Et les héros chantaient…

Avez-vous déjà entendu parler des « BookTok » ? Mais si, vous savez, ces livres tendances sur les réseaux sociaux qui ont même un rayon dédié dans les librairies…Eh bien, Le chant d’Achille de l’ancienne professeure de latin Madeline Miller en fait partie.
Au début j’ai choisi ce roman en ayant en tête de contredire l’avis de toutes ces personnes qui adorent ce livre sans argument. Quoi de mieux donc que de critiquer ce livre négativement ? En revanche, tout ne s’est pas passé comme prévu…
J’ai clairement adoré ce roman, mais moi j’ai des arguments !

Un mythe revisité

Le chant d'Achille

Source : https://www.fnac. com/a7975033/ Madeline- Miller-Le-Chant-d-Achille

Vous connaissez sûrement l’histoire du prince Achille, ce guerrier presque invincible, n’ayant qu’une seule faiblesse, son talon…

Ce roman nous présente une version plus moderne du récit mythologique.

Tout d’abord on pense que le protagoniste central est Achille. Or ce n’est pas le seul. En effet le narrateur du roman est un personnage nommé Patrocle. Il n’est encore qu’un jeune garçon lorsqu’il est exilé après avoir commis une grave erreur. Durant son exil Patrocle rencontre le prince Achille, destiné à être le meilleur guerrier de toute la Grèce. Nous allons suivre tout au long du récit ces deux protagonistes. Nous allons les voir grandir, évoluer, dans le bon comme dans le mauvais sens. Leur relation va également se développer, ils vont passer d’inconnus à amis, et bien plus encore… « Quoique tu deviennes, ça n’aurait pas d’importance pour moi, tant que nous sommes ensemble. » Le roman nous présente des scènes diverses et variées, de vies, d’intrigues et de combats. De plus l’œuvre fait beaucoup référence à l’Iliade et l’Odyssée. C’était très drôle de voir les personnages de ces deux œuvres d’Homère ne pas connaître leur futur destin. Durant ma lecture je suis passée par toutes les émotions même si je pensais connaître la fin. Les personnages sont sous l’emprise du destin, même si celui-ci pourrait bien changer… Comment ? A vous de le découvrir !

Madeline Miller : « j'ai l'impression que beaucoup de gens essaient encore  de transformer les femmes en poupées vivantes…»

Madeline Miller Source : https://www.lepoint.fr/livres/ madeline-miller -chaque-generation-doit-pouvoir-reinterpreter -les-mythes-10-07-2023-2527950_37.php#11

Une écrivaine talentueuse

Madeline Miller a écrit trois romans, dont Le Chant d’Achille, qui se passent tous durant l’antiquité.

J’ai vraiment adoré la plume de cette autrice, elle est à la fois très poétique mais aussi très crue. Elle arrive à mélanger beauté et horreur : « J’admirais la torsion inlassable de son poignet exposant la peau pâle au-dessous, les os fins de sa main aux gestes élégants. Je ne voyais même plus la laideur de ces morts, leur cervelles et leurs os fracassés. » Il y en a pour tous les goûts dans Le Chant d’Achille. Je n’ai jamais voulu passer une page par ennui.  J’ai apprécié aussi le fait que l’autrice humanise beaucoup ses personnages, notamment grâce à leurs sentiments et leurs actes. A ce propos, chaque sentiment des personnages est décrit à la perfection, on s’identifie parfaitement à eux. Je me suis surprise à penser comme eux à plusieurs reprises : « En voyant Centaure toucher ainsi cette partie du corps si vulnérable de mon ami, un frisson me parcourut », j’ai moi-même eu ce frisson… On s’attache aussi beaucoup aux héros, on est dans la peau de Patrocle. Chaque détail apporte une précision pour pouvoir s’imaginer au mieux la scène, chaque mot a une utilité. On voit tout de suite que Madeline Miller veut nous emmener dans ce monde antique et mythologique. La romancière nous expose la relation entre Achille et Patrocle de manière tellement romantique, attendrissante et élégante : « Je tendis la main pour caresser une mèche de cheveux sur sa tempe. Je contemplai son visage levé vers le soleil. La délicatesse de ses traits lui donnait parfois l’air encore plus jeune. » Elle a une écriture descriptive sans être dans l’excès, son style est fluide, j’avais vraiment envie de lire la suite, ne serait-ce que pour la phraséologie.

Un roman à succès

Achille et Patrocle. Dessin réalisé par Laly Chemali.

Comme je vous l’ai dit précédemment, Le Chant d’Achille refait surface sur les réseaux sociaux depuis deux ans environ. Pourtant, il a été publié en 2011 ! Par ailleurs, lors de sa parution l’œuvre a remporté le prix Orange, appelé le Baileys Women Prize for Fiction. De plus le roman cumule aujourd’hui plus de 2 millions d’exemplaires vendus dans le monde.  Ne serait-ce pas le destin de ce roman que de connaître à nouveau le succès ?

J’ai été extrêmement surprise par Le Chant d’Achille et ravie de l’avoir lu. J’espère vraiment que, comme moi, vous franchirez le pas pour rencontrer ces héros mythologiques.

Tous ces arguments font que j’attribue la note de 4.5 étoiles à cette magnifique œuvre !

Bonne lecture, vous ne serez pas déçus !

Miller, Madeline. Le chant d’Achille. Pocket, 2021. 470 p

etoile-4.5 - Agapi

Laly CHEMALI, 1ère2

Un roman féministe avant-gardiste

Source : https://0620056z.esidoc.fr/ document/id_0620056z_23893. html

L’amant de Lady Chatterley est un roman qui a fait polémique en 1928. Mais qu’en penser aujourd’hui ? Je vais vous donner mon humble avis…

En 1928 ce roman écrit par l’écrivain D.H.Lawrence est jugé obscène, provocant et parfois même pornographique, notamment par la description d’un orgasme féminin. Ce récit sera interdit à la publication et ne verra le jour qu’en Italie où il sera malgré tout directement classé comme indécent. Mais aujourd’hui ce roman est considéré comme avant-gardiste. Il représente même un pas vers la libération féminine. En effet, Constance, l’héroïne, est une femme affirmée qui assume ses désirs sexuels. L’auteur met en une jeune femme libre et normalise ses besoins, lesquels sont très restreints à son époque.

Ce roman est donc le récit de la vie de Constance, une femme indépendante qui assume ses désirs. Elle se marie avec Clifford Chatterley. Malheureusement ce dernier perd l’usage de ses jambes après la guerre. Ils restent ensemble par amour mais Constance s’ennuie et a besoin de ressentir plus d’aventures et d’assouvir ses envies à travers diverses relations. C’est le cas avec le garde-chasse, Mellors. Dès lors l’auteur montre que l’amour platonique qu’apporte Clifford à sa femme n’est pas suffisant, elle désire aussi une vie sexuelle ! 

Cette histoire est aussi celle d’un ouvrier, Mellors, qui parle un patois qui n’est pas très distingué, et d’une bourgeoise, Constance, femme cultivée et sophistiquée. Ce sont deux personnes de classes sociales différentes qui arrivent à s’entendre et s’aimer. Pendant cette période des années 1920 le mélange des classes n’est pas envisageable, sans doute encore moins qu’aujourd’hui. Là encore D.H.Lawrence fait preuve de transgression, et sur ce point je trouve qu’il a très bien représenté l’écart de classes entre les deux protagonistes. 

L’auteur nous décrit leurs ébats comme une chose bénéfique pour la jeune femme. Oui, cela nous montre l’épanouissement et l’intérêt des relations sexuelles dans une relation amoureuse. Malheureusement Constance part en voyage à Venise avec sa sœur et apprend que son amant est parti retrouver sa femme. Au même moment elle se rend compte qu’elle est enceinte de Mellors. Elle lui écrit alors une lettre pour éclairer la situation et demande le divorce à Clifford, prétendant avoir rencontrer quelqu’un. Cependant la situation se complexifie encore puisque son mari refuse ce divorce ! Comment réagira-t-il face à toutes ces révélations ? Quelle sera sa réaction s’il apprend que l’amant de sa femme est Mellors, le garde-chasse ? Va-t-on assister à un drame passionnel ? A vous de le découvrir !

Un roman féministe !

Constance est un personnage très bien construit. Elle a sa propre façon de penser que l’on peut comprendre dès le début du roman où son adolescence – période où l’on affirme sa personnalité – est décrite. Constance est une femme qui affirme ses droits et qui connait sa valeur. Ce qui m’a surprise, c’est que l’auteur est un homme qui écrit sur la libération de la femme. On peut se demander si ses paroles sont légitimes, voire crédibles, mais honnêtement je trouve qu’il a bien illustré ses propos et ne dénigre pas la femme et ses envies. On peut facilement, en tant que femme, s’identifier à Constance. Elle s’est construite à travers plusieurs relations avec des hommes durant sa jeunesse pendant laquelle elle se découvre, comme toutes les femmes ! Et, ce qui est génial, c’est qu’à aucun moment dans l’écriture de Lawrence on sent une stigmatisation du corps de la femme ou de son comportement. Il dépeint les doutes que les femmes peuvent avoir à tout âge à cause de la société par le biais de plusieurs remises en question. Par exemple quand Constance doute de sa beauté au vu de son âge car elle ne se sent plus belle aux yeux des hommes.

Mais pourquoi rendre la femme aussi dépendante ?

D.H.Lawrence. Source : https://www.albaeditorial.es/ utores/d-h-lawrence/

Bien que ce roman dépasse les normes de son époque, on sent que Constance dépend de l’affirmation masculine. Elle a besoin de cette approbation qui pour moi est malsaine. Un passage m’a particulièrement marquée, celui où elle se regarde dans le miroir et qu’elle ne se sent plus belle car elle ne plait plus aux hommes, je cite : « au temps où son jeune allemand l’avait vraiment aimée, physiquement alors son corps était jeune ».  Pour vivre pleinement, les femmes ne doivent pas se sentir aimées à travers le regard de l’homme. Pour moi, c’est le principal message de ce roman. On comprend dans le cheminement de l’histoire que Clifford est antipathique avec elle, il dépend d’elle pour vivre mais ne lui apporte plus aucun soutien émotionnel. Ce qui ne me plait également pas c’est la façon dont l’auteur rend libre la femme dans son livre. Pour lui, la liberté passe par son affirmation sexuelle, il sexualise donc la femme pour lui donner des droits, pour être libre de ses choix. Oui, la femme a des désirs sexuels, comme les hommes, mais dans ce récit ces envies sont mises en avant pour montrer qu’elle est libre. Or une femme peut s’affirmer de plein d’autres manières, par son intelligence ou ses engagements !  Ce qui est, je trouve, une incohérence avec le fait que Constance dit elle-même : « la discussion était la plus grande chose ; l’amour, les rapports sexuels n’étaient qu’une sorte de retour à l’instinct ». Mais l’auteur décide de la représenter presque uniquement à travers le sexe, à la réduire à l’acte charnel, ce qui est fort dommage et me déplait. Cela renvoie l’image que la femme doit servir à quelqu’un avant d’être quelqu’un. Bien qu’à cette époque la femme est réduite au rôle d’épouse et de mère, Constance s’émancipe de toutes ces obligations. Cependant le fait qu’elle s’émancipe exclusivement grâce à son corps me pose problème même si pour l’époque cette émancipation est remarquable.

Le mélange des classes sociales

Ce roman brusque une autre norme et montre que deux personnes de milieux différents peuvent s’aimer et se comprendre. Ce qui est génial car cela brise le mépris de classe et la façon de penser des gens fermés d’esprit. Sur ce point je trouve que D.H.Lawrence montre extrêmement bien le fait qu’on aime la personne et pas l’image qu’elle renvoie ou son statut. Car, oui, en 1920 dans la bourgeoisie les mariages arrangés font partie « du jeu » et il est hors de question de se « mélanger » avec des personnes de classes inférieures. En cela ce roman brise les codes et on comprend à nouveau qu’il puisse faire scandale !

Que peut-on en retenir ?

Pour moi ce roman est intéressant car on voit le début des pensées féministes pour l’émancipation de la femme, il est super instructif !

Si vous aimez ce genre de récit où la femme et ses envies sont mises en avant, je vous conseille aussi Madame Bovary, un roman génial et avec du recul hyper intéressant à lire. On peut voir l’importance de nos libertés, de nos sentiments et l’effet qu’ils ont sur notre conduites.

Du point de vue du rythme, ce roman est très descriptif, ce qui peut rebuter. Dès le début il faut s’habituer au style d’écriture où chaque mouvement amène un développement. Ce style d’écriture permet cependant de bien visualiser les scènes et aide le lecteur à s’imaginer les scènes de vie. Ce qui permet de rendre la lecture plus immersive.

Selon moi, cette œuvre est vraiment une avancée vers le dénouement de la parole pour les femmes. C’est une œuvre en avance sur son temps. Et que dire de sa dénonciation de la stigmatisation des différentes classes sociales ! 

Bref, je vous conseille fortement de lire ce livre ! 

D.H.Lawrence .L’amant de lady Chatterley . édité en 1928 

Judith KACZMAREK, 1ère2

Une écriture brillante au service du plus abject des crimes

Source : https://0620056z.esidoc.fr /document/id_0620056z    _10746.html

Lolita eut un impact majeur sur la carrière de Vladimir Nabokov et permit à l’écrivain russo-américain de connaître le succès à l’international. Ce roman a été publié pour la première fois en France, en 1955, car aucun éditeur américain n’acceptait de le publier en raison des thèmes qu’il aborde. Très mal interprétée, parfois qualifiée d’apologie de la pédophilie, l’œuvre a été accueillie par une grande controverse à sa sortie. En effet, Lolita a suscité diverses réactions, allant d’éloges pour lécriture exceptionnelle de l’auteur à un profond dégoût en raison de son contenu explicite. La description des relations sexuelles entre un homme adulte et une jeune fille a choqué de nombreux lecteurs, parmi lesquels certains ont crié à une sorte de pornographie. Par conséquent, l’œuvre de Nabokov a été interdite et censurée dans certains pays tels que le Royaume-Uni, la France, l’Argentine, l’Australie ou encore la Nouvelle-Zélande. Alors que le livre provoque toujours le débat, il bénéficie d’une renommée internationale. Lolita est aujourd’hui considérée comme une œuvre majeure de la littérature du 20ème siècle !

Lolita n’est pas une histoire d’amour, mais une histoire de crime

Le roman confronte le lecteur aux arrogantes confessions d’Humbert Humbert, un professeur de littérature française de 40 ans qui cache indéniablement quelque chose sous son apparence de gentleman serein et cultivé… En effet, l’Amérique du 20ème siècle décrite par Nabokov sert de décor à un homme profondément troublé. Rapidement, on découvre son obsession malsaine pour les filles prépubères et « attrayantes », qu’il qualifie notamment de nymphettes. Alors qu’il déménage aux États-Unis et loge chez Charlotte Haze, il rencontre Dolorès Haze, sa fille de 12 ans, qu’il surnomme Lolita. Humbert Humbert tombe follement « amoureux » de celle qui deviendra bientôt sa belle-fille, tandis qu’il prend Charlotte pour épouse. Effectivement, son obsession pour la jeune fille est telle qu’elle le pousse à commettre d’atroces crimes, et à officialiser son union avec sa mère, dans l’objectif de prendre possession de Lolita. Celle-ci lui rappelle son premier amour, Annabel Leigh, qui décède prématurément à cause du typhus. Aux yeux d’Humbert Humbert, cette tragédie pourrait justifier son comportement à l’égard de la petite, ainsi que son obsession maladive pour les filles âgées de 9 à 14 ans. Le furieusement dérangé Humbert Humbert fait de Lolita, Lo, Dolly, ou Loleeta, le centre de son monde !

« Je la regardais et la regardais encore, et je savais, aussi clairement que je sais que je dois mourir, que je l’aimais plus que tout ce que j’avais vu ou imaginé en ce monde, ou espéré dans l’autre. Vous pouvez me couvrir d’injures, menacer de faire évacuer la salle – tant que je ne serai pas étranglé par vos baillons, je crierai ma pauvre vérité. L’univers saura combien j’aimais Lolita, cette Lolita. »

Affiche du film Lolita, 1962
« Comment a-t-on osé faire un film de Lolita ? »
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki  /Lolita_%28film,_1962%29

Les adaptations cinématographiques ont également été au cœur de débats, précisément sur la manière dont l’histoire d’Humbert Humbert et de Lolita peut être représentée au cinéma. L’œuvre de Nabokov a été adaptée à l’écran pour la première fois en 1962 par le célèbre réalisateur Stanley Kubrick, puis une seconde fois en 1997 par Adrian Lyne. Cette deuxième adaptation se veut plus explicite que la première, ce qui a provoqué davantage de controverses à sa sortie. Les deux films restent fidèles au roman, mais Stanley Kubrick a tout de même apporté quelques modifications afin de s’adapter aux mœurs de l’époque.

Une dimension de complexité unique !

Le protagoniste et narrateur du roman, Humbert Humbert, raconte Lolita à la première personne. En tant que lectrice, j’ai remis constamment en question la fiabilité du récit, puisque l’immoralité dont fait preuve le quadragénaire ne permet pas d’affirmer qu’il est un narrateur digne de confiance. Ainsi, lors de notre lecture, nous devons éviter à tout prix le piège que Nabokov a installé, qui est d’adopter uniquement le point de vue du monstre. J’ai apprécié cet élément de l’œuvre car l’écriture à la première personne la rend davantage complexe et permet à l’auteur, mais aussi au lecteur, d’explorer la psychologie du personnage de fond en comble. Nabokov nous présente les justifications tordues d’un pédophile qui tente malgré tout de rationaliser son comportement répréhensible. Il est conscient qu’il est coupable mais attribue une part de responsabilité à Lolita, sous prétexte que la petite serait aguicheuse et provocante. Le talentueux auteur a pris l’énorme risque d’écrire Lolita sous l’angle du coupable, puisqu’il aurait été confronté à moins de difficultés en l’écrivant du point de vue de la victime, de toute évidence ! A mon sens cela rend l’œuvre de Nabokov davantage remarquable et mémorable.

« Je t’aimais. J’étais un pentapode monstrueux, mais je t’aimais. J’étais haïssable et brutal et abject – j’étais tout cela, mais je t’aimais, je t’aimais ! Et parfois, je devinais ce que tu éprouvais, et c’était pour moi un supplice infernal, mon enfant. Petite Lolita. Dolly Schiller. »

L’un des aspects les plus remarquables de Lolita est, à mon sens, la prose de Vladimir Nabokov. Une des caractéristiques les plus précieuses de son écriture est l’intimité qu’elle parvient à instaurer entre sa beauté et une histoire véritablement perturbante. Ce contraste permet d’attirer le lecteur vers le roman, puisque sa prose est splendide, alors qu’il est tout autant repoussé par les thèmes qu’il aborde. Ainsi, Lolita prouve parfaitement qu’une œuvre peut être artistique et tout à fait provocante et troublante à la fois lorsque l’auteur parvient à manipuler la langue.

Ce roman est tellement réaliste qu’il en devient fascinant

Bien qu’il puisse être choquant et dérangeant, j’attribue quatre étoiles à ce roman. Lolita m’a poussée à me remettre en question et à me confronter à des idées inconfortables, un aspect qui m’a particulièrement plu. Il relate une histoire marquante, qui laisse définitivement une trace dans le cœur, puis dans l’esprit. Je ne vous cache pas que ma lecture fut compliquée au début, car je ne pouvais pas m’empêcher d’imaginer Nabokov en lisant le récit d’Humbert, mais l’auteur n’est pas son personnage. Il est important de faire ce parallèle tout au long de votre lecture. Il convient de lire ce roman avec une certaine compréhension des sujets abordés, et en gardant en tête que l’auteur ne cautionne en aucun cas cette relation incestueuse.

Lisez-le, et ne cédez pas dès les premières pages à l’appel du dégoût !

Pour visionner une interview où Nabokov nous parle de son roman Lolita et nous fait quelques révélations, cliquez-ici.

Nabokov, Vladimir. Lolita. Gallimard, 06/2022. 531 p. Folio. ISBN 2-07-041208-3

Laurine CORNET-MAGNIEZ, 1ère2

Un parcours semé d’embûches

Source : https://www.livredepoche.com / livre/nickel-boys-9782253935025

Nickel Boys est un roman écrit par Colson Whitehead en 2019, traduit de l’anglais par Charles Recoursé. C’est en 2017 que l’auteur remporte son premier prix Pulitzer pour The Underground Railroad, puis son second en 2020 pour Nickel Boys. Il est important de souligner qu’il est l’un des rares écrivains à détenir deux prix Pulitzer, en plus du National Book Award et du prix Arthur C.Clarke. De plus, The Underground Railroad a bénéficié d’une adaptation télévisuelle par Barry Jenkins, qui a contribué à faire connaître l’auteur. Pour avoir déjà lu Harlem Shuffle, un roman écrit par ce même auteur qui m’avait beaucoup plu, mon choix s’est naturellement porté sur Nickel Boys. Une fois de plus, je n’ai pas été déçue par son écriture qui contribue à faire vivre une histoire basée sur des faits aussi réels que révoltants.

Nous sommes en pleine Amérique ségrégationniste dans les années 1960. Plus précisément dans la communauté afro-américaine de la Floride où le jeune Elwood Curtis vit en compagnie de sa grand-mère, Harriet. Abandonné dès le plus jeune âge par ses parents, notamment son père qui était trop ambitieux à son retour de l’armée et pour qui Tallahassee n’était plus à la hauteur de ses attentes. Elwood est un garçon très intelligent, poussé par Harriet qui pense que le travail est une valeur essentielle. Ainsi, elle espère que l’assiduité ne lui laissera pas le temps de participer à des manifestations qui pourraient le mettre en danger en raison de sa couleur de peau. Cependant, le jeune garçon est totalement absorbé par les discours de Martin Luther King qui lui ont ouvert les yeux. Sa fascination pour les discours de ce dernier en faveur de la lutte des droits civiques le pousse à vouloir partager via l’écriture son combat sur la question raciale. Il fait plusieurs tentatives dans ce sens, mais aucun journal n’accepte de partager ses lettres. Lorsque son professeur d’Histoire lui suggère de rejoindre Melvin Griggs, une université réservée aux élèves méritants, Elwood comprend que son avenir est tout tracé. Jusqu’au jour où ses rêves sont brutalement interrompus. Envoyé, suite à une erreur judiciaire, à la Nickel Academy, un établissement de correction pour mineurs, sa vie prend un tournant brutal. Rien n’est simple à Nickel ! Entre les pires sévices perpétrés dans l’ombre et la terreur qui y règne, tout est une question de survie quand le destin vous joue des tours. Elwood devra surmonter toutes ces épreuves pour espérer, un jour, quitter Nickel et regagner sa liberté…

Un roman puissant de vérité

En s’inspirant d’une histoire vraie de la Dozier School for Boys, Colson Whitehead nous relate la réalité la plus juste de la ségrégation aux États-Unis des années 60. Dès le début nous sommes plongés au cœur du sujet : un cimetière clandestin est découvert au sommet de la grande colline du campus de Nickel. Une enquête est ouverte après la découverte de plusieurs corps d’élèves noirs. La parole se libère et les anciens élèves de Nickel parlent des visites nocturnes dans les dortoirs, des cris camouflés par un ventilateur industriel provenant d’une pièce que les élèves noirs surnomment la Maison-Blanche. Nickel aurait dû offrir une nouvelle chance à ces garçons, dont la plupart n’avaient pas une vie facile avant de rejoindre l’école. Au lieu de cela, si ils en ressortent, ce n’est jamais sans séquelles. Depuis son arrestation, Elwood pleure la nuit quand il pense à ce que lui réserve Nickel. C’est au bout du deuxième jour qu’il fait la connaissance de Turner, l’un de ses semblables. Ces deux-là se lient d’amitié. Cette amitié est ce qui permet à l’adolescent de rester fidèle à ses convictions. La violence est au cœur du roman, reflétant la cruauté de la ségrégation. «Vous êtes des Noirs dans un monde de Blancs », voilà ce que leur apprend Nickel ! Dès lors nous avons très vite ce sentiment de rage qui grandit en nous à mesure que l’on avance dans le roman. On lit avec appréhension, angoissé par une menace grandissante, ce qui maintient le suspense. Mais lorsqu’elle frappe, elle est déchirante. C’est tout le brio de l’écriture de l’auteur, une écriture qui a la capacité de nous saisir au bon moment ! Nous suivons la vie brisée d’Elwood, et celle de beaucoup d’autres noirs avant lui. C’est un rappel d’une face les plus sombres de l’Amérique, d’autant plus lorsque l’on sait que la Dozier School for Boys n’a été fermée qu’en… 2011 ! Oui, vous avez bien lu, 2011. Cela montre le racisme persistant dans certains États, encore aujourd’hui malheureusement. Et que le simple fait d’être noir et d’être au mauvais endroit, au mauvais moment, suffit pour que votre vie bascule du tout au tout.

Colson Whitehead Source : https://buechermenschen.de/ lesenswert/10-fragen-an/colson-whitehead/

Deux façons de voir le monde

L’amitié entre Elwood et Turner oppose deux visions différentes. De l’une, Elwood est conscient qu’il est coincé à Nickel, mais il veut en tirer son parti et tout faire pour que ça dure le moins longtemps possible, motivé par les discours de paix du révérend Martin Luther King. De l’autre, Turner semble s’être résigné à son sort. On ne peut pas s’empêcher d’éprouver de la compassion pour Elwood auquel on s’attache immédiatement. En revanche, j’avais un doute quant aux intentions de Turner, du moins au début. Il m’a donné l’impression d’être absent et à l’écart, un être en marge où qu’il soit. Mais rapidement leur relation se concrétise. Elle est un pilier dans leur reconstruction mais aussi dans le schéma narratif du roman. En effet, tout au long du récit les bonds dans le temps – on passe des années 60 aux années 80 – agissent comme une coupure à la violence. Une situation paisible, qui va à l’encontre de ce que nous venons de lire et atténue l’horreur de Nickel. Cependant une tension semble persister. Ces passages m’ont un peu troublée mais ce n’est qu’une fois le roman terminé que nous nous rendons compte de tout l’intérêt de ces allées et venues dans le temps et du génie de l’auteur ! L’épilogue est un revirement de situation insoupçonnable ! Quel talent ! C’est d’ailleurs cette fin qui m’a beaucoup plu et marquée. J’ai également beaucoup aimé la façon d’écrire de Colson Whitehead qui dépeint tant les jours ordinaires que la violence la plus abjecte, suggérant des scènes trop violentes plutôt que de les décrire dans le menu détail ce qui rend ce roman accessible à un large public mais n’en atténue pas la portée. Un roman toutefois dur à lire pour ses scènes puissantes et marquantes qui vous laisseront le cœur plein d’émotions.

J’attribue cinq étoiles à ce roman qui a été un véritable coup de cœur pour moi !

Je vous souhaite une très bonne lecture !

Whitehead, Colson. Nickel Boys. Librairie Générale Française, 05/2022. 264p. Le Livre de Poche, ISBN-9782226449788

 

 

Lucie LEGAY,  1ERE2

Une fugue pour se retrouver

Un roman intemporel

JD Salinger pose pour un portrait alors qu’il lit son roman américain classique « The Catcher in the Rye » en 1952 à New York. source: https://www.today.com/ books/biography-j-d-salinger -didnt-want-public-see-auction -2D11632738

          L’attrape-cœurs (The Catcher in the Rye) est un roman étasunien publié en 1951. Son auteur, J.D Salinger, commence à écrire dès son plus jeune âge. Plus tard, alors que ses œuvres commencent à avoir du succès, il supporte mal la célébrité et s’isole. Emmuré dans un profond silence, il suscite la curiosité des lecteurs du monde entier ! Son roman L’attrape-cœurs est devenu un livre culte sur la jeunesse et a connu un succès immédiat. Témoignage poignant et réaliste des années cinquante, le récit des aventures d’Holden Caulfield explore des thèmes universels qui questionnent toujours aujourd’hui. Il n’est donc pas étonnant que ce roman eu un énorme succès qui est,  selon moi, amplement mérité ! En effet, en abordant la difficile période de l’adolescence et la dépression, ce livre me semble avoir une portée intemporelle. Je peux vous assurer que, même soixante-douze ans après sa publication, cette œuvre new-yorkaise n’a pas pris une ride ! Si vous ne me croyez pas je vous invite à le lire. 

          Holden Caulfield, adolescent perturbé de 17 ans, étudie à Pencey. Il est renvoyé de cette université peu de temps avant Noël. Jeune homme à l’esprit  troublé,  il erre durant trois jours dans les rues de New-York. Effrayé par la réaction de ses parents à l’annonce de son renvoi, il décide en effet de ne pas rentrer chez lui. Même le froid glacial de décembre,  dans lequel il est plongé, ne le décide pas à réintégrer son foyer. Ne sachant jamais où aller, il laisse le destin le guider dans un monde où il ne trouve pas sa place. Une errance qui symbolise bien la période de l’adolescence pendant laquelle nous nous « cherchons ».  Aucun de ses déplacement dans la Big Apple n’est réfléchi, il ne maîtrise rien. « Tellement seul et mal foutu », le jeune homme entame alors une profonde réflexion sur lui-même. Il nous dépeint une critique de la société avec le regard perspicace d’un ado coincé entre deux âges.

Intriguant et original au premier regard

Soure : https://www.abebooks.fr/ rechercher-livre/titre/ attrape-coeurs/auteur/ salinger/

          Je voudrais maintenant vous poser une question essentielle : quelle est la première chose que vous faites lorsque vous choisissez un livre ? Naturellement, il me semble que vous me répondrez que vous retournez le roman et que vous lisez le résumé de la quatrième de couverture. Ou encore, que vous cherchez une inspiration en scrutant l’illustration. Ici, rien de cela. C’est bien ce qui m’a intriguée au premier abord. Cette couverture rouge vive m’a tapé dans l’œil parmi les autres œuvres proposées dans le cadre du Prix littéraire Carnot. Je n’avais aucune idée de ce qu’elle pouvait représenter. Puis j’ai retourné le livre pour avoir des réponses à mes questions. Mais il n’y avait rien, absolument rien, même pas l’ombre d’une phrase ou d’un mot ! Original non ? En ce qui me concerne, c’est cette accumulation de questionnements qui m’a incitée à lire ce roman. Je trouve cette stratégie de l’éditeur très bien trouvée et innovante, mais sans nul doute qu’elle puisse en laisser quelques-uns perplexes…

Un surplus de sous-entendus

          La  seule chose qui m’a déplu dans L’attrape-cœurs,  c’est l’impression de nécessité de relecture pour comprendre chaque sous-entendu. En effet, j’ai pu remarquer que derrière de nombreuses phrases se cachaient des réflexions plus profondes. Un exemple précis me vient à l’esprit. Je peux citer le métier d’attrape-cœurs que voudrait exercer Holden, qui est décrit ainsi par ses soins : «Et moi je suis planté au bord d’une saleté de falaise. Ce que j’ai à faire c’est d’attraper les mômes s’ils approchent trop près du bord. […] moi je réplique et je les attrape. C’est ce que je ferais toute la journée. Je serai juste l’attrape-cœurs et tout.» La vocation du personnage principal serait de remettre dans le droit chemin tous les ados qui, comme lui, ont des difficultés à entrer dans le monde des adultes. Mais cela reste mon interprétation, chacun peut en avoir une autre.

Une identification et un attachement profond au personnage

          Je ne suis pas une grande lectrice, je vous l’avoue. Mais s’il y a bien une chose qui m’a fait aimer ce livre, c’est ce sentiment de proximité avec le personnage. Le fait que la narration soit à la première personne du singulier et qu’elle soit omnisciente (on a accès aux pensées et réflexions du personnage) nous donne l’impression d’être dans la tête d’Holden, voire parfois de prendre sa place. De plus, l’auteur utilise un style oral et  familier comme le souligne des expressions telles que « et tout, et tout » et des accumulations de tics de langage. Ce sont de telles expressions que nous utilisons dans notre quotidien et à mon sens ces procédés nous aident à nous identifier au protagoniste. Si je devais comparer ce roman à une attraction – je sais, cela peut paraître absurde – je l’associerais aux montagnes russes. Plus précisément à des montagnes russes émotionnelles. Au cours de ma lecture, j’ai constaté que ce récit pouvait faire mal. Tour à tour, je ressentais de la mélancolie, un sentiment de solitude lorsque l’adolescent Caulfield recherche désespérément sa place. Ne vous êtes-vous jamais retrouvé comme lui pris entre deux mondes ? Vous trouvant exclu du groupe des enfants à cause d’une maturité plus développée que la leur et rejeté par les adultes qui peinent à vous considérer ? C’est vrai qu’il est difficile, alors  assis à la table des  » mômes » lors d’un anniversaire, d’écouter la conversation voisine des adultes !

        Et puis dans ce fleuve d’ondes négatives, arrive tout à coup une note de légèreté. L’insouciance d’Holden tombe à pic et apporte une pointe d’humour ! Il en devient touchant. L’adolescent n’est pas conscient de l’importance de ses actions sur son futur. En effet, il répond au père Spencer, soucieux de l’avenir de son élève : « Oh si bien sûr. Bien sûr que je me fais du souci pour mon avenir. J’ai réfléchi une minute. Mais pas trop quand même. Non pas trop quand même ». Je me suis donc particulièrement attachée à ce personnage ayant trouvé une petite part de moi-même en lui.

          Finalement, si je devais donner trois adjectifs pour caractériser ce roman ils seraient : intemporel, original et touchant !

       Bonne lecture à tous, j’espère que ma critique vous aura permis de découvrir L’attrape-cœurs, ou même pour certains de le redécouvrir !

Selon moi ce roman mérite bien 4 étoiles !

4 Étoiles Sur 5

Salinger, J.D. L’attrape-cœurs. Pocket, 06/1994. 252 p

Clara SENCE, 1ere2 

Découverte de la vie d’un artiste

 

Première de couverture de la BD « Piscine Molitor »

Piscine Molitor, dessinée et scénarisée par Christian Cailleaux et Hervé Bourhis, est parue en 2009. C’est une histoire vraie puisqu’elle relate la vie de Boris Vian. J’ai découvert cet artiste grâce à mon professeur de Français et mon professeur documentaliste dans le cadre du Prix Littéraire du Lycée Carnot. Boris Vian ne m’était donc pas inconnu au moment de cette lecture puisque mes professeurs nous avaient montré des vidéos sur lui en classe. Nous avons également eu la chance de visiter son appartement le 29 novembre ce qui m’a permis d’en savoir encore plus sur cet artiste. Nous sommes entrés dans son intimité, puis nous avons pu échanger avec Nicole Bertolt qui gère son patrimoine. Cette dame nous a expliqué qui était Boris Vian, elle nous a confirmé qu’il n’avait pas peur de l’avis des autres, d’autant plus qu’il savait qu’il allait mourir jeune ! Je lui ai donc demandé son avis sur cette bande dessinée. Elle m’a répondu qu’elle ne l’avait pas appréciée. Selon elle, cet ouvrage ne représente pas exactement la vie de Vian et présente beaucoup d’erreurs. Il faut en effet savoir que Cailleaux et Bourhis n’ont pas demandé l’accord à Nicole Bertolt pour écrire sur l’artiste. Après tout, c’est elle qui représente Boris Vian ! Avant cela j’avais pu me faire mon propre avis et je vais vous le présenter.

Un dernier plongeon avant la mort

Piscine Molitor-Paris Source: www.bing.com

Ce récit retrace les derniers moments, les dernières heures de cet artiste polyvalent puisqu’il jouait de la trompette, il chantait, il écrivait… Pour comprendre cette bande dessinée, il faut préciser que la piscine Molitor est un lieu qui se situe à Paris. Vian s’y rendait pour y faire de l’apnée car il souffrait d’une maladie cardiaque et, pour lui, retenir le plus longtemps possible sa respiration était bon pour son cœur. D’ailleurs, dès les premières planches nous pouvons constater la maladie de l’artiste. Il sait qu’il va mourir, il se sait condamné. C’est donc pour cela que la bande dessinée porte ce nom.

Nous comprenons aussi qu’il se rend dans cette piscine avant de partir pour la projection cinématographique de l’adaptation de son roman, J’irai cracher sur vos tombes, projection pendant laquelle il va mourir. Cela dit, la présentation de son existence est chronologique. On a juste des aller-retours entre les dernières heures de sa vie et les grandes étapes de son existence, autrement dit une construction en flashbacks. Cela crée une tension dans la lecture car on ne sait pas quand l’épisode de sa mort va nous être relaté. Dès le début on sait qu’il va mourir mais l’attente est longue. 

Dans ce récit, vous pourrez ainsi découvrir les différentes étapes de sa vie, ses femmes, son procès pour atteinte aux bonnes mœurs à la suite de la sortie de son roman J’irai cracher sur vos tombes. Bref, vous allez découvrir sa vie, une vie à mille à l’heure ! Le rythme de la bande dessinée est comme son existence, très rapide ! Cette qualité est en même temps le petit bémol que j’apporterai à cette bande dessinée. En effet, je trouve que les auteurs ne parlent pas assez de sa jeunesse… signe qu’ils ne se sont pas assez documentés, notamment auprès de Madame Bertolt. L’étape de l’enfance passe trop vite, notamment le fait qu’il ait appris à lire et écrire très jeune. Vous le découvrirez durant votre lecture. Je trouve aussi qu’il manque une transition entre sa vie avec sa première épouse, Michelle Léglise, et celle avec sa seconde femme, Ursula Kubler. Il n’y a que l’étape de la séparation ! Cependant l’accent est bien mis sur sa vie de Jazzman car Boris Vian a écrit des chansons et il jouait de la trompette. J’ai donc écouté Le Déserteur suite à ma lecture, mais j’avoue que ce n’est pas mon style de musique !

Une palette de couleurs en lien avec les émotions

Planche de la BD. Page 6. Source: www.bdtheque.com

Concernant l’aspect graphique, les planches sont colorées avec des couleurs assez froides par moment et plus chaudes à d’autres. Chaque couleur correspond à une émotion. Le style de Christian Cailleaux rappelle un peu la ligne claire comme chez Tintin, les traits sont fins. Je trouve que les personnages sont très bien représentés. Par exemple, sur les dessins où il se trouve à la piscine, Boris Vian est dessiné avec des traits émaciés pour faire comprendre qu’il est malade et proche de la fin. Sur la planche ci-contre, l’illustrateur utilise de nombreuses nuances de bleu pour transmettre la gravité de la situation.

Pour découvrir l’artiste, c’est par ici !

Malgré ses manques, j’ai bien aimé ce récit, il explique les grandes étapes de l’existence  de Boris Vian même si je connaissais déjà un peu sa vie. L’artiste était très occupé, nous le comprenons bien. La bande dessinée est très facile à lire et compréhensible. C’est une bonne entrée en matière pour connaître les grandes lignes de la vie de l’auteur. Si vous voulez découvrir l’artiste, voir à quel point il avait une vie mouvementée et comment il en a profité, je vous invite à découvrir cette bande dessinée. Personnellement je lui attribue la note de quatre étoiles. J’enlève une étoile puisque les auteurs ne parlent pas assez de son enfance.

Bonne lecture à vous !

Cailleaux, Christian / Bourhis, Hervé. Piscine Molitor. Dupuis, 03/2020. 74 p. Aire Libre.

SECEMBER Ketty, 1ST2S1

La sauveuse du Palais des femmes

Source : https://www.livredepoche.com/livre/les-victorieuses-9782253934639

Vous connaissez peut-être Laetitia Colombani, une très grande écrivaine, actrice, scénariste et réalisatrice française née en 1976 à Bordeaux. Elle est connue pour ses romans La tresse, Les Victorieuses ou encore Le Cerf-volant. Dès sa parution, Les Victorieuses s’est classé dans les meilleures ventes. L’intrigue se développe autour du Palais de la Femme à Paris, dans le 11e arrondissement. L’idée d’écrire ce roman est venue à Laetitia Colombani quand elle est passée devant ce lieu. Elle a commencé à se renseigner, à recueillir des témoignages et autres informations pour écrire son récit. 

Quand les femmes s’entraident

Les Victorieuses nous raconte l’histoire de Solène, une avocate qui est en burn-out car Arthur Saint-Clair, l’un de ses clients, s’est suicidé après son audience. Elle n’arrive plus à aller travailler et tombe en dépression. Elle consulte alors un psychiatre qui lui propose de faire du bénévolat au lieu de prendre des médicaments. Elle devient bénévole pour les femmes qui ont été violées, qui sont battues ou celles qui vivent dans la pauvreté… aux Palais de la Femme. Pour Solène c’est une vraie thérapie. Au début, elle est accueillie par la directrice chaleureusement. Elle commence sa première permanence et ne se sent pas utile pour ces femmes. Seulement elle va se rendre compte que soutenir les femmes dans le besoin l’aide beaucoup et va prend conscience que c’est le métier la qu’elle veut faire

Dans son récit, Laetitia Colombani retourne dans le passé pour nous parler de Blanche Peyron, une femme de 53 ans atteinte d’une grave infection aux poumons mais qui veut accomplir sa mission « Soupe. Savon. Salut » pour venir en aide aux plus démunis. Blanche Peyron n’est pas n’importe qui. Ancienne mondaine, elle quitte tout pour s’engager au service des autres et entre à l’Armée du Salut. Elle est aussi et surtout la fondatrice de ce Palais de la femme en 1926 ! Le lien qui la relie à Solène est leur volonté commune d’aider les femmes. Blanche Peyron a vraiment existé et selon moi cela ajoute plus d’émotions au récit car c’est une femme qui a fait beaucoup pour ses semblables.

Palais de la femme en 2019. Source : Sortiraparis.com

J’ai beaucoup aimé ce roman ! Je l’ai lu très rapidement car il met en scène des personnes en difficulté et je trouve ça très bien que des femmes s’entraident, c’est émouvant. A un moment du récit, Cynthia, une des résidentes du Palais, se suicide car elle souffre trop et se dit qu’elle ne sert à rien. J’ai trouvé ce passage très touchant car beaucoup de femmes se rabaissent et Laetitia Colombani aborde un sujet d’actualité. En effet beaucoup de femmes se sous-estiment tout le temps et je pense que c’est tout à fait vrai car je connais plein de monde dans ce cas. J’ai beaucoup aimé le personnage de Solène car elle aide beaucoup de personnes même si elle est elle-même au plus mal. Elle est très courageuse, je trouve qu’elle parvient à donner beaucoup de force aux résidentes du Palais qui ont un passé très douloureux. Je trouve le style d’écriture de Laetitia Colombani fluide et intéressant et j’ai apprécié le retour vers le passé avec Blanche Peyron. C’est très intéressant car on veut toujours connaître la suite, on n’arrive pas à s’arrêter de lire. Je vous conseille fortement de lire cette histoire, si vous êtes une femme et surtout si vous êtes un homme, pour mieux comprendre ce que les femmes peuvent vivre. Son récit est basé sur des histoires vraies. L’auteure s’est appuyée sur des témoignages et anecdotes pour alimenter son livre, notamment ceux de Blanche Peyron. Je trouve cela fantastique que Laetitia Colombani ait parlé de Blanche Peyron car c’est une personne importante dans l’histoire des femmes. 

Ce roman nous apporte beaucoup d’émotions. Ce n’est pas facile de se battre pour les femmes, et ce encore actuellement. Il y a encore trop d’inégalités. Si on met une jupe on nous insulte, si on est ronde on se fait critiquer, alors que pour les hommes ce n’est pas le cas – et ce ne sont que deux exemples ! Je pense que de nombreuses femmes n’ont pas assez confiance en elles et ne sont pas rassurées, même s’il commence à y avoir des petits changements. Je trouve que c’est injuste et je pense que beaucoup de mes semblables ne sont pas assez solidaires, elles se critiquent beaucoup trop elles-mêmes. Pour cela le roman de Laetitia Colombani est salutaire ; il est utile pour les femmes, pour qu’elles se sentent mieux, physiquement ou moralement. Qu’elles aient confiance en elles et qu’elles se donnent une seconde chance dans leur vie.

Pour ces raisons je mets cinq étoiles à ce roman. Je vous le recommande fortement !  

 

Colombani, Laëtitia. Les victorieuses. Librairie Générale Française, 05/2020. 233 p. Le Livre de poche, 35741. ISBN 978-2-253-93463-9

Sarah VERIN, 1ST2S2

Une vengeance brutale qui fait froid dans le dos !

J’irai cracher sur vos tombes a été écrit par Boris Vian et publié en novembre 1946 sous le pseudonyme de Vernon Sullivan. Il utilise ce pseudonyme lorsqu’il écrit des romans noirs dont les histoires sont souvent provocantes. En effet, ce roman a fait un véritable scandale à sa sortie à cause du caractère sexuel trop explicite de certaines scènes qui ont pu choquer à l’époque, et peuvent encore choquer actuellement …

Photographie de Boris Vian. Source : http://e-sushi.fr/actualites/boris-vian

J’irai cracher sur vos tombes raconte l’histoire de Lee Anderson, un métis à la peau blanche qui quitte sa ville natale pour se rendre à Buckton venger la mort de son frère noir, lynché car il était amoureux d’une femme blanche. Arrivé à Buckton où règne la ségrégation raciale, Lee se revendique blanc aux yeux de tous et obtient un poste d’employé dans une librairie. Le jeune homme s’intègre très rapidement et devient ami avec une bande de jeunes qui ne vivent que par le sexe, l’alcool et la violence. Par la suite, Lee se rapproche des sœurs Asquith, deux jeunes femmes blanches racistes qui vivent dans un milieu aisé. L’une s’appelle Lou et l’autre Jean. Lee a des rapports sexuels avec les deux sœurs et met enceinte Jean. Heureux événement, me diriez-vous ! Eh bien non ! N’oublions pas que Lee veut venger la mort de son frère et pour cela il va commencer par avouer aux deux sœurs qu’il n’est pas blanc ! Dès lors, que fera-t-il pour venger la mort de son frère ?

Le récit attractif et surprenant  d’un antihéros !

         J’ai apprécié ce récit de Boris Vian car il n’a pas peur de dire les choses telles qu’elles sont, il n’essaie pas d’atténuer les actes de Lee, lesquels peuvent être assez choquants, voire même très choquants. Prenons l’exemple du passage dans lequel Lee et Dexter, l’héritier d’une famille riche, violent deux jeunes filles effrayées qui crient au secours tellement elles souffrent. J’ai également beaucoup aimé le fait que, tout au long de son roman, Boris Vian crée une montée d’adrénaline en répétant à plusieurs reprises « je me rappelais tout de même le gosse » sans qu’on sache qu’il parle de la mort du frère de Lee. Le fait de toujours répéter cette phrase installe le suspense ce qui va créer chez le lecteur un sentiment d’attente et d’impatience pour découvrir de qui et de quoi il s’agit.

Source : https://www.decitre.fr/livres/j-irai-cracher-sur-vos-tombes-9782253141433.html

On peut utiliser le terme « d’antihéros » pour qualifier le personnage principal de Lee Anderson. En effet ce dernier ne présente pas les caractéristiques d’un héros traditionnel, ce qui rend ce récit, pour moi, encore plus intéressant. Au diable les bons sentiments ! Nous avons un personnage principal qui ne respecte pas les femmes et va même jusqu’à les violer pour venger son frère ce qui, à mon sens, n’est pas tout de même pas une excuse valable. Cependant, les femmes qui subissent ces actes sont elles-mêmes méprisables tant elles font preuve d’inhumanité quand s’exprime leur racisme. Personne n’est tout blanc ou tout noir en fin de compte !

Malgré cela ce n’est pas un récit que je recommande à tout le monde parce qu’il peut choquer les âmes sensibles et, après l’avoir lu, je comprends pourquoi il a fait scandale à sa parution. Si ce roman était publié à l’heure actuelle, il ne ferait sans doute pas autant scandale, voire pas du tout, car parler de rapports sexuels n’est plus un sujet tabou si ce n’est peut-être encore dans certains milieux. Notre société a évolué depuis l’époque de Boris Vian. Attention cependant, certaines personnes peuvent toujours être en désaccord avec ce récit car il dénigre beaucoup la femme qui passe avant tout pour un objet sexuel.  Prenons pour exemple cette phrase : « Tais toi, je te donnerai cinq dollars de plus«  lorsqu’une jeune fille d’environ 12 ans refuse d’avoir des rapports sexuels avec Lee qui ne lui laisse pas le choix et pense qu’en la payant plus elle va accepter.

J’irai cracher sur vos tombes est un roman très violent dans lequel certains protagonistes connaissent une mort brutale. Il ne faut pas oublier que ce roman a été écrit pour dénoncer le racisme envers les personnes de couleur aux Etats-Unis mais sous une forme peu conventionnelle. Habituellement pour défendre ce genre de cause les gens font des manifestations. Ici Boris Vian utilise le viol et le meurtre à travers le personnage de Lee  pour dénoncer le racisme et se faire entendre.

Pour moi la vengeance de Lee fait froid dans le dos mais est proportionnelle à l’acte qu’à subit son frère. C’est choquant mais au moins le message est bien passé, et peut-être que par ces actes Vian désirait interpeller ses lecteurs et faire en sorte que certaines choses concernant le racisme changent. Malheureusement aux Etats-Unis le racisme envers les personnes de couleur est toujours présent actuellement. Prenons un fait d’actualité qui s’est passé il y a  deux ans : George Floyd a été tué par un policier blanc car il était noir ce qui montre que, même de nos jours, le racisme est toujours bien présent. Faut-il écrire à nouveau un roman qui fasse scandale pour changer véritablement les choses ?

Bonne lecture à vous 🙂

Boris Vian. J’irai cracher sur vos tombes. Livre de poche. 220 p.

PRESSE Laly, 1ST2S2

Une infiltration sous haute tension

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source : https://0620056z.esidoc.fr /document/ id_0620056z_66707.html

Flic, un journaliste à infiltré la police a été écrit par Valentin Gendrot et publié en septembre 2020. Cette histoire qui se déroule en plein cœur de Paris, dans le 19e arrondissement, relate l’enquête de l’auteur, infiltré dans la police. Valentin Gendrot nous invite littéralement à intégrer son investigation ! Il nous donne l’impression d’être avec lui et de suivre son évolution dans cette infiltration.

Ce récit raconte comment se déroule le service dans la police mais également les faces cachées de ce métier, les coulisses, ce qu’on ne peut pas vraiment voir quand on n’en fait pas partie. Tout au long de ce travail d’investigation, nous sommes témoins des différentes étapes que Valentin Gendrot a dû passer avant de réellement infiltrer la police. Tout d’abord il travaille en tant qu’ADS – adjoint de sécurité ; c’est un peu comme un « jeune » policier. Son rôle est d’assister un agent titulaire dans ses missions. Ensuite, il continue son service d’ADS mais cette fois dans une infirmerie psychiatrique. Il ne va d’ailleurs pas trop apprécier y travailler car ce n’est pas du tout ce qu’il espère en tant que policier. Lorsqu’il devient conducteur d’ambulance de l’infirmerie, une routine va s’installer. Tout au long de son périple Valentin va parfois se mettre dans des positions délicates puisque il a à plusieurs reprises failli se faire démasquer. En effet, un  jour, les autres « apprentis policiers » vont regarder un reportage réalisé par… Valentin Gendrot !  Il va nier et n’avouera jamais que c’est bien de lui qu’il s’agit. Heureusement personne ne demande plus d’explications.

Il va découvrir durant sont infiltration un racisme banalisé. Par exemple pendant une intervention sur le terrain, un policier roue de coups un jeune migrant car il estime que ce qu’il a fait ne sera pas assez puni par la loi ! Il décide donc de rendre justice lui-même ! Ce qui a le plus choqValentin Gendrot – et moi-même – c’est de voir que ses collègues n’y prêtent aucune attention, comme si c’était normal. Il y a aussi la violence envers les femmes. La plupart des policiers ne veulent pas travailler sur ces affaires car pour eux « ce n’est pas ça la police » ! Ils ne veulent pas gérer ces affaires qui sont pour eux trop banales. Valentin Gendrot ne fera rien et va rester de marbre. Cependant pour dénoncer cela, il écrira ce livre où il racontera en détail ce qui se passe réellement dans la police.

Un récit d’utilité publique

Ce récit nous permet de voir comment, encore maintenant, le racisme ainsi que les violences faites aux femmes ne sont pas pris en considération alors que cela peut avoir de très lourdes conséquences !

Valentin Gendrot journaliste https://s1.ibtimes.com/sites/www.ibtimes.com/files/styles/embed/public/2020/09/03/valentin-gendrot-says-his-book-is-not-against.jpg

J’ai adoré lire ce travail d’investigation car on suit son aventure comme une série qui nous pousse à regarder l’épisode suivant. On ne peut pas s’arrêter, on désire connaître la suite de l’histoire. On entre alors au cœur de la police et on est embarqué dans tous ces événements qui s’enchaînent avec rapidité, sans aucun moment de répit, comme par exemple quand il est appelé à se rendre sur le terrain avec d’autres de ses collègues pour intervenir sur des affaires de trafics de drogue ou de bagarres de rue. Des interventions souvent très mouvementées et très violentes .

On sait que Valentin Gendrot est journaliste et cela se ressent dans son écriture. Il utilise un style et un vocabulaire journalistique qui nous font entrer au cœur de l’action. On peut même dire qu’il enlève ses habits de journaliste pour se mettre dans la peau d’un véritable policier pour mieux comprendre ce qu’il vit. Quand on lit son livre on en oublie presque qu’il est journaliste.

Un récit remplit d’adrénaline et de stress !

Pour moi ce récit nous apprend la vraie vie, c’est-à-dire comment est la société de nos jours : cruelle, sans pitié. Il nous montre tout ce qu’elle essaye de nous cacher, notamment dans la police. Cette enquête nous fait prendre conscience des actes barbares des hommes dans la société en général, et dans la police en particulier où les violences envers les migrants et les personnes défavorisées – souvent ignorées et marginalisées –  sont courantes. La société a fait le choix de ne pas montrer la cruauté qui peut malheureusement surgir dans ces milieux pour éviter de choquer la population. Il y a peut-être aussi une réelle volonté d’orienter les discours dans les médias où les coupables sont toujours les mêmes, où tout est blanc ou noir, sans nuance. Mais Valentin Gendrot a lui décidé que cela ne devait pas rester dans l’ombre, que ça devait être exposé aux yeux de toutes et tous.

Si vous voulez vraiment comprendre comment il analyse toutes ces bavures policières qui sont pour moi d’une haute gravité, je vous invite à lire son enquête. Peut-être n’aurez-vous pas le même avis que moi mais je pense que ce travail d’investigation ne vous laissera pas indifférent et vous fera réfléchir. Pour cette raison, je vous laisse vous faire votre propre opinion et vous invite à vous plonger dans cette enquête. Ce récit entraînant et authentique mérite une note de quatre étoiles !

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Bonne lecture à vous !

GENDROT, Valentin. Flic : un journaliste a infiltré la police. Editions Goutte d’or, 09/2020. 293p

Laure WESTFALEWSKI – MISSAYE, 1èreST2S1

La quête du bonheur

Source: https://0620056z.esidoc.fr/ document/id_0620056z_445.html

LHerbe rouge est un roman écrit par Boris Vian en 1947, juste après L’écume des jours. Le jazzman emblématique de Saint-Germain-des-Prés nous y offre une autobiographie. Si son récit ne connaît pas un très grand succès lors de sa parution, cest en 1985, grâce à l’adaptation télévisée de Pierre Kast, que le public redécouvrira son ouvrage, lui apportant reconnaissance et faisant (re)découvrir la modernité de son œuvre. J’ai personnellement découvert cette œuvre grâce au Prix littéraire Carnot, œuvre qui m’a plu grâce aux thèmes que Boris Vian y aborde.

LHerbe rouge nous raconte lhistoire de deux couples, celui de Wolf et son épouse Lil, et celui de Saphir Lazuli et de son amie Folavril. Le personnage principal, Wolf, est atteint dune profonde tristesse dont il aimerait se débarrasser. Persuadé que cette source de mal-être et dangoisses multiples provient de son passé, il décide de construire une machine capable d’effacer les souvenirs qui lont traumatisé. N’avez-vous jamais rêvé vous-même d’effacer vos mauvais souvenirs ? Mais, pour pouvoir les effacer à tout jamais de sa mémoire, Wolf va devoir revivre ses souvenirs avec les sentiments qu’il a refoulés durant son enfance et expliquer devant un jury imaginaire les raisons de son souhait de les oublier ! Il devra alors refaire face à des parents trop protecteurs, des études trop longues, des relations amoureuses compliquées et bien d’autres problèmes qui ne lui ont pas facilité la vie…

Un surréalisme abondant et complexe

Malgré l’entrée difficile dans cette œuvre par son côté surréaliste, j’en ai tout de même apprécié la lecture. Il y a également de nombreuses descriptions et le fait que le roman soit structuré en plusieurs chapitres peut paradoxalement compliquer la lecture et la perception du bon déroulement de lhistoire. Jai moi-même rencontré des problèmes dans certains passages du récit. Cependant, j’ai beaucoup apprécié les thèmes abordés, les trouvant très intéressants. En effet, nous, les lecteurs et lectrices, avons limpression d’être le psy de Wolf qui nous raconte ses traumatismes denfance. On peut avoir limpression que le jeune homme nous fait directement part de son mal-être, ce qui ma particulièrement plu. On éprouve des sentiments envers ce personnage, on a l’impression d’avoir une sorte d’échange avec lui, on peut le comprendre sur certains points comme lorsqu’il revient sur ses études trop longues et épuisantes. Par ces retours, Boris Vian rend la lecture moins monotone et plus divertissante. De plus, on se rend compte que Wolf crée sa machine dans le but de trouver le bonheur et d’être épanoui dans sa vie. Or, nous cherchons – voire nous rêvons – toutes et tous de trouver le remède miracle pour être heureux lorsque nous avons « le moral dans les chaussettes ».

Un récit aux échos autobiographiques

Boris Vian en 1948 Source: https://fr.wikipedia.org/wiki/ Boris_Vian#/media/Fichier:Boris_Vian .jpg

Pour moi, cette œuvre a une part autobiographique. En effet, Boris Vian y fait des références à sa séparation avec sa première femme, Michelle Léglise, à travers Wolf et Lil. Par exemple, lorsque Wolf casse volontairement le saladier de cristal de Lil en lui disant qu’il ne ressent plus rien et qu’il est temps qu’il parte : c’est ce que Michelle aurait dit à Vian lors de leur séparation. Il fait aussi référence à son parcours d’ingénieur avec linvention de la machine de Wolf. Par ailleurs je trouve qu’au début de lœuvre, Lil et Folavril sont caricaturées. Leurs personnalités sont stéréotypées et renvoient à des images de femmes amoureuses, obéissantes et méprisables comme lorsque Lil veut dormir avec Wolf et qu’elle ne le fait pas, ce dernier étant occupé avec son ami Saphir, ce qui la renvoie à l’image d’une femme obéissante qui n’ose pas déranger son mari. Cependant, plus nous avançons dans le récit, plus elles deviennent indépendantes et même féministes ce qui m’a, personnellement, beaucoup plu et marqué. N’oublions pas que Boris Vian a écrit ce roman dans les années 50, années où les femmes sont perçues – et sont – comme des mères au foyer qui s’occupent des tâches ménagères, des enfants et de leur mari. Il fait donc preuve d’une grande modernité dans son approche de la psychologie féminine ! Je pense aussi que le titre que Boris Vian a donné à son roman rappelle, par son surréalisme, que tout peut être inventé. Vian s’inspire du monde qui l’entoure pour créer le sien et c’est là que résident la force et la singularité de son œuvre !

Pour ces raisons, j’attribue trois étoiles à ce roman qui, très captivant, nous « retourne un peu le cerveau » par l’écriture surréaliste de notre cher Boris Vian !

Bonne lecture à vous !

Vian, Boris. L’herbe rouge. Librairie Générale Française, 03/2021. 188 p. Le Livre de poche, 2622. ISBN 978-2-253-00135-5

 

SAIMPOL Lucie, 1ST2S1