rédactrice en chef du site JPPJV

Rencontre avec la réalisatrice Karine Guiho !

Le 5 mai 2021, les élèves de la prépa JPPJV du lycée Daguin ont rencontré la réalisatrice de films documentaires, Karine Guilho. Après une réflexion sur la notion de travail dans une séance précédente, ils ont pu s’interroger sur le film, La Casse Ouvrière tourné en 2011 à la fonderie du Poitou.

L’intervention de Karine Guilho a débuté par la présentation de ses parcours professionnel et personnel. Elle évoqua l’environnement social dans lequel elle a grandi : la classe ouvrière. Karine Guiho est parvenue à suivre sa passion et à s’éloigner du parcours de ses parents. Après le lycée, elle étudie aux Beaux Arts et se plaît alors à peindre et à expérimenter de diverses manières. Plus tard, elle découvre la photographie et cherche à s’échapper de la presse de masse en transmettant de réelles émotions comme en immortalisant des réfugiés avant leur traversée de la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni. La plasticienne, tout en continuant à travailler la peinture et la photographie, finit par entrer dans le monde du cinéma du réel. À la différence du reportage, la subjectivité du point de vue du réalisateur a un rôle majeur dans ce genre cinématographique. Karine Guilho parvient alors à créer son empreinte artistique. On trouve dans ses documentaires des portraits de personnes souvent atypiques livrés avec une grande sincérité et cherchant à peindre leurs situations sans artifices. La réalité devient son matériau d’expression comme pourrait l’être la peinture.

Suite à cette mise en contexte de la vie de l’auteure et de son travail en explorant notamment ses nombreux projets présentés sur son site Web, le film La Casse Ouvrière répondant à la problématique du travail chez L’Homme est exploité. Ce film documentaire de 65 minutes porte à la caméra des ouvriers de la fonderie de Poitou, en 2011, lors de leur lutte syndicale. Leurs témoignages sont particulièrement révélateurs de leur condition. Ils livrent leurs ressentis à propos d’une usine aliénante. Répéter sans cesse les mêmes gestes rend les ouvriers impuissants et les affaiblit progressivement jusqu’à ce qu’ils ne soient presque plus capables de penser. Le rôle et les enjeux de la technologie dans les usines sont également mis en lumière, et bien qu’on puisse penser que ces avancées technologiques constituent un progrès et une révolution pour les travailleurs, il n’en est rien. L’automatisation n’enlève pas le sentiment d’impuissance propre à cet esclavage moderne. Le rapport à la machine comme celui d’une mère nourricière perverse est tout aussi éclairant du paradoxe entre le fait que cette machine les nourrit et les emprisonne.

Enfin, les élèves ont pu poser leurs questions concernant le contexte, la réalisation et les messages véhiculés dans l’œuvre. Ils apprennent que le travail de Karine Guilho appartient à la catégorie du « cinéma du réel ». Elle est passionnée par son art et passe de longs moments au sein d’un même environnement afin de le connaître parfaitement, d’y être presque intégrée et de finalement le représenter avec le plus de fidélité possible. Chaque tournage lui prend entre 2 et 8 ans et tous les milieux dans lesquels elle se rend tels la maison de retraite qu’on retrouve dans Les Assis ou la fonderie du Poitou constituent une réelle part de sa vie. Ses œuvres s’apparentent à des expériences sociales desquelles le spectateur sort grandit. A travers sa caméra, elle cherche avant tout à capturer des instants magiques dont la spontanéité est rare et de ce fait, précieuse.

Grâce aux explications riches et détaillées de Karine Guilho, la rencontre a permis aux élèves d’en apprendre davantage sur ce qu’est un film documentaire et comment il est produit. En outre, ils ont pu réfléchir sur la condition ouvrière et ses enjeux.

Julie Colliou 1G11

Le site internet de Karine Guiho