Travaux en cours

Contes, dessins et pédagogie. Ou l'inverse.

Blog 12 bis EASy’R

Il n’y a pas de « blog 12 bis » dans Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Mais cette partie-là n’est pas inintéressante.

1.     EASy’R ; un processus d’apprentissage ”idéal”

 

Dans son ouvrage Evaluer des compétences, guide pratique[1], François-Marie Gérard présente un processus d’apprentissage idéal[2] que l’auteure résume dans un jeu de mots E.A.Sy’R. Il s’agit de séquencer les apprentissages en quatre moments successifs : l’exploration, l’analyse, la synthèse et le réinvestissement. Attention, ces trois derniers termes n’ont pas la hiérarchie évaluative de la taxonomie des objectifs de Bloom, on est là plus proche de la valeur sémantique de ces verbes.

La phase d’exploration a pour objectif de faire découvrir ce qui va être étudié. On parlait naguère de « document d’accroche » en didactique de l’histoire-géographie. Mais ce peut être plus large que cela. Nous le verrons un peu plus loin. La phase d’analyse correspond à une étude approfondie, par exemple de documents qui permettent de « faire un tour » de la question. La phase de synthèse peut être la trace écrite, le résumé de ce que les élèves devront garder en mémoire, une fiche-méthode réutilisable. Enfin, la phase de réinvestissement est un moment de réutilisation des connaissances qui viennent d’être travaillées. Il ne s’agit pas là du fameux contrôle ou bilan ou évaluation. Quel que soit le nom qu’on lui donne, il n’est pas question ici de sommatif mais d’ancrage des connaissances.

Donnons quelques exemples. En géographie, en histoire et en mathématiques. Commençons par la géographie, en 6e pour le chapitre « Habiter un espace à forte contrainte ».

 

EASy’R en géographie, en 6e

Explorer

On pourrait commencer par le visionnage d’un court documentaire sur la vie d’une communauté humaine dans les Andes. Le professeur alors par quelque moyen que ce soit, magistral, cours dialogué ou autre, mais, attention, il s’agit d’une phase assez rapide, amène la classe à se demander ce qui va être étudié ? Quel type d’espace sera au programme ? Comment les hommes y vivent ? Ont-ils aménagé quelque chose de particulier ? Pourquoi constate-on tel fait ici et pas ailleurs ?

 

Analyser

Cette deuxième phase plus longue consiste à faire une « étude de cas », en fait l’étude d’un lieu. Par exemple, le Mato Grosso au Brésil. Localisons, situons puis essayons de caractériser ce lieu en utilisant, tout ou partie, au choix, une carte de la répartition de la population au Brésil, une photographie (mécanisation, défrichement, habitat de fortune, manifestations…), un graphique (production de lait, de soja, croissance de la population, superficies des défrichements…), un texte. La classe étudie les trois ou quatre documents sélectionnés par le professeur « à fond » sans perdre de vue les questions posées dans la phase d’exploration. Il ne s’agit pas d’étudier ce lieu pour lui-même. On pourrait même commencer à chercher des ressemblances avec les Andes et des différences.

L’idéal serait de pouvoir faire, d’avoir le temps, une seconde étude de cas peut-être plus rapide, sur une station de ski dans les Alpes ou dans les Rocheuses. Là encore chercher tout d’abord des caractéristiques, après avoir localisé et situé bien entendu puis des ressemblances et des différences avec les deux premiers lieux étudiés.

 

Synthétiser

Cette phase pourrait commencer par le rassemblement de tout ce qui a été collecté dans les deux premières sur un planisphère, dans un tableau à double entrée. Localiser certes mais aussi placer les informations type « pays riche/pays émergent/ pays en voie de développement », données bioclimatiques, répartition de la population.

Dans cette phase, en géographie, on change d’échelle. On passe de l’échelle locale à l’échelle mondiale. On se demande si tous les espaces à fortes contraintes ont les mêmes caractéristiques ? S’ils sont situés aux mêmes endroits ? Comment les Hommes y valorisent ou pas leurs contraintes ?

Une trace écrite élaborée avec les élèves ou par le professeur à partir de leurs idées permet de conclure par la définition d’un espace à forte contrainte, la typologie de ces espaces avec quelques exemples d’aménagements. Là encore, cette trace écrite peut être un texte, un tableau, une fiche-méthode, une liste des questions à se poser pour caractériser un espace.

Ici, le professeur de géographie devrait faire son contrôle-bilan, son évaluation finale, corriger, noter et apprécier si l’élève a appris/compris/travaillé et hop, il pourrait alors le sentiment du devoir accompli passer à un autre chapitre, d’une autre matière.

Et c’est ici que François-Marie Gérard préconise de différer encore le temps de l’évaluation (enfin, il ne le dit pas, c’est l’auteure qui le fait), FMG n’évoque même pas l’évaluation dans cette partie, en tout cas, pas la sommative.

 

Réinvestir

L’objectif de ce moment est la manipulation des connaissances acquises précédemment par les élèves afin qu’ils se les approprient. La question n’est pas de savoir s’ils ont appris leurs leçons mais plutôt de leur proposer d’utiliser celles-ci pour mieux les apprendre. Ce moment se passe encore en classe. Le professeur est donc là pour observer chacun, guider, relancer, étayer et désétayer. Avec ce chapitre on arrive à la fin de l’année, il va être temps que les élèves deviennent un peu plus autonomes dans leurs apprentissages et dans leur travail personnel en classe. Ceci-dit, mieux vaut étayer que regarder dormir.

Cette phase de réinvestissement est aussi une phase de mobilisation des ressources, à très court terme certes. Les savoirs engrangés dans la séquence sont utilisés, vivants et non lettres mortes.

Une troisième étude de cas est donc possible. Soit la même pour tout le monde, pourquoi pas en zone arctique ? Soit au choix des élèves, on ne reviendra pas sur l’efficacité de l’auto-détermination dans la motivation des élèves, soit au choix du professeur parmi un panel représentatif. On peut mixer les deux propositions.

 

Les collègues qui ont enseigné la géographie avant la réforme du collège ont reconnu ici la démarche inductive imposée par les programmes de 2008, sauf que ces programmes n’imposaient pas la phase de réinvestissement qui en fait toute l’efficacité pour les apprentissages. Les programmes de 2016 nous ont « délivré » de la démarche inductive. Pourquoi délivrer ? Dans le chapitre précédent[3] , nous nous sommes penchés sur la différenciation et la diversification pédagogiques.  Diversifier c’est aussi cela, ne pas se cantonner dans une procédure intellectuelle. L’inductif c’est bien. Le déductif aussi. L’hypothético- déductif c’est encore mieux.

 

 

EASy’R en histoire en 3ème

Cette séquence trouve sa place après l’étude de l’URSS de Staline qui a déjà permis, d’une manière ou d’une autre, de caractériser un régime totalitaire.  Elle a donc un double objectif : la réactivation des connaissances du précédent chapitre, de découvrir une autre dictature, et même un troisième puisqu’il s’agit d’apprendre à réfléchir et organiser des informations.

 

Pendant la phase d’exploration, les élèves reçoivent une vingtaine de petits textes numérotés sur une feuille recto-verso, à lire en travail personnel hors de la classe et ils doivent à réfléchir à un premier classement de ces textes. Les textes proposés sont la plupart du temps extraits de manuels, parfois très anciens, par exemple un article de l’Humanité du 4 novembre 1922 « Et Valenti fut tué » ou encore un extrait du règlement de Dachau ou bien une chronologie du Japon de 1927 à 1936[4]. Mais aussi « Pour rendre à notre peuple sa grandeur, il faut exalter la personnalité du chef et donner à celui-ci tous les droits »[5].

En classe, les idées de classement sont listées au tableau et les élèves les justifient. La plupart repère des origines géographiques et propose un classement en colonne, une par pays. Rare sont ceux qui vont au-delà. Une année, quelqu’un proposa un tri par nature des textes : témoignage, article de journaux, mémoires, chronologie, texte législatif. Aucun n’alla jusqu’à croiser ces deux idées pour élaborer un tableau à double entrée.

Pendant la phase d’analyse, les petits extraits sont étudiés un par un, en commençant par ceux illustrant le stalinisme (réitérer les connaissances par un apprentissage multi épisodique), en continuant par ceux issus du nazisme. On cherche à retrouver toutes les caractéristiques (les attributs, dans la démarche de Britt-Mari Barth[6]) avec les textes soviétiques puis à chercher quel texte de l’Allemagne nazie correspond à cette caractéristique.

S’il reste du temps, si la classe percute, on peut approfondir avec le fascisme et le Japon de Hiro-Hito[7] ou encore proposer un travail facultatif pour les plus curieux, continuer à classer les textes selon les attributs des dictatures.

La phase de synthèse est collective et consiste à créer un tableau comparatif des dictatures.

Le réinvestissement peut consister à fournir aux élèves un petit corpus pour répondre à la question suivante, « La France de Vichy est-elle un régime totalitaire ? ». Avant d’avoir étudié ce chapitre, bien sûr.

 

EASy’R en mathématiques

Un autre exemple concerne ici les mathématiques et plus précisément l’apprentissage de la programmation. La toute première séance se passe en salle multimédia, les élèves sont en binôme sur un ordinateur et se connectent au site « Une heure de code »[8]. Les élèves ont à écrire un programme, sous forme d’ordres en blocs, pour que leur personnage atteigne le but proposé avec plus ou moins de contraintes.  Ils peuvent faire autant d’essais qu’ils en ont besoin, sachant qu’un thème terminé leur permet d’en faire un autre dont le chalenge sera plus intéressant. Après la présentation de la progression à suivre, les quatre temps d’EASy’R se font au rythme de chacun, pratiquement sans intervention du professeur. Les élèves doivent proposer des agencements des blocs de consigne pour faire bouger leur personnage. Ils commencent donc par explorer les différentes commandes et ensuite analysent les effets de celles-ci. Les contraintes imposées, le nombre maximal de blocs à utiliser par exemple, les obligent à pousser leur analyse, à en discuter la pertinence et à adopter la procédure qui va permettre d’atteindre l’objectif.

A chaque fin de partie, le professeur demande aux binômes un retour sur les commandes utilisées et ce qu’elles ont permis de faire, on est dans la phase synthèse. Le réinvestissement est immédiat et se fait à plusieurs reprises car les parties suivantes intègrent les commandes qui viennent d’être découvertes. Il sera temps ensuite de passer au logiciel qui permet de travailler plus spécifiquement les points de programmes attendus. Mais les bases de la programmation sont atteintes pour chacun.

 

EASy’R pour permettre aux élèves de développer leurs compétences

La même démarche est utilisable pour le travail autour des compétences que le socle et les nouveaux programmes nous demandent de développer chez les élèves. Nous ne pouvons pas développer les compétences des élèves à leur place mais nous pouvons faire en sorte d’organiser notre enseignement en proposant des situations dans lesquelles les élèves vont pouvoir s’entraîner, conscientiser, auto évaluer et développer eux-mêmes leurs compétences.

Regardons ce que cela donnerait pour une compétence de plus en plus demandée par l’institution qui reste un sujet d’interrogation pour de nombreux collègues, l’oral en classe. Depuis l’année scolaire 2016-2017, l’oral fait même l’objet d’une épreuve du brevet. Comment pourrait-on utiliser EASy’R pour permettre aux élèves de monter en compétences et d’arriver sereins à l’examen ?

  1. Explorer : quelques élèves volontaires prennent la parole, par exemple pour un petit exposé, sans conséquence c’est-à-dire pas de notes.
  2. Analyser : qu’est-ce qu’une prestation orale réussie ? Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire ? Laisser la parole aux élèves. Noter ce qu’ils disent. En commentant le moins possible si on veut qu’ils s’approprient ces informations, ni même reformuler.
  3. Synthétiser : organiser les informations dégagées par les élèves dans une petite fiche, un tableau, un petit outil consultable A CHAQUE FOIS QU’IL Y A UN ORAL A FAIRE. Jusqu’à ce que l’élève n’en ait plus besoin. Il est plus efficace que ce soit le professeur qui fasse cette fiche à condition de rester très près des formulations des élèves. Il n’est pas impensable qu’un élève s’en charge.
  4. Réinvestir : s’essayer à la prise de parole en public, par exemple pour rendre compte d’un texte lu. Si possible, là encore, sans notation, avec une évaluation orale, collective, bienveillante, c’est-à-dire à la recherche de tout ce qui a été réussi, appuyée sur la fiche élaborée en phase de synthèse.

 

Quatre exemples de cette démarche d’apprentissage conçus par des collègues en stage interdisciplinaire sont consultables sur un des blogs de l’auteure[9].

Une proposition de l’auteure :

Pour la phase d’exploration, il est possible de visionner de « vrais » élèves de 3ème lors d’une prestation orale en classe[10].

Regardez Ziyad entre 2’59 et 3’25, Pauline (5’40-6’12) et Gwénaëlle (5’09- 5’27). N’oubliez de dire à vos élèves de ne pas se moquer car il a fallu beaucoup de courage pour prendre la parole devant une caméra, tous n’ont pas accepté de le faire.

 

En 2012-2013, cette démarche a été essayée, la classe de 3e qui a visionné les extraits a proposé comme critères d’un oral réussi « la langue (phrases correctes, langage soutenu), la voix (être audible, articuler, ton vivant, rythme adapté), la durée (5 minutes), le contenu (qui ait du sens, complet, intéressant, du vocabulaire, dans le sujet (pertinent, exact), et l’attitude (aucun geste parasite, on regarde le public, on connaît son texte sans réciter, sans lire, être convaincant). Ce sont ces critères qui ont été réutilisés tout au long de l’année en histoire-géo, en français, avec la professeure documentaliste lors de chaque moment d’histoire des arts. Lors de l’épreuve en mai 2013, selon les collègues, les prestations ont été plutôt meilleures que d’habitude. Pour qu’elles soient encore meilleures, il faudrait réfléchir à « élaborer un diaporama qui ne fera mourir d’ennui votre public ». Grâce à François-Marie Gérard, it could be easyer !

 

Les trois « R »

La lecture de ce qui précède montre des exemples des années antérieures. Depuis 2016-2017, l’auteure a modifié en EASY’RRR. En effet, développer une compétence, progresser, c’est long et difficile. Il faut à certains élèves plusieurs essais. C’est donc au(x) professeur(s)[11] là encore de faire en sorte d’organiser leur enseignement pour que les élèves y parviennent. En histoire-géographie-EMC, il est souhaitable que chaque chapitre soit l’occasion non seulement d’apprendre les ressources du programme, la prise de la Bastille mais aussi de développer les compétences au programme. L’auteure propose donc aux collègues en stage d’associer « un chapitre, une compétence », toute l’année. Grosso modo, à la trente-sixième semaine, chaque élève aura eu l’occasion de s’entraîner au moins trois fois (les trois R de EASY’RRR) pour chaque compétence. Il n’y aura plus qu’à évaluer les progrès et en prendre note. Nous y reviendrons dans la quatrième partie de cet ouvrage.

 

[1] François-Marie Gérard,  2008, Evaluer des compétences, guide pratique[1], De Boeck, 1ère édition

[2] page 25. Ceci est une invitation à lire ou relire ce chapitre de François-Marie Gérard, avec des exemples et des définitions, un exercice d’application et un de mise en œuvre personnelle.

[3] Partie 1, chapitre2, différencier/différencier

[4] L’auteure est au courant que ces dictatures ne sont pas au programme de 2016 ni même de celui d’avant.

[5] Ecrit dans la forteresse de Landsberg en 1923. L’auteur y fut détenu neuf mois.

[6] cf. dans ce chapitre, le texte précédent

[7] Qui ne sont pas au programme de 3ème.

[8] https://hourofcode.com/fr

[9] http://lewebpedagogique.com/anniedimartino/2012/11/22/permettre-a-nos-eleves-de-devenir-plus-competents-a-loral/

[10] Un film tourné par Thierry Foulques, « Compétences in vivo 2 », http://www.youtube.com/watch?v=d_9mDQ9qtuU

Séquence détaillée : http://lewebpedagogique.com/anniedimartino/2011/11/30/752/, « différenciation pédagogique en classe entière ». (Ce film a été tourné à d’autres fins, il n’a pas d’intérêt d’être visionné en entier avec votre classe).

[11] cf. partie 2, chapitre 2, Enseigner les tâches complexes : Piano à plusieurs mains

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Blog 22 bis

Ceci est un complément à la page 83 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Outiller l’élève

Ce texte a été rédigé à la suite de la lecture de Curricula et apprentissages au primaire et au secondaire, la pédagogie de l’intégration comme cadre de pensée et d’action[1]. Ce qui suit est donc du Roegiers dans la première partie et un écrit personnel seulement dans la deuxième.

Là, on rend à Xavier Roegiers ce qui lui appartient :

Il faut évidemment ENTRAINER l’élève, le placer dans des situations qui lui permettent de s’entraîner à la mobilisation de ses ressources.

Il faut aussi OUTILLER l’élève. Il s’agit de lui fournir des outils intellectuels : tout d’abord des outils « physiques » comme guides de ses actions. Puis par un désétayage plus ou moins progressif, l’amener du savoir-faire (imposé, technique, qu’il reproduit) à un savoir-être (c’est-à-dire à une utilisation spontanée et personnalisée de la démarche précédente).

Roegiers évoque un outillage sur trois plans : la compréhension, le choix d’une démarche de résolution, la validation de la production.

  1. La compréhension : vérifier le sens des mots, déterminer l’intérêt, l’enjeu du travail, identifier la tâche, anticiper la production, chercher les implicites comme les données parasites.
  2. Le choix de la démarche de résolution du problème : la balle est dans le camp de l’élève. Le professeur a régulièrement proposé, fait travailler des démarches différentes, rapides, fiables, efficaces, expertes pendant les différentes phases d’apprentissage des ressources. MAIS lors des moments d’intégration, c’est l’élève qui en choisit une, sans intervention du maître. Tant pis si elle n’est pas efficace ou pas rapide ou pas experte. A priori, elle correspond au mode de pensée et d’action de l’élève. A posteriori, elle sera un sujet de réflexion à la fin du travail. La difficulté pour l’enseignant ici, comme d’habitude, est de se taire : les profs parlent toujours trop !
  3. La validation de la production : c’est le moment de l’auto-évaluation. Qui peut se faire elle aussi à l’aide de la liste des critères fournie par l’enseignant mais qui doit devenir une évaluation spontanée et personnalisée.

 

Ceci est à rapprocher des travaux de Yinger[2] et Tochon sur les routines procédurales[3]. On vise l’automatisation de procédures par l’utilisation réitérée d’outils concrets. Ces outils ne sont pas seulement des fiches- méthodes, des rappels de procédures, des listes d’informations à suivre dans l’ordre, des grilles avec moult cases. Ce sont réellement des outils à manipuler, par exemple, pour une dissertation une feuille avec des cadres plus ou moins importants à remplir intitulés « introduction, développement, conclusion » et contenant à l’intérieur du cadre des informations de structure.

 

Vers l’autonomie

On va vers l’autonomie de l’élève, par exemple en déterminant des moments d’intégration pendant lesquels l’élève ne pourra pas utiliser ces outils. Après la production, le retour aux outils pourra être l’occasion d’une observation, d’une auto-évaluation de la qualité de la production et surtout de métacognition, d’un retour réflexif par l’élève qui déterminera s’il a intégré ou non la démarche.

On va vers l’autonomie de l’élève, par exemple en déterminant une date-butoir après laquelle l’élève ne pourra plus du tout utiliser les outils lors des moments d’intégration. Cela paraît indispensable lors des années d’examen, des phases de certification. Ce qui ne signifie pas que l’élève n’a plus à sa disposition les outils ; il peut s’y reporter seul, chez lui lors d’un travail personnel par exemple mais il n’est plus question qu’il s’en serve en classe pendant les phases d’intégration.

 

Exemples d’outils

Il nous semble que l’on peut créer un outil de routine à mettre à disposition des élèves lors des premières phases d’intégration. En voici une version, très inspirée également des travaux de Philippe Meirieu et de Jean- Michel Zakhartchouk sur les consignes :

 

Tâche à accomplir ……………………………………………………………………….

Avant le ………………………………………………. soit …………… heures ou jours.

Comprendre la tâche :

Les mots importants sont :

Les mots qui méritent que je recherche une explication sont :

Le mot Ce que j’ai utilisé pour comprendre le sens du mot (= quel outil ? Où ai-je cherché ?) Sa définition
     
     

En quoi ce travail, cette tâche est-elle intéressante ?

Ce qui n’est pas dit mais qui est important ?

Ce qui est dit et qui ne sert à rien ?

A quoi va ressembler mon travail quand j’aurai terminé ?

Choisir une démarche : (comment vais-je m’y prendre pour réussir ?)

Par quoi vais-je commencer ?

Par quoi vais-je finir ?

Quels outils (fiches, livres, manuels, répertoire, ouvrages documentaires, site internet …) me seraient vraiment utiles ? (Si j’ai le droit d’utiliser autre chose que ma tête)

Qui pourrait m’aider ? (Si j’ai le droit à une aide extérieure)

A quoi verrai-je que j’ai terminé ?

De quels objets ai-je besoin ? (Papier, feutres, post-it, ordinateur, affiche, photocopies …)

Sous quelle forme puis-je réfléchir ? (Brouillon, tableau, carte heuristique, schéma …)

Valider sa production :

Ai-je terminé ?

Ai-je fait ce que j’avais prévu de faire ?

Est-ce bien ce qui m’est demandé ?

Est-ce que je l’ai bien fait ? (Par exemple, c’est propre, complet, esthétique …)

Qu’est-ce qui me plait ?

Qu’est-ce que je regrette ?

Qu’est-ce que je pourrais améliorer si j’avais le temps ?

 

L’outil proposé ci-dessus est extrêmement généraliste et peut plus ou moins s’adapter à toutes les disciplines. Il faudrait probablement le doubler ou le compléter avec la liste des ressources disciplinaires à utiliser. Par exemple, en Histoire, les « acteurs – événements/dates – définitions/vocabulaire – documents » indispensables à réutiliser.

Déterminer les ressources disciplinaires à réutiliser :

Quelle discipline est concernée par la tâche à accomplir ? (Par exemple l’Histoire)

Quels sont les incontournables de cette discipline ? (Il faut situer dans le temps, citer ses sources etc.)

(Réflexion à mener autant de fois qu’il y a de disciplines concernées par la tâche complexe à accomplir)

Qu’est-ce que j’ai appris dans cette discipline que je choisis d’utiliser pour mener à bien mon travail ? (Titre de chapitre, de leçons, notions-clés …)

 

Cet outil amène à formuler quelques remarques.

Tout d’abord, il est long à utiliser, il y a beaucoup de pistes à suivre. L’enseignant doit prévoir une durée suffisante pour son utilisation, peut-être une heure entière la première fois que les élèves le découvrent.

D’autre part, en raison de sa longueur mais pas seulement, il est compliqué ; il faut donc envisager que le professeur guide les élèves dans son remplissage par exemple en lisant les consignes, éventuellement en les explicitant ou en les faisant reformuler. Une fois, peut-être deux fois. La troisième voire la quatrième fois, on pourrait imaginer que les élèves l’utilisent en groupes. En effet, il faut que les élèves intègrent l’outil d’intégration.

Si on utilise régulièrement cet outil d’intégration dès la 6e puis tout au long du collège, il semble que, dès la 4e, il doit être possible de le garder à porter de main, dans le portfolio ou le cahier, pour s’y reporter quand le besoin s’en fait sentir mais sans que ce soit systématique afin que, grâce à ce travail de routine procédurale, en 3e, l’élève n’en ait plus besoin. On peut aménager une phase intermédiaire avec un outil laconique qui ne montre plus que le titre des quatre parties : comprendre, choisir une démarche etc. Dès le milieu de la 5e pour les plus autonomes ? Ou en début de 4e pour les autres ? De toute façon, dès le deuxième semestre, il ne devrait plus avoir le droit de l’utiliser car on entre alors dans la phase de certification.

 

La dernière remarque sur l’outil a valeur de conclusion. Une fois cet outil créé, il faut tout de suite l’oublier, sa seule vertu est le moment de réflexion qu’il a permis. Il n’est pas question de créer une quelconque « méthode d’intégration ». Le lecteur a probablement remarqué que chaque partie de cet outil se termine par trois petits points. Etant donné que la démarche d’intégration est personnelle, l’idéal est que l’élève choisisse le plus souvent possible une option qui n’est pas proposée par l’enseignant !

 

Un exemple de routine

Il a été donné par Muriel Misplon[4] pour la dissertation en Seconde (merci d’imaginer que cet outil occupe la totalité d’une page voire d’une feuille). Cet outil n’est pas seulement un « modèle » de référence pour l’élève, il s’en sert physiquement en remplissant les cadres au fur et à mesure. Ensuite, il n’a plus qu’à recopier !

 

Introduction :

 

Sujet : ………………………………………………………………………. Problématique : ………………………………………………… ……………………………………Parties du plan : .……………………………………… , ……………………………………, …………………………………………………………………… ……………………. …

 

Développement :

 

Tout d’abord (ou autre connecteur), ………………………………………………………………………………. 

………………………………………………………………………………………………. 

Etc.

 

 

 

Ensuite (ou autre ), …………………….. etc.

 

 

 

 

 

Enfin (ou…), ……………………. Etc.

 

 

 

 

 

Conclusion :

Résumé rapide de ce qui précède ………….. Réponse à la problématique …………………..

Ouverture sur un autre aspect du sujet ……………………………………………….

 

[1] Xavier Roegiers, 2011, Curricula et apprentissages au primaire et au secondaire, la pédagogie de l’intégration comme cadre de pensée et d’action[1], De Boeck, pages 248 et suivantes.

[2] Yinger, Robert, (1979), Routines in teacher planning. Theory into practice. Ainsi que : Tochon F. (1993). L’enseignant(e) expert(e). Paris : Nathan. Non lus mais connus par des stages suivis par l’auteure.

[3] N.B. Cet article a été écrit juste avant la lecture de « Quand l’école prétend préparer à la vie : développer des compétences ou enseigner d’autres savoirs ? » de Philippe Perrenoud, ESF, 2011. Page 51, l’auteur évoque « une sorte de routinisation de la mise en synergie des ressources. Un peu plus loin, il estime qu’il faudrait y passer un tiers du temps scolaire.

[4] Collègue formatrice à la DAFPA de Versailles dans l’équipe « Pédagogies et apprentissages » avant de devenir I.E.N.

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Blog 22

Ceci est un complément à la page 56 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan. (Le 1er « blog 22 »!)

Quand on surveille un Gr.App., on peut être surpris par les remarques des élèves. Afin de les aider, le professeur écrit au tableau les matières au programme du jour ou affiche l’emploi du temps numérisé. En même temps, il demande : « qu’avez-vous appris ? » Souvent, les réponses sont sidérantes mais pas inattendues :

– Rien, on a fait des exercices

– On n’a rien appris car on a passé l’heure à faire une compréhension orale.

– On a corrigé la dictée/les exercices/ un travail/etc.

– on était sur les ordinateurs.

Sans soupir de désespoir, le professeur commente qu’un exercice sert à apprendre ou réviser une notion ; qu’en corrigeant tel ou tel travail, on peut avoir personnellement tout à coup réalisé quelque chose et donc appris ; qu’à propos de la compréhension orale, on pourrait au moins expliquer quel en était le sujet, quelques termes retenus. Pour l’instant, cela relève de l’incantation humaniste sans portée pédagogique. Pour faire bref, les élèves en écrivent à peine plus sur le cahier d’apprentissages.

Et pourtant, en classe, quand le professeur, d’histoire par exemple, demande en début de cours d’ouvrir le cahier des apprentissages et de résumer ce qu’on sait déjà sur tel chapitre, les élèves écrivent assez longuement. Voilà un paradoxe qui mériterait d’être étudié de manière plus approfondie.

Lors d’une séance de Gr.App. encadrée par l’auteure le 4 décembre 2015, avec des élèves de 4e, certains dans Neo Alta pour la deuxième, une « bonne » question a (enfin) été posée.

« Est-ce qu’on doit écrire ce qu’on a fait ou bien ce qu’on a appris ? »

Un petit débat « sauvage » s’est engagé entre quelques élèves duquel il ressort que travailler ou apprendre c’est pareil. Mais pas pour la même raison. Pour les uns il semble qu’ils ne font pas la différence entre les deux activités ; et pour les autres, en faisant, on apprend. L’heure avançant, le professeur a demandé d’écrire « ce qu’on ne savait pas avant ou dont on n’était pas sûr et que maintenant on sait, on en est plus certain. »

Si on se reporte aux extraits des cahiers d’apprentissage de Camille et Arthur, élèves de 5e, donc première année dans Neo Alta, on peut constater une évolution assez nette au cours de l’année entre « j’ai fait » et « j’ai appris ».      Cf les cahiers de Camille et d’Arthur dans le blog 21.

En Septembre, Camille n’a manifestement pas compris à quoi sert ce cahier. Elle l’oublie souvent probablement puisqu’on peut lire bien peu de dates dans la marge alors que la classe dispose d’un Gr.App hebdomadaire. En octobre, elle commence à raconter ce qu’elle a fait dans la journée. C’est en novembre qu’on voit apparaître quelque chose qu’elle a appris mais qui n’a rien de scolaire: sa camarade lui a montré comment dessiner un chien. A partir de fin novembre, enfin, elle commence l’inventaire de ce qu’elle a « retenu » des cours: des éléments de grammaire, le calme indispensable dans les vestiaires[1], le partage de l’empire de Charlemagne.

Arthur, après la même démarche que Camille lors de la première séance, dès la semaine suivante peut commencer à écrire ce qu’il sait. Dès la fin septembre, il repère ses difficultés « je ne sais pas nager avec la planche ». Une page de la deuxième moitié de l’année montre une très forte évolution. le garçon fait la liste des ressources qu’il a mémorisées du cours d’histoire. Pour la géométrie, il reproduit ou réinvente le schéma des angles d’un triangle rectangle.

Dans les deux cas, on constate que le cahier d’apprentissage est devenu un outil, un objet personnel: chaque élève y a mis des dessins, parfois des couleurs. Camille comme Arthur expriment leurs émotions. Ils écrivent avec des abréviations, aucun des deux ne tient vraiment son cahier avec soin. Ce cahier des apprentissages n’est pas destiné à être ramassé, lu, évalué. ainsi, ce que signifie le grand point d’interrogation rouge en regard des nombreuses ressources écrites par Arthur concernant l’art roman ? N’est-il pas certain d’avoir tout retrouvé ? Ne voit-il aucun intérêt à apprendre cette leçon ?

 

A la fin de l’année 2015, les 5e et 4e Neo Alta ont répondu à un sondage sur leurs méthodes de travail, notamment pour apprendre leurs leçons. Hélas, seuls deux élèves de 5e et une seule en 4e font référence au cahier d’apprentissage ! Faut-il en déduire que c’est un outil inefficace ? L’auteure fait deux autres hypothèses. Un Gr.App hebdomadaire, c’est trop peu pour que les élèves se saisissent d’une nouvelle manière de travailler. D’autre part, trop peu de collègues de la structure utilisent ce cahier en début de cours pour réactiver le cours précédent ou pour répondre à la « question du jour » ou encore pour faire relire un petit résumé que chacun aurait écrit en fin de l’heure d’avant. On voudrait faire passer le message qu’un cahier d’apprentissage ne sert à rien qu’on ne s’y prendrait pas autrement. A la décharge des collègues, faisons une troisième hypothèse. L’enquête menée auprès des élèves montre que pour apprendre les leçons ils s’accrochent à cette bonne vieille méthode du « je la lis » y compris les 4e dont la plupart ont déjà une année dans Neo Alta. Si la seule lecture suffisait pour apprendre, cela se saurait. Malgré les efforts en classe et en Gr.App de quelques collègues, il est très difficile apparemment de faire changer les pratiques des élèves. Cela se vérifie également des pratiques pédagogiques. Les collègues de Neo Alta sont volontaires, attentifs à leurs élèves, prêts à travailler en équipe ; cependant tous ne parviennent pas à transformer leurs pratiquer, à essayer autre chose, malgré les trois stages de formation continue qui ont accompagné la mise en place de cette expérimentation.

Est-ce pour autant qu’il faille abandonner les cahiers d’apprentissage ? Non. Voilà un outil peu coûteux, un ancien cahier auquel il reste des pages fait l’affaire, simple à utiliser pour les élèves, peu chronophage pour les enseignants. L’auteure a la certitude d’une réelle plus-value pédagogique, constatée dans ses cours. Pour que les élèves s’en emparent, il faut plus de temps. Sans doute également pour les collègues.

[1] Longue discussion des professeurs avec les classes. Ensuite il n’y avait plus le temps d’aller dans l’eau.

 

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Blog 21

Ceci est un complément à la page 55 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Des cahiers d’apprentissage pour apprendre les ressources

 

La structure Neo Alta existe depuis Septembre 2013. Dès l’origine, il a été prévu un temps de travail personnel, le Gr.App (Groupes d’apprentissages) en fin de journée, autant de fois que possible dans la semaine. Ce temps d’étude est au volontariat des élèves.

Deux exemples de cahiers d’apprentissage:    cahiers Camille Arthur

Très vite, il a semblé indispensable de cadrer ce temps de travail personnel face à la difficulté pour les élèves de rendre ce temps efficace. D’autre part, quelques membres de l’équipe souhaitaient mettre en œuvre l’idée suivante[1] : les leçons découvertes dans la journée pendant les cours doivent être réactivées le soir-même pour éviter un oubli trop important et donc un trop grand effort de mémorisation la semaine suivante.

Il a donc été mis en place un rituel de travail et un cahier dédié nommé « cahier d’apprentissages »[2]. Celui-ci est sensé servir en classe, par exemple en début de cours pour se remémorer ce qui a été travaillé au cours précédent et/ou ce qui était à apprendre ; ou bien en fin de séance pour prendre le temps de la réactivation immédiate, et non de la synthèse, plus difficile, à faire collectivement avec le professeur. Ou encore pour pratiquer des « Que sais-je ?[3] » Ce n’est pas actuellement fait régulièrement ; ce n’est pas devenu une pratique pédagogique généralisée à l’ensemble des enseignants dans Neo Alta.

Ce cahier d’apprentissages sert également le soir en Gr.App. puisque le rituel prévoit que les premières minutes sont consacrées à la remémoration de ce qui a été appris dans la journée. Individuellement dans un premier temps, très court ; puis en binôme pour enrichir, compléter ce qui a été retrouvé.

Ce qui est écrit pendant les premières minutes est bien souvent très court et ressemble à une petite liste au pire, à un catalogue au mieux.  (pour une suite, cf blog 22)

[1] Tony Buzzan, Une tête bien faite, Editions d’organisation, 2004, page 79.

[2] cf. les travaux de Jacques Crinon, relayés par les articles d’Anthony Lozac’h sur Ecole de demain,  https://ecolededemain.wordpress.com/2013/01/30/le-cahier-des-apprentissages-pour-remplacer-les-devoirs/ et https://ecolededemain.wordpress.com/2013/02/24/le-cahier-des-apprentissages-de-la-theorie-a-la-pratique-dans-les-classes/

[3] cf. Socle commun et compétences, pratiques pour le collège, ESF, 2011 (Di Martino et Sanchez), voir un exemple dans la Partie 3, chapitre 1 : les échelles d’évaluation

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Blog 20

Ceci est un complément à la page 55 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Apprendre par concept, un exemple en enseignement moral et civique

L’enseignement moral et civique est un programme de cycle. Pour le cycle 4, en conseil d’enseignement, il a été décidé dans le collège de l’auteure que « Reconnaître les grandes caractéristiques d’un Etat démocratique » serait traité en 3e. L’auteure a fait le choix d’une démarche à la Britt-Mari Barth. Des exemples « oui » et « non »[1]  sont projetés alternativement sur le TNI. Ce cours venant après l’étude des régimes totalitaires, les contre-exemples sont choisis dans l’URSS de Staline et en Allemagne nazie. Chacun prend des notes sur son cahier au fur et à mesure de la projection, en silence. Les exemples auraient pu être choisis parmi des chapitres étudiés les années précédentes (Athènes au Vème siècle ante- christum par exemple) mais l’auteure a choisi dans cette séance de réactiver les connaissances sur les caractéristiques des dictatures. Spirale, quand tu nous tiens… Ceci dit, cela aurait spiralé aussi avec la démocratie athénienne.

 

Quelques « exemples oui »

DDHC 1789 : Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément.

Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme.

 

Constitution 1958 : La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum.

Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.

Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques.

Le gouvernement est responsable devant le Parlement

Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l’exercice de tout mandat parlementaire

 

Montesquieu, De l’esprit des lois : Tout serait perdu, si le même homme, ou le même corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs : celui de faire des lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers.

 

Ensuite, ce sont des images qui sont projetées. La classe doit alors se demander, collectivement, en argumentant, s’il s’agit d’exemples « oui » ou « non ». Par exemple sont projetées des photos de manifestations (lycéens dans la rue selon l’actualité du moment, les anonymous), des reproductions de tracts syndicaux pris en salle des professeurs, des logos d’associations caritatives, des affiches de propagande, des portraits officiels (Kim Jong- Il, Pétain). Enfin, une dernière série de phrases est projetée, présentées comme exemples ou contre-exemples. Les élèves doivent expliquer pourquoi telle phrase est bien une caractéristique d’une Etat démocratique ou l’inverse.

 

Quelques « exemples non »

Montesquieu, De l’esprit des lois : Un gouvernement où un seul gouverne, mais par des lois fixes.

Un gouvernement où un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et ses caprices.

Diderot, article « autorité politique », Encyclopédie : Aucun homme n’a reçu de la nature le droit de commander aux autres

Lénine, l’Etat et la révolution : La dictature du prolétariat apporte une série de restrictions à la liberté pour les oppresseurs, les exploiteurs, les capitalistes.

Là où il y a répression, il y a violence, il n’y a pas de liberté, il n’y a pas de démocratie.

Décret sur la presse (octobre 1917): Pourront être suspendus les organes de presse qui appellent à la résistance ouverte ou à la désobéissance au gouvernement ouvrier et paysan

 

Dans un dernier temps, chaque élève a dû se débrouiller seul avec un exercice d’application : retrouver parmi une dizaine de phrases, toutes « oui », les caractéristiques d’une démocratie.  Ainsi  » Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi » devient la liberté d’opinion et d’expression constitutive d’une démocratie.  Enfin, les élèves, à plusieurs, établissent le brouillon d’une rédaction sur le sujet puis, individuellement, font cette rédaction à la maison. De retour en classe, une activité d’amélioration de textes est menée avec segmentation en différentes parties et ajout de connecteurs logiques. Les arguments, les exemples et les citations sont mises en évidence par un jeu de couleurs.

 

Cette démarche se rapproche de la démarche d’auto-socio-construction chère au GFEN dont il a déjà été question dans cet ouvrage. Suivant le concept à enseigner, il n’est pas toujours facile de trouver ces exemples et contre-exemples pertinents. Mais au vu de l’efficacité de la méthode, on pourrait imaginer que des collègues, d’un même établissement ou pas, construisent ensemble ces outils. La mutualisation reste difficile dans notre profession de réputation individualiste, on ne peut que le déplorer.

[1] Ainsi l’auteure, toute jeune institutrice, n’ayant pas encore compris ce qu’est la formation continue et pestant qu’on lui « supprime » des cours, a vécu son premier choc pédagogique. Britt-Mari Barth elle-même (mais l’auteure confesse qu’elle ne savait pas qui c’était…) faisait vivre une séance sur la découverte de l’impressionnisme, avant la publication de sa thèse. Double choc: l’auteure ne savait pas non plus ce que c’est que l’impressionnisme. plus de trente ans après, elle n’a toujours pas oublié.

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Blog 19

Ceci est un complément à la page 53 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Un dispositif de classe : apprendre par un enseignement mutuel , un exemple en mathématiques

En mathématiques aussi, on peut aller plus loin en proposant aux élèves de faire le cours. Pour un chapitre qui peut être découpé en plusieurs parties, on demande aux élèves de choisir celle qui les intéresse le plus. Ils sont alors répartis en petits groupes qui ont pour mission de préparer puis de présenter le cours à la classe. Par exemple, un chapitre de 5e de géométrie sera découpé en : unités de longueurs, médiatrices, hauteurs, inégalité triangulaire, construction de triangles connaissant les trois longueurs des côtés. Des ressources sont mises à disposition : différents manuels, accès internet, possibilité de se rendre au CDI. Le professeur est lui-même une ressource bien sûr. Selon leur degré d’avancée et l‘ordre des parties de la leçon, les groupes présentent les résultats de leur recherche. La mise au propre de leurs notes est alors photocopiée et distribuée pour devenir la référence du cours. Parallèlement, chaque élève s’entraine aux exercices du plan de travail individuel dans le même groupe. Si une partie n’est choisie par personne, c’est le professeur qui la présente. Dans cette classe de 5e, dans laquelle la moitié des élèves était en résignation apprise mâtinée de perturbation du cours, la proposition de ce type de travail a permis à un grand nombre de se prendre au jeu, de s’apercevoir qu’ils étaient capables d’apprendre et de faire apprendre leurs camarades. De la résignation apprise, la plupart est passée à une implication qui a nettement amélioré le climat de la classe. Les élèves s’encourageaient et se félicitaient. Ayant repris confiance en eux, en leur classe et sans doute aussi dans leur professeur, la suite des cours de maths a été apaisée et plus efficace pour chacun.

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Blog 18

Ceci est un complément à la page 53 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Un dispositif de classe: apprendre par un enseignement mutuel, un exemple  en histoire

Et pour nos élèves ? Sans mettre les élèves dans le même dispositif, les auteures utilisent également une méthode qui s’en approche : « Apprendre par un enseignement mutuel ».

Voici un premier exemple en histoire. 2016- 2017, en 3e, la classe est rebelle, tour à tour apathique et agitée. Elle réclame du cours magistral ; celui-ci se déroule très bien ; le calme est impressionnant, on n’entend que les plumes glisser sur les cahiers d’écolier. L’auteure pense qu’une classe qui ne fait pas de bruit, à moins qu’elle soit en contrôle, est une classe dont les élèves ne travaillent pas. Le silence est alors le signe de l’électroencéphalogramme plat momentané. Donc, le magistral c’est bien mais on ne peut pas y passer l’année. Il va bien falloir que ces enfants se mettent en activité intellectuelle, s’impliquent, travaillent, apprennent. Ce qui suit se réfère à une très ancienne forme d’enseignement, l’enseignement mutuel[1]. Le maître faisait la leçon à quelques élèves plus avancés en âge ou en savoirs. Ceux-ci ensuite allaient la donner aux autres élèves, par petits groupes. L’auteure s’est demandé si cette manière de faire pouvait trouver sa place en cours de nos jours, comment cela allait se dérouler et avec quelle efficacité.

L’expérience a commencé en fait en 4e Neo Alta : les élèves sont prêts à tout et toujours partant. La professeure s’est fait la main puis a rectifié certains tirs. Nous étions dans la révolution française et l’enseignante voulait continuer le chapitre avec l’étude de deux acteurs Robespierre et Napoléon Bonaparte. La classe a été divisée en deux, chaque moitié travaillant sur l’un des deux personnages historiques. Ce travail a duré deux ou trois heures. La professeure a annoncé l’objectif : « Vous devrez préparer un cours d’un quart d’heure sur votre personnage historique.  Vous serez tour à tour professeur et élève ». Dans un premier temps, les robespierristes se sont rassemblés avec la prof pour une étude très, très guidée, de documents ; les élèves ayant pour mission de suivre, comprendre, poser des questions, prendre des notes s’ils voulaient. Les autres travaillaient seuls ou en duos pour compléter la fiche biographique de Bonaparte. Ensuite, les groupes se sont échangés. A la maison, à partir de leurs notes, de la fiche biographique et du travail avec la professeure, à la maison, chacun devrait préparer son cours. Dans un deuxième temps, le professeur a annoncé les duos et les cours ont commencé, par Robespierre. Au bout d’un quart d’heure, les élèves ont changé de rôle. La professeure a observé ce qui se passait. Chacun a pris son rôle au sérieux. Tous avaient préparé un cours. C’est d’ailleurs amusant de voir les élèves professer : ils reproduisent les représentations qu’ils ont (qu’ils voient, qu’ils vivent ?) de l’acte d’enseignement. Ils ont prévu des lectures, des questions, des études de documents, un résumé. Chacun a été engagé dans la tâche ; les « professeurs » ont accompli leur mission avec conscience ; les « élèves » ont suivi les indications et ont fait sérieusement ce qui leur a été demandé, l’auteure n’a pas eu à utiliser le « bras armé de la république ». L’expérience s’est arrêtée là, c’est sans doute un tort et c’est probablement pourquoi l’auteure a souhaité recommencer avec les 3e, avec quelques infléchissements dans le déroulement.

 

Le chapitre porte sur « Résistances et collaboration pendant la seconde guerre mondiale ». Une nouvelle fois la classe est séparée en deux cependant il n’y a pas d’apport fait par la professeure qui veut sortir d’une longue série de cours magistraux, cf. chapitre 2 sur l’autonomie ; les élèves prennent leurs informations à partir des leçons du manuel et d’un dossier documentaire ; ils peuvent également utiliser les manuels des autres éditeurs ou plus anciens à disposition dans la salle. Evidemment, la professeure est à leur disposition. Les élèves peuvent pour cette phase travailler à deux. En travail personnel hors de la classe, ils doivent à leur tour préparer un cours d’un quart d’heure en prévoyant à l’avance une trace écrite. L’heure suivante, les « cours commencent » avec Pétain et la collaboration. Première modification, à la suite de ce temps, la professeure a repris la main et invité les élèves à poser des questions. Il y en eut quelques-unes, des demandes d’éclaircissement essentiellement. Deuxième modification, chacun sur une demi-feuille a dû écrire ce qu’il avait compris sur la collaboration (en précisant s’il était élève ou professeur). Ensuite, les élèves ont changé de rôle. Et se sont succédés le « cours », les questions et le petit résumé sur ce qui a été compris de la résistance. Enfin, troisième modification, les 3e devaient conclure en écrivant s’ils estimaient avoir plus appris en étant « élève » ou en étant « professeur ». Les résultats de ce petit sondage sont sans appel : quatorze élèves ont déclaré avoir plus appris quand ils étaient professeurs. L’un d’eux le justifie en écrivant : « J’ai dû préparer sérieusement car je voulais être capable de répondre aux questions qui risquaient de m’être posées. » Une autre explique qu’elle a davantage appris car elle a tout d’abord fait les activités préparatoires puis elle a révisé en préparant son « cours » et enfin elle l’a revu quand elle a travaillé avec son binôme. Au final, elle a bien appris car elle a fait le travail trois fois. Sept élèves restent campés sur le fait qu’on apprend mieux en étant élève. Persistance des représentations ?

[1] Philippe Meirieu, Des lieux communs aux concepts-clés, ESF, 2013 et Claude Lelièvre, sur son blog, « Par-delà le dérapage » d’Antoine Prost, 7 mai 2016,  https://blogs.mediapart.fr/claude-lelievre/blog/070516/par-dela-le-derapage-dantoine-prost   

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Blog 13

Ceci est un complément aux pages 38 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Autonome dans le travail à la maison ?

Il n’a été question jusqu’ici que de pratiques en classe. Est-ce que l’on pourrait envisager que l’autonomie se construit également, non pas en-dehors de l’école mais aussi en-dehors de l’établissement ? C’est ce que l’auteure a voulu savoir en tentant l’expérience suivante. En 2015- 2016, il a été proposé à trois classes de faire leur travail personnel en choisissant un degré d’autonomie. Cette expérience s’inscrit dans le droit fil des conférences de l’IFE sur le travail personnel de l’élève[1]. Chaque classe s’est vue proposer de faire ses devoirs non pas de manière classique (le professeur donne les devoirs et les élèves en font tout … ou partie) mais selon un degré d’autonomie choisi par l’élève lui-même. Les devoirs sont indiqués grosso modo pour un chapitre entier et non pas d’un cours pour l’autre. En début de chapitre, l’expérience est expliquée à la classe, chaque élève détermine son degré d’autonomie. Le professeur met alors en ligne sur l’ENT les documents nécessaires, un document par degré d’autonomie. Le cours se déroule normalement selon ce qu’a prévu le professeur. Cependant, les élèves sont invités à montrer au fur et à mesure ce qu’ils ont appris. En fin de chapitre, chacun doit remplir un petit bilan de son travail personnel, qui est ramassé. A quoi ressemblent les consignes, cf un autre article sur un autre blog. [2] ?

En 6e, nous commençons « les débuts du judaïsme », pour le degré 1 (le plus bas), « je fais ce que le professeur demande », lire § C p 50 (de la leçon dans le manuel), mémoriser les définitions de « Les Juifs » et « La diaspora », noter le repère « début de l’écriture de la Bible : VIIIème siècle A.C. » dans le cahier et en faire une phrase, apprendre la leçon dans le cahier.

En 4e, en Géographie sur le chapitre des « pays les moins avancés », en degré 2, « je choisis ce que je veux faire pour apprendre parmi les activités proposées dans le tableau ». Ces activités sont organisées autour de quatre entrées : lire, écrire, apprendre et autre. En lecture, en sus de leçons dans le manuel est proposée la consultation d’un ouvrage documentaire sur le Mali à choisir grâce à e_sidoc. En rédaction, le professeur demande d’établir une liste d’informations sur le Bengladesh à partir des documents du manuel ou encore d’analyser un graphique ou bien d’inventer un quizz. Pour ce qui est d’apprendre les propositions vont du vocabulaire à l’apprentissage d’une carte ou d’un résumé. Enfin, dans la colonne « autre », les élèves peuvent choisir de regarder une vidéo du site.tv ou d’aller au CDI établir une biographie sur un PMA.

En 3e, nous commençons le chapitre « effondrement et refondation de la république ». Il s’agit d’étudier les réactions des français pendant la seconde guerre mondiale. Pour le degré 3, la consigne est simplement « je me débrouille. A moi de jouer ou plutôt de faire ce qu’il faut pour apprendre ».

Quelles sont les résultats de cette expérience ? Ce qui suit n’a aucune valeur scientifique, il ne s’agit pas d’une enquête menée avec la rigueur sociologique nécessaire. Ce sont seulement quelques constats. Tout d’abord, quel degré d’autonomie les élèves ont-ils choisi ? Dans les trois classes c’est le degré 2 qui a recueilli le plus de suffrages. En 6e, quatre élèves ont choisi le degré 1 et aucun le degré 3. En 4e et en 3e, un seul a voulu faire ce que préconisait le professeur et un seul également a souhaité se débrouiller seul pour apprendre. Le nombre d’activités choisies et prévues montre les « appétits » différents des élèves et 2 à 8 sur 15 en 6e, de 4 à 11 sur 12 en 4e et de 3 à 8 sur 14 en 3e. En 6e, on a choisi plutôt dans la colonne « lire » et « apprendre » est la moins cochée. En 3e, est-ce parce qu’il s’agit d’une classe d’examen pour l’histoire-géographie, presque tous les élèves ont sélectionné des activés dans le « apprendre » et tous au moins une leçon du manuel à travailler.

Mais les élèves ont-ils fait ce qu’ils avaient prévu ? En fait, non. Ils sont très peu nombreux à avoir fait plus ou autant que prévu. L’écrasante majorité en a fait moins. Mais, souvent, on n’est pas loin du compte (4 sur 5 ou 6 sur 8). En 3e, plusieurs font le constat qu’ils n’ont effectivement pas ENCORE fait ce qu’ils avaient prévu mais qu’ils n’avaient pas terminé. Ce qui est surprenant est que certains ont sélectionné des activités puis en définitive en ont fait d’autres. En 3e, T. reconnait qu’il a tout fait, mais « pas très sérieusement la mémorisation des deux dernières définitions ». En 3e toujours, L. a choisi le degré 3 et s’est établi un programme de travail incroyable avec quatre eurécartes[3] de synthèse des leçons du manuel puis trois activités sur dossier pour approfondir la défaite de la France, le rôle de de Gaulle et un mouvement de résistance ; enfin, elle a travaillé sept notions-clés. Et elle a fait tout ce qu’elle avait prévu. Evidemment il s’agit d’une exception. Cependant, tous les élèves se sont prêté au jeu, ont fourni un travail de qualité, plus abondant dans l’ensemble que ce que le professeur aurait donné comme devoir. Au fil des cours, les élèves étaient invités à montrer leurs connaissances, à expliquer ce qu’ils avaient fait pour les acquérir. C’était très intéressant et riche. Parfois, cela a été une bonne surprise : S. dont l’activité principale cette année-là était de profiter du temps qui passe s’est montré, enfin, un élève intéressé tenant des propos intéressants qui faisaient réellement avancer le travail de la classe.

L’auteure pensait prendre des risques en lançant cette expérience, les résultats ont montré que non. Au final, les élèves se sont investis. Les 6e ont produit des questionnaires et des quizz réutilisables pour d’autres classes par exemple.

Qu’en disent les élèves ?

Enfin, cette expérience s’est conclue par un travail en petits groupes avec la classe de 4e [4]. Ce chapitre finit donc comme il commencé puisqu’il s’agissait pour eux de réfléchir à ce qu’est un élève de 4e autonome. Qu’en disent-ils ?

« Un élève qui n’est pas autonome n’est pas capable de travailler sans obligation ni aide quelconque. Il est également incapable de prendre des décisions seul » (pour trois élèves).

« Un 4e qui n’est pas autonome ne prend pas de responsabilité et demande toujours ce qu’il faut faire. Il ne rend pas ses devoirs à temps, il ne peut pas travailler seul. Il ne s’avance pas dans ses devoirs, les fait la veille. Il ne fait pas ses devoirs jusqu’au bout ou alors rapidement » (pour quatre élèves).

« Un élève qui n’est pas encore assez autonome a besoin d’aide mais lorsqu’il a compris, il peut se débrouiller seul » » (pour quatre élèves).

« Un élève un peu autonome travaille mais n’aime pas trop le faire en autonomie. Il ne sait pas vraiment le faire avec les conseils du professeur » (pour trois élèves).

« Un élève de 4e autonome s’avance dans ses devoirs sans qu’on le pousse à le faire. Il prend des initiatives et ne sollicite pas les professeurs. Il sait faire ses devoirs tout seul et fait parfois plus que ce qu’on lui demande » (pour quatre élèves).

« Un élève autonome peut se débrouiller seul, est capable de se donner du travail et de s’y tenir, sait s’organiser sur ce qu’il doit apprendre. Il peut distinguer ce qui est le plus important à apprendre, ce dont il a impérativement besoin. Il choisit pour quand et quand il doit faire son travail » (pour quatre élèves).

 

L‘analyse un peu plus haut de cette expérience montre que ces élèves n’ont pas toujours fait ce qu’ils avaient prévu. Cependant, l’autonomie, ils savent ce que c’est, ils savent la décrire et nul doute qu’ils atteignent assez rapidement un très haut niveau de maîtrise de cette compétence. Si on considère qu’apprendre c’est tout d’abord comprendre puis mémoriser puis transférer alors on peut penser que ces élèves ont compris ce qu’est l’autonomie ; qu’ils vont progresser petit à petit par le biais de mise en situation de la développer et de s’autoévaluer ; et qu’ils vont tôt ou tard transférer cette maîtrise de leur liberté individuelle vers d’autres situations. A l’école et dans la « vraie » vie.

[1] Cf. une conférence de Patrick Rayou au printemps 2016 (http://formations.inrp.fr/2016-05-03%20p-rayou.mp3  et https://www.youtube.com/watch?v=Z_1nBdUAaBM ) et les ressources très nombreuses mises en ligne depuis (https://www.reseau-canope.fr/education-prioritaire/agir/item/ressources/laccompagnement-du-travail-personnel-des-eleves-organise-et-adapte-a-leurs-besoins.html ).

[2] Pour les documents entiers, voir sur le blog https://lewebpedagogique.com/anniedimartino/2018/11/04/travail-personnel-developper-lautonomie-des-eleves/

[3] Appellation « maison » des cartes heuristiques, parfois écrites eurékartes d’ailleurs.

[4] Il s’agit de la 4ème Neo Alta, une expérimentation menée dans le collège de l’auteure dont un des axes est précisément le développement de l’autonomie chez les élèves. Cf un petit film tourné par Thierry Foulques « Neo Alta un dispositif innovant », https://www.youtube.com/watch?v=XGlNDa0JrrA

 

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Blog 12

Ceci est un complément à la page 37 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Concevoir des situations de classe (pour développer l’autonomie des élèves): le brouillon

Il va donc falloir réfléchir à des situations de classe conçues spécifiquement pour cela. Arrivé à ce point, en stage, l’auteure fait lire des textes extraits de Blanquart et Walkowiak dans Réussir l’école du socle[1] , de Hadji dans Comment impliquer l’élève dans ses apprentissages[2] puis deux textes de Philippe Meirieu sur l’autonomie[3]. C’est le moment pour les équipes de commencer à élaborer des situations de classe. En général l’auteure fait concevoir ces situations d’enseignement-apprentissage en utilisant la démarche E.A.Sy’R présentée au chapitre 3 « Apprendre les ressources du programme » de cet ouvrage. Les collègues, à plusieurs, choisissent un des points des listes proposées dans les textes lus et bâtissent une séquence.

Mettons que les collègues aient choisi « Les élèves sont-ils capables d’utiliser correctement un brouillon, sans le recopier à l’identique lors de la production finale, mais en étant capables de tester plusieurs solutions avant de choisir celle qui leur semble la plus appropriée ? »

Avec cette proposition, on est au cœur du socle et des programmes ainsi qu’une petite lecture le démontre. Selon le socle commun, cela devient « l’élève gère les étapes d’une production, écrite ou non » (domaine 2). Cela apparaît dans les programmes de Français cycle 3, dont un des attendus de fin de cycle est la pratique du « brouillon » ou écrit de travail. Idem en fin de cycle 4 : (l’élève doit) utiliser l’écrit pour lire et pour penser (par la) réalisation d’écrits préparatoires. Cette notion de « brouillon » ou écrit de travail dit encore préparatoire se retrouve en histoire-géographie : une des compétences travaillées, tant en cycle 3 qu’en cycle 4 est « pratiquer différents langages en histoire et en géographie ». Un des descripteurs en est « écrire pour construire sa pensée et pour apprendre ». Enfin, dans une publication de la DGESCO d’Octobre 2016, le document d’accompagnement pour l’évaluation des acquis du socle[4], on va le retrouver plusieurs fois. « Pour attester d’un niveau de maîtrise satisfaisant en fin de cycle 3, l’élève parvient à recourir à l’écriture de manière autonome pour (…) réfléchir ». Citer toutes les références serait fastidieux. En revanche, ce qu’il est intéressant de souligner est que toutes les disciplines sont clairement appelées à mener ce travail.

La proposition suivante concerne donc toutes les disciplines, en particulier celles dans lesquelles l’écrit, la rédaction sont une des tâches attendues. La séquence suivante pourrait être menée dans le cadre de l’accompagnement personnalisé, idéalement pris en charge par plusieurs matières.

Après un premier cours, il est demandé à l’élève de produire un brouillon. Le relevé montre une variété de situations : des rédactions déjà rédigées, des listes, des « gribouillis », un plan, une sorte de brainstorming fléché. Dans un deuxième temps, la classe analyse en petits groupes un corpus de brouillons d’une autre classe ou de l’année précédente. Les élèves réfléchissent à l’efficacité à chaque brouillon. La séance suivante se passe en partenariat avec le professeur-documentaliste en demi-groupes. Au CDI, les élèves recherchent différents exemples de brouillon, d’écrivains, de scientifiques. Après ces deux séances d’analyse et de recherches, les élèves doivent pouvoir commencer à caractériser un brouillon efficace qui soit un écrit pour réfléchir, un travail préparatoire à la rédaction. La suite se passe en classe, le professeur demande aux élèves de refaire un brouillon sur le sujet de départ, ou sur un autre selon l’avancée des programmes. Au fil de la séquence, ils vont être amenés à essayer différents types de brouillon à partir de différents sujets. Idéalement, toutes les matières s’y mettent et tous les professeurs demandent à leurs élèves de précéder chaque écrit d’un brouillon.

On pourrait enchaîner avec un autre exemple, à partir cette fois d’une proposition de Meirieu : « être autonome c’est être capable d’analyser un échec, de chercher pourquoi telle ou telle méthode n’a pas été efficace et mettre en place de nouveaux moyens : aidons-nous nos élèves à faire ces analyses, les faisons-nous avec eux ? » Cette fois, on pourrait commencer, pour rester dans le même domaine, avec la projection d’un brouillon d’élève anonymé, d’une autre année afin de ménager les susceptibilités et préserver l’estime de soi des jeunes présents. Les élèves disposent par ailleurs de la photocopie de la rédaction avec les commentaires du correcteur. Ceux-ci montrent clairement que la production n’est pas réussie. Le travail consiste alors à repérer toutes les erreurs commises par le rédacteur. Il serait intéressant de les lister sur un paperboard et les afficher dans la salle, au moins dans un premier temps, comme pense-bête de ce qu’il faut éviter. La suite consiste à se demander pourquoi ou comment l’élève a fait ses erreurs, à quoi cela nous fait penser et comment on pourrait éviter de faire les mêmes. Ceci fait, l’élève est invité à prendre une de ses productions récentes et à y rechercher s’il n’a pas commis le même genre d’erreurs, quelles sont celles qu’il fait le plus, afin de se construire un petit vade-mecum personnalisé de ce à quoi il doit être particulièrement attentif.

[1] Francis Blanquart et Céline Walkowiak, Réussir l’école du socle, p 107, ESF, 2013

[2] Charles Hadji, Comment impliquer l’élève dans ses apprentissages, ESF, 2014

[3]https://www.meirieu.com/DICTIONNAIRE/autonomie.htm    https://www.meirieu.com/CLASSEAUQUOTIDIEN/formationautonomie.htm

[4] https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/33/9/RAE_Evaluation_socle_cycle_2_643339.pdf

https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/74/4/RAE_Evaluation_socle_cycle_3_643744.pdf  https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/74/6/RAE_Evaluation_socle_cycle_4_643746.pdf

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Blog 10

Ceci est un complément à la page 36 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan .

Deuxième exemple : plans de travail en géographie

Un projet vit le jour en Juin 2014 : « Et si on passait au « tout numérique » ? L’auteure imagine. Plus de cahier, plus de manuel. Ceux-ci seront distribués à la rentrée et resteront à la maison. En cours, on utilisera une version numérique gratuite, on saisira toutes les productions sous forme numérique. Tous les cours auront donc lieu en salle multimédia. Les élèves seront encouragés à apporter leur matériel informatique, à utiliser leur téléphone mobile…. On continuera d’enrichir le blog « Faites le MOOC pas l’amer » commencé par les 3e [1] de cette année.

 

Plan de travail   n°1          (cf pièce jointe également, juste ici:   PdT1 SeptOct 15 )       Géographie/ Les mobilités humaines

3 à 5 h du 23/09/15 jusqu’au 07/10/2015

23/09/15 25/09/2015 07/10/2015

La présence d’un astérisque indique qu’une fiche-outil/ méthode est à votre disposition dans le classeur.

  Lieu d’étude choisi :    « Ceuta et Mellila, en Afrique) »     ou      « 900 km avec des migrants (en Europe )»
 

 

 

Activités d’apprentissage obligatoires

Situer Localiser Caractériser Faire un croquis Gestion des tices MLF
Capture d’écran Avec des emboîtements d’échelles L’un ou l’autre Document OpenOffice correctement enregistré Maîtrise de la langue française :
    Répondez avec vos propres mots Croquis de paysage   Phrases correctes,
    10 caractéristiques attendues, au choix A la main ou à la palette graphique   Orthographe raisonnable
Mémorisation du vocabulaire Les migrations (lelivrescolaire) Les flux migratoires (idem) L’émigration Un clandestin Un touriste  
Activités de prolongement (à faire seulement si on a fini ce qui est obligatoire) Une autre vidéo

+ faire un résumé pour les camarades

Un article du Monde

 

+ inventer un questionnaire pour les camarades

Degré d’autonomie :

1 Le prof me surveille et me dit quoi faire au fur et à mesure.
2 Le prof vient voir de temps en temps où j’en suis. Je peux parfois aider mes camarades.
3  Je travaille tout seul. Je sollicite de l’aide quand j’en ai besoin. Je peux toujours aider les autres si j’ai mon brevet de tuteur.

 

 

Après le rêve pédagogique, la réalité didactique fut différente. Au bout de quelques mois de mise en œuvre, cette expérimentation eut des conséquences inattendues.

Après trois passages de deux heures en salle multimédia et du travail sur trois chapitres, il était temps de faire un bilan intermédiaire. Tous les élèves réussissaient à se connecter au manuel numérique. Aucun n’avait encore apporté son propre matériel numérique mais en définitive, la classe n’avait pas vraiment été incitée à le faire. En revanche, les élèves avaient tous une clé USB ramassée régulièrement pour évaluer l’avancée du travail.

Seules deux élèves étaient perdues face à l’informatique mais elles étaient à des années-lumière du minimum que l’on pourrait attendre au XXème siècle. Du coup, elles piétinaient.

Que faire ?

Les consignes étaient toujours sur le même canevas et concernaient quatre compétences[2] disciplinaires : localiser, situer, caractériser, faire un croquis. Pourtant, certains binômes semblaient repartir à chaque fois de zéro en demandent ce que signifie « situer » : faire une capture d’écran sur un globe virtuel pour montrer le lieu étudié, marqué d’une punaise. Par conséquent, ils avançaient très lentement.

Assez rapidement, ce mode de travail a évolué vers un « plan de travail » à la Freinet. C’est-à-dire qu’il a permis à chacun d’avancer à son rythme. Ce n’est pas ce que l’auteure avait envisagé au départ : ramasser toutes les clés au bout de deux heures, regarder le travail accompli et même noter ; enchaîner sur le 2e chapitre etc. Le profil de la classe étant ce qu’il était, au bout de deux heures, l’écart était déjà si grand entre les binômes qui avaient terminé et même fait plus que demandé et ceux qui avaient péniblement fait une capture d’écran avec une punaise pour localiser que plutôt que de mettre un 20/20 et 10 zéros l’auteure a décidé d’évaluer toutes les deux heures mais de laisser le travail se faire au rythme des binômes en mettant tout de même de la pression.

Dans cette classe, plusieurs élèves avaient leur « brevet de tuteur » et ont pu, s’ils étaient disponibles, répondre aux questions des camarades, tant pour les problèmes liés au numérique que pour le fameux localiser/situer, et les aider dans l’avancement de leur plan de travail.

Cependant, il restait toujours le problème de l’énorme décalage temporel entre ceux qui avancent vite, ceux qui avancent bien et les autres. C’est une autre pratique pédagogique, issue celle-là de la pédagogie Institutionnelle, qui apporta une solution satisfaisante pour tout le monde, le texte choisi. Les élèves les plus rapides et les volontaires étaient invités à rédiger un résumé du chapitre. Au cours suivant, les auteurs pouvaient lire s’ils le souhaitaient leur texte à la classe et celle-ci choisissait l’un ou l’autre pour devenir la trace écrite du cours. Arrivé à ce moment-là, la professeure mettait un terme à l’étude du chapitre pour les plus lents qui entamaient alors un autre travail.

[1] Un blog à destination des élèves. Il servit deux ans jusqu’à la découverte des applications type « nuage » par l’auteure.

[2] Dans les programmes de 2008, en Histoire-Géographie, on parlait de « capacités ».

 

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