Introduction : Le modèle d’analyse éthique multidimensionnel

Cette présentation se situe dans la continuité d’un article que nous avons publié en septembre 2019 : « L’éthique de la critique : un impératif pour les pédagogies radicales »1.

Le modèle d’analyse éthique multidimensionnel désigne en Amérique du Nord un courant de recherche en éthique professionnelle en éducation provenant de la philosophie et de la psychologie morale. Le théoricien Robert Starratt2 distingue ainsi trois perspectives qui sont nécessaire à la constitution d’un jugement éthique en éducation : l’éthique de la justice, l’éthique du care et l’éthique de la critique. Cette thèse est également reprise par la psychologue morale Lyse Langlois qui tente de lui donner une validité empirique. C’est également dans cette perspective que se situent Joan Polner Shapiro et Jacqueline Stefkovich3, mais ils ajoutent à ce triptyque, l’éthique de la profession.

L’éthique de la justice trouve sa source dans deux modèles théoriques que sont respectivement l’œuvre de John Rawls en philosophie et celle du psychologue Lawrence Kholberg. Pour sa part l’éthique du care a pour origine le travail de la psychologue morale Carol Gilligan. Sur le plan de la philosophie morale et de l’éthique professionnelle, c’est l’éthique de la critique qui apparaît comme ayant donné lieu à moins de recherche et de littérature. Les auteurs qui admettent la multiplicité des paradigmes éthiques réfèrent l’éthique de la critique à la Théorie critique de l’école de Francfort, mais également au philosophe et pédagogue de l’éducation Paulo Freire.

Pour cet auteur la question de l’éthique professionnelle est centrale comme il le souligne : « Et si l’on me permet de dire cela, les programmes de formation des enseignants aux USA et dans d’autres pays doivent accorder une attention spéciale à la question éthique. Il est essentiel de créer une situation dans laquelle les futurs enseignants puissent développer un débat significatif sur l’éthique en éducation. Il ne suffit pas de connaître la théorie de l’opprimé avec ses multiples identités, mais il faut également se positionner éthiquement face aux identités multiples et stratifiées que génère l’histoire de l’oppression »4.

Mais, les enjeux dépassent la formation des enseignants, il s’agit d’une réflexion plus générale sur la formation en éthique professionnelle. Dans quelle mesure l’éthique de la critique peut contribuer à lutter contre l’instrumentalisation dont fait parfois l’objet l’éthique, entre autres, dans le monde de l’entreprise ?

I- L’éthique de la critique : une perspective appuyée sur un cadre juridique

La première difficulté à laquelle nous pouvons nous heurter est celle de savoir sur quoi peut se fonder une éthique professionnelle de la critique dans nos démocraties libérales. En effet, le risque d’une telle éthique de la critique, c’est d’être accusée de relever d’un projet partisan. L’éthique de la critique peut elle être une éthique pour la formation des enseignants dans le cadre d’une mission de service publique qui implique la neutralité des fonctionnaires ?

1. De la dignité de la personne humaine

Se situant dans la continuité de la psychanalyse humaniste d’Erich Fromm, Paulo Freire accorde une place centrale dans Pédagogie des opprimés5 à la lutte contre la déshumanisation de l’être humain contre toutes les formes de réification. Cet objectif constitue l’axe central de Pédagogie des opprimés : « Le problème de l’épanouissement de l’homme, de son humanisation, qui d’ailleurs a toujours été, d’un point de vue philosophique, un sujet de recherche, est devenu aujourd’hui une préoccupation lancinante »6.

Cette centralité accordée à la dignité de l’être humain n’est pas seulement une thématique de la philosophie morale, mais a connu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale une place croissante en droit international, européen et interne. Ainsi la Déclaration Universelle des droits de l’Homme de 1948 proclame en son article 1er : « Tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droit ». En 1994, la Conseil constitutionnel consacre le principe de dignité de la personne humaine. Enfin, il est possible également de citer la Charte européenne des droits fondamentaux de 2000 dont le titre I est consacré à la dignité humaine.

Il est important de rappeler qu’au niveau international l’approche de Paulo Freire est devenue une des références importantes en matière d’éducation aux droits humains7.

2. Du droit de la non-discrimination

C’est de l’article 1er de la Déclaration universelle des droits de l’homme que découle le droit international, européen et national de la non-discrimination. En France, la loi de 2008 sur la lutte contre les discriminations découle de la transposition du droit européen.

La lutte contre les discriminations constitue un des axes majeurs de la pédagogie de Paulo Freire comme il le rappelle dans Pédagogie de l’autonomie : « Je suis professeur pour soutenir constamment la lutte contre toute forme de discrimination, contre la domination économique des individus ou des classes sociales »8.

La place qu’assigne Paulo Freire comme finalité de l’éducation dans une perspective de conscientisation à la lutte contre les discriminations constitue de notre point de vue l’explication de l’ire que lui porte l’actuel Président brésilien d’extrême droite Jair Bolsonaro connu pour ses critiques des droits de l’homme et ses propos discriminatoires à l’égard des minorités.

Ainsi Paulo Freire affirme que l’éducation n’est pas neutre et que sa conception éducative s’inscrit dans un projet éthico-politique. De ce fait, on pourrait se demander si l’éthique de la critique est compatible avec l’obligation de neutralité des fonctionnaires en France9. En réalité, la difficulté se dissout lorsque l’on comprend que les finalités que Paulo Freire assignent à l’éducation se retrouvent non seulement dans les conventions européennes et internationales, mais également dans le droit interne français comme dans les textes de l’éducation nationale. Ainsi, l’article L111.1 du code de l’éducation dispose que : « Le service public de l’éducation (…) contribue à l’égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative. (…) Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité ». De même, le référence de compétence des enseignants de 2013 comprend une compétence en éthique professionnelle ainsi libellée : « – Se mobiliser et mobiliser les élèves contre les stéréotypes et les discriminations de tout ordre, promouvoir l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes. […] identifier toute forme d’exclusion ou de discrimination, ainsi que tout signe pouvant traduire des situations de grande difficulté sociale ou de maltraitance » (Compétence n° 6). C’est ce que nous appelons les finalités socio-éthique de l’éducation.

L’éthique de la critique peut échapper à l’objection de son caractère partisan en s’appuyant sur un cadre déontologique relevant des conventions internationales concernant les droits humains et le droit de la non-discrimination.

II- L’éthique de la critique et les rapports sociaux de pouvoir

Il est possible de se demander, en particulier dans le cadre de son développement dans le secteur privé, si l’éthique n’est pas souvent réduite à un alibi permettant de renvoyer sur les travailleurs et travailleuses, en tant qu’individus, la responsabilité des manquements éthiques de l’entreprise. En introduisant une perspective critique, dans la formation en éthique professionnelle, l’éthique de la critique pourrait ainsi peut être permettre de participer à une lutte contre l’instrumentalisation de l’éthique professionnelle sous couvert par exemple d’image de marque des entreprises.

Plus spécifiquement, en éducation, l’éthique de la critique a pour fonction de développer la sensibilité éthique des futurs enseignants et enseignantes aux questions de lutte contre les discriminations et les inégalités sociales à l’école.

1. Définition de l’éthique de la critique par Lyse Langlois

Lyse Langlois10 , qui a travaillé plus particulièrement sur l’éthique dans les directions scolaires, définit l’éthique de la critique de la manière suivante :

« Ceux et celles qui intègrent cette perspective dans leur démarche cherchent à découvrir les injustices parfois rencontrées dans les relations sociales ou créées par des lois, par la structure d’une organisation ou encore par l’utilisation d’un langage visant à camoufler le vrai problème ou à dominer une relation, bref toute situation pouvant profiter à une personne ou à un groupe au détriment d’autres personnes ou groupes. Le but de cette éthique est de chercher à découvrir si un groupe domine un autre groupe et à essayer de voir comment s’est construit cet état de choses. Et cela dans le but de corriger les injustices. Quatre questions sont reliées à cette éthique de la critique qui vise à comprendre toute relation de pouvoir :

1. Qui bénéficie de cette situation ?

2. Y-a-t-il un groupe dominant ?

3. Qui définit la façon dont les choses doivent être structurées ?

4. Qui définit ce qui doit être valorisé ou dévalorisé ?

Lorsqu’une injustice est découverte, ceux et celles qui adoptent cette perspective éthique tentent de sensibiliser les autres afin d’obtenir une meilleure répartition des bénéfices. Leur position est éthique car ils traitent de questions de justice sociale et de dignité humaine. »11

2. Proximité avec la visée de conscientisation chez Paulo Freire

L’éthique de la critique telle que la défini Lyse Langlois entretient une grande proximité avec la pédagogie critique de Paulo Freire. La première raison tient au fait que les deux approches dérivent de la Théorie critique de l’école de Francfort.

La deuxième raison est liée à ce que l’augmentation du niveau de conscientisation (critical consciousness) constitue la condition de possibilité du développement de la sensibilité éthique propre à l’éthique de la critique. En effet, la conscientisation désigne le processus par lequel un sujet, dans un cadre collectif, prend conscience de l’existence de rapports sociaux de pouvoir13.

De ce fait, la pédagogie critique, initiée par le pédagogue Paulo Freire, constitue ainsi l’approche par laquelle il est possible de développer chez les enseignants, mais plus généralement chez les professionnels, la sensibilité éthique propre à l’éthique de la critique.

Comme il l’écrit dans Pédagogie de l’autonomie, la visée de Paulo Freire est en opposition avec l’éthique néolibérale, ce que l’on pourrait appeler l’utilitarisme économique néo-classique : « Mais il doit rester clair que l’éthique dont je parle n’est pas l’éthique mineure et étroite du marché qui se courbe obéissante aux intérêts du lucre ». Toute l’oeuvre de Paulo Freire repose sur un choix existentiel qui a orienté l’ensemble de son existence depuis ses premières expériences personnelles de la pauvreté dans le Nord-Este au Brésil : celui d’être du côté des opprimés et des opprimées.

Ainsi, l’éthique de la critique dans le monde professionnel interroge la norme implicite de la performance dans les organisations de travail néolibérale y compris dans le nouveau management public : le travail doit-il être organisé de telle sorte que seul les « hommes valides » y trouvent véritablement leur place ? A l’inverse, l’éthique de la critique conduit à s’interroger sur la place des personnes en situation de vulnérabilité sociale dans les organisation de travail : les mères célibataires avec charge d’enfants, les personnes malades ou en situation de handicap…

III- L’éthique de la critique et la déshumanisation au travail

La question de la réification du travail a acquis une nouvelle actualité en philosophie sociale à la faveur du travail d’Axel Honneth14. On trouve aussi bien dans la philosophie sociale contemporaine que dans la psychodynamique du travail un intérêt pour les implications éthiques15. De son côté, Paulo Freire affirme la nécessité de ne pas dissocier la réflexion en éthique professionnelle des conditions morales et matérielles de travail : « Le respect que nous devons en tant que professeurs à nos élèves se manifeste difficilement si nous ne sommes pas, nous-mêmes, traités avec dignité et décence par l’administration privée ou publique de l’éducation » ou encore : « bien que restant dans ce corps enseignant et accomplissant avec amour leur devoir, ils ne cessent de lutter politiquement pour leurs droits et pour le respect à la dignité de leur tâche, aussi bien que pour la diligence due à l’espace pédagogique dans lequel ils agissent avec leurs élèves ».

Ainsi l’éthique de la critique se caractériserait à la différence d’autres approches en éthique professionnelle par le fait qu’elle implique une prise en compte des conditions matérielles et des intérêts moraux des travailleuses et des travailleurs16. Ainsi consacrés par des textes à valeurs constitutionnels, la liberté de se syndiquer et le droit de faire grève peuvent être appréhendés sous l’angle de la déontologie professionnelle.

1. Détresse morale, souffrance éthique et conflits de valeurs au travail

De ce fait, il appartient à l’éthique de la critique appliquée à l’éthique professionnelle de reprendre sous une perspective philosophique des questionnements présents en psychologie du travail et développés sous les concepts de « détresse morale » (Andrew Jameton), « souffrance éthique » (Christophe Dejours) ou encore « conflit de valeurs » (Michel Gollac).

Cela nous conduit à nous dissocier sur un point des auteurs relevant du courant de la multiplicité des paradigme éthiques. En effet, pour ces auteurs, le jugement éthique professionnel découle de l’application conjointe de plusieurs perspectives éthiques. Or notre thèse est qu’au contraire, il peut naître une souffrance éthique qui provient du conflit de valeurs au travail entre ces différentes éthiques.

Ainsi, l’éthique de la profession ou l’éthique du care peuvent entrer en contradiction avec l’éthique de la critique. On peut ainsi penser à un enseignant qui accepte de prendre des cours en plus par conscience professionnelle (éthique de la profession) tout en se mettant ainsi en porte à faux avec l’éthique syndicale de la critique qui considère qu’il faudrait au contraire ne pas accepter des cours en plus pour contraindre l’administration à recruter davantage d’enseignants.

Il est possible de ce fait d’analyser comment sous l’effet de l’utilitarisme néolibéral et de ses formes appliquées dans le nouveau management public, les différentes éthiques sont utilisées les unes contre les autres. L’adhésion des travailleurs et travailleuses à l’éthique de la profession ou à l’éthique du care peut être alors opposée à l’éthique de la critique syndicale. L’éthique de la justice, à travers le droit, peut également se trouver entrer en contradiction avec l’éthique de la critique syndicale et mise au service d’une éthique utilitariste économique.

Un des enjeux de l’éthique de la critique, c’est de favoriser l’alliance dans le monde professionnel entre l’éthique de la critique, du care et de la profession contre une réduction de l’éthique professionnelle à la logique néolibérale de l’efficience économique.

2. Résistance éthique, alerte éthique et désobéissance éthique.

La notion de résistance éthique au travail désigne un ensemble de pratiques qui s’opposent à la déshumanisation de l’être humain. Celle-ci peut résulter de pratiques discriminatoires comme de formes de harcèlement moral institutionnel qui conduisent à la réification de l’être humain17. Il en existe de multiples. Pour mémoire, on citera deux types documentés de résistance éthique.

Le premier est l’alerte éthique qui est désormais consacrée par le droit interne et le droit européen. La loi Sapin définit l’alerte éthique de la manière suivante : « une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ».

Le second est la désobéissance éthique telle que définit par Alain Refalo : « Nous qualifierons ainsi la désobéissance éthique comme l’action de résistance, personnelle ou collective, de salariés ou de citoyens, qui s’opposent à des lois, des règlements, mais aussi à des injonctions et des normes imposées, au nom de leur éthique professionnelle et citoyenne »18. La désobéissance éthique pose davantage de difficultés du fait du rapport problématique qu’elle entretient avec la déontologie du fonctionnaire19.

A ces deux là, nous pourrions également par exemple ajouter la « dissidence éthique » qui consiste à avoir le courage moral de faire entendre sa voix alors même que l’institution ou le groupe de pairs peuvent prendre une position qui s’oppose à l’éthique de la critique. D’une certaine manière, on peut admettre que le droit de la non-discrimination attaque sous le nom de « discrimination indirecte » des pratiques qui peuvent être dénoncées par l’éthique de la critique. Par exemple, refuser des primes à tous les salariés qui sont à temps partiels relève de la discrimination indirecte sanctionnée par le droit dans la mesure où dans cette entreprise les personnes à temps partiel sont des femmes.

3. Existentialisme et vertuisme dans l’éthique de la critique

Il existe au moins depuis le XXe siècle tout un courant aussi bien en philosophie qu’en sociologie ou en littérature d’auteurs qui ont produit une critique de la réification de l’existence dans le monde contemporain. Cette lignée de penseur a été assez bien documentée par exemple par les travaux de Michael Lowy20.Cette réification ne se produit pas seulement au travail, mais elle tend à coloniser la vie quotidienne (comme l’a thématisé par exemple Jurgen Habermas avec la notion de « colonisation du monde vécu »). Cette thématique est également présente dans la psychologie existentielle avec des auteurs tels que Victor Frankl. Dans l’oeuvre de Paulo Freire, il s’agit sans doute également de l’influence de l’ouvrage de Erich Fromm, Société aliénée et société saine21.

Cette influence de l’humanisme existentialiste se retrouve également chez Paulo Freire dans une conférence qu’il prononce à Edimbourg en 1988 intitulée « Les vertus de l’éducateur progressiste ». Il met en avant entre autres la vertu de « consistance » qui peut être rapprochée de la notion de « congruence » chez Carl Rogers ou encore de la notion d’authenticité que l’on retrouve chez les auteurs existentialistes. Ainsi écrit-il dans Pédagogie de l’autonomie : « Encore aussi importante que l’enseignement des contenus est la cohérence avec laquelle j’agis dans la classe, cohérence entre ce que je dis, j’écris et je fais »22.

Néanmoins, l’éthique de la critique implique également de s’interroger sur une autre vertu, le courage moral23. En effet, à travers l’étude de la personnalité autoritaire, les penseurs de l’école de Francfort24 ont lié l’adhésion à des processus de déshumanisation de l’être humain à des comportements relevant de la psychologie sociale telle que le « conformisme de groupe » (Salmon Asch) ou encore la « soumission à l’autorité » (Milgram).

L’enjeu de l’éthique de la critique est entre autres d’articuler les problématiques de l’éthique professionnelle à celle de la lutte contre les risques psycho-sociaux au travail.

4. Comment développer les vertus de l’agir éthique ?

  • La  congruence: Elle suppose que les personnes soient au clair avec les valeurs qu’elles défendent et qui sont importantes pour elles. Pour cela, il est possible d’avoir recours à la clarification de valeurs.

En formation des enseignant-e-s, il est possible d’utiliser le tableau suivant: Voici plusieurs modèles de l’enseignant. Lequel correspond à votre conception de ce qu’est un enseignant ? Vous pouvez les classer par ordre d’importance en leur accordant un chiffre.

Type d’enseignant : Caractéristiques Type de formation
L’enseignant instruit « la pertinence et la précision des savoirs à enseigner et des savoirs pour enseigner » Accès sur la transmission de contenus par des leçons
Le technicien « l’adéquation des techniques, des procédures, des démarches d’enseignement en référence aux règles et principes établis par les scientifiques et les experts » Formation à des pratiques pédagogiques validées par les sciences qu’il s’agit d’appliquer rigoureusement
Le praticien artisan « l’adaptation des interventions et des routines aux élèves, aux ressources et aux contraintes du contexte » Pratique sur le terrain avec le compagnonnage d’un enseignant expérimenté
Le praticien réflexif « l’argumentation de choix (…) fondés sur une analyse rigoureuse des facteurs en jeu » Réalisation d’un mémoire professionnel. Analyse réflexive de pratique.
L’acteur social la prise en compte des valeurs sociétales de justice, de démocratie et du nécessaire engagement en équipe Réflexion sur les enjeux anthropo-sociaux avec des grilles d’analyse sociologique et philosophique
Le facilitateur de développement personnel « le vécu personnel, les relations interpersonnelles et les enjeux en termes de développement » en vue d’éduquer les élèves comme des personnes Réflexion sur le vécu avec une analyse psychologique,mise en avant des émotions et des affects.

Tableau inspiré de :

Paquay, Léopold, et Marie-Cécile Wagner. « Compétences professionnelles privilégiées dans les stages et en vidéo-formation », Léopold Paquay éd., Former des enseignants professionnels. Quelles stratégies ? Quelles compétences ?De Boeck Supérieur, 2012, pp. 181-210.

  • L’ouverture au dialogue: Il est possible de mettre en place un exercice avec trois participant-e-s. Deux des participant-e-s discutent d’une thématique en lien avec des problématiques de justice sociale. La première doit faire partager son point de vue sur ses convictions. La seconde lui pose des questions et lui fait des objections. Le ou la troisième participante observe la discussion et propose à l’issue de la discussion une série de remarques sur l’ouverture à la discussion des deux participantes.
  • Le courage moral de faire entendre sa voix propre: Pour développer cette capacité, il est possible de proposer à chacun des participant-e-s de développer une position qui lui semble importante (congruente avec ses valeurs) face à un groupe de personnes qui lui pose des questions et lui formule des objections. Il s’agit de s’entraîner à prendre la parole face à un groupe même si l’on est seul à défendre une position.

Notes:

1PEREIRA Pereira, « L’éthique de la critique : un impératif pour les pédagogies radicales », Les cahiers de pédagogies radicales, n°1, 2019. URL : https://f.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/5879/files/2019/08/Varia1-2019.pdf

2STARRATT, Robert J. “Building an ethical school: A theory for practice in educational leadership.” Educational administration quarterly 27.2, 1991: 185-202.

3SHAPIRO, Joan Poliner, and STEFKOVICHJacqueline A. Ethical leadership and decision making in education: Applying theoretical perspectives to complex dilemmas. Routledge, 2016.

4FREIRE, Paulo, El maestro sin recetas: el desafío de enseñar en un mundo cambiante,Siglo XXI Editores, 2016, p.60.

5FREIRE Paulo, Pédagogie des opprimés, Paris, Maspero, 1974.

6Idem., p.19.

7CHAMPEIL-DESPLATS, Véronique (dir.). Pédagogie et droits de l’homme. Presses universitaires de Paris Nanterre, 2014

8FREIRE Paulo, Pédagogie de l’autonomie, Toulouse, Eres, 2013, p.116.

9Il est à noter qu’une telle obligation de neutralité n’existe pas au Brésil et qu’elle constitue actuellement le cheval de bataille de l’extrême droite brésilienne.

10LANGLOIS, Lyse. Comment instaurer un processus décisionnel éthique chez le gestionnaire. Éthique et dilemmes dans les organisations, 2005, p. 13-26.

11Idem, p. 18.

12Cité in: LANGLOIS, Lyse (2001). “Les directions générales et les commissaires scolaires.” Origines et incidences des nouveaux rapports de force dans la gestion de l’éducation: 266. URL: https://www.acelf.ca/c/revue/revuehtml/29-2/12-Langlois.html

13JEMAL A. (2017). Critical Consciousness: A Critique and Critical Analysis of the Literature. The Urban review, 49(4), 602–626. https://doi.org/10.1007/s11256-017-0411-3

14HONNETH Axel. La réification: petit traité de théorie critique. Gallimard, 2017. CHANSON, Vincent, CUKIER, Alexis, et MONFERRAND, Frédéric. La réification. Histoire et actualité d’un concept critique. Dispute (La), 2014.

15ROLO, Duarte. « Histoire et actualité du concept de souffrance éthique », Travailler, vol. 37, no. 1, 2017, pp. 253-281. RENAULT, Emmanuel. Reconnaissance et travail. Travailler, 2007, no 2, p. 119-135.

16Néanmoins, il est possible également sans doute de s’intéresser à la question du travail en éthique à partir de la perspective féministe du care. KOLLY, B. & BAUDRY, M. (2011). « A côté du care : comment politiser l’invisible service ? », Critique, n°768, pp. 414 – 423. Vanina MOZZICONACCI, « Théories féministes de l’éducation : où est le care ? », Éducation et socialisation [En ligne], 40 | 2016. URL : http://journals.openedition.org/edso/1514.

17PASCAL, Chabot. Global burn-out. Paris, Presses universitaires de France, 2013.

18REFALO Alain, « Qu’entend-on par désobéissance éthique ? », Alternative non-violente, 2011.

19CHAUVET, Clément. « Fonctionnaire, obéir/désobéir », Pouvoirs, vol. 155, no. 4, 2015, pp. 149-160.

20Voir par exemple : LOWY, Michael. « Chaînes en papier. Despotisme bureaucratique et servitude volontaire dans Le Château de Franz Kafka », Diogène, vol. 204, no. 4, 2003, pp. 62-74.

21FROMM Erich, Société aliénée et société saine, Paris, Le courrier du livre, 1956.

22FREIRE Paulo, Pédagogie de l’autonomie, Op. Cit, p.116.

23FLEURY Cynthia, La fin du courage, Paris, Fayard, 2010.

24ADORNO, Theodor W. « La théorie sous-jacente à la construction de l’échelle d’évaluation des potentialités fascistes (échelle F) », Tumultes, vol. 23, no. 2, 2004, pp. 99-122.