Léo Drouyn et la Commission des Monuments historiques de la Gironde

L’idée de préserver les bâtiments anciens est apparue juste après la Révolution, pendant laquelle de nombreuses destructions d’églises et de châteaux ont eu lieu. Auparavant, on n’hésitait pas à raser les monuments pour en construire de nouveaux, adaptés aux goûts et aux besoins de l’époque. Pour repérer et conserver les monuments importants d’un point de vue historique ou architectural, l’Etat crée en 1830 le poste d’Inspecteur général des Monuments historiques. Prosper Mérimée, célèbre écrivain, est nommé à ce poste en 1834. Il réalise une longue série de tournées à travers la France pour découvrir les bâtiments en péril. En 1837, il participe à la création de la Commission nationale des Monuments historiques dont le but est de prendre en charge la sauvegarde des monuments et de les protéger des projets d’urbanisme ou des restaurations sans autorisation. Un site Internet est consacré à cet homme, qui incarne cette volonté de conservation des monuments. Pour le découvrir, cliquez sur le lien suivant :

http://www.merimee.culture.fr/accueil_flash.html

La  Commission des Monuments historiques de la Gironde est mise en place en 1839 sur le modèle de la Commission nationale des Monuments historiques. Léo Drouyn travaille pour elle de 1842 à 1849. La mission de cette commission est de réaliser un inventaire des monuments dignes d’être conservés, d’en indiquer l’état de conservation et d’assurer leur protection. Elle fait donc appel à des architectes et des dessinateurs pour représenter les monuments choisis. La Commission des Monuments historiques de la Gironde commande à Léo Drouyn des « études pittoresques », c’est-à-dire des dessins en élévation de nombreux monuments. Léo Drouyn doit également parfois, lorsqu’il se rend sur place pour dessiner les monuments, les étudier ou en dresser un inventaire sommaire. Mais Léo Drouyn quitte cette commission en 1849, devenue selon lui complice du « vandalisme restaurateur », c’est-à-dire des restaurations excessives qui dénaturent les monuments.

Vous trouverez en suivant ce lien une exposition virtuelle réalisée par les Archives départementales de la Gironde, entièrement dédiée à l’histoire de la Commission des Monuments historiques, et où il est question de Léo Drouyn : http://fonds-archives.gironde.fr/4T/exposition/defaut/index.jsp

 

L’invention du tube de peinture

Au XIXe siècle, les artistes sortent de leurs ateliers pour peindre en extérieur, « sur le motif ». Cette attitude est rendue possible par l’invention du tube de peinture.

La peinture est obtenue en mélangeant des pigments à un liant. Les pigments – qui donnent à la peinture sa couleur – sont des poudres d’origine animale, végétale, minérale ou chimique. Le liant peut être à base d’eau (additionnée de gomme arabique, de colle ou de jaune d’œuf) ou d’huile.

Jusqu’au XIXe siècle, les peintres préparent eux-mêmes leurs mélanges. Ils ont leurs propres recettes pour fabriquer leurs couleurs. Dès 1822, James Hams conçoit un nouvel emballage pour la peinture : des seringues en verre ou en métal. Cependant, leur coût élevé empêche leur diffusion. C’est en 1841 que le peintre américain John Goffe Rand invente le tube de peinture en métal souple, compactable, fermé hermétiquement à l’aide d’une pince. Ce concept est repris et commercialisé en France par la maison Lefranc, qui améliore le principe du bouchon à pas de vis. Désormais, ce sont des marchands de couleurs qui assument la fabrication de la peinture et proposent de nouveaux produits. Munis de tubes de peinture déjà préparés et faciles à transporter, les peintres peuvent plus facilement s’évader de leurs ateliers et travailler en plein air, pour capter une atmosphère ou traduire la lumière d’un paysage. 

Glossaire teinture

Acrylique : Liant synthétique permettant la fabrication de peintures diluables à l’eau, faciles à appliquer, et séchant vite.

Calcination : Technique consistant à chauffer à très haute température un élément.

Cochenille: Insecte provenant originellement du Mexique, dont la carapace séchée et réduite en poudre sert de pigment rouge, le kermès.

Décantation : Opération de séparation chimique de plusieurs éléments constituant une matière. On peut ainsi séparer soit plusieurs liquides, soit des solides.

Décoction : Méthode d’extraction des arômes d’une préparation, par une dissolution dans l’eau bouillant. Cette méthode est généralement appliquée aux parties les plus dures des plantes (racines, graines, écorces etc.).

Kermès (ou vermillon) : Nom donné au pigment rouge obtenu par le traitement des cochenilles.

Lévigation : Technique permettant de séparer les constituants d’une poudre avec un courant liquide. C’est l’action de purification des minéraux par l’eau.

Liant : En peinture, le liant a pour fonction de donner de la cohésion aux pigments, tout en leur permettant de tenir solidement après séchage.

Macération : Opération qui consiste à laisser tremper à froid un corps dans un liquide pour en extraire certains constituants solubles.

Mortier : Appareil constitué d’un récipient en matière solide et d’un pilon, servant à moudre des éléments organiques.

Ocre : Roche composée d’argile et de grains de sables, qui donne des pigments naturels allant des rouges aux bruns.

Oxydation : Processus d’union entre un élément ou une substance avec l’oxygène. Celui-ci est un phénomène qui peut se produire dans la vie de tous les jours car l’air contient du dioxygène.

Pastel : Plante tinctoriale, utilisée pour la couleur bleue.

Pigment : Substance minérale, chimique ou organique que l’on mélange à un liant afin de  constituer un film de peinture solide qui se fixe à la surface des supports. Ce sont les pigments qui colorent une peinture.

Tempera : Technique de peinture, autrefois fabriquée à base de jaunes d’œufs exclusivement. De part sa texture, c’est l’ancêtre de notre gouache.

L’origine des couleurs

Les pigments et colorants sont extraits de végétaux, de minéraux, ou bien d’animaux. Certaines couleurs sont également fabriquées par des procédés se rapprochant de l’alchimie, ce sont les pigments artificiels.

Au Moyen Age, la majorité des couleurs est fabriquée à partir de végétaux ; les procédés pour extraire des colorants de plantes sont divers : cela peut se faire par macération, ou par décoction et cuisson. On peut aussi extraire des pigments de matières minérales comme des pierres ou de la terre. Les pierres, broyées (différemment selon la nature de la pierre), sont réduites en poudre. Quant aux terres, elles sont lavées puis décantées pour séparer le pigment du sable. Enfin, le monde animal peut fournir certaines couleurs, comme le noir obtenu par calcination d’os de cerf, ou d’ivoire d’éléphant, ou le rouge kermès fabriqué à partir d’un insecte.

Tous ces pigments sont la base des peintures ou teintures utilisées autrefois : la peinture n’est en réalité que le simple mélange d’un pigment avec un liant.

Fabriquer des pigments

On peut utiliser différentes sortes de terres ou de pierre pour créer des pigments : par exemple l’ardoise une fois préparée donnera une poudre noire bleutée, des terres peuvent donner de l’ocre, la brique un rouge brun etc. Fabriquer un pigment est à la portée de tous, cependant il n’est pas évident de se procurer de bonnes matières premières, à l’origine de couleurs intéressantes.

Afin d’obtenir de jolies couleurs de pigment, une astuce consiste à se servir de pigments déjà utilisés, et de les remettre en poudre. On peut ainsi réutiliser les pigments de crayons de pastels secs, qui seront faciles à réduire en poudre à l’aide d’une feuille de papier de verre très fine (grain 600), ou d’une râpe à craie.

Les pigments obtenus n’ont plus qu’à être mélangés à un liant pour devenir de la peinture.

Le broyage

Pour fabriquer des pigments à partir d’éléments naturels « secs » comme la terre ou la pierre, il faut commencer par écraser l’élément au mortier, jusqu’à l’obtention d’une poudre fine et homogène. Cette étape peut être longue et fastidieuse, c’est pourquoi il vaut mieux choisir une matière plutôt molle, comme de la brique, ou certaines pierres tendres. Il faut ensuite séparer la poudre de ses impuretés par la lévigation : c’est l’action de purification des minéraux par un courant liquide. Cela demande un équipement de chimie adapté, ce qui rend la fabrication de pigments à partir d’éléments minéraux compliquée.

Pour obtenir une pâte, il est important de mélanger les poudres obtenues à un liant en veillant bien à respecter les bonnes proportions de pigments et de liant. Attention certains pigments sont incompatibles avec certains liants par exemple !

Les liants

En peinture, il n’est pas faux, même si c’est un peu simplificateur, de considérer le liant comme une « colle à pigments et à supports » donnant à la couleur une viscosité qu’elle n’a pas naturellement, tout en la protégeant. Si on mélange les pigments seulement avec de l’eau, ils redeviendront une poudre qui s’envolera dès que l’eau sera évaporée.

Les premières peintures rupestres connues (Tsodilo, Arnhem, Lascaux, Chauvet, Altamira, etc.) étaient souvent réalisées sans liant. La plupart n’aurait pas résisté à une exposition même brève à l’air libre. En Australie, on commença très tôt (cf. Anne Varichon) à utiliser le suc d’orchidée sauvage, le jaune d’œuf, la cire et divers produits d’origine végétale comme liants. On mentionne l’emploi de graisses animales au paléolithique en Europe. Mais parmi les tous premiers liants de grande efficacité, outre l’œuf et la cire qui on fait leurs preuves, nous citerons la gomme arabique et probablement aussi la gomme de merisier (que nous connaissons mal). Les huiles à peindre n’apparaîtront que très tardivement, bien après le jaune de l’œuf, et une bonne quantité de produits ayant démontré leur bonne adaptation à des contextes précis d’emploi pictural.

Toute peinture est constituée au moins :

–   de pigments

–   d’un, voire de plusieurs liants qui mouillent et collent les pigments entre eux tout en les faisant adhérer au support.

Chaque procédé de peinture réfère à un liant spécifique. On parle de « procédé à l’huile », de « tempera à l’œuf, à la caséine ou à la colle », de peintures synthétiques, acryliques, vinyliques, de peinture à fresque au mortier, etc.

Les artistes ont élaboré des recettes de peintures, que nous pouvons tester pour la plupart :

– les peintres de l’Antiquité peignaient à l’encaustique : ils mélangeaient leurs pigments avec de la cire d’abeille qu’il faut chauffer pour pouvoir ensuite l’étaler. L’ajout d’une résine à la préparation durcissait l’ensemble une fois sec.

– au Moyen Age et à la Renaissance, on utilise la tempera (l’ancêtre de notre gouache). C’est le jaune d’œuf qui sert de liant. On mélange ce jaune (avec une goutte de vinaigre) aux pigments pour obtenir une peinture brillante avec des couleurs vives. Attention : la peinture ainsi fabriquée ne se conserve pas, il faut l’utiliser aussitôt !

– les frères Van Eyck passent pour être les inventeurs de la peinture à l’huile. Cette peinture est difficile à fabriquer (il faut des huiles spéciales et faire très attention aux proportions). Cette peinture ne se dilue pas à l’eau, mais à l’huile, à la thérébentine ou au white spirit. Elle a des qualités de transparence et de souplesse très intéressantes.

– le XX° siècle a vu l’invention d’un liant: l’acrylique. Il permet de réunir les avantages de la gouache (se dilue à l’eau) et ceux de l’huile (imperméable une fois sec, permet des empâtements qui ne se craquellent pas, devient transparent une fois dilué et permet des glacis…).