Travaux en cours

Contes, dessins et pédagogie. Ou l'inverse.

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Ceci est un complément à la page 22 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan .

Autoriser et encourager l’erreur

Daniel Favre[1] relève dans ses recherches que « les enseignants associent majoritairement l’erreur à la honte ou à de la culpabilité ou encore à une réaction de colère. » Cette imprégnation renvoyée aux élèves, est un des obstacles majeurs à l’apprentissage. L’erreur n’est pas une faute que l’on punit. Plutôt que de sanctionner par une mauvaise note ou un travail identique, la tâche de l’enseignant devrait être plutôt d’aider l’élève à déconstruire ses représentations ou à trouver une méthode lui permettant d’éviter les erreurs d’inattention. Comment faire pour que l’erreur devienne un réel outil d’apprentissage ?

Détournant[2] un proverbe arabe, l’auteure a affiché sur le mur de sa salle de classe « Celui qui ne se plante jamais n’a aucune chance de pousser », une citation de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends. » et une citation d’Einstein : « Pose ta question, tu seras idiot une seconde. Ne la pose pas, tu seras idiot toute ta vie ». Les élèves ont le droit en début d’année à une explication de texte au deuxième voire troisième degré suivi d’un débat. Ce qui permet de planter le décor, c’est le cas de le dire. Il ne suffit bien sûr pas de le formuler, il faut être congruent, c’est-à-dire que les actes doivent être en accord avec les déclarations. Les élèves cherchent ce qui pourrait les aider : pas de moqueries en cas d’erreur, droit de recommencer, droit d’avoir du temps pour comprendre, droit de s’expliquer entre eux. Mais également de la part du professeur, des propositions de travailler autrement pour mieux apprendre. En voici quelques exemples.

 

Erreurs d’inattention

Les élèves de cette auteure ont de la chance, c’est une grande étourdie. Elle a passé sa jeunesse affectée de cette étiquette, signe probable d’une grave maladie, au vu du ton catastrophé de ses enseignants lorsqu’ils faisaient ce constat. Le problème n’était pas tant la grave maladie que le fait de ne pas avoir de médicament à prescrire. Elle souffrirait donc toute sa vie de « fôtes » d’étourderies. Sauf qu’à un moment, elle s’est rendue compte que c’était pour elle un problème d’attention portée à ce qu’elle faisait. Les erreurs n’ont pas toutes disparues, elles perdurent encore parfois aujourd’hui, mais leur nombre a sévèrement diminué dès lors qu’elle a prêté plus d’attention à ce qu’elle écrivait. Les fautes d’étourderie s’étaient transformées en erreurs d’inattention.

C’est ce parcours qu’elle propose depuis plusieurs années à ses classes.

En classe de 4e, il est demandé de faire apprendre le calcul fractionnaire dans toutes ses opérations, en utilisant de plus les techniques de calcul sur les nombres négatifs et les priorités des opérations. Il y a là beaucoup de règles très différentes à appliquer et il n’est pas rare qu’un très bon élève remplace  par 5, occupé qu’il est à respecter tout le reste. On ne peut pas suspecter cet élève de pas savoir que cest 6. C’est un cas qui semble typique d’erreur d’inattention due à une surcharge de mémoire de travail. Le professeur ne peut pas élucider lui-même toutes les erreurs d’inattention de chaque élève. Il va donc leur proposer un dispositif dans une démarche formative pour qu’ils arrivent à les reconnaitre eux-mêmes.

Dans un premier temps, et après que les élèves aient effectué un bon nombre de calculs numériques en écriture fractionnaire, il leur demande de repérer et d’écrire toutes les erreurs commises. Elles sont écrites sur le tableau sous forme générique : oubli de virgule au résultat, erreur de table de multiplication, confusion d’opérations, erreur de règle d’addition de fraction, erreur de priorité, non connaissance d’une règle, non simplification … Elles sont classées par « Comment les éviter ? » :

  • Apprendre les leçons : table de multiplication, définition de l’addition de fractions, non connaissance d’une propriété en général
  • Adopter une stratégie plus efficace : simplification
  • Faire plus attention et/ou mieux se relire : oubli de virgule au résultat, erreur de table de multiplication, confusion d’opérations, erreur de règle d’addition de fractions, erreur de priorité, non connaissance d’une règle, non simplification

Une fois ont que les élèves compris, appris, il reste à faire plus attention.

Le dispositif se poursuit par l’écriture à la fin du cahier de cours des types d’erreurs personnelles que l’élève est capable de faire. Il doit ensuite ajouter une croix ou un trait à chaque fois qu’il refait cette erreur. Cela dans le but de se rendre compte de ce qui lui pose le plus de problème.

Arrive le jour de l’interrogation écrite. Les élèves ont cinq calculs fractionnaires à effectuer. Une fois leur travail terminé, le professeur leur demande de prendre un stylo d’une autre couleur. Ils doivent relire leur travail en traquant les erreurs d’inattention. Mais ils ne regardent qu’un axe à la fois selon les erreurs qu’ils ont repérées commettre régulièrement.  Tel élève va commencer par relire en regardant s’il a bien réécrit tous les signes « moins » puis continuera par vérifier les priorités. Tel autre commencera par les techniques opératoires puis les confusions d’opérations. Ils ont le temps dont ils ont besoin pour ce faire. Le professeur corrige les copies en ne tenant pas compte des couleurs. Rares sont les élèves qui ne bénéficient pas de ce temps structuré de relecture.

Au contrôle bilan, cet entrainement leur permet d’une part de faire plus attention mais aussi de se relire de manière plus efficace.

La première classe à laquelle a été proposé ce dispositif était une classe de 4e Technologique. Ses résultats ont été supérieurs de cinq points sur vingt à la moyenne obtenue par les élèves de l’année précédente. Inutile de dire qu’il a été reconduit chaque fois que l’auteure a eu une classe de 4e et proposé aux autres niveaux. En discutant avec des professeurs de français, ceux-ci ont eu envie d’essayer ce dispositif pour les dictées ou pour les rédactions.

[1] Daniel Favre, 2010, Cessons de démotiver les élèves, 18 clés pour favoriser les apprentissages, Dunod ; et en 2016, Eduquer à l’incertitude, Dunod

[2] Idée de Philippe Watrelot, Crap-Cahiers pédagogiques

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