L’histoire

Obama investiture familleLe mot « histoire » en français est  équivoque. Distinguons au   moins trois sens. L’ « histoire » tout court, c’est la réalité passée, présente et à venir  de l’espèce humaine : « histoire » est  alors proche de  « devenir ». L’ « histoire » que l’on enseigne à l’école est le récit d’un tel  devenir. Enfin l’ « histoire » de telle ou telle réalité renvoie au  mouvement et aux  grandes étapes  d’un   processus évolutif (l’histoire de l’art par exemple).

Une science humaine

L’histoire,  du grec istoria : enquête, dans son sens usuel rassemble toutes les connaissances relatives au passé de l’humanité.  Cette discipline s’apparente à une science par sa rigueur et  son exigence de vérité. Mais si l’histoire est une science, ce n’est pas une science exacte mais une « science humaine », c’est-à-dire une science dont l’objet est l’homme. Or le comportement des hommes ne peut être étudié ni rapporté comme ceux  d’une planète ou d’une molécule de gaz.  Les actions des hommes doivent être interprétées et organisées afin de prendre la forme d’un récit structuré et signifiant. L’objectivité stricte est hors d’atteinte.

Idéalisme et matérialisme

Les philosophes modernes  ont avant tout été soucieux d’établir  l’intelligibilité  de l’histoire. L’histoire n’est pas une suite d’événements et  de décisions aussi incompréhensibles qu’imprévisibles. Pour les  philosophies idéalistes (Kant, Hegel, Comte), il existe une rationalité profonde qui gouverne le monde et qui en constitue la trame cachée.  Pour Hegel, en particulier, les passions des hommes ne sont que les « matériaux » que la raison utilise pour parvenir à son but.  Pour les matérialistes (Marx et Engels) l’histoire repose sur une base matérielle (l’infra-structure économique) qui la détermine en premier lieu.  Les approches hégelienne et marxiste sont  « dialectiques »,  ce qui signifie qu’elles reposent sur l’idée que le « négatif » (les luttes, l’opposition de intérêts, les conflits et leur résolution, la violence en général) joue un rôle majeur dans le progrès historique.

Le  sens de l’histoire

Aujourd’hui les philosophes et les historiens ont tendance à se méfier de ces  approches systématiques de l’histoire. Marx et Hegel, tout comme Auguste Comte (1798-1857), ont pensé en effet que l’histoire avançait  nécessairement vers un but, un accomplissement, ce qu’ils appellent une « fin »  – le savoir partagé, le communisme ou la paix. Aujourd’hui un tel optimisme n’est plus de mise. Pourtant, il est difficile de renoncer à l’idée de sens de l’histoire. Kant pensait que le fait de croire dans le progrès (évolution globale vers un mieux) était stimulant et constituait même pour chacun d’entre nous un devoir moral. Même si l’homme est libre et si l’histoire est imprévisible, la connaissance historique  nous permet tout de même d’anticiper partiellement l’avenir et d’adopter  une orientation positive fondée sur une meilleure intelligence de notre passé

Sujets de dissertation : Le passé peut-il faire l’objet d’une connaissance historique ? Le rôle de l’historien est-il de juger ? Un peuple est-il responsable de son histoire ?

Liens : Histoire et progrès (cours)

Textes de Marx et Engels (histoire et lutte des classes), textes de Hegel de Kant sur le progrès et de Comte sur le positivisme

autrui

Chats siamois jumeaux

Différence : (Etym  latin differentia : « différence ») 1) Sens ordinaire : toute relation entre deux ou plusieurs termes impliquant  leur séparation (ils ne se confondent pas) et leur distinction qualitative  (ils ne sont pas identiques en tous points)  2) Sens philosophique : la différence d’un être ou d’une chose est le caractère ou l’ensemble des caractères qui lui sont propres et la distinguent de toute autre.

Altérité : (Etym :  latin alter : « autre ») : 1) Caractère de ce qui est autre, par opposition à l’identité 2) Qualité essentielle de l’autre en tant qu’autre : on peut parler de l’altérité des choses en général par rapport à la conscience  ou  bien de l’altérité plus spécifique des autres hommes, d’un autre homme par rapport au moi.

Racisme : (Etym : formé à partir de 1902 à partir du mot « race »). Sens courant : 1) Comportement caractérisé par le rejet et le mépris des hommes et des cultures qui nous paraissent incompatibles avec notre façon d’être et de penser.  2) Théorie selon laquelle il existe une hiérarchie entre les races, ce qui fonde le droit de la race supérieure de dominer les races de moindre valeur.     Philosophie et  histoire : Pour P. A. Taguieff  (La force du préjugé) il n’y a pas un racisme, mais deux. Le racisme traditionnel, inégalitaire, justifie la domination   des races inférieures par les races supérieures au nom des intérêts de tous  à être bien gouvernés par les hommes les plus éclairés  et les plus savants.  Pour le racisme « différentialiste »- qui insiste sur la différence de l’autre-  au contraire le représentant de l’autre culture n’est ni assimilable ni rééducable ni « infériorisable ».   Ainsi les nazis n’ont pas voulu dominer les juifs, les homosexuels et les handicapés. Logiquement, ils ne pouvaient que les exterminer. Le racisme « différentialiste » est fondé sur la peur du mélange et de l’indifférentiation.

Transcendance :  (etym : latin transcendere, « passer au-delà » « surpasser » .  Sens ordinaire : caractère de ce qui échappe, de ce qui est supérieur et renvoie au «  tout autre »   Philosophie : 1)  Philosophie classique: caractère de ce qui est au-delà de toute expérience possible. La transcendance chez Pascal ou Kant renvoie à sa source supposée, c’est-à-dire un être séparé du monde et infiniment supérieur ( « Quelque chose en l’homme passe l’homme » Pascal) 2) Phénoménologie : capacité  qu’à  la conscience de renvoyer à autre chose qu’elle-même, qu’elle ne contient pas, mais dont elle témoigne. La conscience de la temporalité est l’une des expressions de cette transcendance.  Pour Levinas, c’est le visage qui incarne et prouve la transcendance dont tout homme est le représentant et la preuve concrète.

Je fais une pause

Il y a des difficultés techniques en ce moment avec cette plateforme. Répondre à vos questions me prend un temps fou! Je vais donc cesser quelque temps. De plus , vous me demandez souvent de faire votre travail. Ce n’est pas la raison d’ être de ce blog. 

 Pour l’aide à la dissertations voyez :

Devoirs.fr, ici :

 http://209.85.229.132/search?q=cache:k9U8cWnjWrkJ:devoirs.fr/+devoirs.fr&cd=1&hl=fr&ct=clnk&gl=fr

 Si vous avez des questions d’ordre philosophique (et pas seulement :  j’ai un devoir pour demain, que faut-il faire?),  vous me trouverez sans difficulté sur l’un de mes autres blogs :

http://hansen-love.blogspot.com/

ou

http://www.hansen-love.com/

 A bientôt!

Le désir

Le désir l'amour Klim

 

Le langage courant confond le désir, le besoin et la volonté. Il faut pourtant bien les distinguer.
 Le besoin relève de la nature ; comme nous, les animaux ont des besoins, qu’ils doivent satisfaire pour vivre. La volonté est un pouvoir positif  de décision qui est en général considéré comme une qualité. Au contraire, le désir est une notion foncièrement contradictoire. Le désir est un aspect de notre condition qui peut être jugé fâcheux. Il est aussi pourtant à la source de notre grandeur.  

Démesure du désir

Le désir –du latin desiderare : regretter l’absence de quelqu’un ou de quelque chose – peut être défini comme une tendance, un effort, vers quelque chose, accompagné ( e)  de la conscience de cette inclination. Il se distingue donc du besoin pour le meilleur et pour le pire. Pour le meilleur, car le désir est une motivation puissante pour toutes les actions et entreprises humaines : « Rien de grand ne s’est accompli dans le monde sans passion » (Hegel). Et pour le pire, car le désir loin de s’éteindre lorsqu’il atteint son objet, s’aiguise et se reporte sur un autre objet. C’est pourquoi Socrate compare dans le Gorgias l’homme  aux Danaïdes, condamnées à remplir un tonneau percé jusqu’à la fin des temps.

 

Désir et  reconnaissance

 Le désir peut être considéré comme l’essence de l’homme en tant que puissance d’affirmation et de création (Spinoza, Ethique, 3).  Le désir est pourtant  «  négatif » en ce sens  qu’il est  volontiers agressif, voire destructeur, lorsqu’il rencontre des obstacles. L’autre, ou le désir de l’autre,  sera le plus souvent cet obstacle. Dans ce que l’on nomme «  la dialectique du maître et de l’esclave », Hegel explique que tout homme recherche la confirmation de sa valeur en tentant d’imposer son point de vue à  l’autre. Et cette « lutte pour la reconnaissance » peut aller jusqu’au conflit violent. « Toute conscience, écrit-il, poursuit la mort de l’autre ». Le vainqueur est le maître, le vaincu, l’esclave.

 

Positivité du désir ?

 Les anciens ont bien souvent condamné le désir au nom du bonheur «  Quant au désir, pour le moment, renonces-y totalement : car si tu désires l’une des choses qui ne dépendent pas de nous, tu ne seras pas heureux, c’est inévitable » Epictète, Manuel . A la suite de  Descartes et de Spinoza , les modernes ont davantage insisté sur la positivité du désir. Désirer, bien sûr, c’est prendre des risques. Mais si nos passions, qui sont les formes exacerbées de nos désirs, peuvent être dangereuses car elles nous exposent aux frustrations et au chagrin, elles ont en même temps notre force et nous honorent. Que vaudrait la vie sans le désir ? Pour Niezsche,  il ne faut pas renoncer à nos désirs. Il faut tenter de les embellir, de les magnifier, ou encore de les « sublimer ».

 

Sujets de dissertation : Sait-on ce qu’on désire ? Suis-je l’esclave de mes désirs ? Faut-il renoncer à ses désirs pour être libres ?

 Liens :  Autrui Hegel la dialectique du maître et de l’esclave  Rousseau : l’illusion cesse.. Epicure : accomplir tous ses désirs ; Platon le désir amoureux.

L’inconscient

 

 L'inconscient the evil dead

Lorsque Freud (1856-1939), à la fin du 19 ième siècle,  présente à ses pairs  sa théorie de l’inconscient, il  rencontre une très vive résistance. La notion d’inconscient est apparue   scandaleuse pour deux raisons ; d’une part, parce qu’elle semblait remettre en cause la liberté de l’homme et la maîtrise qu’il était supposé avoir sur lui-même. D’autre part, parce que la région dite «  inconsciente » de notre vie psychique  semble faire la part belle à la sexualité.

 Prémisses de la notion d’inconscient 

Ni le sens commun ni les philosophes n’ont attendu Freud pour découvrir qu’une partie de notre propre psychisme nous échappe parfois. Un homme qui tombe dans le coma est inconscient, un dangereux chauffard l’est aussi,  en ce sens qu’il ne sait plus ce qu’il fait. Chez Platon, on trouve l’idée  de souvenirs inconscients de la vérité contemplée dans une autre vie (théorie de la réminiscence). Leibniz ( 1646-1716) a formulé la thèse des « petites perceptions » inconscientes : « Il y a mille marques qui font juger qu’il y a à tout moment une infinité de perceptions en nous… c’est-à-dire des changements  en l’âme même dont nous ne nous apercevons pas » (Essai sur l’entendement humain). La notion d’inconscient est ici en place, mais elle n’est pas encore conceptualisée ni bien définie.

 La théorie de Freud

 L’inconscient chez Freud devient un substantif. Il désigne une partie de nous-même, ou plus exactement  une zone de notre esprit où sont stockés une foule de souvenirs, de fantasmes, de désirs inavouables, que nous ne pouvons pas atteindre car une résistance en nous s’y oppose. L’inconscient est donc une sorte de sous-sol de notre vie psychique  où nous plaçons tout ce qui heurte notre conscience. Le refoulement est la notion clef de la théorie freudienne. Le psychisme comporte trois « instances » : le « ça » qui englobe l’ensemble de nos pulsions, le « sur-moi », qui est en nous le représentant de l’exigence morale, et le « moi »  qui est le médiateur, autrement dit cette mini-personne en nous-même qui s’efforce de réconcilier les différents points de vue.

Les objections

 Les contemporains de Freud ont estimé que sa théorie était fantaisiste et non scientifique car elle ne reposait sur aucune donnée observable : par définition, l’inconscient est hors d’atteinte. Freud a répondu que son hypothèse était pourtant justifiée car l’inconscient se manifeste de façon indirecte, comme dans les rêves,  les actes manqués mais aussi bien sûr la maladie mentale. De plus la théorie psychanalytique a porté ses fruits en apportant un soulagement aux patients. Aujourd’hui, le critiques se sont déplacées. Elles tournent surtout autour de la question de la responsabilité. Si un autre moi me gouverne que je ne connais pas, comment puis-je encore me croire libre ? Telle est la principale objection adressée à Freud par  le philosophe Alain.

 Sujets de dissertation : Puis-je invoquer l’inconscient sans ruiner la morale ? Sur quelles raisons pouvons-nous nous appuyer pour admettre l’existence de l’inconscient ? Peut-on à la fois admettre la liberté de l’homme et supposer l’existence de  l’inconscient.
 Liens : textes de  Freud, Légitimité de l’hypothèse de l’inconscient et première topique et schéma de Freud,  de Leibniz : l’inconscient et de Bergson , Une immense danse macabre, Texte de Alain

La conscience

Schiele auto-portraitLa conscience :

On admet généralement que la conscience est   le  propre de  l’être humain  au même titre que la raison. Pourtant, la conscience est une forme de présence au monde qui semble commune à certains  animaux et aux être humains. On distinguera donc, en toute rigueur,

la conscience spontanée, commune aux animaux supérieurs et à  l’homme, et la conscience réfléchie, propres aux êtres humains. Celle-ci serait plus précisément la capacité de se mettre à distance de soi-même pour s’observer, ou encore de faire retour sur nos propres pensées ou nos propres actions non seulement pour les analyser mais aussi pour les juger. On dira d’un homme dénué de scrupule indifférent aux autres, cynique ou cruel qu’il parait dénué de conscience, autrement dit dépourvu de sens moral.

 

 La conscience est le propre de l’homme

 L’étymologie du mot, littéralement « savoir (scientia)  avec (cum)  » suggère l’idée d’un accompagnement. Par la conscience, le monde m’accompagne, ou plus exactement  la représentation du monde m’accompagne. Mais en même temps, la conscience est ce qui me place en position de sujet, seul, parmi tous les êtres vivants, à posséder  le sentiment de mon existence mais aussi  la crainte de la mort. De Socrate ( « Connais-toi toi-même ») à  Kant, les philosophes classiques accordent donc à la conscience une place centrale  dans leur tentative de définition de l’homme. « Qu’est-ce donc que je suis ? Une chose qui pense. Qu’est ce que cela ? C’est bien une chose qui doute, qui connaît,qui affirme,qui nie, qui veut, qui ne veut pas,qui imagine aussi et qui sent » (Méditations Métaphysiques 2) Le philosophe Pascal récuse pour sa part l’idée de conscience-substance («  une chose » pensante) et lui préfère la métaphore du roseau qui évoque non seulement la grandeur de l’homme mais aussi sa fragilité : « La grandeur de l’homme est grande en ce qu’il se connaît misérable. Un arbre ne se connaît pas misérable. C’est donc être misérable que se connaître misérable ; mais c’est être grand que de connaître qu’on est misérable.
Pensée fait la grandeur de l’homme[…]

L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature. Mais c’est un roseau pensant »

 

Toute conscience est une conscience morale

 La conscience serait donc  la capacité de se séparer de soi-même pour se  « représenter », et pour s’interroger sur le sens de notre existence. Elle  constitue  notre dignité mais aussi notre douleur. Tout d’abord la conscience  implique la responsabilité de nos actes. Je suis l’auteur de mes actes ; je le sais, aussi   je ne peux m’en désolidariser,  car j’ai conscience de mon unité malgré la diversité  de mes pensées ou de mes sentiments :  le fait de dire « Je » en témoigne, et ceci dans toutes les langues ou cultures, même si ce mot n’existe pas séparément : « Posséder le « Je » dans sa représentation : ce pouvoir, écrit Kant, élève infiniment l’homme au-dessus de tous les êtres vivants sur la terre. Par là il est une personne, et grâce à l’unité de la conscience dans tous les changements qui peuvent survenir, il est une seule et même personne… » (Anthropologie du point de vue pragmatique). Mais cette aptitude à nous reconnaître dans nos propres actes, qui n’est pas dissociable de la liberté, est aussi source de souffrance. Puisque je suis conscient de ce que je fais – dès lors que je ne suis pas jugé aliéné – je dois en répondre devant  les tribunaux humains mais aussi devant ma propre conscience,  à laquelle je ne peux échapper et qui ne prononce jamais de « relaxe » définitive. Un homme sans conscience ne serait plus un homme. Or il arrive que notre conscience nous tourmente malgré nous, en nous reprochant des actes ou des pensées que nous n’avons pas voulus. Tel est le ressort des grandes tragédies antiques.

 

La communication des consciences

 La philosophie classique a eu tendance à considérer la conscience comme auto-suffisante, voire seule au monde, à la suite de  Descartes a imaginé que la certitude de soi était antérieure à  la connaissance du monde  et plus ferme qu’elle : «  Or maintenant je sais avec certitude que je suis, et en même temps, qu’il se peut que toutes ces images et généralement que tout ce qui est rapporté à la nature du corps ne soient rien que des rêves ».  Aujourd’hui on ne considère plus la conscience comme une sorte de bulle ou de ballon, susceptible de se gonfler au point d’accueillir le monde entier pour le représenter ou l’exprimer .A la suite notamment de Hegel, puis de Husserl, la philosophie moderne insiste sur le caractère ouvert de la conscience : « toute conscience est conscience de quelque chose ». Les phénoménologues (Husserl, Merleau-Ponty) nomment  intentionnalité cette structure d’ouverture de la conscience : nous avons besoin de l’autre pour accéder à nous-mêmes , paradoxalement. « L’autre est le médiateur entre moi et moi-même » (Sartre). La psychanalyse, enfin, confirme ce point de vue. La conscience n’est pas entièrement transparente à elle-même, ni maîtresse d’elle-même. Pour nous comprendre nous même, pour nous représenter et nous construire, nous avons besoin des autres, du point de vue da l’autre. La conscience n’est donc pas le miroir de tout l’univers, mais plutôt un miroir de miroirs qui répercute sans fin des images entrelacées de nous-même, des nos proches et  de l’univers dans son ensemble. On appelle « intersubjectivité » la communication immédiate et intuitive des consciences entre elles.

 

 

 

Le sujets de dissertation les plus courants : Que peut-on savoir de soi ? La conscience de soi suppose-t-elle autrui ? Toute prise de conscience est-elle libératrice ? La conscience de ce que nous sommes fait-elle obstacle au bonheur ?

L’explication de texte de philosophie (méthode)

 

La méthode élémentaire  de l’explication de texte de philosophie au bac

 

Première lecture :

 Tout d’abord, vous vous assurez que vous comprenez convenablement le texte, c’est-à-dire que vous êtes capable d’en dégager la thèse  sans aucun doute possible (sinon vous ne prenez pas ce sujet). Avec deux « stabilo », soulignez (non pas n’importe quoi)  mais seulement :1) le ou les mots clés, trois ou quatre occurrences maximum 2 ) les mot-logiques qui indiquent les étapes du raisonnement (par exemple : car, donc, mais, ainsi..)

Au brouillon :

– Dégagez le thème  de l’extrait et  la question (soulevée à laquelle il répond) et, pour finir, la thèse (réponse à la question soulevée).

– Dégagez la structure logique : par exemple : Thèse –Arguments- Objections – Conclusion . Ou encore : Opinion commune- Réfutation  (série d’arguments) – Illustration- Thèse et Conclusion.

– Formulez votre problématique : la question  (décomposée en 2 ou 3 points) soulevée puis tranchée ou traitée  par l’auteur.

-Indiquez deux pistes de réflexion pour votre partie « critique » : Par exemple : 1) caractère paradoxal de la thèse 2) Impact dans l’histoire des idées (Nota bene : « critiquer » ne signifie pas « invalider »)

 Rédaction :

-Introduction . Ne résumez pas le texte, n’annoncez pas votre propos. Procédez en deux temps : 1) Ancrage du texte dans un thème 2) Enoncé de votre problématique.

-Explication proprement dite : en deux ou trois parties, suivant le plan du texte. Phrase après phrase. Les affirmations les plus abstraites doivent être illustrées. Les difficultés doivent être explicitées et non pas passées sous silence. Les idées les plus fortes (difficiles, originales) doivent être mises en relief. Ainsi, en tant que lecteur, vous témoignez de votre ETONNEMENT (philosopher, c’est savoir s’étonner).

Partie critique : en deux temps :  par exemple : 1) Objections 2) Réponse aux objections (c’est une possibilité parmi d’autres).

 

 L’ESSENTIEL A RETENIR

-Manifester un réel esprit CRITIQUE ; ne pas adhérer purement et simplement au propos de l’auteur. (paraphrase). Au contraire, il faut interroger le texte,  questionner les idées et le mode d’argumentation de  l’auteur.

– Ne pas reprocher à l’auteur de ne pas avoir pensé à ceci ou à cela. Vous ne connaissez pas l’ensemble de son œuvre

– Ne pas plaquer des connaissances extérieures et superflues.

– Ne pas  supposer que la thèse est forcément dans la première phrase

– Faire preuve de pédagogie. Ne pas embrouiller le lecteur, au contraire tenter de clarifier le texte, comme si vous l’expliquiez à quelqu’un qui ne le comprend pas.

Etude d’un texte de Kant

Voici la suite de l’article intitulé « Réfléchir sur les bonnes et mauvaises actions à partir d’un texte de Kant » où l’on étudie le texte du philosophe.
– Si tu crois que ça peut m’aider pour le comprendre, dit la jeune fille en acceptant ma proposition.
– Alors dégage de cet extrait, s’il te plaît, les thèmes principaux.
– Il est question du mensonge et de la vérité, répondit Julie.
– C’est pas faux, mais je ne crois pas que ce soient les thèmes principaux. Regarde mieux.
– Kant parle de ce qui est bien et mal.
– Exact, les thèmes sont la morale, le devoir, le bien et le mal, et en exemple est abordé le fait du mensonge. Dis moi à présent quelle est la thèse de ce texte, qu’est-ce que l’auteur soutient comme idée ?
– Comme ça direct, je ne vois pas bien, se plaignit Julie.
– Que comprends-tu ?
– Que parfois on peut mentir, mais que c’est pas toujours bien…
– Mouais… on est loin du compte…
– Tu vois qu’il est trop dur encore ton texte !
– Voyons quelques passages essentiels! Si je mens ou fais une fausse promesse, il y a deux façons de considérer mon geste, lesquelles ?
– C’est prudent ou bien c’est un devoir moral ?
– Voilà . La prudence renvoie à l’idée d’une sagesse pratique. Il peut être pratique, utile donc, de mentir sans que ce soit moral. (Utile tant que les autres ne mentent pas à leur tour ce qui peut m’être nuisible) Quant au devoir moral et au bien moral, ils se reconnaissent à quoi ?
– On fait le bien…
– Mais quel bien ? Mentir peut être un bien ou même « faire » du bien. Et pourtant aux yeux de la morale, c’est mal. Pourquoi ? Kant propose un critère ici pour reconnaître si mon action est bonne, et même avant toute action si mon intention est bonne elle-même. Lequel ?
– Je ne vois pas… se découragea Julie.
– Cherche, un critère comme une règle à suivre dans le texte.
– C’est quand il parle de « maxime universelle » ?
– Exact ! C’est quoi alors cette histoire de « maxime universelle » de mon action ?
– Déjà c’est quoi une « maxime » ?
– C’est la règle de ma conduite.
– Et universelle ?
– Qui serait la même pour tout le monde. Alors ?
– Je ne sais pas comment dire les choses.
– Eh bien Kant propose de rendre universelle mon intention. Puis-je vouloir que ma maxime soit étendue au-delà de mon projet, à tout le monde ?
– C’est ça son critère pour reconnaître le bien et le mal ?
– Schématiquement oui…
– Et donc je vais savoir si j’ai fait quelque chose de mal en mentant à ma meilleure amie alors ?
– Reprenons encore un instant notre étude s’il te plaît ; avant d’en tirer trop rapidement des conclusions. Si je mens par intérêt c’est très utile sur le moment, mais puis-je vouloir que cela devienne une loi universelle, puis-je accepter de justifier l’acte de mentir, sans remettre en question la valeur des intentions, des actes, des échanges, entre les êtres humains ? Non, je ne peux pas… Autrement dit je ne peux jamais justifier le mensonge même pour un cas particulier, sinon je le légitime pour toute situation. Accepter le mensonge une fois, revient à l‘accepter en toute occasion, cela n’est pas tenable.
– Et ainsi s’il n’y a pas d’exception à la règle, j’ai fait quelque chose de mal.
– Effectivement, Julie, d’après la morale Kantienne, tu n’as pas agi selon ton devoir qui était de respecter ton engagement.
– Je le savais! se lamenta Julie.
– Cela dit je voudrais attirer ton attention sur un dernier point. Kant parle lui-même d’une promesse que l’on fait avec « l’intention de ne pas la tenir ». Ce n’était pas ton cas ?
– Non… enfin j’aurais dû m’en douter quand même.
– Julie, une dernière chose : l’universalisation relève d’un travail de la raison. Cette morale est une morale de la rationalité. Elle suppose que l’on fasse un usage clairvoyant de la liberté se pliant aux exigences de notre raison. Cette faculté se construit à travers l’éducation, l’apprentissage, l’expérience. Pour Kant, pouvoir faire un usage éclairé de la rationalité, qu’il s’agisse d’un peuple ou d’un individu, c’est entrer dans l’âge de la majorité. Toi Julie, sans vouloir te vexer, tu n’y es peut-être pas encore! Tu ne te connais pas encore tout à fait! On n’attend pas d’un être qui ne possède pas pleinement sa faculté de liberté qu’il ne soit pas aveuglé par des penchants naturels, comme c’est encore le cas des enfants qui ne sont pas « responsables » au sens moral, ni au sens juridique d’ailleurs.
Julie hésitait entre soulagement de voir sa culpabilité levée et la déception de n’être considérée encore que comme une « mineure » qui a des excuses.
– Considérons donc, concluais-je, que tu n’as pas commis de faute morale, du fait que ta raison n’est pas encore entièrement acquise.
– J’attendrais donc de grandir et de me connaître mieux avant de m’engager dans une promesse la prochaine fois, décida avec dépit Julie.
– Je crois que ce serait plus sage…

A suivre

Réfléchir sur les bonnes et mauvaises actions à partir d’un texte de Kant

Julie se taisait. J’attendais qu’elle me lâche enfin un mot, sans doute une question, le sujet d’une première dissertation qu’elle n’arrivait pas à traiter. Mais rien ne venait… Non seulement Julie gardait toujours le silence, mais je me rendis compte au bout d’un moment qu’elle baissait même les yeux et jouait nerveusement avec ses doigts, ses bagues. Visiblement, pour dire ce qu’elle avait en tête, il fallait d’abord surmonter une difficulté bien grande. J’allais jeter dans la bataille de son trouble un petit mot d’encouragement quand elle se leva brutalement.
– Excuse-moi, Katy je me suis trompée. Je ne sais plus pourquoi je suis venue d’ailleurs.
La prenant aux épaules, je la fis s’asseoir. J’étais toujours persuadée qu’elle n’osait pas me demander un petit coup de main pour un devoir.
– Si tu es là, c’est bien parce que tu as une question à me soumettre, repris-je pour lui donner la force d’avancer…
– Oui, mais je me rends compte que j’ai honte de ce que j’ai à dire…
– A ce point, c’est peut-être parce que je ne suis pas la bonne personne, en ce cas.
– Si, à part toi je ne vois pas à qui je pourrai en parler !
– Bon j’y suis ! concluais-je feignant découvrir les motifs de sa visite… Tu as une dissertation à faire et tu ne sais pas comment t’y prendre ?
– Euh oui j’ai une dissert à faire… Mais ça va à peu près… Je suis là pour autre chose.
– Ah bon ? répondis-je un peu interdite. Julie manifestait des signes de gêne de plus en plus évidents, de fuite, même. Eh bien, vas-y, lâche toi, recommençais-je, comme si j’étais ta meilleure amie !
– Non ! Justement, je ne peux pas en parler à ma meilleure amie !
– Je t’écoute.
Je ne doutais plus alors un seul instant qu’il devait s’agir d’une peine de coeur. Et si c’était bien le cas, elle ne me semblerait pas aussi grave qu’à Julie, et ainsi je lui donnerai les moyens de considérer la situation avec plus de distance qu’elle ne semblait pouvoir le faire seule.
– Eh bien voilà , avoua Julie après avoir pris une longue respiration, j’ai menti à ma meilleure amie !
Je ne pus retenir un « Aïe ! » bien mal à propos. Sans se démonter pourtant Julie continua son mea culpa.
– Je pense que c’est vraiment mal ce que j’ai fait. Je m’en veux terriblement et en même temps… Je ne regrette pas, parce que je ne pouvais pas faire autrement…
– C’est compliqué ton histoire, ajoutais-je dans une demi grimace. En tout cas je comprends que tu sois dans l’embarras. Mentir en général n’est pas un acte anodin, et a fortiori à sa meilleure amie, c’est un geste grave. A moins que ne tu l’aies fait pour protéger ton amie, pour son bien ?
– Ben pas trop, là , tu vois… marmonna piteusement Julie.
– Alors explique plus ce qu’il s’est passé, que je puisse juger.
– En fait avec ma copine Camille on regardait depuis le début de l’année Tristan qui est vraiment… comment dire… enfin… il est très gentil, mignon, quoi !
Julie était devenue rouge comme une écrevisse en disant cela. Pour l’encourager je renchéris son propos par un « tu en as de la chance ! » des plus maladroits.
– Arrête, poursuivit Julie! C’est sérieux! Donc Camille et Tristan sont devenus enfin tu vois… très copains…
-Oui, tu veux dire qu’ils sortent ensemble ?
– Voià ! Du coup Camille m’a demandé d’arrêter de le calculer. Seulement moi, ça été plus fort que tout, je faisais que penser à Tristan tout le temps. Quand je le voyais j’étais bien et quand je ne le voyais plus je ne pensais qu’à être le lendemain pour le revoir.
– Bref tu étais un peu amoureuse, ce qui est très naturel.
– Mais le problème c’est que Tristan l’a remarqué, et mieux ou pire il m’en a parlé, et je lui ai tout dit, enfin pas vraiment d’ailleurs mais il a compris, et là il m’a demandé si je voulais sortir avec lui !
– Et bien sûr tu as dit non ? interrogeais-je un peu narquoise.
– Et bien sûr j’ai dit oui! Mais je m’en veux car j’ai pas réfléchi . De toute façon ça a été plus fort que moi. Tu aurais fait quoi à ma place ?
– Justement, je ne suis pas à TA place, Julie ! Mais dis-moi, vous avez juste parler de sortir ensemble ou bien vous avez… C’est fait ? C’est ton petit ami ?
– Non ! Si ! Si ! en fait… On s’est embrassé.
– Ah quand même !
– C’est mal hein ce que j’ai fait, n’est-ce pas ? questionna fébrilement Julie.
Bien que je ne fût pas certaine qu’un tel malentendu d’adolescents vaille la peine qu’on réveillât un casuiste (un casuiste fait de la casuistique qui est la partie de la théologie morale, qui s’occupe des cas de conscience), je me concentrais sur la réponse que je pouvais apporter à Julie, laquelle s’impatientant reformula sa demande.
– C’est mal, dis-moi ?
– Si quelque chose de mal a été commis, tu n’es pas seule en cause en tous les cas. Il y a Tristan qui est coupable d’avoir trompé la confiance de Camille. Et peut-être Camille aussi est-elle en tort, car elle a exigé une promesse de toi sans tenir compte des sentiments que tu étais susceptible d’éprouver.
– Mais quand même j’ai promis !!
– Tu ne prends pas le mensonge ni le désengagement à la légère, c’est tout à ton honneur. Pourtant je te propose de mettre un peu de côté ce que tu ressens pour étudier les concepts en jeu, prendre du recul par rapport à cet épisode, et trouver quelle conclusion on pourra en tirer concernant le mal que tu as fait.
– Si tu sais comment, je suis d’accord.
– Nous allons lire ce texte de Kant sur le bien et le devoir moral, puis nous l’appliquerons à notre situation présente après discussion.

Kant, Fondements de la Métaphysique des Moeurs, (1785) trad. Victor Delbos, Ed. Delagrave, p.103

« Soit par exemple, la question suivante : ne puis-je si je suis dans l’embarras, faire une promesse avec l’intention de ne pas la tenir ? Je distingue ici aisément entre les sens que peut avoir la question demande-t-on s’il est prudent ou s’il est conforme au devoir de faire une fausse promesse ? Cela peut être sans doute prudent plus d’une fois. A la vérité, je vois bien que ce n’est pas assez de me tirer, grâce à un subterfuge, d’un embarras actuel, qu’il me faut encore bien considérer si de ce mensonge ne peut pas résulter pour moi dans l’avenir un désagrément bien plus grand que tous ceux donc je me délivre pour l’instant ; et comme, en dépit de toute ma prétendue finesse, les conséquences ne sont pas si aisées à prévoir que le fait d’avoir une fois perdu la confiance d’autrui ne puisse m’être bien plus préjudiciable que tout le mal que je songe en ce moment à éviter, n’est-ce pas agir avec plus de prudence que de se conduire ici d’après une maxime universelle et de se faire une habitude de ne rien promettre qu’avec l’intention de le tenir ? Mais il n’en est pas moins évident qu’une telle maxime n’en est pas moins toujours uniquement fondée sur les conséquences à craindre. Or c’est pourtant tout autre chose que d’être sincère par devoir, et de l’être par crainte des conséquences désavantageuses. […] Après tout, en ce qui concerne la réponse à cette question, si une promesse trompeuse est conforme au devoir, le moyen de m’instruire le plus rapide, tout en étant infaillible c’est de me demander à moi-même : accepterais-je bien avec satisfaction que ma maxime (de me tirer d’embarras par une fausse promesse) dût valoir comme une loi universelle (aussi bien pour moi que pour les autres?) Et pourrais-je bien me dire : tout homme peut faire une fausse promesse quand il se trouve dans l’embarras et qu’il n’a pas d’autre moyen d’en sortir ? Je m’aperçois bientôt ainsi que si je peux bien vouloir le mensonge, je ne peux en aucun manière vouloir une loi universelle qui commanderait de mentir ; et en effet, selon une telle loi, il n’y aurait plus à proprement parler de promesse, car il serait vain de déclarer ma volonté concernant mes actions futures à d’autres hommes qui ne croiraient point à cette déclaration ou qui, s’ils y ajoutaient foi étourdiment, me payeraient exactement de la même monnaie : de telle sorte que ma maxime, du moment qu’elle serait érigée en loi universelle, se détruirait elle-même nécessairement. »

– Une fois de plus, il est compliqué ton texte ! protesta Julie.
– Écoute si tu préfères, on peut en faire l’analyse comme dans une étude de texte en classe, suggérais-je.

A suivre…

buy windows 11 pro test ediyorum