Violences contre les homosexuels au collège, extrait de l’autobiographie En finir avec Eddy Bellegueule, Edouard Louis

Je viens de terminer l’autobiographie d’Edouard Louis, « En finir avec Eddy Bellegueule », parue en 2014, dans laquelle il relate les violences subies dans son enfance et son adolescence en raison de son apparence efféminée et de son homosexualité soupçonnée.

Voici un extrait particulièrement explicite sur l’enfer vécu dès son arrivée dans le secondaire au début des années 2000 :

« Au collège, tout a changé. je me suis retrouvé entouré de personnes que je ne connaissais pas. Ma différence, cette façon de parler comme une fille, ma façon de me déplacer, mes postures remettaient en cause toutes les valeurs qui les avaient façonnés, eux qui étaient des durs. Un jour dans la cour, Maxime (…) m’avait demandé de courir, là, devant lui et les garçons avec qui il était. Il leur avait dit Vous allez voir comment il court come une pédale en leur assurant, leur jurant qu’ils allaient rire. Comme j’avais refusé il avait précisé que je n’avais pas le choix, je le payerais si je n’obéissais pas Je t’éclate la gueule si tu ne le fais pas. J’ai couru devant eux, humilié, avec l’envie de pleurer, cette sensation que mes jambes pesaient des centaines de kilos, que chaque pas était le dernier que je parviendrais à faire tellement elles étaient lourdes, comme les jambes de celui qui court à contre-courant dans une mer agitée. Ils ont ri.

A compter de mon arrivée dans l’établissement, j’ai erré tous les jours dans la cour pour tenter de me rapprocher des autres élèves. Personne n’avait envie de me parler : le stigmate était contaminant ; être l’ami du pédé aurait été mal perçu.

J’errais sans laisser transparaître l’errance, marchant d’un pas assuré, donnant toujours l’impression de poursuivre un but précis, de me diriger quelque part, si bien qu’il était impossible pour qui que ce soit de s’apercevoir de la mise à l’écart dont j’étais l’objet.

L’errance ne pouvait pas durer, je le savais. J’avais trouvé refuge dans le couloir qui menait à la bibliothèque, désert, et je m’y suis réfugié de plus en plus souvent, puis quotidiennement, sans exception. Par peur d’être vu là, seul, à attendre la fin de la pause, je prenais toujours le soin de fouiller dans mon cartable quand quelqu’un passait, de faire semblant d’y chercher quelque chose, qu’il puisse croire que j’étais occupé et que ma présence dans cet endroit n’avait pas vocation à durer.

Dans le couloir sont apparus les deux garçons, le premier, grand aux cheveux roux, et l’autre, petit, au dos voûté. Le grand aux cheveux roux a craché Prends ça dans ta gueule. »

L’isolement, la honte, l’incapacité à se tourner vers des adultes aveugles, absents ou supposés impuissants conduira à un harcèlement quotidien fait d’injures, de crachats et de coups qui durera pendant deux ans.

Cette stigmatisation du féminin comme identité à déprécier, parce que perçue comme passive, faible, maladroite, incomplète en quelque sorte, va de pair avec l’homophobie et la peur de voir un homme associé à ces attributs identitaires.

Les stéréotypes ont la vie dure, malheureusement, comme le prouve cette publicité qui met en scène ce que faire quelque chose « comme une fille » signifie :

Identifier et corriger ces stéréotypes est certes une responsabilité éducative, mais également individuelle.

Nathalie Anton

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