La ville est un rêve : histoire d’un livre

La couverture en bilangue proposée

Par sérendipité, je tombe sur cette page d’un site de financement participatif bien connu. Une dessinatrice et écrivaine japonaise propose un livre sur la qualité de la ville, entre Tokyo et Paris, en collaboration avec un auteur français, Jean-Philippe Lheureux.

Voilà une thématique attirante, et en deux clic je tombe sur l’offre de l’ouvrage sur un site de vente par correspondante (mais pas le plus connu). Paru en octobre 2013, ce livre que je ne connaissais pas va m’être livré dans la semaine, si toutefois cette livraison est jugée « de première nécessité ». Mais s’agissant de la ville et du séminaire, pourquoi cet ouvrage ne pourrait-il pas l’être ?

Nos villes doivent continuer de vivre. Les injonctions au confinement bousculent nos représentations de la ville et nos rapports humains. La crise sanitaire s’annonce longue et nous devons trouver en nous les ressorts d’une humanité à reconsidérer et à reconstruire. Comment allons-nous nous saluer dorénavant ? Je pense que dans quelques semaines nous verrons arriver des livres sur cette guerre au Coronavirus. Et ce thème de la ville rêvée est tout à fait pertinent dans ses contradictions avec la conjoncture.

 

Page principale de la demande de participation financière et son résultat : 140% !

Pour le moment, je présente juste le projet issu du site de financement participatif. En allant se balader sur la page, on peut avoir une assez bonne idée de ce que l’on va trouver. Mais déjà, le rouge a cédé sa place au noir dans l’encrage du titre. Ce qui m’intéresse dans ce livre, c’est la rencontre entre deux cultures, deux sexes, et deux manière de voir le monde. Deux villes, deux points de vues, deux écritures, deux langages…

Version proposée à la vente

Les espoirs de financement ont été dépassés et l’ouvrage a pu voir le jour. Outre le fait de permettre de faire découvrir une illustratrice japonaise, je compte m’inspirer du concept pour m’aider à réfléchir sur le support illustration-texte, comme une forme possible de langage. J’attends aussi de lire les images et le texte pour m’approcher de cette proposition, et ensuite la rediffuser sur ce blog pédagogique.

J’attends donc la livraison…

 

L’économie du pigeonnier a-t-elle encore un sens aujourd’hui ?

Carte d’implantation des pigeonniers (extrait), d’après Raymond Laurans

par Thomas Audar

C’est à partir de cette problématique qui a évoluée de nombreuses fois que j’ai décidé de mener mes recherches sur les pigeonniers et notamment sur les pigeonniers du Tarn-et-Garonne qui semblent représentatifs pour évoquer la question de l’économie dans le département.

Réparties en grand nombre dans le sud, ces constructions font partie intégrante du paysage et forment le petit patrimoine rural que l’on connait bien. Au cours de mes recherches, il apparait que la plupart d’entre elles ont connu plusieurs phases de leur vie avant d’être aujourd’hui réaménagées et tirées d’affaire de l’oubli et du délaissement. Je me suis donc questionné sur ces différentes phases historiques, périodes pendant lesquelles le pigeonnier a joué un rôle à la fois utilitaire et symbolique.

Parcourir l’histoire m’a fait découvrir les richesses de ce petit patrimoine ne serait-ce que dans ses typologies. En effet, le Tarn-et-Garonne concentre non seulement un nombre important de pigeonniers, mais leurs particularités font que chacun d’eux possède des différences dans leurs formes. Certains sont rattachés à un corps d’habitations, la ferme, tandis que d’autres y sont vraiment éloignés. Il est d’ailleurs aujourd’hui parfois difficile de savoir à quelle ferme a appartenu tel ou tel pigeonnier au regard de sa distance vis-à-vis d’elle fortement variable. De plus, certaines fermes ont disparu et seul le pigeonnier présente encore un signe de vie.

Revue La Vie à la Campagne, 1905

 

Si des pigeonniers se retrouvent perdus en plein milieu des champs, c’est pour répondre à la volonté de ses hôtes de rester dans des endroits paisibles et Alfred Gritton préconisait de les « placer toujours sur un terrain sec et salubre, car, si les pigeons sont peu sensibles aux modifications de température, ils redoutent beaucoup l’humidité ». (Alfred Gritton, Revue La Vie à la Campagne, 1909-1926)

Exemple de randières, © Thomas Audar 2020

S’il apparait que le pigeonnier est synonyme de diversité, tous possèdent des attributs communs tels que les trous d’envols ou les randières qui respectivement limitent l’intrusion d’autres oiseaux plus gros dans le pigeonnier et qui évitent l’ascension de prédateurs terrestres dans la caisse (volière plus communément). Intéressons-nous toutefois au Pied-de-Mulet, ce pigeonnier méridional qui tire son nom de la forme de sa toiture à 2 pans inclinés de la même manière et dont sa base rectangulaire mesure souvent 4×5 m ou 6×5 m de côtés. Construit entre 1820 et 1850, ce pigeonnier a rapidement connu ses années de gloire pour ses qualités intrinsèques : économique à la construction, capacité importante de boulins (cavités à l’intérieur du pigeonnier pour nicher les pigeons), forme banale, mais efficace, car mono-orientée à l’encontre des vents dominants, rez-de-chaussée de 20 ou 30m2 pouvant servir de lieu de stockage … Il apparaît ainsi comme une construction vernaculaire tout à fait pragmatique, nécessaire à la vie paysanne. En effet, si ce petit patrimoine s’est aussi bien répandu sur nos terres c’est pour une raison simple. Droits jusqu’alors réservés aux seigneurs, ce n’est qu’à partir de 1789 avec la fin des privilèges que tout à chacun pouvait bâtir son propre pigeonnier.

Le premier avantage de ce dernier est de fournir de l’engrais. En effet, la colombine, matière fécale produite par les pigeons « donne un engrais de grande chaleur, préférable à tous les autres fumiers pour améliorer les sols argileux froids » comme il était inscrit dans Corps complet d’agriculture de M.Hale. Les paysans qui s’en servaient pour leurs cultures y voyaient un intérêt économique particulièrement intéressant. C’était un moyen de fournir de l’engrais sans pour autant se préoccuper de la vie du pigeon que quiconque n’avait besoin de nourrir. Cet animal se nourrissait de céréales et notamment de blé qu’il trouvait dans les champs alentour. D’ailleurs, si l’on se penche sur la carte de la France agricole de la période antérieure au XIXème siècle, on constate une adéquation entre la répartition des terres à blé, et la concentration en pigeonniers. J’ai donc voulu voir par le calcul ce que représentait la quantité de colombine amassée pour l’exemple d’un pigeonnier de 320 boulins situé à Valence d’Agen. Au résultat, le pigeonnier permet d’amasser 2400kg/ an de Colombien soit, 48 hectolitres. Or, le site internet Cours d’agriculture, des engrais végétaux explique que 25 hectolitres de fientes par hectare sont nécessaires pour les cultures de lin, de colza.

Pigeonnier, © Thomas Audar 2020

Un pigeonnier comportant 320 boulins pourrait réaliser tous les ans la production d’engrais pour 2 hectares de champs qui lui permettrait de multiplier les rendements des cultures en les faisant grossir plus vite. Cependant, ce que l’on doit comprendre c’est s’il était question d’une production personnelle ou d’une production qui permettait de faire tourner l’économie du pays en la revendant. La réponse de trouve dans LA CRISE AGRICOLE A LA FIN DU XIXe SIÈCLE, EN FRANCE, Essai d’interprétation économique et sociale de Jean Lhomme qui disait qu’en «1892, il existe encore en France 3,5 millions d’exploitations s’étendant sur moins d’un hectare ! Et l’on songera qu’à la même date, les établissements qualifiés officiellement de « petits » et couvrant des surfaces de 0 à 10 hectares, forment 85 % du total des établissements et 26 % de la superficie cultivée. » Ces données nous montrent alors que la quantité de colombine par an était suffisante pour les agriculteurs qui, pour la plupart, ne possèdaient pas plus d’un hectare de terre.


Le pigeonnier demeurait également essentiel pour l’économie, car il avait une vocation de garde- manger. Apprécié pour ses qualités gustatives, le pigeon était un met de choix, à l’encontre de la viande rouge qu’il était difficile de trouver pour manger.

Cette première phase d’utilité du pigeonnier a vite été remplacée par une seconde phase qui ne lui était pas réservée. Effectivement, avec l’arrivée des produits azotés et la découverte des phosphatières en 1865 au hameau de Cos près de Caylus par Jean-AndréPoumarède, médecin et chimiste à Caussade, l’agriculture se tourne vers cet engrais miracle qui s’épuise toutefois dans la région dès 1887. Ajouté à cela, le département diversifie ses cultures et ses terres deviennent de plus en plus maraichères. Les pigeons sont alors contraints de quitter les pigeonniers, car la nourriture qu’ils cherchent se trouve de plus en plus éloignée. Ceci n’est pas la seule raison, on peut la rapprocher d’une seconde raison que l’on repère dans l’Essai d’interprétation économique et sociale qui évoque une crise agricole. Celle-ci n’impacte pas directement l’économie tirée des pigeonniers, au contraire; elle invite à une réflexion sur les moyens de transport qui permettent d’importer des marchandises lointaines et à bas prix au lieu de favoriser l’économie des cultures de proximité. Cela provoque directement un impact sur les productions céréalières et notamment le blé qui devient un produit d’import.

C’est justement à cette période que les activités diffèrent dans les pigeonniers. Ce que j’appellerai la seconde phase est en réalité une seconde utilisation du pigeonnier pour un usage lié à l’économie rurale. En effet, je reprends pour exemple le pigeonnier de Valence d’Agen qui a connu cette seconde phase pendant laquelle le rez-de-chaussée de ce dernier à été utilisé comme lieu de stockage de vin dans des cuves. La particularité de son architecture érigée en a fait un endroit où les paysans pouvaient verser le contenu de leurs récoltes de raisin du haut du premier étage, c’est-a?-dire au-dessus des cuves. Mes recherches m’ont d’ailleurs fait prendre conscience que c’était aussi un endroit pour placer du bétail, des lapins entre autres dont les ventes étaient parfois inscrites sur les murs.

Plus généralement, la localisation en pleine nature de ces pigeonniers était propice pour stocker du matériel agricole. Cette troisième et dernière phase et d’ailleurs encore visible dans le département et notamment vers Réalville (82). Les propriétaires ont investi les lieux de matériel, de bois, dont ils se servent l’été pour allumer des BBQ ou l’hiver pour se réchauffer au coin de la cheminée. Bien que distant d’un modèle économique visant à gagner de l’argent avec son bien hérité, d’autres pratiques plus contemporaines ont vu le jour comme la transformation du pigeonnier en gîte ou meublé de caractère. Ne voyons-nous pas en ce sens, un moyen d’attirer du monde dans les campagnes le temps d’une saison ? Peut-on toujours parler d’une économie de subsistance lorsque le pigeonnier est loué tel un habitat de vacances ? Mes entretiens avec les personnes possédant des pigeonniers destinés à la location ont été révélateurs d’une pratique qui se développe encore, mais qui n’est pas viable économiquement. En effet, les travaux de restaurations et de maçonneries représentent une enveloppe colossale pour un simple particulier. Plusieurs dizaines de milliers d’euros sont nécessaires pour restaurer l’extérieur du bâtiment…

Il est alors compréhensible que beaucoup de propriétaires préfèrent délaisser leur bien plutôt que d’engager des frais pour le voir sous un nouveau jour. Pourtant, des aides de L’État sont mises en place pour rénover le petit patrimoine rural comme en témoigne la communauté des communes et le département qui versent chacun d’eux 3.708 €. La région quant- à elle alloue une enveloppe de 10% du prix des travaux extérieurs comprenant la maçonnerie, les menuiseries, l’électricité et les peintures extérieures. Cette somme est encore plus importante lorsqu’elle est délivrée par l’organisme des gîtes de France dès lors que le patrimoine reçoit un label. D’autres aides peuvent aussi être additionnées pour garantir une préservation du patrimoine.

Néanmoins, on peut supposer que l’enjeu majeur n’est pas forcément la préservation de la culture architecturale vernaculaire, mais plutôt l’économie tirée du tourisme grâce au patrimoine. Si autant de fonds sont attribués pour la sauvegarde, c’est parce que la France est une destination touristique majeure. Les étrangers y trouvent une certaine authenticité; ils y trouvent tout le confort de l’habitat classique au sein d’un cadre de verdure où le paysage est souvent magnifique. En effet, en dominant les autres bâtiments par leurs hauteurs, les pigeonniers savent vers quoi regarder pour attirer de plus en plus de monde à la recherche de calme. L’économie du pigeonnier est donc relativement à modérer dès lors qu’elle se retourne vers le tourisme qui comme on le sait n’est effectif que pendant un semestre. Les bénéfices tirés de la transformation d’un pigeonnier sont donc très en deçà des coûts de réhabilitations. C’est pourquoi il faudrait des années pour se dégager de véritables revenus de cette pratique comme me l’expliquait la propriétaire du pigeonnier de Valence d’Agen…

La géographie au secours de la pédagogie

Gustave Courbet, Le ruisseau de la Brême, 1865, Musée des Beaux-arts de Besançon

 

Histoire d’un ruisseau est un livre écrit par le géographe Elisée Reclus (1830-1905) vers la fin du XIXè siècle (en 1869). Réédité par Actes Sud en 2005, ce petit texte, disponible également sur Gallica mérite une attention particulière en cette période de remise à plat des outils pédagogiques.

De la source au fleuve, en passant par la grotte ou le moulin,  — ce qui sans doute aura inspiré Georges Perec pour Espèce d’espace — nous nous arrêterons sur les considérations pédagogiques :

 » Dans nos écoles et nos lycées, nombres de professeurs, sans trop le savoir et même croyant bien faire, cherchent à diminuer la valeur des jeunes gens en enlevant la force et l’originalité à leur pensée, en leur donnant à tous même discipline et même médiocrité ! Il est une tribu des Peaux-Rouges où les mères essaient de faire de leurs enfants, soit des hommes de conseils, soit des guerriers, en leur poussant la tête en avant ou en arrière par de solides cadres de bois et de fortes bandelettes; de même des pédagogues se vouent à l’œuvre fatale de pétrir des têtes de fonctionnaires et de sujets, et malheureusement il leur arrive trop souvent de réussir. Mais, après les dix mois de chaîne, voici les heureux jours de vacances : les enfants reprennent leur liberté; ils revoient la campagne, les peupliers de la prairie, les grands bois, la source déjà parsemée des feuilles jaunies de l’automne; ils boivent l’air pur des champs, ils se seront impuissant à faire disparaître de leur cerveau les souvenirs de la libre nature. Que le collégien sorti de la prison, sceptique et blasé, apprenne à suivre le bord des ruisseaux, qu’il contemple les remous, qu’il écarte les feuilles ou soulève les pierres pour voir jaillir l’eau des petites sources, et bientôt il sera redevenu simple de cœur, jovial et candide. »

Rappelons que ce texte date de 1868 et qu’à cette période, la pédagogie est encore loin d’avoir acquis une expertise telle que nous la connaissons aujourd’hui. Aussi, ne pourrait-on pas profiter de cette période de liberté pédagogique pour susciter des vocations nouvelles, des intérêts particuliers et nous adapter aux circonstances qui nous sont imposées.

=> Elisée Reclus, Histoire d’un ruisseau, récit (1868), coll. Babel, Arles : Actes sud, 2005, 224 p.

La vie des gens vue de divers points de vue

J’aimerais présenter plusieurs restitutions à propos de la vie des gens.

http://retro-hd.com/critiques/cinema/721-la-vie-des-gens.html

Paru en 2015, un documentaire d’Olivier Ducray qui durant l’année 2013 a suivi le travail d’une infirmière circulant à trottinette dans la ville de Lyon. Elle s’occupe des personnes dépendantes, soit par maladie, soit par accident, soit par vieillesse, et circule à travers la ville. 4290 kms parcourus à trottinette pour aller de foyer en foyer. Un regard, une humanité…

La Vie des Gens Textes de François Morel La vie des gens, texte de François Morel, illustration de Martin Jarrie, Editions Les Fourmis Rouges 2013

En 2013, se met en place ce projet autour d’une résidence d’artiste. Martin Jarrie, peintre et illustrateur, est accueilli en résidence en région parisienne (Saint Gratien 95). En voyant le résultat, sa femme, l’éditrice Valérie Cussaguet, lui propose alors d’éditer les quinze portraits en un ouvrage, et demande à François Morel d’inventer un texte. Ces quinze portraits donnent lieu à quinze récits de vie assez percutants.

La vie des gens, François Morel, et Martin Jarrie, Les Fourmis Rouges, 2013

« Elsa

« J’aimerais changer. Et c’est le moment ou jamais. C’est ce que je me suis dit l’autre nuit quand je n’arrivais pas à dormir. Aurélie est grande. Pour l’instant Cédric a un bon travail. Mais quand je vais à Pôle Emploi, ils ne me voient pas comme une personne… »

Ce qui est intriguant dans ce livre et dans ces textes, c’est que cette réalité augmentée ne se distingue pas d’une réalité propre. Ces portraits sont si « vrais » qu’ils pourraient très bien être vrais. Quelque part, ils le sont, car François Morel a puisé dans son imaginaire, dans son entourage et dans son expérience. Mais je me dis quand même que les personnes qui ont prêté leur image à ce jeu de portrait n’ont peut-être pas apprécié leur histoire. C’est par conséquent un peu dérangeant de tricher avec une réalité qui n’a souvent pas besoin d’être inventée.

Revenons un peu en arrière, en 2005, Jacques Winderberger, très connu pour son approche de la société et de l’image publie un recueil de photographies qui retrace son expérience de 1969 à 2002. Des images qu’il a prises montrant des gens dans leur quotidien. En arrière fond, les paroles de la chanson de Léo Ferré. Derrière toutes ces formes de représentation, la question de comment montrer la vie des gens reste en suspens. Allier l’écriture et le dessin (ou la photographie) permet d’en dire un peu plus, d’aller plus loin dans la description parce que l’image apporte ce supplément d’âme que le texte a du mal à approcher. Si l’image témoigne à sa façon, le texte précise et rend plus vivant. Ce rapport étroit entre l’image et le texte est à questionner, surtout chez celles et ceux qui se demandent encore comment traduire leur terrain, en restant au plus près des gens qu’ils ont croisés.

 

Pierre Fournier, La vie des gens, Ed. du Square, 1971

Les années 70 nous offrent aussi leur regard du monde dans un contexte de guerre froide où l’affrontement entre les Russes et les Américains est encore très présent. La bande dessinée offre aussi cette possibilité de raconter un point de vue en image et en récit.

 

Lecture du monde vue à l’échelle humaine

Alors que l’ANR (Agence Nationale sur la Recherche) vient de publier un appel d’offre sur le CoronaVirus, nous allons voir comment voir la ville à différente échelles. Différentes cartographies à l’échelle mondiale vont nous aider à comprendre le sens et les enjeux liées à cette pandémie.

« Entre 2005 et 2018 la rougeole a été à l’origine de 2 365 000 décès estimés globalement dans le monde, majoritairement parmi les enfants de moins de 5 ans », est-il écrit dans un blog destiné à la vaccination. La rougeole comme certaines maladies infantiles tuent à travers le monde, surtout dans les pays pauvres comme nous pouvons le voir sur la carte ci-dessus. Les comportements dans les pays riches sont différents, mais pas exclusivement propres aux pays riches. Par exemple, on trouve une carte de l’activité physique qui montre que les Etats-Unis et l’Amérique du Sud en sont au même point, et bien plus au Moyen-Orient. Le manque d’activité physique est responsable d’une surmortalité. Nous n’avons pas suivi le développement de la méthodologie employée pour effectuer ce genre de calcul, mais nous pouvons estimer que l’OMS reste fiable, s’agissant d’une institution mondiale et reconnue.

D’ailleurs, nous pouvons nous demander de quoi meurent les gens à travers le monde. La carte ci-dessous met en évidence les premières causes de mortalité à travers le monde. Nous voyons clairement que les pays riches, l’Europe, les Etats-Unis et l’Australie, et également la partie Est de l’Amérique du Sud, sont touchés par les maladies cardiaques, dont une part peut être  imputée au manque d’activité physique.

Par contre, l’Afrique, le Moyen-Orient, et l’Asie vivent des différences surprenantes qui mettent en cause des maladies en rapport avec des comportements culturels (sida, accident de la route) ou politique (guerre). Dans certaines régions du monde, le paludisme fait encore d’énormes ravages, étant la première cause de mortalité en Afrique de l’Ouest, avec les infections respiratoires. L’Asie, quand à elle, subie davantage les accidents vasculaires cérébraux.

Ce constat montre que nous ne sommes pas logés à la même enseigne en fonction de notre lieu de vie (grande région), de notre culture et de nos richesses. La répartition des cas de choléras à travers le monde exprime cette idée d’inégalité entre les peuples, que l’on peut rapprocher aussi des inégalités sanitaires.

Aussi, la pandémie de CoronaVirus est-elle symptomatique d’une épidémie à l’échelle mondiale qui se développe principalement dans les pays où les individus circulent beaucoup. Alors que l’Europe et l’Amérique du Nord est épargnée par le choléra, il en est tout autrement pour le CoronaVirus.

Dans un registre un peu plus large, on peut lire ou relire l’ouvrage édité chez Les empêcheurs de penser en rond en 1999 intitulé : Les maladies ont-elles un sens, de l’américain Robert Aranowitz.

=> Aranowitz, Robert. Les maladies ont-elles un sens, Paris : Les empêcheurs de penser en rond, 1999, 380 p.

Mobilité et injonction sociale

Classement de la cyclabilité toulousaine, L’Union et Portet en vert, FUB 2020

A lire l’ouvrage sur la mobilité, on apprend que cette dernière résonne depuis le XIXè siècle autour d’une variation complexe qui reprend globalement la notion de déplacement, d’ascension, de mouvement du territoire…

Comme nous le rappellent Katja Ploog, Anne-Sophie Calinon et Nathalie Thamin, « le terme de mobilité est davantage un présupposé qu’un véritable objet du discours » (2020, p. 9). Au demeurant, ce concept polymorphe s’est transformé avec le temps et à revêtu une apparence tantôt positive, tantôt négative, qui résonne aujourd’hui à travers le monde politique, scolaire, entrepreneurial. D’abord perçue comme une instabilité, la notion de mobilité reflète une insécurité de l’humeur et de la posture. Ce qui est mobile est à l’origine négatif, dans un monde où la fixité et la permanence doivent régner. Avec le XIXè siècle, les arrêtés anti-mendicité ont par exemple caractérisés la mobilité des plus pauvres comme quelque chose de nocif et à combattre (Jouenne, 1997). Il fallait alors fixer les peuples, surtout lorsqu’ils n’étaient pas dignes d’assumer leur oisiveté. Au demeurant, à l’orée des années 1970, l’accession des classes populaires au pavillon n’a-t-elle pas la même fonction sociale que de s’assurer d’une fixité des peuples ? (Bourdieu, 1990).

Pour aller plus loin, cette notion existe déjà dans le repérage de la production de l’idéologie dominante, en 1976 (Bourdieu, 2008). Pierre Bourdieu et Luc Boltanski la repèrent dans leur corpus où le terme est décliné en trois thématiques : une thématique du changement des mentalités : « il s’agit désormais de viser un but mobile ; le changement de mentalité correspond au passage du tir aux pipes au tir aux pigeons » ; une thématique économique : « cette mobilisation des ressources, que tous préconisent, implique leur mobilité, que beaucoup refusent » ; et une thématique de la masse salariale : « A l’échelle internationale, la mobilité des personnes a permis dans le passé de puiser à l’étranger des masses de prolétaires et même de sous-prolétaires ». Mobilité des mentalités, mobilité économique et des masses monétaires, et mobilité des masses salariales se conjuguent pour former ce que l’on nomme la thématique de la mobilité. La logique de déplacement ne concerne pas seulement celle des peuples, mais aussi celle des idées et de l’argent. Constatons aujourd’hui même la mise en place d’un dispositif de surveillance des « clusters » dans lesquels circule le virus Covid-19, en contrariété avec les injonctions notamment à l’échelle scolaire, professionnelle et entrepreneuriale.

Le caractère idéologique de cette notion peut-être révélé à travers le changement de mentalité, lorsque l’on comprend que les finalités ne sont pas les mêmes pour tous. Ainsi, le déplacement de l’économie n’a pour finalité que l’accroissement des richesses qui ne seront pas redistribuées vers le sous-prolétariat des « mobiles », mais vers le capital. Nous arrivons aujourd’hui à une « saturation idéologique de la notion dans le discours contemporain » (2020, p. 103). Dans le champ scolaire, il s’agit d’une véritable « injonction à la mobilité » (Ibidem).

Dans ses valeurs, la mobilité est perçue aujourd’hui comme un « stimulateur d’activité ». Alors qu’elle était associée à un manque de concentration, à une instabilité et à une immaturité, un renversement des valeurs s’est opéré dans un monde sans cesse en mouvement, mobile, et l’immobilisme serait désormais l’inaction à pourchasser. Le déplacement des travailleurs devient source d’une ascension sociale et se nomme mobilité sociale. Ainsi, on peut être mobile sans changer de place. « Posée comme un principe démocratique, la mobilité incarne alors le rêve américain en étant « idéologiquement » ascendante » (2020, p. 113). La crise que nous traversons est d’autant plus dramatique qu’elle joue sur le déplacement et la mobilité.

Mexico, 15 février 2020, © Juliette

Parce que « l’incitation à la mobilité géographique et académique étudiante est largement portée par des arguments néolibéraux, d’économie de marché et l’employabilité » la mobilité affiche une idéologie largement répendue depuis les années 1980. L’individu étant au centre des enjeux, ce dernier répond aux injonctions sociales d’un devoir de mobilité tant pour sa personne, pour son entourage que pour la société dans laquelle il évolue. L’ascension sociale va de pair avec le mouvement territorial et dans cette course à la compétitivité, le déplacement des hommes s’effectue dans les deux axes : vertical et horizontal. Ainsi, « l’idéologie mobilitaire joue sur le paradoxe qui consiste à projeter une représentation du monde conçue par les élites pour les élites — l’individu mobile — mais donnant l’impression, voire l’illusion d’un phénomène total, normalisé et égalitaire, alors que la majorité de la population vit sans cette représentation et hors d’elle » (2020, p. 129). En effet, dans « un placement de père de famille », Pierre Bourdieu avait montré quelles étaient les stratégies employées par les cadres moyens et les ouvriers pour se loger sur des territoires adaptés à leurs capacités financières. De ce point de vue, la mobilité n’est pas synonyme de liberté, mais plutôt de fixité (Bourdieu, 1990).

« Positivement survalorisée dans les sociétés dominées par la perspective néo-libérale, la mobilité est une figure amplement promue dans la publicité » (2020, p. 129). Nous touchons là à un domaine qui nous préoccupe et pour lequel nous avons déjà consacré quelques recherches (Jouenne, 2020). La pratique de la bicyclette en ville, notamment pour ce qui concerne le trajet-travail, est largement relayée par les pouvoirs politiques, mais aussi les institutions de marketing urbain à l’échelle de la nation. La mise en place du Plan-Vélo à l’automne 2019 témoigne de l’ampleur du dispositif et de la stratégie destinée à positiver le fait de se rendre au travail à vélo, de laisser sa voiture au garage (mais d’avoir une voiture quand même), dans un esprit de libre choix nécessaire à la sauvegarde de la planète. Le Plan Vélo prévoit l’apprentissage du vélo en ville dès l’école primaire. Alors que les habitants des pays en développement rêvent de passer à la voiture, nous voilà dans les pays riches recourir au vélo. Ce retour à la bicyclette est-il rationnel ?

Dans notre société, les injonctions sont légions : « bouger, manger cinq fruits à cinq légumes par jour », « Pour votre santé, bouger », etc. Dans le même temps, les enfants qui bougent trop sont contraints d’avaler une dose de Ritaline chaque matin. On parle alors d’hyperactivité. Bouger oui, mais pas trop. Dans le cadre de la maîtrise de l’employabilité, le lieu et la durée du déplacement sont étroitement calculés par les besoins et les tendances. Le marché de l’emploi global dicte ses besoins et la population, autrefois prolétaire mais aujourd’hui plus qualifiée, s’aventure loin de ses origines et de sa famille. Ainsi la mobilité professionnelle rime-t-elle avec mobilité géographique et mobilité sociale.

Dans le domaine des transports, la distance toujours plus grande entre le lieu d’habitation et le lieu de travail a converti le déplacement en mobilité urbaine. « Toute la conception de l’espace semble désormais dominée par la mobilité » (2020, p. 133). Mais c’est à l’individu s’assumer cette charge, qui plus est, en polluant le moins possible. Face à la saturation des transports en commun, l’ultime alternative reste la pratique du vélo, lorsque les déplacements ne dépassent pas 5 kilomètres. Et comme l’électricité va vite, le vélo électrique semble l’outil de transport ad hoc pour couvrir des distances plus grandes (jusqu’à 19 kilomètres). Moins polluant qu’une voiture, plus rapide qu’un autobus ou un vélo traditionnel, et moins fatiguant, le vélo électrique apparaît comme le sauveur des nouveaux prolétaires du néo-libéralisme. Ce qui pose problème, c’est que la recherche sur les pratiques du vélo se font dans le cadre plus général des études sur la mobilité, comme si le vélo n’était qu’un instrument de déplacement. Sur le plan symbolique, le vélo est bien plus.

Comme l’ont montrés les auteurs, si la mobilité est porteuse d’une idéologie dominante, alors son étude dans un cadre institutionnel est porteur de biais idéologiques propre à l’institution. Ainsi, les départements d’étude sur les transports et les colloques sur les mobilités ne s’associent-ils pas bon gré mal gré à cette idéologie ? Si comme le prétendent les auteurs, « la mobilité est une nécessité autour de laquelle l’on cherche à construire du sens » (2020, p. 136), alors nous pouvons cautionner cette idéologie pour en chercher le sens. S’agit-il de respecter la planète ou bien d’accroître les profits d’une poignée, un ordre moral doit permettre de faire la distinction et d’ouvrir au débat.

 

=> Pierre Bourdieu. (1990), « Un placement de père de famille. La maison individuelle : spécificité  du produit et logique du champ de production », ARSS, 81-82, pp. 6-33.

=> Pierre Bourdieu & Luc Boltanski. (2008). La production de l’idéologie dominante, Paris : Raison d’Agir,  166 p.

=> Noël Jouenne. (1997), Approche de la problématique sine domo en Haute-Loire et au Puy-en-Velay du milieu du XIXe siècle à nos jours. Contribution à l’étude du vagabondage, Thèse sous la direction de Ph. Laburthe-Tolra, Paris V-René Descartes, 830 p. Thèse en ligne.

=> Noël Jouenne. (2020), Notes sur le vélo et la bicyclette. Regard ethnologique sur une pratique culturelle, Paris : L’Harmattan, 208 p.

=> Katja Ploog, Anne-Sophie Calinon, Nathalie Thanin. (2020). Mobilité. Histoire et émergence d’un concept en sociolinguistique, Paris : L’Harmattan, 352 p.

L’écriture du mémoire

Hommage à Marcel Duchamp, Toulouse, © NJ 2018

Wouah !  A lui seul ce thème vaudrait un livre, et même plusieurs, puisque certains auteurs, sociologues, ethnologues ou autres se sont spécialisés dans l’écriture d’ouvrages spécialisés dans l’écriture de mémoire.

=> Howard Becker (2004). Ecrire les sciences sociales, préface de Jean-Claude Passeron, Paris : Economica, 180 p.

N’entrons pas dans les détails. Savoir rédiger, ça se travaille au quotidien, sur toute la vie. Il n’y a pas de fatalité. S’améliorer fait partie d’une culture de la progression. N’est-on pas sur terre pour progresser, pour aller de l’avant, pour ajouter sa pierre à l’édifice de la connaissance de l’Homme ? Waouh (2) !

Alors il faut savoir rester humble et avancer à son rythme. En l’occurrence, il vaut mieux écrire de petites phrases que de grandes (en longueur). Il vaut mieux rédiger simplement plutôt que d’essayer des phrases alambiquées. Il faut utiliser les auteurs lorsque l’on a quelques chose à dire de fort. Il ne faut pas oublier de citer les auteurs, au lieu de les plagier. Il faut être honnête avec soi-même, et ne pas chercher à impressionner à tout prix.

Je propose un texte autour du travail d’écriture et de l’expérience du métier, rédigé par Yves Winkin et intitulé « Brûlures fertiles : traces mnésiques et travail ethnographique« . Le sociologue Yves Winkin, disciple de Bourdieu, de Ray Birdwhistell et de Erving Goffman, revient ici sur son passé et son expérience, sur son mode d’écriture et sur quelques conseils éthiques en la matière.

Lorsque les mots grimpent

Ngram réalisé par le moteur Gooogle Ngram Viewer à partir des termes « vélo » et « bicyclette » sur la base de donnée mondialisée

Parmi les nombreux outils inexplorés sur Google, celui de Google Ngram Viewer est à découvrir comme un outil puissant et signifiant. Le moteur calcule les inférences de termes à partir des numérisations d’ouvrages et d’articles contenues dans bases de données de Google Books. Pour des questions de droits d’auteurs, ces sources ne sont pas disponibles en France, mais il est toutefois possible de travailler dessus et de rechercher les sources.

Les deux termes qui nous intéressent ici sont « vélo » et « bicyclette », deux synonymes qui expriment toutefois de subtiles variations. Par exemple, l’emploi du terme de « bicyclette » est plus distingué et était autrefois le substantif a utiliser dans un texte scientifique. Celui de « vélo » est davantage lié au « peuple » et plus proche d’une idéologie qui colle bien avec « écolo » et « bobo ».

Même si la mise à jour de ce moteur s’est arrêtée en 2013 selon Wikipédia, il est intéressant de remarquer que ces deux termes n’ont pas eu la même trajectoire, et que l’utilisation de « vélo » a dépassé celui de « bicylcette » juste après 1990. Le dépassement a lieu en 1993 précisément. Mais nous remarquons également l’ascension de l’emploi de « vélo » à travers le temps. De 1940 à nos jours, il n’a fait que progresser. Et si son utilisation a aujourd’hui remplacé officiellement celui de « bicyclette », c’est qu’il se passe quelque chose.

Les deux courbes vivent leur vie

Si l’on effectue le même type de travail sur l’intervalle complet, à partir de 1840, on se rend compte que le décollage du terme de vélo ou de bicyclette a lieu en même temps, après 1880. Alors que la bicyclette va progresser dans les écrits jusqu’en 1900, puis amorcer une inflexion pour se stabiliser jusque vers 1930, puis amorcer une remontée jusqu’en 1950 et reprendre la même trajectoire, comme par des vagues successives, la notion de vélo suit une courbe tout à fait différente. Elle progresse lentement, même très lentement jusqu’à couper la courbe « bicyclette » en 1993, et la dépasser.

Le mot « vélo » est tellement en vogue aujourd’hui que le législateur a remplacer le vocable « bicyclette » par « vélo » dans la loi du même nom et du Plan Vélo : « A la fin du dernier alinéa dudit article L. 2531-5, les mots : « de la bicyclette » sont remplacés par les mots : « du vélo » ; (Loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités.

Bref, l’idéologie de la mobilité est convoquée ici. Et grâce à ce nouvel ouvrage paru ce moi-ci, la notion de mobilité n’a plus de secret. Mais je me réserve de donner les explications dans un autre billet… C’est les vacances !

=> Katja Ploog, Anne-Sophie Calinon, Nathalie Thanin, Mobilité. Histoire et émergence d’un concept en sociolinguistique, Paris : L’Harmattan, 2020, 353 p.

 

Mon plan tient-il la route ?

L’aube d’un nouveau jour © NJ 2020

Nous arrivons à une étape où il peut être intéressant de regarder son plan, sa construction, sa logique, et voir s’il tient toujours la route.

Outre le plan classique dit Imrad, il existe une variété de plans  destinés à rendre le mémoire plus clair. Le plan est finalement une succession d’étapes qui ont entre elles une certaine logique. Du général au particulier, du global à l’étude de cas, de la dimension historique, etc. il y a toujours une logique dans la construction du plan. Le bon sens peut être utile pour évaluer son plan; mais encore faut-il avoir recueilli toutes les informations que l’on souhaite développer.

Cela n’a rien à voir avec l’hypothèse qui reste un fil conducteur. Mais l’hypothèse est sous-tendue par la qualité et la quantité de données disponibles. Par conséquent, avant de se demander si le plan tient la route, il faut se demander si les éléments collectés sont suffisants, utiles, nécessaires, etc.

Dans l’ouvrage de Stéphane Beaud & Florence Weber, Guide de l’enquête de terrain, il n’est pas question du plan de rédaction du mémoire, mais seulement de l’avant-rédaction, c’est-à-dire de la collecte des données et de leur analyse. Le chapitre 8, « interpréter et rédiger » donne les derniers conseils avant l’analyse. Par exemple, au sujet des informateurs, qu’ils appellent l’enquêté, il est primordial d’informer sur son statut social et culturel : Son nom (même un pseudonyme qui permet de donner le genre), son âge (et parfois son année de naissance), la profession de ses parents, son lieu d’origine, le nombre de frères et sœurs.

Son diplôme le plus haut et sa profession, son statut au regard de son habitation (locataire ou propriétaire), son lieu de résidence, ses préférences politiques et sa tendance religieuse (ex: catholique non pratiquant). Le nombre d’enfants, leur âge, et leur statut vis-à-vis de la scolarité.

Ces éléments indispensables permettent de cerner à travers la singularité de l’informateur, sa position sociale, et donc d’éclairer son point de vue. Vous pouvez organiser tous ces éléments dans un tableau croisé, de manière à faciliter l’analyse par comparaison, ou analogies.

Bien souvent, le plan ne tient pas la route parce que les éléments collectés ne sont pas assez importants pour permettre d’argumenter. Il relève donc du bon sens de savoir si l’on a suffisamment d’informations, avant de se demander si le plan tient la route.

=> Stéphane Beaud & Florence Weber (1998), Guide de l’enquête de terrain, Paris: La Découverte, 338 p. (réédité depuis en livre de poche)

Retour sur la matinée inclusive

Roxane et Choukri présente leurs résultats, © NJ 2020

Nos deux architectes de l’association Handi’Apt, Océane et Mélanie, ont ouvert cet atelier avec une activité ludique pour sensibiliser au problème du handicap dans la ville. Après un exercice où chacun a pu se présenter rapidement et lancer la boulette de papier au suivant, nous nous sommes regroupés par binôme et avons réfléchi autour de plans cadastraux, et d’images représentant un morceau de ville. En l’occurrence, il s’agissait du secteur de Compans Caffarelli. Pour nous aider, nous avions une fiche représentant un type de handicap : trisomie 21, surdité, mal-voyant, autisme, récupérée sur le site Haudacity.

Tour à tour, nous avons ensuite présenté nos résultats devant le groupe. La plupart du temps, les étudiants ont cherché des solutions et ont anticipé sur le résultat, alors qu’il s’agissait plutôt de faire un diagnostic. Mais l’ensemble a donné lieu à un contenu assez riche et complémentaire. Lorsque l’on commence à s’intéresser aux diverses situations de handicap, on se rend compte à quel point la ville devient agressive et mal conçue.

Les enseignants planchent à leur tour, © NJ 2020

Bien évidemment, nous avons également participé aux activités pédagogiques. Derrière le handicap mental, nous trouvons aussi le handicap social, et chacun développe des stratégies pour faire face à des situations parfois angoissantes. Et lorsque les stratégies ne suffisent plus, l’architecte peut alors intervenir à différentes étapes du processus, de la création à la remédiation. Par exemple la Loi Elan, ou le Vivre ensemble

Pour aller plus loin, Océane et Mélanie nous enverrons une bibliographie. Mais en attendant, voici un ouvrage paru récemment sur la question. On y découvrira 27 termes, critiqués, définis et approfondis.

=> Charlot Jean-Luc. (2019) Petit dictionnaire [critique] de l’habitat inclusif, Paris : L’Harmattan, 142 p.

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