Genèse maudite

 Publié en 1967, Un bébé pour Rosemary est un roman écrit par Ira Levin (l’homme qui vous regarde à votre gauche), écrivain Américain père de plusieurs best-sellers parmi lesquels un bonheur insoutenableLes Femmes de Stepford ou encore le roman dont je vais vous parler.

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Un hôtel particulier 

Dans les pages de ce roman d’horreur fantastique, nous suivons l’histoire de Rosemary, jeune femme au foyer, et de son mari Guy qui est comédien. Le jeune couple cherche un nouvel appartement dans le Bradford, un immeuble chargé d’histoire. Miraculeusement une place se libère suite à la mort d’une de ses habitantes. Le malheur des uns fait toujours le bonheur des autres ! Ils sautent alors sur l’occasion et l’achètent sans attendre, et surtout sans savoir que cet achat scellera leur destin. Par la suite ils font la connaissance d’un vieux couple, mais celui-ci semble un peu trop s’immiscer dans leur vie et, surtout, trop s’investir dans la grossesse de Rosemary avec un allier des plus surprenants…

Un roman en deux temps

Source : https://www.fnac.com/ a88250/Ira-Levin-Un-Bebe- pour-Rosemary

Un bébé pour Rosemary est un roman que j’ai avant tout eu du mal à commencer. Selon moi la première partie n’était qu’un ramassis de clichés inintéressants, notamment la façon dont Levin s’attarde sur la banalité de la vie du couple doublé d’une mauvaise plume destructrice. Mais omettons cette plume.

Après avoir survécu à cette première partie interminable relatant la vie banale du couple, une dimension totalement différente s’est ouverte à moi. Plus de cliché, plus d’ennui, le récit est alors gorgé de mystère mais surtout il devient malsain, surtout lorsque l’on fait face à un attachement surprenant au satanisme ainsi qu’un mépris plus que constant pour le catholicisme. Cette deuxième partie change totalement l’image qu’on a jusqu’alors du roman. On se surprend à s’attacher aux personnages, à attendre la suite, à vouloir deviner les mystères de cette immeuble et l’identité secrètes de chacun de ses habitants, on se met à douter de chaque personne, de chaque geste, de chaque parole. Nous nous retrouvons presque dans le même état psychologique que Rosemary. On plonge lentement, tout comme elle, dans une profonde psychose face au monde qui l’entoure. Tout cela est essentiellement dû au vieux couple mais aussi au passé sombre du Bradford. Mais l’évènement qui bouleverse réellement Rosemary et la plonge dans une lente folie est tragique ! Malheureusement, pour le découvrir il vous faudra lire le roman… Mais ayant un cœur, voici une citation qui pourra vous mettre sur la piste :

« C’était assez marrant, je me faisais l’effet d’être un nécrophile »

             – GUY

Le dénouement de l’histoire m’a choquée mais pas déçue ! Le talent qu’à l’auteur de pouvoir pervertir le monde est admirable et bouleversant. Il nous plonge dans un premier temps dans un récit monotone pour ensuite mieux nous transporter dans l’horreur. Malgré tout, même si j’ai aimé ce roman, la plume de l’auteur ou peut-être du traducteur ne m’a en revanche pas du tout plu. A mon sens elle gâche une œuvre que j’aurais pu adorer.

En résumé Un bébé pour Rosemary est une histoire profondément intéressante mais gâchée par la mauvaise plume de l’auteur/traducteur. Malheureusement ce n’est pas un élément que l’on peut omettre facilement.

Pour terminer, j’ajouterai qu’un minuscule détail a fait une place particulière à ce roman dans mon cœur…suspense… je suis née le même jour que l’auteur ! Alors pour cela je lui mets trois étoiles !

Si vous avez aimé ma critique, et je n’en doute pas, filez lire ce roman ! Faites-vous votre propre avis sur cette plume que j’ai détestée et cette histoire que j’ai adorée.

Levin Ira. Un bébé pour Rosemary, Robert Laffont, 2005.

Elora DUFLOS, 1ère2

Qui est-il vraiment ? 

Source : https://bookdoreille.com/american-psycho1

6 mars 1991 aux États-Unis. Meurtre, misogynie, viol, démence, violence macabre, torture, narcissisme, drogue, psychopathe ! Un nouveau thriller fait scandale ? Et oui, voici chers lecteurs : American Psycho

Comment vous parler d’American Psycho ? Eh bien, je vous dirai que ce roman écrit par Bret Easton Ellis en 1991 met en scène Patrick Bateman qui est ce que l’on appelle un golden boy : homme beau, toujours bien habillé, prenant soin de lui et de son image ; un homme avant tout riche et apprêté ! Vous me direz donc que je parle de l’homme parfait, le seul et l’unique ! Mais tout cela serait sans compter sur le passe-temps favori de notre très cher Monsieur Bateman. Quand je parle de son passe-temps favori j’entends par exemple le meurtre, le viol organisé, la torture ainsi qu’un vilain goût pour les scènes ensanglantées. Mais ce n’est tout, Patrick Bateman est aussi un grand poète comme nous le prouve ces citations : « Tu es une putain de vilaine garce, je veux te poignarder à mort, et ensuite jouer avec ton sang » ou encore « Ne prends pas cet air affligé, connasse ! ». En plus d’être un véritable détraqué mental prédateur violent, Patrick Bateman possède un narcissisme et un amour propre à toute épreuve.

Une double sensation. Avec tout ce que je viens de vous dire, on pourrait croire qu’American Psycho est un véritable tas d’ordure absolument obscène et inhumain, seulement bon à être jeté. En réalité ce roman est bien plus que cela ! Il est pour moi l’un des chefs d’œuvres de ces quarante dernières années. Je me permettrais même de dire qu’il est l’un des pionniers de son époque. A travers le personnage de Bateman ce roman vous procure à la fois une sensation de compréhension et d’incompréhension. Cette sensation est vraiment très intéressante car elle permet d’attiser la curiosité de n’importe quel lecteur. Cette déconnexion de la réalité, ce droit qu’il s’accorde lui-même à céder à ses pulsions, à faire ce qu’il veut quand il le veut ne nous laisse pas indifférents, et je pense, à mon humble avis, qu’au fond de nous, nous l’envions tous ! 

Même si ce roman choque, même si son contenu divise, pour moi la littérature doit être détachée de la réalité ; comme une sorte de rêve éveillé ou un cauchemar si vous le souhaitez. La Littérature est une échappatoire pour n’importe qui, un endroit où on peut s’évader pour penser à n’importe quoi. C’est donc pour cela que je trouve que l’œuvre de Bret Easton Ellis n’est ni immorale, ni malveillante, mais seulement à son goût et à celui des lecteurs qui en apprécient la lecture, lecteurs dont je fais partie.  

Je concluerai en disant en toute franchise à toutes et à tous : foncez lire ce livre, vous ne serez pas déçu même si certains passages peuvent paraître longs ou macabres. Faites-moi confiance. Son sarcasme, sa violence, son histoire, tout est absolument parfait !

J’attribue en toute logique 5 étoiles à ce titre qui m’a particulièrement plu en tout point ! 

Je tiens aussi à préciser qu’il existe une adaptation cinématographique de ce roman toute aussi intéressante que je vous conseille aussi ! Merci de m’avoir lu, en espérant vous avoir convaincus, vous, mes chers lecteurs !

Easton Ellis , Bret. American psycho. UGE, 04/2005. 526p. 10/18. ISBN 978-2-264-03937-8

Erevan GALLET, 1ère2 

Et les héros chantaient…

Avez-vous déjà entendu parler des « BookTok » ? Mais si, vous savez, ces livres tendances sur les réseaux sociaux qui ont même un rayon dédié dans les librairies…Eh bien, Le chant d’Achille de l’ancienne professeure de latin Madeline Miller en fait partie.
Au début j’ai choisi ce roman en ayant en tête de contredire l’avis de toutes ces personnes qui adorent ce livre sans argument. Quoi de mieux donc que de critiquer ce livre négativement ? En revanche, tout ne s’est pas passé comme prévu…
J’ai clairement adoré ce roman, mais moi j’ai des arguments !

Un mythe revisité

Le chant d'Achille

Source : https://www.fnac. com/a7975033/ Madeline- Miller-Le-Chant-d-Achille

Vous connaissez sûrement l’histoire du prince Achille, ce guerrier presque invincible, n’ayant qu’une seule faiblesse, son talon…

Ce roman nous présente une version plus moderne du récit mythologique.

Tout d’abord on pense que le protagoniste central est Achille. Or ce n’est pas le seul. En effet le narrateur du roman est un personnage nommé Patrocle. Il n’est encore qu’un jeune garçon lorsqu’il est exilé après avoir commis une grave erreur. Durant son exil Patrocle rencontre le prince Achille, destiné à être le meilleur guerrier de toute la Grèce. Nous allons suivre tout au long du récit ces deux protagonistes. Nous allons les voir grandir, évoluer, dans le bon comme dans le mauvais sens. Leur relation va également se développer, ils vont passer d’inconnus à amis, et bien plus encore… « Quoique tu deviennes, ça n’aurait pas d’importance pour moi, tant que nous sommes ensemble. » Le roman nous présente des scènes diverses et variées, de vies, d’intrigues et de combats. De plus l’œuvre fait beaucoup référence à l’Iliade et l’Odyssée. C’était très drôle de voir les personnages de ces deux œuvres d’Homère ne pas connaître leur futur destin. Durant ma lecture je suis passée par toutes les émotions même si je pensais connaître la fin. Les personnages sont sous l’emprise du destin, même si celui-ci pourrait bien changer… Comment ? A vous de le découvrir !

Madeline Miller : « j'ai l'impression que beaucoup de gens essaient encore  de transformer les femmes en poupées vivantes…»

Madeline Miller Source : https://www.lepoint.fr/livres/ madeline-miller -chaque-generation-doit-pouvoir-reinterpreter -les-mythes-10-07-2023-2527950_37.php#11

Une écrivaine talentueuse

Madeline Miller a écrit trois romans, dont Le Chant d’Achille, qui se passent tous durant l’antiquité.

J’ai vraiment adoré la plume de cette autrice, elle est à la fois très poétique mais aussi très crue. Elle arrive à mélanger beauté et horreur : « J’admirais la torsion inlassable de son poignet exposant la peau pâle au-dessous, les os fins de sa main aux gestes élégants. Je ne voyais même plus la laideur de ces morts, leur cervelles et leurs os fracassés. » Il y en a pour tous les goûts dans Le Chant d’Achille. Je n’ai jamais voulu passer une page par ennui.  J’ai apprécié aussi le fait que l’autrice humanise beaucoup ses personnages, notamment grâce à leurs sentiments et leurs actes. A ce propos, chaque sentiment des personnages est décrit à la perfection, on s’identifie parfaitement à eux. Je me suis surprise à penser comme eux à plusieurs reprises : « En voyant Centaure toucher ainsi cette partie du corps si vulnérable de mon ami, un frisson me parcourut », j’ai moi-même eu ce frisson… On s’attache aussi beaucoup aux héros, on est dans la peau de Patrocle. Chaque détail apporte une précision pour pouvoir s’imaginer au mieux la scène, chaque mot a une utilité. On voit tout de suite que Madeline Miller veut nous emmener dans ce monde antique et mythologique. La romancière nous expose la relation entre Achille et Patrocle de manière tellement romantique, attendrissante et élégante : « Je tendis la main pour caresser une mèche de cheveux sur sa tempe. Je contemplai son visage levé vers le soleil. La délicatesse de ses traits lui donnait parfois l’air encore plus jeune. » Elle a une écriture descriptive sans être dans l’excès, son style est fluide, j’avais vraiment envie de lire la suite, ne serait-ce que pour la phraséologie.

Un roman à succès

Achille et Patrocle. Dessin réalisé par Laly Chemali.

Comme je vous l’ai dit précédemment, Le Chant d’Achille refait surface sur les réseaux sociaux depuis deux ans environ. Pourtant, il a été publié en 2011 ! Par ailleurs, lors de sa parution l’œuvre a remporté le prix Orange, appelé le Baileys Women Prize for Fiction. De plus le roman cumule aujourd’hui plus de 2 millions d’exemplaires vendus dans le monde.  Ne serait-ce pas le destin de ce roman que de connaître à nouveau le succès ?

J’ai été extrêmement surprise par Le Chant d’Achille et ravie de l’avoir lu. J’espère vraiment que, comme moi, vous franchirez le pas pour rencontrer ces héros mythologiques.

Tous ces arguments font que j’attribue la note de 4.5 étoiles à cette magnifique œuvre !

Bonne lecture, vous ne serez pas déçus !

Miller, Madeline. Le chant d’Achille. Pocket, 2021. 470 p

etoile-4.5 - Agapi

Laly CHEMALI, 1ère2

Un roman féministe avant-gardiste

Source : https://0620056z.esidoc.fr/ document/id_0620056z_23893. html

L’amant de Lady Chatterley est un roman qui a fait polémique en 1928. Mais qu’en penser aujourd’hui ? Je vais vous donner mon humble avis…

En 1928 ce roman écrit par l’écrivain D.H.Lawrence est jugé obscène, provocant et parfois même pornographique, notamment par la description d’un orgasme féminin. Ce récit sera interdit à la publication et ne verra le jour qu’en Italie où il sera malgré tout directement classé comme indécent. Mais aujourd’hui ce roman est considéré comme avant-gardiste. Il représente même un pas vers la libération féminine. En effet, Constance, l’héroïne, est une femme affirmée qui assume ses désirs sexuels. L’auteur met en une jeune femme libre et normalise ses besoins, lesquels sont très restreints à son époque.

Ce roman est donc le récit de la vie de Constance, une femme indépendante qui assume ses désirs. Elle se marie avec Clifford Chatterley. Malheureusement ce dernier perd l’usage de ses jambes après la guerre. Ils restent ensemble par amour mais Constance s’ennuie et a besoin de ressentir plus d’aventures et d’assouvir ses envies à travers diverses relations. C’est le cas avec le garde-chasse, Mellors. Dès lors l’auteur montre que l’amour platonique qu’apporte Clifford à sa femme n’est pas suffisant, elle désire aussi une vie sexuelle ! 

Cette histoire est aussi celle d’un ouvrier, Mellors, qui parle un patois qui n’est pas très distingué, et d’une bourgeoise, Constance, femme cultivée et sophistiquée. Ce sont deux personnes de classes sociales différentes qui arrivent à s’entendre et s’aimer. Pendant cette période des années 1920 le mélange des classes n’est pas envisageable, sans doute encore moins qu’aujourd’hui. Là encore D.H.Lawrence fait preuve de transgression, et sur ce point je trouve qu’il a très bien représenté l’écart de classes entre les deux protagonistes. 

L’auteur nous décrit leurs ébats comme une chose bénéfique pour la jeune femme. Oui, cela nous montre l’épanouissement et l’intérêt des relations sexuelles dans une relation amoureuse. Malheureusement Constance part en voyage à Venise avec sa sœur et apprend que son amant est parti retrouver sa femme. Au même moment elle se rend compte qu’elle est enceinte de Mellors. Elle lui écrit alors une lettre pour éclairer la situation et demande le divorce à Clifford, prétendant avoir rencontrer quelqu’un. Cependant la situation se complexifie encore puisque son mari refuse ce divorce ! Comment réagira-t-il face à toutes ces révélations ? Quelle sera sa réaction s’il apprend que l’amant de sa femme est Mellors, le garde-chasse ? Va-t-on assister à un drame passionnel ? A vous de le découvrir !

Un roman féministe !

Constance est un personnage très bien construit. Elle a sa propre façon de penser que l’on peut comprendre dès le début du roman où son adolescence – période où l’on affirme sa personnalité – est décrite. Constance est une femme qui affirme ses droits et qui connait sa valeur. Ce qui m’a surprise, c’est que l’auteur est un homme qui écrit sur la libération de la femme. On peut se demander si ses paroles sont légitimes, voire crédibles, mais honnêtement je trouve qu’il a bien illustré ses propos et ne dénigre pas la femme et ses envies. On peut facilement, en tant que femme, s’identifier à Constance. Elle s’est construite à travers plusieurs relations avec des hommes durant sa jeunesse pendant laquelle elle se découvre, comme toutes les femmes ! Et, ce qui est génial, c’est qu’à aucun moment dans l’écriture de Lawrence on sent une stigmatisation du corps de la femme ou de son comportement. Il dépeint les doutes que les femmes peuvent avoir à tout âge à cause de la société par le biais de plusieurs remises en question. Par exemple quand Constance doute de sa beauté au vu de son âge car elle ne se sent plus belle aux yeux des hommes.

Mais pourquoi rendre la femme aussi dépendante ?

D.H.Lawrence. Source : https://www.albaeditorial.es/ utores/d-h-lawrence/

Bien que ce roman dépasse les normes de son époque, on sent que Constance dépend de l’affirmation masculine. Elle a besoin de cette approbation qui pour moi est malsaine. Un passage m’a particulièrement marquée, celui où elle se regarde dans le miroir et qu’elle ne se sent plus belle car elle ne plait plus aux hommes, je cite : « au temps où son jeune allemand l’avait vraiment aimée, physiquement alors son corps était jeune ».  Pour vivre pleinement, les femmes ne doivent pas se sentir aimées à travers le regard de l’homme. Pour moi, c’est le principal message de ce roman. On comprend dans le cheminement de l’histoire que Clifford est antipathique avec elle, il dépend d’elle pour vivre mais ne lui apporte plus aucun soutien émotionnel. Ce qui ne me plait également pas c’est la façon dont l’auteur rend libre la femme dans son livre. Pour lui, la liberté passe par son affirmation sexuelle, il sexualise donc la femme pour lui donner des droits, pour être libre de ses choix. Oui, la femme a des désirs sexuels, comme les hommes, mais dans ce récit ces envies sont mises en avant pour montrer qu’elle est libre. Or une femme peut s’affirmer de plein d’autres manières, par son intelligence ou ses engagements !  Ce qui est, je trouve, une incohérence avec le fait que Constance dit elle-même : « la discussion était la plus grande chose ; l’amour, les rapports sexuels n’étaient qu’une sorte de retour à l’instinct ». Mais l’auteur décide de la représenter presque uniquement à travers le sexe, à la réduire à l’acte charnel, ce qui est fort dommage et me déplait. Cela renvoie l’image que la femme doit servir à quelqu’un avant d’être quelqu’un. Bien qu’à cette époque la femme est réduite au rôle d’épouse et de mère, Constance s’émancipe de toutes ces obligations. Cependant le fait qu’elle s’émancipe exclusivement grâce à son corps me pose problème même si pour l’époque cette émancipation est remarquable.

Le mélange des classes sociales

Ce roman brusque une autre norme et montre que deux personnes de milieux différents peuvent s’aimer et se comprendre. Ce qui est génial car cela brise le mépris de classe et la façon de penser des gens fermés d’esprit. Sur ce point je trouve que D.H.Lawrence montre extrêmement bien le fait qu’on aime la personne et pas l’image qu’elle renvoie ou son statut. Car, oui, en 1920 dans la bourgeoisie les mariages arrangés font partie « du jeu » et il est hors de question de se « mélanger » avec des personnes de classes inférieures. En cela ce roman brise les codes et on comprend à nouveau qu’il puisse faire scandale !

Que peut-on en retenir ?

Pour moi ce roman est intéressant car on voit le début des pensées féministes pour l’émancipation de la femme, il est super instructif !

Si vous aimez ce genre de récit où la femme et ses envies sont mises en avant, je vous conseille aussi Madame Bovary, un roman génial et avec du recul hyper intéressant à lire. On peut voir l’importance de nos libertés, de nos sentiments et l’effet qu’ils ont sur notre conduites.

Du point de vue du rythme, ce roman est très descriptif, ce qui peut rebuter. Dès le début il faut s’habituer au style d’écriture où chaque mouvement amène un développement. Ce style d’écriture permet cependant de bien visualiser les scènes et aide le lecteur à s’imaginer les scènes de vie. Ce qui permet de rendre la lecture plus immersive.

Selon moi, cette œuvre est vraiment une avancée vers le dénouement de la parole pour les femmes. C’est une œuvre en avance sur son temps. Et que dire de sa dénonciation de la stigmatisation des différentes classes sociales ! 

Bref, je vous conseille fortement de lire ce livre ! 

D.H.Lawrence .L’amant de lady Chatterley . édité en 1928 

Judith KACZMAREK, 1ère2

Une vie non jouée

Albert Camus posant le jour où il a obtenu le Prix Nobel de littérature en 1957.
Source : https://www.edjnews.fr/les-vies-dalbert-camus

L’Étranger est le premier roman écrit par Albert Camus. Il fut publié en 1942. Camus était un écrivain, dramaturge et philosophe français reconnu mondialement de par ses idées humanistes et sa philosophie vis-à-vis de l’absurdité de notre société. Il sera davantage connu après que son roman L’Étranger soit désigné Prix Nobel de littérature en 1957 et même cité comme l’un des meilleurs romans de tous les temps. L’auteur nous offre ici une fiction dans laquelle un homme subit les normes de la bien-pensance de notre société une fois son destin touché à jamais par un acte tragique qui m’a moi-même surpris…

Source : https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782070360024-l-etranger-albert-camus/

L’Étranger est l’histoire de Meursault, un homme dépourvu de sentiments, complétement indifférent aux événements. En somme, détaché des normes « politiquement correctes » de notre société. Le récit débute par un télégramme provenant de l’asile de vieillards de Marengo en Algérie. Il apprend que sa mère est décédée. Ce qui me surprend d’emblée, c’est qu’on a l’impression qu’il est indiffèrent à cette nouvelle, que même cela le dérange. Tout le monde serait bouleversé par la mort de sa mère, non ?! Lui, ce n’est pas le cas ! Durant l’enterrement il est davantage gêné par la chaleur du soleil que par l’évènement. Cette réaction m’a personnellement dérangé – je pense que c’est normal – elle est étrange. Par la suite, Meursault se retrouvera dans une situation délicate puisqu’il sera jugé pour un crime qu’il a commis. Lequel ? A vous de le découvrir en lisant le roman ! Étrangement, face au comportement apathique du prévenu, le tribunal va plus prendre en considération son détachement émotionnel et le fait d’avoir « tué moralement » sa mère que le délit pour lequel il est jugé.
Mais au fond, Meursault est juste un homme authentique qui prend la vie comme elle est. Personne n’arrive en réalité à comprendre cet homme qui ne veut juste pas mentir et jouer des émotions qui ne sont pas les siennes… Et vous, réussirez-vous à comprendre ce personnage complexe ? 

Un voyage dans l’absurde

Moi qui ne suis pas un grand lecteur, j’ai trouvé la lecture fluide. Cela s’explique peut-être par le nombre de pages du roman (192 pages pour l’édition Gallimard dans la collection Folio). Pour moi, ce fut un argument conséquent qui a joué un rôle dans mon appréciation du récit.
Le roman est structuré en deux parties. Concernant la première j’ai eu un peu plus de mal à lecture, je trouvais le rythme monotone, tout comme son personnage Meursault ne faisant paraître aucun sentiment. Cela est peut-être voulu par Camus qui accentue l’apathie de son personnage par un faux rythme. Mais la lecture de la deuxième partie m’a énormément plu : le destin d’un homme va basculer pour nous procurer des sensations complexes face à l’absurdité de notre société et de ses normes. Ce qui est ardu est d’essayer de se mettre dans la peau d’un personnage qu’on lit à la première personne du singulier. En effet, moi qui étais à l’intérieur des pensées de Meursault, j’ai peu de fois réussi à percevoir certaines de ses émotions telles que l’amour, la tristesse ou même l’ennui. J’ai été assailli par un sentiment de malaise et d’incompréhension. Mais selon moi c’est justement de là que la beauté de ce livre provient ! L’écriture d’Albert Camus nous plonge d’autant plus dans cet univers absurde et neutre du récit. Son écriture est sobre, concise et dépourvue d’ornements inutiles, tout cela nous rapproche une fois de plus vers son personnage, Meursault. Ce dernier se distingue de son auteur, Albert Camus. En effet, le protagoniste de l’histoire n’aime pas avoir à jouer un rôle, il dira même « on ne joue pas », tandis qu’Albert Camus lui, était un grand fan de théâtre. 

Une accroche iconique

« Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. »

Dès le début du roman, on comprend la personnalité du protagoniste : froide, détachée et incompréhensible aux yeux de ceux qui ne le connaissent pas. C’est de là qu’on comprend qu’il ne joue pas, ses émotions – ou non-émotions – sont sincères. Cette première phrase m’a fait réfléchir. Non pas à la mort de la mère de Meursault, mais au conformisme qui nous est en quelque sorte imposé. Pourquoi Meursault serait-il obligé de faire part de ses émotions ? Pourquoi serait-on obligé de mentir pour plaire ? À quoi bon changer ses propres valeurs jusqu’à en faire changer sa destinée et ne plus être soi ? C’est ce conformisme absurde qui m’a questionné tout au long de ma lecture. Mais cela reste subjectif, c’est mon ressenti, et chaque lecteur peut se faire sa propre idée. C’est donc pour cela que L’Étranger doit être au moins lu une fois dans sa vie !

Après la lecture de ce roman, on se sent différent. Le texte de Camus amène une grande réflexion sur l’existence et le destin, c’est pour cela qu’il m’a fait penser au film Taxi Driver de Martin Scorsese. Tant dans Taxi Driver que dans L’Étranger, les protagonistes ont une pensée non conforme à la société, ce qui les conduit à des actes inexplicables.

Par la réflexion qu’il fait naître chez le lecteur, son histoire, sa lecture facile et le fait qu‘il soit l’un de mes premiers grands classiques, je lui attribue la note de 4 étoiles et vous le conseille fortement !

Bonne lecture !

 Camus Albert. L’Étranger. Collection folio, Gallimard. 191p, 1942

Anthyme HEYSEN-ROLIN, 1ère2

« En 1969, j’ai arrêté les femmes et l’alcool, ça a été les 20 minutes les plus dures de ma vie »

Source :
lecarredesmots.com/ product/show/ 9782234077287/ george-best- le-cinquieme-beatles

« C’est comme cela que tout avait commencé, et que tout a fini. »

Le Cinquième Beatles est un roman écrit par Vincent Duluc en 2014, racontant la vie du célèbre footballeur nord-irlandais George Best.

J’ai découvert ce livre et en ai appris plus sur George Best grâce au projet du Prix Littéraire Carnot 2024, et j’ai trouvé l’oeuvre plutôt intéressante dans l’ensemble. Laissez-moi vous la présenter.

Vincent Duluc, né en 1962, est journaliste au sein de la rubrique football de L’Equipe. Il est l’auteur de multiples livres sur ce sport. Dans Le Cinquième Beatles, il nous raconte dans le premier chapitre sa passion pour le football anglais et particulièrement pour George Best.

Pour en revenir au récit, l’auteur commence par nous raconter son voyage scolaire en Angleterre, en 1973, où il vivait chez une famille d’accueil. C’est au sein de ce foyer, à la télévision, qu’il a appris la retraite de George Best, à l’âge de 27 ans seulement ! Puis commence le récit de la vie de Best, de ses débuts dans le football, jusqu’à son décès.

« Balle au pied, George ne faisait pas de prisonniers » 

George Best, originaire de Belfast, Irlande du Nord, était un garçon timide mais révélait un talent incroyable pour le football. Il a fini par être repéré par un recruteur de Manchester United et a fait ses débuts avec ce club en 1963, à 17 ans. Dès le début, George a montré qu’il n’était pas là pour « enfiler des perles ». Il dribblait tous les défenseurs qui voulaient lui barrer la route, et repassait même parfois une deuxième fois pour les humilier. Il multipliait les buts spectaculaires et devenait, match après match, le footballeur préféré de milliers de gens. Son comportement sur le terrain était simple : pour lui, ses coéquipiers n’étaient que des plantes vertes, des plots de chantier à qui il ne donnait le ballon qu’en cas de vrai problème ( ceci n’est pas une déclaration officielle, ce n’est qu’une hyperbole très exagérée de ma part ! ).

George Best sur le terrain Source : www.thesun.co.uk/sport/ football/ 3931408/george-best-death-wive s – alex-angie-manchester-united/

Il gardera cette façon de jouer et le football lui fera perdre sa timidité. Il passera notamment par une relation particulière, voire une rivalité, avec une autre star de son équipe, Bobby Charlton, qui vient de s’éteindre ce 21 octobre 2023. Pour la petite histoire, ce dernier n’était plus le même homme après avoir survécu à la catastrophe de Munich, le 6 février 1958. Ce jour là, presque tous les membres du club ont péri, sauf quelques personnes, dont Bobby.

« Sur tous les terrains je suis le dernier homme debout »

La célébrité peut poser problème à de nombreuses personnes. Parfois de simples soucis mais dans le cas de George Best ce ne sont pas que de simples problèmes ! En effet, il a hérité de l’alcoolisme de sa mère et était célibataire alors que toutes les femmes étaient folles de lui… pratique ! Il multipliera donc les relations sexuelles avec des dizaines de femmes, parfois des célébrités, des Miss Great Britain et autres Miss Monde. Attirer ce genre de femmes était simple pour lui, vu sa célébrité et son talent sur le terrain. Cependant cela lui fera rater beaucoup d’entraînements, il aura même l’audace de dire (page 107) : « I used to miss a lot ». Subtil jeu de mots qui veut dire « J’avais l’habitude de rater beaucoup de choses » et dont le double sens signifie qu’il a à la fois manqué des entraînements et des rendez-vous galants. Sacré George !

Aussi, tous ces verres et toutes ces femmes auront des répercussions. Mais est-il parvenu à vaincre ses démons ? Qu’a-t-il fait à sa retraite ? Pour le découvrir,  lisez Le Cinquième Beatles !

J’ai pris mon rythme, je ne suis pas George

De manière générale, j’ai apprécié le livre, mais sans plus. Disons que j’ai eu du mal à trouver mon rythme au départ parce que je n’ai pas l’habitude de sortir de la fiction pour aller vers un récit biographique. Pour certains passages, je vais être honnête, je finissais par simplement vouloir que ça se termine. Un exemple me vient en tête, ce sont les 35 pages où on a une liste ( sûrement non exhaustive ) de ses « conquêtes de la nuit ». Certes, ça fait partie de l’histoire et ce n’est pas le fait d’avoir cette liste – pas écrite comme une liste de courses non plus – qui pose problème, mais simplement la manière dont tout cela est raconté qui finit par être ennuyeuse selon moi. Cependant, avec toutes ces femmes et ces pintes, l’auteur nous fait comprendre que c’était un point fondamental et essentiel dans la vie de George.

Rassurez-vous, il n’y a pas que des passages ennuyeux. Il y a certaines parties que j’ai beaucoup appréciées, comme les cinq, dix premières années après sa retraite où il adoptait un style de vie qui me plaisait. Il changera, mais je ne peux pas dire comment, dans quel sens ? ça c’est à vous de le découvrir !

Pour aborder le thème du destin, thème du Prix Littéraire Carnot cette année, on pourrait se poser la question : Best a-t-il gâché sa vie ? Selon moi ça ne fait aucun doute ! L’avenir qui l’attendait dans le football était en or massif. Sachez qu’il a quand même remporté le  Ballon d’Or 1968 mais a raté sa carrière à cause de sa « double vie ». Pouvait-il faire quelque chose pour éviter un tel destin ? Aurait-il pu brider ses démons ? Je vous laisse vous poser la question. De mon point de vue, l’alcoolisme est le problème majeur. C’est une addiction plus compliquée à gérer que d’autres. Je pense que sans l’alcoolisme, Best aurait pu se reprendre en main et avoir une meilleure carrière dans le football. Encore une fois, libre à vous de vous poser la question de votre côté. Et, pour autant, a-t-il été malheureux ?

Je le répète, le récit est agréable à lire dans l’ensemble. Je lui donne la note de trois étoiles sur cinq. Si vous aimez le football, le Royaume-Uni, ou les deux, ce livre devrait vous plaire !

Duluc, Vincent. Le Cinquième Beatles. 2014, Stock. 227 p. 5192. ISBN 978-2-234-07728-7

Martin DUMUR, 1ère2

Une écriture brillante au service du plus abject des crimes

Source : https://0620056z.esidoc.fr /document/id_0620056z    _10746.html

Lolita eut un impact majeur sur la carrière de Vladimir Nabokov et permit à l’écrivain russo-américain de connaître le succès à l’international. Ce roman a été publié pour la première fois en France, en 1955, car aucun éditeur américain n’acceptait de le publier en raison des thèmes qu’il aborde. Très mal interprétée, parfois qualifiée d’apologie de la pédophilie, l’œuvre a été accueillie par une grande controverse à sa sortie. En effet, Lolita a suscité diverses réactions, allant d’éloges pour lécriture exceptionnelle de l’auteur à un profond dégoût en raison de son contenu explicite. La description des relations sexuelles entre un homme adulte et une jeune fille a choqué de nombreux lecteurs, parmi lesquels certains ont crié à une sorte de pornographie. Par conséquent, l’œuvre de Nabokov a été interdite et censurée dans certains pays tels que le Royaume-Uni, la France, l’Argentine, l’Australie ou encore la Nouvelle-Zélande. Alors que le livre provoque toujours le débat, il bénéficie d’une renommée internationale. Lolita est aujourd’hui considérée comme une œuvre majeure de la littérature du 20ème siècle !

Lolita n’est pas une histoire d’amour, mais une histoire de crime

Le roman confronte le lecteur aux arrogantes confessions d’Humbert Humbert, un professeur de littérature française de 40 ans qui cache indéniablement quelque chose sous son apparence de gentleman serein et cultivé… En effet, l’Amérique du 20ème siècle décrite par Nabokov sert de décor à un homme profondément troublé. Rapidement, on découvre son obsession malsaine pour les filles prépubères et « attrayantes », qu’il qualifie notamment de nymphettes. Alors qu’il déménage aux États-Unis et loge chez Charlotte Haze, il rencontre Dolorès Haze, sa fille de 12 ans, qu’il surnomme Lolita. Humbert Humbert tombe follement « amoureux » de celle qui deviendra bientôt sa belle-fille, tandis qu’il prend Charlotte pour épouse. Effectivement, son obsession pour la jeune fille est telle qu’elle le pousse à commettre d’atroces crimes, et à officialiser son union avec sa mère, dans l’objectif de prendre possession de Lolita. Celle-ci lui rappelle son premier amour, Annabel Leigh, qui décède prématurément à cause du typhus. Aux yeux d’Humbert Humbert, cette tragédie pourrait justifier son comportement à l’égard de la petite, ainsi que son obsession maladive pour les filles âgées de 9 à 14 ans. Le furieusement dérangé Humbert Humbert fait de Lolita, Lo, Dolly, ou Loleeta, le centre de son monde !

« Je la regardais et la regardais encore, et je savais, aussi clairement que je sais que je dois mourir, que je l’aimais plus que tout ce que j’avais vu ou imaginé en ce monde, ou espéré dans l’autre. Vous pouvez me couvrir d’injures, menacer de faire évacuer la salle – tant que je ne serai pas étranglé par vos baillons, je crierai ma pauvre vérité. L’univers saura combien j’aimais Lolita, cette Lolita. »

Affiche du film Lolita, 1962
« Comment a-t-on osé faire un film de Lolita ? »
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki  /Lolita_%28film,_1962%29

Les adaptations cinématographiques ont également été au cœur de débats, précisément sur la manière dont l’histoire d’Humbert Humbert et de Lolita peut être représentée au cinéma. L’œuvre de Nabokov a été adaptée à l’écran pour la première fois en 1962 par le célèbre réalisateur Stanley Kubrick, puis une seconde fois en 1997 par Adrian Lyne. Cette deuxième adaptation se veut plus explicite que la première, ce qui a provoqué davantage de controverses à sa sortie. Les deux films restent fidèles au roman, mais Stanley Kubrick a tout de même apporté quelques modifications afin de s’adapter aux mœurs de l’époque.

Une dimension de complexité unique !

Le protagoniste et narrateur du roman, Humbert Humbert, raconte Lolita à la première personne. En tant que lectrice, j’ai remis constamment en question la fiabilité du récit, puisque l’immoralité dont fait preuve le quadragénaire ne permet pas d’affirmer qu’il est un narrateur digne de confiance. Ainsi, lors de notre lecture, nous devons éviter à tout prix le piège que Nabokov a installé, qui est d’adopter uniquement le point de vue du monstre. J’ai apprécié cet élément de l’œuvre car l’écriture à la première personne la rend davantage complexe et permet à l’auteur, mais aussi au lecteur, d’explorer la psychologie du personnage de fond en comble. Nabokov nous présente les justifications tordues d’un pédophile qui tente malgré tout de rationaliser son comportement répréhensible. Il est conscient qu’il est coupable mais attribue une part de responsabilité à Lolita, sous prétexte que la petite serait aguicheuse et provocante. Le talentueux auteur a pris l’énorme risque d’écrire Lolita sous l’angle du coupable, puisqu’il aurait été confronté à moins de difficultés en l’écrivant du point de vue de la victime, de toute évidence ! A mon sens cela rend l’œuvre de Nabokov davantage remarquable et mémorable.

« Je t’aimais. J’étais un pentapode monstrueux, mais je t’aimais. J’étais haïssable et brutal et abject – j’étais tout cela, mais je t’aimais, je t’aimais ! Et parfois, je devinais ce que tu éprouvais, et c’était pour moi un supplice infernal, mon enfant. Petite Lolita. Dolly Schiller. »

L’un des aspects les plus remarquables de Lolita est, à mon sens, la prose de Vladimir Nabokov. Une des caractéristiques les plus précieuses de son écriture est l’intimité qu’elle parvient à instaurer entre sa beauté et une histoire véritablement perturbante. Ce contraste permet d’attirer le lecteur vers le roman, puisque sa prose est splendide, alors qu’il est tout autant repoussé par les thèmes qu’il aborde. Ainsi, Lolita prouve parfaitement qu’une œuvre peut être artistique et tout à fait provocante et troublante à la fois lorsque l’auteur parvient à manipuler la langue.

Ce roman est tellement réaliste qu’il en devient fascinant

Bien qu’il puisse être choquant et dérangeant, j’attribue quatre étoiles à ce roman. Lolita m’a poussée à me remettre en question et à me confronter à des idées inconfortables, un aspect qui m’a particulièrement plu. Il relate une histoire marquante, qui laisse définitivement une trace dans le cœur, puis dans l’esprit. Je ne vous cache pas que ma lecture fut compliquée au début, car je ne pouvais pas m’empêcher d’imaginer Nabokov en lisant le récit d’Humbert, mais l’auteur n’est pas son personnage. Il est important de faire ce parallèle tout au long de votre lecture. Il convient de lire ce roman avec une certaine compréhension des sujets abordés, et en gardant en tête que l’auteur ne cautionne en aucun cas cette relation incestueuse.

Lisez-le, et ne cédez pas dès les premières pages à l’appel du dégoût !

Pour visionner une interview où Nabokov nous parle de son roman Lolita et nous fait quelques révélations, cliquez-ici.

Nabokov, Vladimir. Lolita. Gallimard, 06/2022. 531 p. Folio. ISBN 2-07-041208-3

Laurine CORNET-MAGNIEZ, 1ère2

Un parcours semé d’embûches

Source : https://www.livredepoche.com / livre/nickel-boys-9782253935025

Nickel Boys est un roman écrit par Colson Whitehead en 2019, traduit de l’anglais par Charles Recoursé. C’est en 2017 que l’auteur remporte son premier prix Pulitzer pour The Underground Railroad, puis son second en 2020 pour Nickel Boys. Il est important de souligner qu’il est l’un des rares écrivains à détenir deux prix Pulitzer, en plus du National Book Award et du prix Arthur C.Clarke. De plus, The Underground Railroad a bénéficié d’une adaptation télévisuelle par Barry Jenkins, qui a contribué à faire connaître l’auteur. Pour avoir déjà lu Harlem Shuffle, un roman écrit par ce même auteur qui m’avait beaucoup plu, mon choix s’est naturellement porté sur Nickel Boys. Une fois de plus, je n’ai pas été déçue par son écriture qui contribue à faire vivre une histoire basée sur des faits aussi réels que révoltants.

Nous sommes en pleine Amérique ségrégationniste dans les années 1960. Plus précisément dans la communauté afro-américaine de la Floride où le jeune Elwood Curtis vit en compagnie de sa grand-mère, Harriet. Abandonné dès le plus jeune âge par ses parents, notamment son père qui était trop ambitieux à son retour de l’armée et pour qui Tallahassee n’était plus à la hauteur de ses attentes. Elwood est un garçon très intelligent, poussé par Harriet qui pense que le travail est une valeur essentielle. Ainsi, elle espère que l’assiduité ne lui laissera pas le temps de participer à des manifestations qui pourraient le mettre en danger en raison de sa couleur de peau. Cependant, le jeune garçon est totalement absorbé par les discours de Martin Luther King qui lui ont ouvert les yeux. Sa fascination pour les discours de ce dernier en faveur de la lutte des droits civiques le pousse à vouloir partager via l’écriture son combat sur la question raciale. Il fait plusieurs tentatives dans ce sens, mais aucun journal n’accepte de partager ses lettres. Lorsque son professeur d’Histoire lui suggère de rejoindre Melvin Griggs, une université réservée aux élèves méritants, Elwood comprend que son avenir est tout tracé. Jusqu’au jour où ses rêves sont brutalement interrompus. Envoyé, suite à une erreur judiciaire, à la Nickel Academy, un établissement de correction pour mineurs, sa vie prend un tournant brutal. Rien n’est simple à Nickel ! Entre les pires sévices perpétrés dans l’ombre et la terreur qui y règne, tout est une question de survie quand le destin vous joue des tours. Elwood devra surmonter toutes ces épreuves pour espérer, un jour, quitter Nickel et regagner sa liberté…

Un roman puissant de vérité

En s’inspirant d’une histoire vraie de la Dozier School for Boys, Colson Whitehead nous relate la réalité la plus juste de la ségrégation aux États-Unis des années 60. Dès le début nous sommes plongés au cœur du sujet : un cimetière clandestin est découvert au sommet de la grande colline du campus de Nickel. Une enquête est ouverte après la découverte de plusieurs corps d’élèves noirs. La parole se libère et les anciens élèves de Nickel parlent des visites nocturnes dans les dortoirs, des cris camouflés par un ventilateur industriel provenant d’une pièce que les élèves noirs surnomment la Maison-Blanche. Nickel aurait dû offrir une nouvelle chance à ces garçons, dont la plupart n’avaient pas une vie facile avant de rejoindre l’école. Au lieu de cela, si ils en ressortent, ce n’est jamais sans séquelles. Depuis son arrestation, Elwood pleure la nuit quand il pense à ce que lui réserve Nickel. C’est au bout du deuxième jour qu’il fait la connaissance de Turner, l’un de ses semblables. Ces deux-là se lient d’amitié. Cette amitié est ce qui permet à l’adolescent de rester fidèle à ses convictions. La violence est au cœur du roman, reflétant la cruauté de la ségrégation. «Vous êtes des Noirs dans un monde de Blancs », voilà ce que leur apprend Nickel ! Dès lors nous avons très vite ce sentiment de rage qui grandit en nous à mesure que l’on avance dans le roman. On lit avec appréhension, angoissé par une menace grandissante, ce qui maintient le suspense. Mais lorsqu’elle frappe, elle est déchirante. C’est tout le brio de l’écriture de l’auteur, une écriture qui a la capacité de nous saisir au bon moment ! Nous suivons la vie brisée d’Elwood, et celle de beaucoup d’autres noirs avant lui. C’est un rappel d’une face les plus sombres de l’Amérique, d’autant plus lorsque l’on sait que la Dozier School for Boys n’a été fermée qu’en… 2011 ! Oui, vous avez bien lu, 2011. Cela montre le racisme persistant dans certains États, encore aujourd’hui malheureusement. Et que le simple fait d’être noir et d’être au mauvais endroit, au mauvais moment, suffit pour que votre vie bascule du tout au tout.

Colson Whitehead Source : https://buechermenschen.de/ lesenswert/10-fragen-an/colson-whitehead/

Deux façons de voir le monde

L’amitié entre Elwood et Turner oppose deux visions différentes. De l’une, Elwood est conscient qu’il est coincé à Nickel, mais il veut en tirer son parti et tout faire pour que ça dure le moins longtemps possible, motivé par les discours de paix du révérend Martin Luther King. De l’autre, Turner semble s’être résigné à son sort. On ne peut pas s’empêcher d’éprouver de la compassion pour Elwood auquel on s’attache immédiatement. En revanche, j’avais un doute quant aux intentions de Turner, du moins au début. Il m’a donné l’impression d’être absent et à l’écart, un être en marge où qu’il soit. Mais rapidement leur relation se concrétise. Elle est un pilier dans leur reconstruction mais aussi dans le schéma narratif du roman. En effet, tout au long du récit les bonds dans le temps – on passe des années 60 aux années 80 – agissent comme une coupure à la violence. Une situation paisible, qui va à l’encontre de ce que nous venons de lire et atténue l’horreur de Nickel. Cependant une tension semble persister. Ces passages m’ont un peu troublée mais ce n’est qu’une fois le roman terminé que nous nous rendons compte de tout l’intérêt de ces allées et venues dans le temps et du génie de l’auteur ! L’épilogue est un revirement de situation insoupçonnable ! Quel talent ! C’est d’ailleurs cette fin qui m’a beaucoup plu et marquée. J’ai également beaucoup aimé la façon d’écrire de Colson Whitehead qui dépeint tant les jours ordinaires que la violence la plus abjecte, suggérant des scènes trop violentes plutôt que de les décrire dans le menu détail ce qui rend ce roman accessible à un large public mais n’en atténue pas la portée. Un roman toutefois dur à lire pour ses scènes puissantes et marquantes qui vous laisseront le cœur plein d’émotions.

J’attribue cinq étoiles à ce roman qui a été un véritable coup de cœur pour moi !

Je vous souhaite une très bonne lecture !

Whitehead, Colson. Nickel Boys. Librairie Générale Française, 05/2022. 264p. Le Livre de Poche, ISBN-9782226449788

 

 

Lucie LEGAY,  1ERE2

Une fugue pour se retrouver

Un roman intemporel

JD Salinger pose pour un portrait alors qu’il lit son roman américain classique « The Catcher in the Rye » en 1952 à New York. source: https://www.today.com/ books/biography-j-d-salinger -didnt-want-public-see-auction -2D11632738

          L’attrape-cœurs (The Catcher in the Rye) est un roman étasunien publié en 1951. Son auteur, J.D Salinger, commence à écrire dès son plus jeune âge. Plus tard, alors que ses œuvres commencent à avoir du succès, il supporte mal la célébrité et s’isole. Emmuré dans un profond silence, il suscite la curiosité des lecteurs du monde entier ! Son roman L’attrape-cœurs est devenu un livre culte sur la jeunesse et a connu un succès immédiat. Témoignage poignant et réaliste des années cinquante, le récit des aventures d’Holden Caulfield explore des thèmes universels qui questionnent toujours aujourd’hui. Il n’est donc pas étonnant que ce roman eu un énorme succès qui est,  selon moi, amplement mérité ! En effet, en abordant la difficile période de l’adolescence et la dépression, ce livre me semble avoir une portée intemporelle. Je peux vous assurer que, même soixante-douze ans après sa publication, cette œuvre new-yorkaise n’a pas pris une ride ! Si vous ne me croyez pas je vous invite à le lire. 

          Holden Caulfield, adolescent perturbé de 17 ans, étudie à Pencey. Il est renvoyé de cette université peu de temps avant Noël. Jeune homme à l’esprit  troublé,  il erre durant trois jours dans les rues de New-York. Effrayé par la réaction de ses parents à l’annonce de son renvoi, il décide en effet de ne pas rentrer chez lui. Même le froid glacial de décembre,  dans lequel il est plongé, ne le décide pas à réintégrer son foyer. Ne sachant jamais où aller, il laisse le destin le guider dans un monde où il ne trouve pas sa place. Une errance qui symbolise bien la période de l’adolescence pendant laquelle nous nous « cherchons ».  Aucun de ses déplacement dans la Big Apple n’est réfléchi, il ne maîtrise rien. « Tellement seul et mal foutu », le jeune homme entame alors une profonde réflexion sur lui-même. Il nous dépeint une critique de la société avec le regard perspicace d’un ado coincé entre deux âges.

Intriguant et original au premier regard

Soure : https://www.abebooks.fr/ rechercher-livre/titre/ attrape-coeurs/auteur/ salinger/

          Je voudrais maintenant vous poser une question essentielle : quelle est la première chose que vous faites lorsque vous choisissez un livre ? Naturellement, il me semble que vous me répondrez que vous retournez le roman et que vous lisez le résumé de la quatrième de couverture. Ou encore, que vous cherchez une inspiration en scrutant l’illustration. Ici, rien de cela. C’est bien ce qui m’a intriguée au premier abord. Cette couverture rouge vive m’a tapé dans l’œil parmi les autres œuvres proposées dans le cadre du Prix littéraire Carnot. Je n’avais aucune idée de ce qu’elle pouvait représenter. Puis j’ai retourné le livre pour avoir des réponses à mes questions. Mais il n’y avait rien, absolument rien, même pas l’ombre d’une phrase ou d’un mot ! Original non ? En ce qui me concerne, c’est cette accumulation de questionnements qui m’a incitée à lire ce roman. Je trouve cette stratégie de l’éditeur très bien trouvée et innovante, mais sans nul doute qu’elle puisse en laisser quelques-uns perplexes…

Un surplus de sous-entendus

          La  seule chose qui m’a déplu dans L’attrape-cœurs,  c’est l’impression de nécessité de relecture pour comprendre chaque sous-entendu. En effet, j’ai pu remarquer que derrière de nombreuses phrases se cachaient des réflexions plus profondes. Un exemple précis me vient à l’esprit. Je peux citer le métier d’attrape-cœurs que voudrait exercer Holden, qui est décrit ainsi par ses soins : «Et moi je suis planté au bord d’une saleté de falaise. Ce que j’ai à faire c’est d’attraper les mômes s’ils approchent trop près du bord. […] moi je réplique et je les attrape. C’est ce que je ferais toute la journée. Je serai juste l’attrape-cœurs et tout.» La vocation du personnage principal serait de remettre dans le droit chemin tous les ados qui, comme lui, ont des difficultés à entrer dans le monde des adultes. Mais cela reste mon interprétation, chacun peut en avoir une autre.

Une identification et un attachement profond au personnage

          Je ne suis pas une grande lectrice, je vous l’avoue. Mais s’il y a bien une chose qui m’a fait aimer ce livre, c’est ce sentiment de proximité avec le personnage. Le fait que la narration soit à la première personne du singulier et qu’elle soit omnisciente (on a accès aux pensées et réflexions du personnage) nous donne l’impression d’être dans la tête d’Holden, voire parfois de prendre sa place. De plus, l’auteur utilise un style oral et  familier comme le souligne des expressions telles que « et tout, et tout » et des accumulations de tics de langage. Ce sont de telles expressions que nous utilisons dans notre quotidien et à mon sens ces procédés nous aident à nous identifier au protagoniste. Si je devais comparer ce roman à une attraction – je sais, cela peut paraître absurde – je l’associerais aux montagnes russes. Plus précisément à des montagnes russes émotionnelles. Au cours de ma lecture, j’ai constaté que ce récit pouvait faire mal. Tour à tour, je ressentais de la mélancolie, un sentiment de solitude lorsque l’adolescent Caulfield recherche désespérément sa place. Ne vous êtes-vous jamais retrouvé comme lui pris entre deux mondes ? Vous trouvant exclu du groupe des enfants à cause d’une maturité plus développée que la leur et rejeté par les adultes qui peinent à vous considérer ? C’est vrai qu’il est difficile, alors  assis à la table des  » mômes » lors d’un anniversaire, d’écouter la conversation voisine des adultes !

        Et puis dans ce fleuve d’ondes négatives, arrive tout à coup une note de légèreté. L’insouciance d’Holden tombe à pic et apporte une pointe d’humour ! Il en devient touchant. L’adolescent n’est pas conscient de l’importance de ses actions sur son futur. En effet, il répond au père Spencer, soucieux de l’avenir de son élève : « Oh si bien sûr. Bien sûr que je me fais du souci pour mon avenir. J’ai réfléchi une minute. Mais pas trop quand même. Non pas trop quand même ». Je me suis donc particulièrement attachée à ce personnage ayant trouvé une petite part de moi-même en lui.

          Finalement, si je devais donner trois adjectifs pour caractériser ce roman ils seraient : intemporel, original et touchant !

       Bonne lecture à tous, j’espère que ma critique vous aura permis de découvrir L’attrape-cœurs, ou même pour certains de le redécouvrir !

Selon moi ce roman mérite bien 4 étoiles !

4 Étoiles Sur 5

Salinger, J.D. L’attrape-cœurs. Pocket, 06/1994. 252 p

Clara SENCE, 1ere2