Archive for the ‘histoire locale’ Category

Fourier tableau miraculé

mercredi, juillet 17th, 2019

Fourier, le tableau miraculé

Paris, bureau du premier consul, 19 pluviôse X (8 février 1802)

_ Fourier, Berthollet vous en a déjà informé. J’ai décidé de vous nommer préfet de l’Isère.
_ C’est que, citoyen général…
_ Je voulais vous voir avant que vous ne preniez vos fonctions.
_ Mais…
_ Et ne soyez donc pas timide. La fonction est délicate. Il y a là-bas un nid de suppôts d’Ancien Régime. Je compte sur vous pour me les attacher ou tout au moins, faire en sorte qu’ils ne nous encombrent pas.
_ …
_ Je n’ai aucun doute, vous réussirez. Imposez-vous ! Vous représenterez la France. Et d’abord, voyez avec Vivant Denon à ce qu’il vous commande un portrait auprès de David. Vous ne serez plus un petit professeur qu’à vos moments perdus… s’il vous en reste !

Paris, atelier de David, thimèle, duodi 22 pluviôse X (10 février 1802)

_ Monsieur David, il y a là un certain Fourier qui nous est envoyé par le gouvernement pour un portrait.
_ Encore ! C’est tous les jours qu’il s’en présente. Hier, c’était Antoine Français de Nantes qui est préfet de Charente. Lui, aujourd’hui, je ne peux pas m’en occuper. Envoyez-le à Gros ou à Gautherot, s’ils ont le temps.

_ Monsieur Gautherot ? Je viens d’être nommé préfet par Bonaparte et il souhaite que je dispose d’un portrait qui corresponde à cette fonction.
_ Hum…
_ Je dois partir bientôt.
_ En plus.
_ On peut sans doute reconsidérer l’affaire.
_ … Ecoutez, je vous propose de revenir la prochaine décade, début ventôse. Arrivez dès le lever du soleil, nous aurons une bonne lumière. Comptons deux séances de pose pour que j’ai les éléments indispensables ; vous serez ensuite libre de vos mouvements.
_ Je n’aurai plus besoin de poser ensuite ?
_ Non, je terminerai seul, mais à mon rythme. Je suis débordé d’ouvrage. Comptez six mois.
_ Et vraiment, cela suffira.
_ Oui, si vous n’êtes pas plus exigeant : vous disposerez d’un portrait façon portrait de famille… tiens… à la façon de celui-ci. C’est classique, cela ne se démodera pas. Plus fouillé, plus personnalisé, je ne peux pas, je n’ai pas le temps.
_ Mais…là ?… on ne voit guère les fonctions que j’exerce.
_ Vous allez à Grenoble m’avez-vous dit ?
_ Oui.
_ Il y a là-bas d’excellents ymageurs qui pourront s’inspirer de ma toile pour vous poser dans le décor de votre choix.

L’histoire des portraits que nous possédons de Joseph Fourier est très lacunaire ; pour en rendre compte, nous devons formuler des hypothèses qui seront peut-être infirmées si de nouveaux éléments apparaissaient. Pour l’heure, nous disposons de quelques éléments tangibles qui nous autorisent à ébaucher le récit qui fut suscité par une communication du service culturel de la ville d’Auxerre sur Facebook le 29 mars 2019.

Le tableau protégé par du papier japon.

Détail

Détail.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Joseph Fourier est nommé préfet de l’Isère en février 1802 (23 pluviôse X), il se présente à la préfecture de l’Isère le 17 avril 1802 (27 germinal) ; la préfecture reçoit des hôtes (des élus municipaux à des personnages parmi les plus illustres : le roi d’Espagne, le pape Pie VII….) or, Joseph Fourier est souvent absent de sa préfecture (soit à cause de ses fonctions, des missions demandées par l’Empereur, soit à cause de sa santé ou pour ses travaux personnels). Lorsqu’il reçoit un hôte, si le préfet est absent, son représentant peut s’en excuser et l’absence être moins mal ressentie si les excuses sont présentées devant un tableau représentant le préfet absent. Ces considérations ont certainement pesé dans la commande qui a été passée à Claude Gautherot et réalisée l’an XI.

[Il est plausible que l’œuvre ait été réalisée à Paris, dans l’atelier de Gautherot, elle a pu être mise en chantier dès le printemps 1802, sans nécessiter la présence du modèle tout au long de l’exécution. L’artiste a pu faire poser Fourier le temps de prendre les éléments de physionomie, esquisser l’attitude générale, les détails moins pertinents étant réalisés ultérieurement, par le maître ou par un de ses élèves, sans que le modèle soit présent. Fourier passe commande d’un portrait ‘standard’, comme doit en posséder tout personnage accédant à la fonction qui est la sienne dorénavant.] Sur ce tableau, Fourier est représenté debout, vu de face, la tête nue, vêtu de noir. Appuyé du bras gauche au dos d’une chaise, sur laquelle est jeté son pardessus, il tient ses gants de la main gauche. Le bras droit descend le long du corps.

Au cours de l’an XI (septembre 1802-septembre 1803) l’œuvre, une toile, peinte à l’huile, de 1,27 m sur 0,91m, est achevée, signée, et, pensons-nous, livrée à la préfecture de Grenoble.

Il est probable que ce premier ouvrage a été doublé d’un second qui nous est parvenu également : un tableau au pastel sur papier, de dimensions sensiblement égales à la toile peinte (1,17 m sur 1,08 m) qui n’est pas signé et représente Joseph Fourier en habit de préfet d’Empire. Les éléments iconographiques présents sur l’image (l’habit, les livres de l’arrière plan – Platon et Ciceron -, l’ouvrage ouvert de Newton, tenu dans la main de Fourier) indiquent que Fourier lui-même à précisé les éléments qu’il voulait y trouver.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ce pastel n’est pas signé : il est possible qu’il ait été réalisé d’après la peinture à l’huile soit à Paris dans l’atelier de Gautherot, soit ailleurs (à Grenoble ?) par un artiste missionné pour exécuter une interprétation plus orientée vers la communication que l’austère portrait peint à l’huile par Gautherot.

On peut supposer que les deux portraits 0nt été exposés dans les locaux de la préfecture de l’Isère entre l’an XI et 1815, départ de Fourier de Grenoble ; après quoi, Fourier a pu les emporter dans son nouveau poste, à Lyon, durant les Cent-Jours, mais on sait que début mai 1815, Fourier est considéré comme démissionnaire du poste de préfet du Rhône où il ne voulait pas appliquer le régime d’exception préconisé par le commissaire du gouvernement. Les deux tableaux ont pu suivre Fourier à Paris avec les effets personnels du préfet déchu et y rester en toute discrétion, le temps n’étant pas, sous la Restauration, à exhiber des souvenirs provocateurs rappelant le précédent régime.

Au décès du savant, le 16 mai 1830, Joseph, le fidèle serviteur hérite des quelques biens matériels laissés par Joseph Fourier. Quant à la  masse assez importante de papiers, Claude Louis Marie Henri Navier, ami de Fourier et son collègue à l’Académie des sciences de Paris, en devient le dépositaire. Pour le reste, sont seuls héritiers des arrérages de pension de Légion d’honneur (93,20 F), le frère consanguin, Etienne Joseph Fourier, domicilié à Auxerre pour un quart (23,30 F, payables à Auxerre) , et la nièce, Marie Jeanne Fourier épouse de monsieur Louis Claude Pierre Blanchin, employé au ministère des finances, demeurant à Paris, rue Culture Sainte Catherine, n° 46, pour trois-quart des biens (69,90 F payables à Paris)…

On peut penser que Joseph, le valet du savant et son héritier fut dépositaire de la toile et du pastel. Le pastel intégra les collections du Musée d’Auxerre en 1865 grâce à l’obligeance de Louis Blanchin, l’époux de Marie Jeanne Fourier. Pour la toile peinte, elle fut soit confiée par Joseph au frère consanguin de l’académicien, Etienne Joseph Fourier, soit confiée à la Ville d’Auxerre en souvenir de son maître, soit remise à Faillot lorsque, vers 1844, celui-ci rechercha de la documentation pour réaliser le monument pour lequel Gau de Gentilly légua 4 000 F qui furent complétés par une souscription.

1849 : la statue de Fourier par Faillot (1810-1849) est inaugurée à Auxerre.

1858 : livret de l’exposition des Beaux-Arts, imprimé à Auxerre chez Perriquet et Rouillé, p. 28, « 423. Portrait de Fourier par Gauthereau [sic], élève de David. »

Ensuite, les deux portraits se retrouvent dans les collections du Musée d’Auxerre où on peut les suivre :

1863 : Montceau, catalogue manuscrit
« Gautherot (Claude), élève de David, né à Paris en 1769, mort en 1825
16. Portrait du baron Fourier
fig jusqu’aux genoux, grandeur naturelle »

1865 :Legs du pastel par Louis Blanchin
Pastel d’un auteur anonyme, représentant Fourier en costume d’académicien [sic, lire plutôt : de préfet] – inventaire n° 1865.2.1 – mesure 117.7 x 107.7 cm. Il avait été légué au musée en 1865 par M. Louis Blanchin qui avait épousé une nièce de Fourier.

1866: livret de la deuxième exposition des Beaux-Arts, livret imprimé à Auxerre chez Perriquet, page 27
« Gautherot (Claude), élève de David, né à Paris en 1769, mort en 1825.
172. Portrait du baron Fourier.
(appartient au Musée). »

1872 : Catalogue des Beaux-Arts [du Musée de la Ville d’Auxerre], pp.19-20
« GAUTHEROT (CLAUDE), né à Paris en 1769, mort dans la même ville en 1825. (Ecole française)
Après avoir reçu de son père les premières notions de l’art et essayé avec succès le modelage du portrait, il entra en 1787 dans l’atelier de David, dont il fut l’élève et l’ami. Gautherot, qui ne put rester étranger aux agitations de son époque, vint dans le département de l’Yonne à la suite de Lepelletier de Saint-Fargeau. Plus tard, blessé d’un coup de feu en défendant la Convention le 13 vendémiaire an IV (octobre 1795), il résolut de se consacrer exclusivement à la peinture. A cette époque, il ouvrit une école sous le patronage de David et forma d’excellents élèves. Ses principaux tableaux sont : Marius à Minturnes (1796)[1]. Pyrame et Thisbé[2]. Convoi d’Atala (1810)[3]. Portrait de Davout. Portrait de Portalis. Napoléon haranguant ses troupes au passage du Leck (Prix de 1810). Napoléon blessé devant Ratisbonne. Entrevue des empereurs de France et de Russie à Tilsitt. Saint Louis pansant les malades. Saint Louis donnant la sépulture aux soldats de son armée, etc.
13. Portrait du baron Fourier.
H. 1,27 – L. 0,91 T. Fig jusqu’aux genoux, gr. nat.
Il est représenté debout, vu de face, la tête nue, vêtu de noir. Appuyé du bras gauche au dos d’une chaise, sur laquelle est jeté son pardessus, il tient ses gants de la main gauche. Le bras droit descend le long du corps.
Provenance inconnue.

Facsimilé extrait du catalogue de 1872.

Signé : GAUTHEROT, AN XI

1910 : Catalogue du Musée III peinture et sculpture, imprimé par l’imprimerie coopérative ouvrière « l’Universelle »
« 13. GAUTHEROT (Claude), né à Paris en 1769, mort à Paris en 1825, élève de David d’Angers. Portrait du baron Fourier (H. 1,27, L. 0,91).
Signature : Gautherot, an XI. [mention marginale manuscrite : 1858-2.1]

Les années 1950 n’étaient pas au souvenir de Fourier ; les Auxerrois étaient en passe de l’oublier (et cet état perdure encore en 2019, malgré les manifestations organisées en 2018 pour marquer le 250e anniversaire de sa naissance). Chez les scientifiques, Dieudonné et le groupe Bourbaki ignorent superbement l’œuvre de Fourier [trop axée sur la physique pas assez sur la théorie ?] et l’Encyclopedia Universalis ne lui consacre pas (encore) une entrée.

Le conservateur du Musée d’Auxerre de cette époque est chargé d’une mission impossible : avec des moyens chichement comptés, il doit empêcher la destruction des œuvres fragiles qui lui sont confiées. Certains avant lui l’ont tenté avec maladresse : papier scotch pour masquer les déchirures, mastic et verni pour les trous ; il opte pour recouvrir l’œuvre de papier japon ce qui lui garantit un sauvetage provisoire au prix de la disparition de l’image représentée. La peinture est oubliée. Les biographes de Fourier, Robert et Dhombres, n’en ont pas connaissance. Seul reste visible, mais rarement exposé à cause de sa fragilité, le pastel non signé attribué à Gautherot.

Au 250e anniversaire de la naissance de Joseph Fourier, on vit, en 2018, un groupe de savants, mathématiciens, académiciens, faire le déplacement jusqu’à Auxerre, pour honorer leur précurseur ; à l’approche de ces événements la Conservatrice s’avisa de demander une expertise pour la restauration du portrait à l’huile. L’entreprise est souvent hasardeuse. Ainsi, quelques années avant, deux conférences sur la vie de Fourier données en 2010 et 2011 devant l’U.T.B. d’abord, puis la SAMA par Daniel Reisz, avaient incité à entreprendre la restauration du pastel représentant Fourier en habit de préfet. Le pastel représentant Fourier en habit de préfet attribué à Gautherot a été effectivement restauré en 2014 sur une initiative de la Société des Amis des Musées d’Auxerre (SAMA), alors présidée par madame Arlette Halbout, qui s’est engagée à régler le devis proposé. La SAMA a effectivement réglé les 2 640,80 € correspondant aux travaux. La facture a été notoirement plus lourde : le devis a sur-estimé l’état du support et des matériaux (le portrait a été réalisé pendant le blocus avec des produits de médiocre qualité). Pour protéger l’œuvre il a fallu la doter d’un cadre et d’une vitre qui ne faisaient pas partie du devis.

En 2018, c’est Martine Lemot qui fut chargée d’expertiser la peinture et de proposer un protocole de restauration accompagné d’un devis. Voici ce qu’elle découvre :

« Toile XIXe fine à trame lâche et ouvert, complètement cuite, arrachée du châssis sur trois côtés, très déformée. Importantes lacunes de toile le long du bord inférieur (3 à 10 cm).
Plusieurs pièce au revers datant de plusieurs campagnes de restaurations différentes (scotch, cire…), très nombreux trous et innombrables microlacunes. Taches de colle et importantes traces d’humidité au revers, très for encrassement.

Châssis à clefs en bois résineux, cassé et désassemblé, entièrement vermoulu, à changer. »
« Peinture entièrement soulevée et recouverte de papier japon, tableau en cours de transposition spontanée. Innombrables lacunes avec écaillages et microécaillages, pertes de matières sur toute la surface et les bords.

Vernis fortement jauni, repeints probables, non discernables en l’état. »
La description est sans appel : c’est une sorte de miracle que l’on attendait de madame Lemot en lui soumettant la restauration de l’œuvre. Voici ce qu’elle écrit à l’issue de son travail :

« Inscriptions : A l’issue de la restauration, après vernissage, des inscriptions effacées sont réapparues dans l’angle inférieur gauche, partiellement discernables en lumière rasante naturelle et plus visibles sous ultra-violets. Nous ne disposons malheureusement pas d’une caméra infrarouge qui permettrait de les lire de façon claire.
On distingue GAUTHERS ( ? ou GAUTHIERS)

AN XII (?)

Nous ne pouvons déterminer s’il s’agit du nom du peintre ou du personnage représenté. »

 

 

Finalement, le parcours de cette toile aura suivi la même évolution que l’œuvre scientifique de Joseph Fourier : disparue, longtemps oubliée, elle réapparaît maintenant.

 

—–Notes—-

[1] L’œuvre de Gautherot ne nous est pas connue, par contre, Jean-Germain Drouais, autre élève de David, a traité le même thème.

[2] Le thème de Pyrame et Thisbé a été souvent traité dans divers arts.

[3] Sur ce site, on trouve une gravure de Lignon, d’après le tableau de Gautherot.

Jeunesse de Fourier

lundi, janvier 14th, 2019

La jeunesse de Fourier,

revisitée,

par Jean-Charles Guillaume

Le coche d’eau, dessin de Lallemand, vers 1770.

Préparant sa contribution à un ouvrage biographique concernant Joseph Fourier, à paraître aux éditions Hermann sous la direction de Jean Dhombres, Jean-Charles Guillaume[1] est revenu sur la jeunesse auxerroise de Joseph dans un livret d’une soixantaine ne pages : « La jeunesse de Joseph Fourier à Auxerre (1768-1794) : une nouvelle approche ? »[2]. Dont voici l’introduction :

L’image de Joseph Fourier (1768-1830) pendant les vingt-sept premières années de sa vie est bien connue. Il naît à Auxerre, ville qui « a un aspect moyenâgeux », un « air antique et triste […] presque toute bâtie en bois », « d’une famille pauvre, mais estimable », chez des parents qui « ne savent que très peu lire et écrire ». Cet orphelin à huit ou neuf ans est le fils « d’artisans pauvres et vertueux », « un vaillant jeune homme, sorti de cette classe ouvrière, laborieuse, si féconde en âmes fortes et d’une trempe vigoureuse [monté], par son seul mérite, aux premiers rangs de la société ». Plus tard, « amené sur un autre théâtre », celui de la Révolution, il est de ceux qui croient que « le meilleur moyen d’empêcher ce fleuve bienfaisant de devenir un torrent dévastateur, [c’est] que les hommes éclairés et vraiment patriotes [dirigent] son cours ». Son rôle à la Société populaire et au Comité de surveillance lui permet « d’empêcher beaucoup de mal et de faire un peu de bien », mais, un peu plus tard, celui à Orléans lui fait risquer la mort :

« J’ai éprouvé tous les degrés de la persécution et du malheur. Aucun de mes adversaires n’a connu plus de danger et je suis le seul de mes compatriotes qui ait été condamné à mort. Cependant ils ont l’injustice d’oublier la terreur que j’ai éprouvée pour parler sans cesse de celle que j’ai dit-on inspiré. »

On lui reproche à la fois ses excès et sa faiblesse :

« [S’il sait] conjurer l’orage qui mena[ce] plusieurs têtes dans sa villes natale, il ne peut se soustraire lui-même à ses coups. […] Chargé […] d’une mission dans le département du Loiret […], et ayant, suivant sa coutume, tempéré par l’équité et la prudence, la rigueur des mesures qu’il [a] à exécuter, il [est] mis hors la loi […], réduit à se cacher, sans fortune, et ne repar[aît] au grand jour qu’après la révocation de la mesure arbitraire dont il [est] frappé. »

Cette image est-elle conforme à la réalité ? N’a-t-elle pas été construite par ceux qui ont prononcé son éloge après sa mort – François Arago, à l’Académie des Sciences, et Victor Cousin, à l’Académie française – et par leurs relais locaux comme Gabriel Mauger en 1837, le préfet, le maire, Philibert-Joseph Roux, Gallois et Ravin lors de l’inauguration de sa statue en 1848, Ambroise Challe en 1858, Emile Duché en 1871, Charles Moiset en 1893 ?

La réponse à ces questions passe par une analyse des vingt-deux premières années de la vie de Joseph Fourier, dont dix-huit passées à Auxerre, puis par celle des cinq années de la période révolutionnaire.

La maison Fourier de 1773 à 1778.

 

[1] Professeur d’histoire, auteur, récemment, de « De Lesseré à Soisson & James, Six générations de commerçants à Auxerre, 1759 – 1963 » et précédemment de « Guilliet », « Le travail de l’ocre dans l’Auxerrois : 1763-1966, une industrie rurale. » …

[2] Coédité par la Société des Sciences Historiques et Naturelles de l’Yonne et la Société Joseph-Fourier.

Fourier et la société d’émulation

lundi, juillet 23rd, 2018

Fourier et la Société d’émulation

Un dossier, conservé à la Société des Sciences Historiques et Naturelles de l’Yonne, épais d’une dizaine de centimètres contient ce qui est parvenu jusqu’à nous des archives de la Société d’émulation d’Auxerre. Les bribes de documents laissent entrevoir l’exaltation de l’époque sur un point bien délimité (le développement et la transmission des savoirs académiques, en ce sens la société d’émulation préfigure aussi bien l’éducation populaire que les centres de culture scientifique), la société d’émulation me semble sans implication politique marquée (contrairement à la Société populaire d’Auxerre dont Joseph Fourier sera par suite membre actif). Les buts annoncés qui portent en germe ce que sera, un peu plus tard la Société des Sciences de l’Yonne, sont la diffusion et la transmission des savoirs.

SSHNY : Dossier de la Société d’émulation

La Société d’émulation d’Auxerre est fondée le 6 avril 1790, les derniers documents datés renvoient à mars 1792 ; en deux ans, les quelques membres fondateurs (Balme, Boulage, Bourdeaux, Chaudé, Deschamps, Ducrot l’aîné, Ducrot le jeune, Fourier, Lefebure, Liégeard, Pasqueau, Villetard, Bonard, Garnier) vont, au rythme moyen d’une séance par semaine, élaborer des statuts, établir des règles de vie, rechercher des locaux adaptés à leurs travaux et communiquer sur les sujets qui leur tiennent à cœur.

La Société d’émulation s’est constituée, on ne s’en étonnera pas, autour d’un noyau de professeurs du collège. Les premières réunions se tiennent chez Liégeard, un professeur du collège[1]. La devise adoptée indique clairement l’objet de l’association : « quaerunt » (ils cherchent).

L’élaboration des statuts montre tout à la fois un souci de rigueur et d’ouverture. Extraits : Les sociétaires pourront embrasser dans leurs études les sciences, les arts, les belles-lettres et tout ce qui a rapport aux connaissances humaines. /…/ La société sera composée de trente résidents et de trente associés correspondants[2]. /…/ pour être reçu au nombre des résidents il faudra avoir un domicile de fait ou de droit dans le lieu de la résidence de la société. Tout homme de lettre étranger pourra être admis à la qualité d’associé correspondant. /…/ Les femmes ne pourront être revêtue de la qualité de membres résidents mais elles pourront prétendre à celle de correspondant.

Les réunions, dirigées par un président tiré au sort chaque mois[3], sont hebdomadaires. Des discussions sont relatées améliorer la ponctualité des membres aux séances et sanctionner leurs absences injustifiées (radiation après deux mois d’absence). La Société se structure rapidement en quatre classes :

Classe de littérature : Burat, Chaudé, Liégeard, Villetard, Lefebure

Classe d’histoire : Lefebure, Bourdeaux, Boulage, Liégard

Classe de mathématique : Balme, Ducrot l’aîné, Pasqueau, Ducrot le jeune

Classe de physique : Bonard, Ducrot, Fourier

Les interventions semblent se faire, sans ordre défini, en fonction des souhaits d’intervention des participants sous la direction d’un président au rôle assez limité. Trente-neuf séances se tiennent en 1790 (elles sont numérotées dans le cahier de compte-rendus ; l’absence de numérotation en 1791 ne permet pas d’en établir clairement le nombre)[4].

Fourier tentera d’organiser le fil des interventions en demandant que chacun propose par avance les sujets sur lesquels il interviendra aux fins d’établir un calendrier.

Parmi les sujets traités :

– Mr Fourier a lu au nom de la classe de Rhétorique une dissertation sur les principe de l’attraction universelle. (9 janvier 1791)

– Me Villetard pour la classe de littérature a lu deux romances intitulées l’une : Éléonore au tombeau de son amant, l’autre Le besoin d’aimer. (9 janvier 1791)

– discours sur l’émulation en réponse à celui de Sr Fourier es ouverture des séances de la société.

– imitation de l’ode d’Horace diffugere nives

– ode pour l’anniversaire de la prise de la Bastille

– Imitation de l’ode turque adressée par Ibrahim Pacha à la fille du sultan Acmet ; tirée des lettres de Milady Montague.

– discours d’ouverture des séances après les vacances de la société

– Épître à M. D. ou voyage de Vincelles par Veaux

– Deux romances : Les Noce… et le Besoin d’aimer

– 1er chant du commencement du poème d’Anette et Colin et élégie Quand vous m’aimiez et Les Patriotes à Cithère

– L’origine des attributs de l’amour

– Plan et morceaux du 2e chant d’Annette et Colin

– Me Fourier a développé les principes de l’attraction universelle et propose le sujet : quelques difficultés relatives à l’émission de la lumière. Il a rendu hommage au profond génie de Newton qui a découvert les véritables lois de l’Univers que les anciens avaient méconnues, ou très peu de philosophes les ont entrevues et d’une manière obscure, incomplète et incohérent. Il a fini par verser des larmes sur le génie présenté et sur le bienfaiteur de l’Humanité. (dimanche 9 janvier 1792)

– Mr Fourier a présenté la solution d’astronomie physique dans les calculs de la physique céleste, il était d’usage d’exprimer l’attraction d’une sphère en divisant sa masse par le carré de la distance de son centre au point attiré. Cette expression suppose que les parties de la sphère agissent sur les corps qui les environnent précisément comme si ces parties étaient concentrées au centre de la sphère ; or le résultat n’a pas le caractère de l’évidence. On pourrait douter que ce fut le véritable résultant de toutes les attractions spéciales. 20 mars 1792 :

– L’annonce de la mort de Benjamin Franklin est l’occasion de présenter sa biographie.

Notons aussi des conférences sur la formation de la France, l’histoire des Musulmans…

Un cahier de 46 pages contenant le texte d’un pièce « le Repentir » qui porte cette mention difficilement lisible ajoutée a posteriori au crayon d’une main anonyme «  Cette pièce est je crois une mouture de la p(illisible) littéraire d’Auxerre de 1791 vers le Reg de Rétif ». La scène est au 1er acte dans le palais de Southampton donné par Edouard à Pauline Montaigne.

signatures au bas du compte-rendu de la séance du 29 avril 1790.

 

La signature de Fourier président à la Société d’Emulation le 29/30(?) avril 1790

Sources :

Jean-Charles Guillaume, 2015 « La jeunesse de Joseph Fourier à Auxerre, 1768-1794, une nouvelle approche »

Dossier Joseph Fourier, Archives de la SSHNY, aimablement communiqué par M. Alain Cattagni, président de la SSHNY.

Le lecteur intéressé pourra consulter avec fruit l’’article La société d’émulation d’Auxerre (1790-1792) – 5 pages- d’Hervé CHEVRIER, paru in Les hommes de la Révolution dans l’Yonne, Actes du colloque du bicentenaire tome 1, 1991, p.203-207, dont nous avons eu connaissance tardivement. A signaler aussi dans le tome 2 p.79-86 : L’éveil de Fourier aux idées nouvelles (1790-1794) de Jean-Bernard ROBERT.

———– NOTES :
[1] Jean-Charles Guillaume, 2015 « La jeunesse de Joseph Fourier à Auxerre, 1768-1794, une nouvelle approche » :

Fourier est élu président de la Société lors de sa première séance. A ses côtés, un camarade du collège, Georges Bénigne Liégeard, dans la maison duquel se tient les réunions, et Jean Guillaume Balme (1765-), fils d’un serrurier lié aux Cabasson et aux Dhalle, et professeur proposé le 17 octobre 1790 par dom Rosman comme professeur de huitième en remplacement Jean Louis Roux devenu sous-préfet du collège. Il est vite rejoint d’autres membres de la « phalange » qui « tous ont laissé des traces remarquables de leur passage dans la carrière des lettres, des sciences ou de l’administration » : Simon Philippe Chaudé, Jean-Joseph-Prix Deschamps, Joseph Villetard, futur secrétaire d’ambassade et poète, dont le père Edme Germain a adhéré aux idées nouvelles et qui adopte avec fouge les idées révolutionnaires, sans doute influencé par une partie de la famille qui a participé à la guerre d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique, etc. Les relations de s’élargissent à Etienne Garnier, neveu de Germain marquis Garnier, futur préfet de la Creuse de 1817 à 1823 ; Thomas Pascal Boulage, bientôt otage du roi et futur doyen de la Faculté de droit de Paris. »
[2] Ces nombres théoriques ne seront apparemment jamais atteints. Le dossier fait état de quelques discussions et votes sur l’admission de nouveaux membres, mais l’effectif total des membres restera limité proche du nombre des fondateurs.
[3] 30 janvier 1791 : on a ensuite procédé à l’élection d’un président et le sort a désigné Mr Liégeard.

6 mars 1791 : Mr le président ayant annoncé que le temps de sa présidence était expiré, on a procédé au scrutin pour la nomination du suivant et le scrutin a indiqué Me Balme qui a accepté… [on dispose dans une urne 15 billets numérotés 1 à 15 ; celui qui tire le n°15 est nommé président]

13 mars 1791 : … la société étant assemblée Mr Bonnard Présid. en la place de Mr Balme a ouvert la séance….

27 mars (vue 0029) : La présidence du mois de mars étant expirée, la société est allée au scrutin, le sort a indiqué M. Boulage qui a fixé la séance suivante au dimanche prochain. – 10 présents.

25 avril 1791 : Mr Boulage a ensuite annoncé que le temps de sa présidence expirait cette semaine et a demandé qu’on tirât au sort celui qui devait le remplacer le [tirage] ayant été fait Me Bourdeaux a été indiqué pour le ….[fin de page, la suite manque]

[4] A titre d’exemple, voici la transcription de l’ordre du jour complet de la séance du dimanche 20 février 1791 :

M. Bonnard au nom de la classe de littérature annalisé (sic) quelques principes de la théorie de la lumière

M. Chaudé au nom de la classe de littérature a lu la traduction du 1er acte d’une comédie italienne intitulée : la Vénus rusée, de Goldoni

M. Lefebure qui au nom de la classe de d’histoire ne put faire son rapport à la séance précédente l’a repris à celle-ci et a tracé rapidement l’histoire des premières découvertes des Portugais en Affrique et dans les Indes Occidentales.

Fourier à la une

mercredi, mars 21st, 2018

Fourier à la une

de l’Yonne républicaine

Ce 21 mars 2018 est le 250e anniversaire de la naissance du physicien et mathématicien auxerrois, Joseph Fourier. Joseph Fourier n’appartient plus à Auxerre, Joseph Fourier n’appartient plus à la France, Joseph Fourier appartient à l’ensemble de l’humanité. L’importance du personnage a incité à inscrire cet anniversaire au rang des commémorations nationales pour l’année 2018 et logiquement, le quotidien régional diffusé à Auxerre, l’Yonne Républicaine titre à la une sur cet événement. Deux pages intérieurs sont aussi consacrées à l’illustre académicien, ainsi qu’une page de son site.

Yonne Républicaine 21 mars 2018

Le fait du jour :

Le mathématicien auxerrois Joseph Fourier est enterré à Paris

Quand Fourier perd la tête au Père-Lachaise

Insolite

On célèbre aujourd’hui même les 250 ans de sa naissance, à Auxerre. Le mathématicien et physicien Joseph Fourier (1768-1830) est enterré à Paris, au cimetière du Père-Lachaise. Sa tombe fait partie des nombreuses histoires racontées aux visiteurs : le buste qui y trône n’est pas le sien. L’Yonne républicaine s’est rendue sur place pour tenter d’y voir clair.

par Marc Chavasson

Avec 3,5 millions de visiteurs par an, c’est l’un des cimetières les plus connus et les plus arpentés au monde : le Père-Lachaise, à Paris, avec ses 70 000 sépultures alignées parmi un dédale d’allées pavées.

Sur 44 hectares, de nombreuses personnalités y reposent : Édith Piaf, Alain Bashung, Jim Morrison, Colette… Le long de l’allée des Acacias, au sein de la 18e division, se trouve la tombe de Joseph Fourier. La dernière demeure du mathématicien auxerrois est parfois citée par les connaisseurs des lieux pour son « buste-zombie ».

Un regard livide, un nez cassé, une oreille coupée

Effectivement, le face-à-face avec la sculpture peut en faire frémir plus d’un. Placé dans une alcôve, sur un bloc aux inscriptions trop érodées pour être bien lues, le visage de pierre semble surgir de la pénombre. Un regard glaçant, un nez cassé, une oreille coupée… « Ce n’est pas une beauté fatale. Il a pris quelques gnons », commente avec un ton amusé Régis Dufour-Forestier, le président de l’Association des Amis et passionnés du Père-Lachaise (APPL).

Ce septuagénaire connaît très bien « ce musée à ciel ouvert » pour le parcourir depuis l’âge de 16 ans et guider régulièrement des groupes dans ses méandres. « Fourier ? C’est un sourire pour nos visiteurs le buste fait partie des anecdotes qui alimentent les nombreuses histoires du Père-Lachaise et renforce son attractivité. « Et pour cause : ce buste en pierre un peu fatigué n’est pas celui de Fourier. C’est celle du docteur François Chaussier », révèle Régis Dufour-Forestier. Diantre ! Une usurpation d’identité en plein Paris.

Il faut prendre un peu de recul pour tenter de comprendre la situation. Les deux tombes sont situées à seulement dix mètres l’une de l’autre. Mis à part cette proximité, seulement deux points communs relient les deux hommes. Ils sont tous les deux nés en Bourgogne (Chaussier est natif de Dijon) et ont vécu à la même période, entre la fin du XVIIIe et de début du XIXe siècle. « Le vrai buste de Fourier a disparu depuis des lustres, poursuit le président d’APPL. Pour ma part, je ne l’ai jamais connu. » Celui de Chaussier s’est également volatilisé plus récemment. « Vous savez, dans ce cimetière, il y a parfois des plaques ou des fleurs qui vont d’une tombe à l’autre… La tête de Chaussier aurait été retrouvée dans les années 1980, entre deux tombes, avance Régis Dufour-Forestier. Ce sont des habitués du cimetière qui l’auraient retrouvé et remis sur la tombe de Fourier, bien protégé dans l’enfeu. Depuis elle y est restée. »

Aujourd’hui, la tombe est en déshérence

Certains passionnés de Joseph Fourier, dont l’Icaunais Tadeusz Sliwa, rêveraient de voir trôner de nouveau un buste représentant le mathématicien. « Aujourd’hui, la tombe est en déshérence : elle n’appartient à personne. Il faut trouver un ayant droit ou attendre que la mairie devienne propriétaire de ce monument, résume Régis Dufour-Forestier. Sinon, il n’est pas possible d’envisager de toucher à cette tombe.

Le long combat d’un Auxerrois passionné par Fourier

Depuis le 1er mars, un compte à rebours a été lancé. Le conservateur du cimetière du Père-Lachaise a officiellement constaté l’état d’abandon de la tombe de Joseph Fourier.

Un « ensemble penchant à gauche », des joints à refaire », un « chapiteau fissuré » et la « présence de parpaings posés derrière le monument » sont autant d’éléments pris en compte dans ce constat.

Dans trois ans, un second constat sera établi. En l’absence de remise en état de la sépulture par un ayant droit ou un descendant, un arrêté municipal prononcera sa reprise administrative. « La Ville de Paris disposera alors librement de l’emplacement. Elle pourra alors permettre à une association comme la nôtre de s’en occuper », explique Tadeusz Sliwa, le président de la société Joseph-Fourier, à l’origine de ces démarches administratives.

« Aujourd’hui, nous ne pouvons pas apposer de plaque sur la tombe. Nous pouvons juste déposer des fleurs ou des éléments temporaires mobiles. » Pour la société Joseph-Fourier, c’est une longe attente qui vient de débuter avant de pouvoir espérer remettre en valeur la dernière demeure du mathématicien icaunais.

REPÈRES

« Fourier a eu chaud ! ». La tombe du mathématicien auxerrois a échappé de peu à un accident tragique en ce début d’année. « Un arbre malade s’est effondré sur la tombe d’à côté et l’a fortement endommagé, explique Régis Dufour-Forestier. Fourier a eu chaud ! » sa tombe aurait pu être pulvérisée por le choc. Tout s’est en effet joué à quelques centimètres.

Fourier a eu froid aussi. « Joseph Fourier était atteint d’une curieuse maladie, raconte Régis Dufour-Forestier. Il avait froid même l’été. On pouvait ainsi avoir l’impression qu’il partait pour le Pôle Nord. »

Vive l’Égypte. Des cobras, des ailes, un soleil… La tombe de Fourier est un monument inspiré de l’Égypte antique. Fourier était en effet un passionné d’égyptologie. En 1798, il a été désigné pour participer à l’expédition scientifique en Egypte.

L’Égypte toujours. À côté de la tombe de Fourier, on retrouve celle de Champollion qui aurait formulé le souhait d’être enterré près de son ami et de son mentor.

Sur les traces de Fourier. Jusqu’au 31 décembre, le Muséum d’Auxerre propose tout un parcours urbain ponctué de panneaux pour mieux comprendre la vie et l’œuvre de Fourier.

Fourier en bulles. À l’initiative d’un professeur de l’institut Fourier à Grenoble, une bande dessinée pour le grand public doit sortir aux éditions Petit à Petit, à l’automne.

Fourier denté. En discussion avec la poste depuis un an, Tadeusz Sliwa annonce qu’un timbre à l’effigie de Joseph Fourier sera « édité en 2020 ».

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L’événement est aussi relayé dans les journaux à diffusion nationale. Ainsi, cette annonce publiée dans Le Monde daté du mercredi 14 mars 2018 (supplément Science et Médecine p. 3) :

Le Monde – 14 mars 2018

EN L’HONNEUR DE JOSEPH FOURIER À PARTIR DU 14 MARS, À AUXERRE

Auxerre, sa ville natale, va honorer à plusieurs reprises le 250e anniversaire de la naissance de Joseph Fourier, mathématicien français de la Révolution :

– Cédric Villàni donnera le 14 mars (18 h 30, salle « Le 89 », boulevard de la Marne) une conférence « De Fourier à aujourd’hui : comprendre le défi de l’intelligence artificielle ».

– Une exposition, pilotée par le Muséum d’Auxerre sous forme de parcours urbain accessible en permanence, fera découvrir les richesses du patrimoine auxerrois et la présence de Joseph Fourier. hier comme aujourd’hui. Inauguration le 21 mars à 10 heures.

– Une mini-expo « Fourier 1768-2018 » au Muséum d’Auxerre (boulevard Vauban), a été conçue avec des élèves du lycée Fourier. Informations sur www. smf.emath.fr

FOURIER À PARIS AUSSI, LE 21 MARS : Le 21 mars, Jean Dhombres, historien des mathématiques, donnera à Paris 5e (Fondation Napoléon rue Geoffroy-Saint-Hilaire), une conférence « Fourier et Napoléon ». Inscription : paris.delegation@ gmail.com

MATHÉMATIQUES ET ARTS, À PARIS DU 12 AU 23 MARS : La salle René-Capitant (près de la mairie du 5e) propose une exposition « Mathématique et arts » conçue par l’ESMA et deux conférences le 20 et 22 mars à 18 h sur les liens entre ces deux disciplines. mairie05-fo.paris.fr/actualites?page=2

« FRACTALES » AU CINÉMA À NANCY LE 28 MARS : La prochaine conférence du cyc1e « Mathématiques et société », en partenariat avec « Sciences en lumière », mercredi 28 mars à 18 h 30 (salle Raugraff, 13bis, rue des Ponts, Nancy) sera consacrée aux fractales, ces magnifiques objets mathématiques auto-similaires rendus célèbres dès 1975 par le mathématicien franco-américain Benoît Mandelbrot. La projection du film sera suivie d’un débat avec Julien Bernat et animé par El-Haj Laamri. Informations sur www.iecl.univ-lorraine.fr

 

Fourier encore

samedi, mars 17th, 2018

Fourier encore

Ce 17 mars 2018, on trouve deux mentions se rapportant à Joseph Fourier dans le quotidien auxerrois l’Yonne Républicaine. L’un est la relation un échange humoristique qui s’est déroulé au cours de la conférence de Cédric Villani le 14 mars 2018 :

YR 17/03/2018 p. 9

L’autre, plus sérieusement, est une information à propos d’un colloque qui se tiendra à Paris le 7 avril 2018. Ce colloque inaugure une exposition qui sera visible du 4 avril au 30 juin à l’Institut Henri-Poincaré.

YR 2018/03/17 p. 9

 

 

Fourier en sa ville

mercredi, mars 14th, 2018

Fourier en sa ville natale

     Dans son édition du 14 mars 2018, le quotidien local, l’Yonne Républicaine, page 11, rend compte du programme prévu à Auxerre, sa ville natale, pour fêter le 250e anniversaire de la naissance de Joseph Fourier : une conférence, par Cédric Vilani, un prix pour quatre élèves méritants, une exposition, un parcours urbain.

YR, 14 mars 2018

Nous avons, de notre côté, présenté ce programme ici et souhaitons suivre sur ce site les manifestations au fur et à mesure de leur déroulement.

Fourier sur la lune

samedi, mars 11th, 2017

Le quotidien auxerrois l’Yonne Républicaine honore Joseph Fourier dans son édition du 9 mars 2017 à l’occasion du bicentenaire de son admission à l’Académie des sciences. L’angle choisi par Grégoire Molle pour la présentation en une est un peu insolite ; il incite le lecteur à se rendre en pages intérieures pour y découvrir un rappel assez complet de ce qui doit être porté à la gloire de Joseph Fourier.

Un Auxerrois a fait

son trou sur la lune

Grégoire Molle – gregoire.molle@centrefrance.com

   

YR-9 mars 2017, une

Insolite : Un cratère lunaire a pris le nom du scientifique Joseph Fourier, né à Auxerre au XVIIIe siècle. Plus de 1 500 cratères de la lune portent un nom. L’un d’eux est baptisé du nom de Joseph Fourier, mathématicien né dons la ville d’Auxerre.

Environ 10 % des cratères lunaires ont été baptisés du patronyme de personnalités françaises. Parmi eux, un Icaunais, né à Auxerre le 21 mars 1768 : Jean-Baptiste Joseph Fourier.

Les travaux scientifiques du mathématicien auxerrois ont notamment concerné la propagation de la chaleur. Il a montré que cette propagation, dans les corps solides, peut être analysée à travers des séries mathématiques qui portent son nom, d’après l’encyclopédie Britannica.

     Trente Français : En plus de ces séries, un cratère porte également le nom de ce scientifique depuis la première moitié du XIXe siècle, quand deux astronomes de l’époque, Wilhelm Beer et Johann Heinrich Mädler élaborent une carte du satellite de la Terre. Trente noms de Français figurent alors parmi ceux présents sur cette carte, affirme Jean-Michel Faidit, qui a détaillé ses recherches dans le livre Ces Français dans la Lune.

La nomenclature officielle des noms de cratères lunaires est créée en 1935 par l’Union astronomique internationale (UAI), une organisation dont les 12 727 membres sont des astronomes professionnels. C’est cette institution qui est, encore actuellement, responsable nommer les cratères de la Lune. Aujourd’hui, 164 de ces cavités sont nommées d’après des Français, et deux d’après des Françaises, dont Marie Curie.

Jean-Baptiste Joseph Fourier est considéré comme l’un des premiers scientifiques à avoir écrit sur les principes de l’effet de serre. Son Mémoire sur les températures du globe terrestre et des espaces planétaires « est effectivement considéré aujourd’hui comme portant les bases de la compréhension de l’équilibre thermique des atmosphère planétaires », écrit Jean-Louis Dufresne, membre du Laboratoire de météorologie dynamique, dans son article Jean-Baptiste Joseph Fourier et la découverte de l’effet de Serre.

     Des chercheurs : « Il a vraiment posé les bases de ce qu’on appelle la physique du climat », affirme l’auteur de cet écrit. Les chances de nommer un cratère lunaire sont faibles. Rose Hayward, qui gère la base de données pour un groupe de travail dédié à la nomenclature du système planétaire, affilié à l’UAI, dit que ce sont généralement les chercheurs qui proposent ces noms. «  Bien que le public puisse tout à fait suggérer des noms, le nombre de noms suggéré est bien supérieur au nombre de noms nécessaires », écrit-elle dans un courriel.

L’héritage de Fourier

reste d’actualité

Cette année marque le 200e anniversaire de l’entrée du scientifique Jean-Baptiste Joseph Fourier à l’Académie des sciences. Né à Auxerre, où il fut élève et professeur à l’École royale militaire locale, Jean-Baptiste Joseph Fourier a donné son nom à un lycée et à une rue de sa ville natale.

En 1789, le scientifique présente un mémoire sur la résolution d’équations algébriques, devant l’Académie des sciences, selon le site Internet de cette institution. En 1812, l’Institut national des sciences et des arts récompense ses travaux sur le mouvement de la chaleur dans les corps solides par le grand prix de mathématiques de l’Institut.

En 1817, Jean-Baptiste Joseph Fourier est élu et confirmé comme membre de l’Académie des sciences, dont il devient secrétaire perpétuel pour les sciences mathématiques en 1822. Près de dix ans plus tard, le scientifique entre à l’Académie française. Il était également membre de la Royal Society of London.

Le scientifique a parfois suscité l’indignation de ses pairs, rappelle Jean-Pierre Kahane, membre de l’Académie des sciences et auteur de l’article Le retour de Fourier. Ses travaux sur les fonctions et les intégrales trigonométriques étaient « très mal admis par une partie des mathématiciens de cette époque, » assure-t-il.

L’héritage du scientifique peut être trouvé dans les mathématiques, les sciences physiques, ainsi que dans la biologie. «On ne connaîtrait pas la structure des ribosomes si on n’avait pas mobilisé l’analyse de Fourier pour ça, d’après Jean-Pierre Kahane. Il y a maintenant une découverte de tout ce que Fourier a fait» et était resté méconnu, continue-t-il. Pour lui, le rapprochement récent des mathématiques et des sciences physiques peut expliquer la réhabilitation de Fourier, qui a travaillé dans ces deux domaines.

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Jules Verne : Dans Autour de la Lune, Jules Verne fait dire à Barbicane que le moment est venu de « vérifier la température de l’espace, et voir si les calculs de Fourier ou de Pouillet sont exacts. »

Un chiffre : 4,55 en milliards d’années, l’âge de la Terre, établi notamment grâce à l’équation de la chaleur due à Joseph Fourier.

Fourier en creux

lundi, août 8th, 2016

Fourier en creux

YR 6 août 2016

YR 6 août 2016

     Le 6 août 2016 paraît, à Auxerre, dans le journal local, l’Yonne Républicaine, une page consacrée aux Auxerrois célèbres représentés par une statue dans la ville.

     Huit gloires locales ont ainsi droit à un développement de dix à vingt lignes : Paul Bert, Jean Moreau, le maréchal Davout, Charles Surugue, Marie Noël, Rétif de la Bretonne, Cadet Roussel et saint Amatre.

     La journaliste, Laurenne Jannot prouve qu’elle connaît bien son terroir : Fourier, dont la statue a disparu dans les conditions que connaissent les lecteurs de ce blog, s’il n’est naturellement pas à l’image, a droit à une mention spéciale un peu plus étoffée que celles de ses « rivaux » sous le titre, en grosses lettres « Fourier n’a qu’un médaillon ».

     Il est probable, que dans une prochaine édition, ce souvenir en creux, d’un Fourier voué aux Gémonies par l’occupant, soit gommé lorsque à l’action entreprise par le CCSTIB, sous l’impulsion de Tadeusz Sliva aboutira. Nous en reparlerons alors plus largement.

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Fourier en médaillon

Fourier

Fourier

 

Fourier et Auxerre

mardi, décembre 29th, 2015

Fourier et Auxerre

Ce que le mathématicien et physicien Joseph Fourier doit à Auxerre

La Société des Sciences Historiques et Naturelles de l’Yonne nous annonce qu’une conférence concernant Joseph Fourier sera donnée dans ses locaux : 1 rue Marie Noël à AUXERRE.

Dimanche 7 février 2016

à 14 h 30

Jean Dhombres

Jean Dhombres

Jean DHOMBRES

Ce que le mathématicien et physicien Joseph Fourier doit à Auxerre

 

Rappelons que Jean Dhombres, qui a publié en 2012 chez Hermann une biographie de Laplace, prépare une biographie de Joseph Fourier à paraître prochainement chez le même éditeur.

Les lecteurs de ce billet qui souhaiteraient des précisions peuvent poser leurs questions auprès de sjf89@laposte.net.

Plaque commémorative

Plaque commémorative

Maison natale de J.J. Fourier

Maison natale de J.J. Fourier

La statue de Joseph Fourier

mercredi, juillet 29th, 2015

La Statue de Fourier à Auxerre

 1844 – Première idée d’une souscription : Gau de Gentilly, par testament, lègue une somme de 4 000 fr. pour élever un buste à Fourier dans une des salles de la bibliothèque. Une commission, composée de MM. Jomard, président, Champollion-Figeac, Larabit, Mauger, Châtelet et Roux, et constituée par la ville d’Auxerre, est chargée, à Paris, de centraliser les fonds dont l’importance permet bientôt d’ériger une statue au lieu d’un simple buste.

Nous avons déjà relaté ici l’historique que Daniel Reisz a brossé du projet d’Edme Faillot qui fut retenu, nous n’y reviendrons pas. Initialement, la statue et les bas-reliefs de son socle furent érigés dans le jardin botanique.

1849 – Inauguration

10 mai 1849 : inauguration dans le Jardin Botanique (près de l’actuel -2015- Palais de Justice).

Le bulletin de l’année 1849 de la Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne, pages 119 à 136, conserve le compte-rendu des festivités liées à l’inauguration. On y trouve les allocutions du maire de la ville [Uzanne], de MM Roux, Gallois, Ravin et Burat.

1882 – Déplacement de la statue

En 1882 la construction de l’actuel Palais de Justice et la réorganisation du quartier imposa de déplacer la statue. Le Palais de Justice occupe la plus grande partie de l’emplacement de l’ancienne abbaye de Notre-Dame-la-d’Hors. Elle avait été remplacée elle-même depuis la Révolution par divers services communaux ; on y avait logé d’abord le curé de la paroisse Saint-Etienne (1809), puis plus tard la bibliothèque publique et le musée, les justices de paix, le tribunal de commerce et une école de filles. Le jardin des moines devint, en 1827, une sorte de jardin des plantes, au milieu duquel on plaça, en 1849, la statue de Joseph Fourier. Une promenade de tilleuls fut plantée sur l’emplacement de l’église de Saint-Marien, qui coupait transversalement la place actuelle, et dont le sanctuaire se rapprochait de la rue Notre-Dame.

Ce déplacement ne se fit pas sans réflexions. Réflexions préliminaires et travaux de commission sont relatés dans le bulletin de la SSHNY de 1882. On y trouve une lettre de Demaison et, dans un rapport de Marcilly, les conclusions de la commission réunie par la SSHNY. Finalement, la statue est installée sur une place proche de la Mairie qui devient place Fourier (actuelle place du Maréchal Leclerc), devant la bibliothèque municipale qui occupait alors le premier étage de l’ancien Palais de Justice jouxtant la Mairie d’Auxerre. [Malgré l’érection de cette statue au milieu d’une place centrale de la ville, on peut noter que l’œuvre de Fourier est méconnu en cette fin de siècle, comme en témoigne le peu d’intérêt que lui portent Arluison et Carteret.]

1942 – La statue de Fourier est fondue dans le cadre de la réquisition par l’Etat français de Vichy de statues de bronze, pour épargner les cloches des églises, le Régime nazi ayant exigé du métal pour son armement sans se soucier de l’origine de ce métal.

Les bas-reliefs apposés sur le socle de la statue sont cependant épargnés. Le détail des décisions des différentes instances de l’Etat français, acceptées ou non par la municipalité d’Auxerre, se trouve dans un article de Bernard Richard, tome 150 (2012/2) du Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne, pages 123 à 152 : « Vendanges de bronze dans l’Yonne sous l’Occupation ».

[C’est aussi à cette époque et pour les mêmes raisons, qu’à Paris la statue de Fourier, Charles, le théoricien de l’économie, située boulevard de Clichy, réalisée par Émile Derré, payée par le produit d’une souscription populaire, inaugurée en juin 1899 fut réquisitionnée et fondue. Le socle, resté en place, a été réutilisé le 10 janvier 2011 pour l’installation de La Quatrième Pomme, une sculpture contemporaine en inox.]

1952 – Installation d’un médaillon sur la façade de l’ancien Palais de justice de la ville devenu bibliothèque municipale, puis maintenant annexe de la mairie. Sur la même façade, sont aussi scellées les deux plaques de bronze initialement posées sur le socle de la statue détruite.

L'assèchement des marais de Bourgoin

L’assèchement des marais de Bourgoin

L'éloge funèbre de Kléber

L’éloge funèbre de Kléber

 

 

 Joseph Fourier en médaillon

Joseph Fourier en médaillon

22 juin 2012Lancement d’une souscription nationale par Gilles Bertrand (président du CCSTIB) et Tadeusz Sliwa (coordinateur général de la souscription) avec la participation des signataires du comité.

3 mars 2015 : Lancement d’une campagne de publicité sur Internet pour la souscription de la statue Joseph Fourier.

20… – Réalisation et inauguration à Auxerre du second monument à la gloire de Joseph Fourier, académicien du début du 19e siècle et inspirateur de recherches fructueuses dans de nombreux domaines de physique et de mathématiques contemporaines.