« N’aie pas peur si je t’enlace » de Fulvio Ervas

autisme ervasUn voyage de trente-huit mille kilomètres, qui commencera par la traversée des Etats-Unis en Harley Davidson. C’est cela que Franco Antonello souhaite pour le dix-huitième anniversaire de son fils, diagnostiqué autiste à l’âge de trois ans. Andrea est un ouragan imprévisible. Lorsqu’il marche, c’est sur la pointe des pieds. Les objets, il les aime rangés dans un ordre méticuleux. Quand il veut savoir qui il a en face de lui, il l’enlace afin de sentir ce que l’autre a dans le ventre et pour cette raison ses parents ont inscrit sur ses T-shirts : N’aie pas peur si je t’enlace. Pourtant ce voyage se fera, à travers les Etats-Unis et jusqu’en Amérique latine, mille fois plus inattendu que prévu.

Un road movie à travers des Amériques très différentes, auréolé par cet amour partagé entre père et fils. Découverte de nouveaux décors mais aussi découverte de soi-même. Franco va au contact de la souffrance de son fils Antonello mais loin de plomber l’ambiance, il choisit toujours de laisser son fils décider pour eux deux, de laisser sa part au hasard avec un optimisme invincible. A lire pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur l’autisme, les autistes et leur capacité à déplacer des montagnes…

Mariannick, doc.

« Dommage de guerre » d’Anne Guillou

dommage guerrePour écrire ce livre, Anne Guillou s’est inspirée d’un fait divers tragique qui s’est déroulé à Guiclan, une commune du Nord-Finistère, au mois d’août 1944. Bien que les anciens en aient été témoins, la mémoire locale a occulté cet événement dramatique. S’appuyant sur des documents historiques, tant français, bretons qu’américains, l’auteur a traité avec tendresse et humanité, dans le style dépouillé qui lui est propre, cet épisode vieux de presque 70 ans. Plus qu’un document historique, c’est un ouvrage mêlant fiction et réalité, propre à émouvoir autant qu’à informer.

Après avoir débarqué en Normandie, les troupes alliées de libération se dirigent vers Brest. Tout au long de leur progression, des échanges se font entre la population locale et les libérateurs (café, essence contre de l’eau-de-vie et autres denrées alimentaires). Un détachement de soldats noirs américains du service de l’Intendance campe dans un bois, ausud de Guiclan. C’est alors qu’une jeune mère de famille est assassinée.

L’auteur décrit avec finesse le microcosme paysan, la mentalité léonarde, les réactions face au drame insupportable. La libération de Morlaix fait l’objet de plusieurs pages colorées et documentées où la joie de la liberté retrouvée ne fait pas oublier la gravité du climat ambiant dans une ville qui abrite la Cour martiale.

« J’ai eu vingt ans à Ravensbrück » de Béatrice de Toulouse Lautrec

20 ans ravensbruckBéatrix de Toulouse-Lautrec et sa mère ont été arrêtées par la Gestapo de Lyon en juin 1944, internées au fort de Montluc, puis déportées à Ravensbrück en août et libérées en avril 1945.  L’auteur, qui avait vingt ans en 1944 et était alors Mlle de Gontaut-Biron, a raconté son épreuve dès 1946, sans intention de publication, pour se libérer de ce qu’elle venait de vivre. Mais le manuscrit a circulé anonymement, signé « matricule 75 537 »; dès 1948, trente-trois ans avant sa première édition en 1981. On ne saurait mieux définir ce document très différent des ouvrages postérieurs sur la déportation que par ce jugement de Martin du Gard : « Peu de ces rescapés ont su rendre si fidèlement, si humblement, avec une telle absence de cabotinage et de tricherie, ce qu’a été leur vie de tous les jours, ses grandes angoisses, ses dangers, ses petites peines, ses petites joies. » Et par celui d’Albert Camus qui le reçut lui aussi sans nom d’auteur: « On ne peut pas ne pas être profondément touché par le ton même du récit. Garder l’amour de la vie, la confiance, l’humour quelquefois, la tendresse toujours au milieu des charniers, c’est un tour de force ou une grâce, je ne sais pas. »

Procédant par une succession de scènes et de dialogues qui forment un tableau riche de spontanéité, d’émotion, d’amour et de simplicité, Béatrix de Toulouse-Lautrec fait surgir, sans chercher à philosopher, les mille misères de la vie carcérale, l’angoisse de la mort, mais aussi l’espoir et les petites joies qu’un rien suffisait à faire jaillir dans le malheur.

Ce que je retiens de ce livre : de vrais fous rires lancés à la barbe des tortionnaires !

A lire aussi un livre fort : « Kinderzimmer » de Valentine Goby

Mariannick, doc.

« Kinderzimmer » de Valentine Goby

kinderzimmerAu printemps 1944, Mila entre au camp de concentration de Ravensbrück. Elle est plongée alors dans un monde infernal où l’horreur prend toutes les formes : le froid, la maladie, les expériences médicales, la faim, les poux, les coups. Et cette horreur pénètre par tous les sens : les yeux, les oreilles, le nez,… Mais, dans cette horreur absolue, il reste encore la vie, l’amitié, l’amour, l’attention quotidienne aux autres. Comme Mila ou Teresa, chacun décide de vivre ou non.  Pour Mila, enceinte, le risque de vivre est encore plus grand, mais plus miraculeux encore, le risque d’aimer un enfant qui est voué à la mort, le risque d’aimer l’enfant d’une autre. Jusqu’au bout, l’on se demande si cette opiniâtreté à défier la mort sera gagnante.

C’est un livre grave, bouleversant qui rappelle l’existence, souvent ignorée, d’une « kinderzimmer » , une pièce dévolue aux nourrissons dans un camp de la mort.

En rappel, le très beau livre de Béatrice de Toulouse-Lautrec « J’ai eu vingt ans à Ravensbrück » où elle témoigne de son internement dans ce camp.

Deux livres à lire absolument !

Mariannick, doc.