Coup de foudre

Ophélie, huile sur toile de Konstantin Makovsky (1839-1915, Russia)Ophélie, huile sur toile de Konstantin Makovsky

En cinquième, les élèves ont réalisé des poèmes en utilisant des moitiés d’alexandrins empruntés à des auteurs célèbres (Baudelaire, Hugo, Rimbaud…) Ils avaient le droit de changer quelques mots et devaient donner un titre à leur poème pour en souligner l’unité. Voici un magnifique exemple de ce travail :

« Coup de foudre

Le chant du coq au loin flotte comme un grand lys

La musique souvent tombe des astres d’or

J’ai rêvé la nuit verte dans les bons soirs de juin

Le long des gazons verts aux neiges éblouies

+++

Un chant mystérieux chante dans les bouteilles

Le seigneur à cheval est d’un rouge d’enfer

Sois sage ô mon amour  à la clarté des lampes

Par les soirs bleus d’été où les lions vont boire

+++

Une brise d’amour a laissé son odeur

Entends, ma chère, entends, au coeur de tes oreilles

A l’horizon, le ciel nous  prend comme une mer

+++

Ma blanche Ophélia fait le tour de mon coeur

Ah que le monde est grand comme si j’avais mille ans

La courbe de tes yeux passe sonnant du cor »

(Thomas B.)

Ophélie est un personnage de Hamlet. Allez voir toutes les représentations qui ont été faites de ce personnage dans les liens…

J’aime, je n’aime pas

Le mois dernier, en cinquième, nous avons travaillé de nouveau sur les descriptions, mais en considérant le fait qu’elles peuvent permettre d’exprimer une opinion, parfois très subjective – sur les thèmes qu’elles abordent, comme dans ce texte humoristique sur les hamburgers maison et les épinards (surgelés ?):

« J’adore les hamburgers, ce goût tellement bon, cette viande coupée et cuite à la main, au barbecue. Le fromage coule et la sauce burger en rajoute. Et le pain, ah, le pain, il est tellement croustillant ! Et la salade, cette belle salade cueillie dans les champs et tellement verte et craquante qu’on se croirait au paradis. Et la tomate est la plus juteuse et la plus rouge du monde. Vraiment, c’est la meilleure chose qui puisse exister.

Mais les épinards, ce truc vert tellement dégoûtant, ça ressemble à du vomi tout fraîchement déposé dans l’assiette. Cette odeur ressemble à celle des excréments d’animaux. Une fois l’assiette finie (par le chien), la couleur verte reste sur l’assiette et c’est très dur de la nettoyer. Et dire que c’est un aliment comestible ! Le chien qui a mangé cette assiette d’épinards devrait mourir en moins de deux. »

(Valentin S.)

Voici deux autres travaux, moins drôles, mais davantage emprunts de poésie :

« J’aime l’été pour ses longues et belles vacances, sa grande chaleur, le sable doux et l’eau claire des plages, l’herbe fine et l’odeur de fleurs des prairies, loin des hivers tristes et froids dont la neige nous rend malades, des nuages grisâtres où tombe la grêle, des routes gelées et glissantes que l’on prend pour aller travailler. L’été n’est que joie et lumière tandis que l’hiver est ennui et tristesse. L’été a des arbres pleins de fruits merveilleux, mais l’hiver, lui, n’a que des arbres sans feuilles. L’eau d’été, qu’elle doit douce ou salée, est belle et chaude. L’eau d’hiver, elle, n’est que glace et silence. L’hiver est sombre car le soleil est caché, mais en été, il est partout, ses rayons illuminent les villes et les campagnes. L’été est comme le gardien de nos vacances. »

(Anonyme)

Le feu et l’eau

J’aime le feu, sa couleur rouge-orangé, le crépitement de ses flammes, sa beauté extraordinaire. En hiver, il chauffe comme en plein été, car le soleil lui-même est une boule de feu géante, chauffant toutes les planètes qui l’environnent. Mais son pire ennemi, l’eau, comme je la hais ! Quand on rentre dans ce monde aquatique, il y a un fort risque de ne pas en sortir vivant : les requins peuvent te manger, les méduses te piquent et certaines algues te brûlent. L’eau est un élément malsain qui peut tuer. Le feu, lui, n’a aucun habitant qui peut tuer. Mais l’eau est un tueur diabolique qui fait couler les personnes en souffrant, et si elles réussissent à s’en échapper, elles s’enrhument et doivent aller se réchauffer près de la cheminée allumée. Le feu, lui, est la solution à tout. Voilà pourquoi le feu est mon élément préféré et que l’eau – son pire ennemi – est celui que je hais.

(Anonyme)

Si quelqu’un veut défendre l’eau, j’attends sa réponse…

Ajoutons que les consignes données pour la réalisation de ce travail étaient : En quinze à vingt lignes et à la première personne, oppose deux univers : un que tu aimes et un que tu n’aimes pas. (Par exemple, deux sports, la ville et la campagne…) Utilise des termes positifs et d’autres négatifs.

 

 

 

 

Entre mots et tableaux…

Original image

Ce mois-ci nous avons commenté les tableaux de plusieurs artistes, dans une séquence intitulée « Entre mots et tableaux » (inspirée, notamment, par l’étude du film Le Tableau de Jean-François Laguionie). Bien sûr, nous avons mis certains de ces tableaux en relation avec des textes. Puis les élèves ont réfléchi sur ce sujet : « Imagine que tu découvres ce tableau (« Les deux saltimbanques » de Pablo Picasso) dans une salle d’exposition. Décris-le précisément ainsi que tes impressions à son sujet. Ensuite, imagine que tu as l’occasion de discuter avec le peintre qui a réalisé le tableau. Quelles précisions t’apporte-t-il à son tour ? (Par exemple, dans quelles circonstances l’a-t-il peint, quelle signification donne-t-il à son oeuvre ? ) Rédige ce récit en 15 à 20 lignes au présent ou au passé, à la première personne (je), en insérant éventuellement quelques phrases de dialogue. »

Laissons la parole aux élèves, à présent :

« Hier, je suis allée à une exposition sur les oeuvres de Picasso. Je parcourais la salle lorsqu’un tableau attira mon attention. Il représentait un homme et une femme assis devant une table. On aurait presque pu croire qu’ils se faisaient la tête (ils regardaient chacun un côté différent et l’homme avait l’air fâché).

– Magnifique, ce tableau, n’est-ce-pas ?

Ne l’ayant pas entendu arrivé, je sursautai. En me retournant, je découvris, tout sourire, le célèbre Pablo Picasso. Lorsque je l’interrogeai sur son tableau, il me répondit que celui-ci représentait deux grands artistes (des saltimbanques, pour être plus précis), qui, lors d’une fête entre amis que Pablo Picasso lui-même avait organisée, s’étaient tenus à l’écart des autres. Il me raconta que, lorsqu’il avait peint ce tableau, il avait voulu montrer l’impression qu’ils avaient fait aux autres gens de la fête. »

(Anonyme)

« Tous les week-ends je vais à la salle d’exposition. Cette fois, j’ai vu un tableau qui était très attirant. Il représentait deux personnes assises sur une banquette, dans un bar, en train de boire. Ce tableau n’était pas réaliste. Pour moi, il représentait deux personnes qui ne s’aimaient pas beaucoup. Il était attirant car il avait une part de mystère : on aurait aimé savoir pourquoi ils avaient l’air de ne pas s’apprécier. Après l’exposition j’ai eu la chance de rencontrer le peintre et il m’a expliqué l’histoire de ce tableau. « C’est l’histoire de am rencontre avec ma femme. Au début, on se détestait, d’où le fait que les personnes ne s’aiment pas. Puis on a appris à se connaître et nous avons passé notre vie à voyager sur les routes, jusqu’au jour où elle est décédée. On était les deux saltimbanques… »

(Chéryl)

Un jour, à la Maison dans la vallée, en jetant un oeil à une exposition, je m’arrêtai devant un tableau. A première vue, il me semblait simple, pas très joyeux. Il représentait deux dames dans une sorte de bar ou dans un restaurant… L’une des deux, de profil, regardait au loin avec une expression de colère. La deuxième était de face et avait un air triste, morose… Elle semblait blottie contre la première, comme un enfant qui a peur et qui se serre contre sa mère. C’était un tableau triste. Puis soudain, le peintre qui avait peint ce tableau arriva. Je lui demandai pourquoi il avait peint un tableau aussi triste et comment il l’avait peint. Il me dit : « Un jour, dans un bar, j’ai aperçu deux dames assises à une table. Elles avaient l’air triste de s’être disputées entre elles. Puis, l’une des deux, se sentant peut-être seule, s’était rapprochée de l’autre. Mais celle-ci ne l’avait même pas regardée et affichait toujours cette expression de colère. J’ai peint ce tableau car je trouve qu’il représente la solitude, le rejet d’une personne par une autre, et j’étais dans la même situation à ce moment-là. »

(Thibaut)

« Il faisait chaud et beau et j’avais décidé de me promener. Le chant des cigales était agréable à entendre. Je me déplaçai pour mieux les écouter et tombai nez à nez avec une bâtisse d’avant-guerre dans le style de la région. Le lierre grimpait et recouvrait murs et fenêtres. La maison semblait abandonnée. J’entrepris donc d’entrer : « – Bonjour », dis-je avec hésitation. Pas de réponse. Là, au milieu de la salle, je découvris une peinture. Elle représentait un homme et une femme, en opposition. La femme était vêtue de rouge et l’homme de bleu. Ils étaient tous les deux accoudés à une table couverte d’une nappe blanche. Devant eux, se trouvaient un grand verre et un plus petit, eux aussi en opposition rouge-bleu. Puis je remarquai l’air triste et blasé, presque ennuyé des deux personnes. Encore une fois, le sol et la porte étaient aussi en opposition par leurs couleurs rouge-bleu.

– Bonjour, me dit une voix grave et rauque.

– Bonjour, répondis-je à mon tour. L’homme s’essuyait les mains avec un torchon qui à l’origine avait dû être blanc. Il vint à côté de moi pour contempler le tableau, lui aussi.

– Ce sont deux saltimbanques, me dit-il.

– La recette de leur spectacle n’a pas dû être suffisante…

– Oui, sûrement…

– Ou alors, ils s’ennuient…

– On ne s’ennuie jamais d’être saltimbanque…

– Oui, sûrement…

(Manon)

Bravo à tous ! En correction, nous avons noté que les deux personnages sont en opposition par leur attitude (ils ne regardent pas du même côté), mais aussi par les couleurs de leurs vêtements (chaudes pour la femme, froides pour l’homme), ainsi que par les formes qui les dessinent (plutôt rondes pour la femme et plutôt anguleuses pour l’homme). Le tableau est littéralement coupé en deux (le côté de la femme et le côté de l’homme). Cette opposition est renforcée par celles entre les verres : le grand pour l’homme (Arlequin) et le petit pour sa femme (sa compagne).

Clara fait une nouvelle rencontre…

Voici une nouvelle suite de « Clara était depuis toujours attirée par l’étang. Lorsqu’elle décida d’y aller ce jour-là, elle ne savait pas qu’elle y rencontrerait un garçon étrange. » Ce texte très poétique a été réalisé par l’un de mes élèves de 5ème de cette année.

« Ce matin, à l’aube, comme tous les dimanches, Clara partit vers l’étang. C’était l’étang le plus merveilleux qu’elle ait jamais vu. L’eau scintillait grâce à l’éclat du soleil, et quand la pluie tombait, de magnifiques cercles se formaient sur l’étang. Mais le plus beau de tout, c’était l’arc-en-ciel qui passait juste au-dessus de l’eau. Toutes ses belles couleurs se reflétaient dans l’étang comme dans un miroir. Clara se promenait, faisait le tour de l’étang et s’arrêtait de temps à autre pour regarder les couleurs de l’eau qui changeaient. Clara aimait être seule, allongée sur l’herbe fraîche. Elle se redressa et vit la silhouette d’un garçon et hésita à aller le voir. Il avait les cheveux bruns et était vêtu tout de noir. L’étang tout entier se reflétait dans ses yeux verts. Clara n’avait jamais vu ce garçon près de l’étang, mais elle sentait que ce n’était pas la première fois qu’il venait ici. Il lui montra du doigt l’arc-en-ciel… qui disparut. L’étang perdit ses couleurs. Le garçon montra ensuite les nuages… qui disparurent aussitôt. Clara se demandait comment le garçon faisait cela, mais ça l’attristait beaucoup de voir l’étang perdre toutes ses couleurs. Elle se retourna deux secondes et regarda au bout de l’étang. Le garçon avait disparu… » (Gaël D.)

Clara rencontre un garçon étrange…

En cinquième, l’unité consacrée à Mondo et autres histoires, de J. M. G Le Clézio, reliée à l’étude de Tomboy, le film de Céline Sciamma, nous a conduits à réfléchir sur le thème de la découverte de l’autre, qui apparaît souvent étrange, lorsqu’il n’a pas révélé son identité autrement que par ses attitudes et par son apparence. Pour illustrer ce thème, j’ai proposé aux élèves d’imaginer la rencontre entre Clara et un garçon inconnu, en complétant ce début : « Clara était depuis toujours attirée par l’étang. Lorsqu’elle décida d’y aller ce jour-là,elle ne savait pas qu’elle y rencontrerait un garçon étrange ».

Magali D. a imaginé cette suite :

Comme tous les jours, Clara se promenait autour de l’étang. C’était un magnifique endroit fait de verdure. Il y avait des buissons anciens de plusieurs années, d’immenses chênes et autres arbres. Au bout de quelques minutes, Clara eut très envie de plonger dans l’eau qui était très claire, avec des nénuphars de toutes tailles. Soudain elle plongea et parcourut tout l’étang. Elle s’amusait tellement qu’elle ne vit pas un jeune garçon arriver, qui la regarda avec étonnement.

Quand Clara sortit de l’eau, elle eut très froid. Elle se retourna et quand elle vit le garçon, elle eut si peur qu’elle tomba en arrière dans l’eau. Le garçon étrange sauta dans l’eau pour éviter qu’elle ne se noie. En sortant de l’eau, elle le regarda. Il était habillé d’un short bleu et blanc et d’un tee-shirt rouge et jaune, mais il était pieds-nus et il avait des yeux verts et gris, un peu mystérieux. Clara hésita à lui parler.

 Pendant longtemps, ils restèrent assis tous les deux puis Clara se lança : 

« Bonjour, merci… Je m’appelle Clara. Et toi ? », dit-elle. Mais il se leva et ne répondit pas. Un silence s’installa entre eux pendant tout le reste de la journée. Clara trouvait ce garçon étrange, mais elle aimait son côté mystérieux. Plus tard, elle se leva et partit en lui disant : « Au revoir », et elle lui fit un bisou sur la joue. Il lui parla enfin : « Hajja ». Clara ne comprit pas, mais elle fut très contente et espérait le revoir encore une fois près de cet endroit magique… 

Renart au Mac-Donald…par Bryan D.

Comme promis à mes élèves de 5B, voici le texte de Bryan, que nous avons lu en classe et apprécié. Renart évolue dans le monde moderne, conformément aux consignes que j’avais données.

Renart le farceur

Renart était au Mac Donald. Il commanda une mac baguette, un royal Deluxe et un royal bacon. Il prit aussi deux boîtes de nuggets par neuf et deux pots de potatoes avec de la sauce moutarde. Renart alla dans les toilettes et il mit un seau plein de colle Uhu liquide au dessus de la porte. Mais au même moment le serveur Patrick entra dans les toilettes et fit tomber le seau sur la tête de Renart. Le serveur dit à Renart : « Bien essayé, mais pas réussi ! » Renart lui répondit : « Je me vengerai, maudit serveur. »

Renart attendit le serveur à l’extérieur. Quand Patrick sortit de son travail, il monta dans sa voiture et dit à voix haute : « Je me sens bien bas. » Renart l’entendit et lui répondit : « C’est logique que tu te sentes bien bas. » Là, il rit et ajouta : « car j’ai crevé tes pneus ! » Et là, Renart, tout content de lui, partit en direction du Nord avec un grand sourire qui lui montait jusqu’aux oreilles. Et le voilà parti à la recherche d’autres personnes à ennuyer ! 

Bryan D.

L’Arche de Noé (suite)

Dans l’Arche de Noé

Tout a commencé un beau jour où je me trouvais dans la forêt. Je regardai le ciel et je vis au loin de terribles nuages qui se rapprochaient à grande vitesse. Affolé, je courus vers la mer et je vis un grand bateau : c’était une arche. Devant, il y avait plein d’animaux qui étaient en train d’entrer à l’intérieur. Sur l’arche, il y avait un vieil homme, ça devait être le capitaine.

Je me faufilai tout doucement à l’intérieur de l’arche. Je vis plein de cages avec des animaux et des escaliers. Je montai, je montai… Arrivé tout en haut, je vis qu’il n’y avait qu’un grand couloir sombre. A la fin de ce couloir, j’ouvris la porte et il n’y avait que des humains derrière, dans une salle. Une dame s’approcha de moi et me demanda : 

– Comment t’appelles-tu , mon petit ?

– Je me suis perdu dans l’arche.

Le vieil homme que j’avais vu auparavant s’approcha et me dit :

– Bonjour, je m’appelle Noé. Viens t’asseoir avec moi, mon petit.

Il me montra un fauteuil sous une fenêtre. Je m’assis et je regardai par la fenêtre. Il y avait de l’orage, de la pluie, des grêlons et d’énormes vagues. On entendit un énorme bruit qui venait d’en bas. On se dit que c’était juste la pluie…

La nuit passa et le lendemain, on se réveilla et je descendis pour donner à manger aux fauves. Sauf que la veille, le bruit qu’on avait entendu, c’était les lions qui s’étaient échappés de leur cage ! On les retrouva, on les remit dans leur cage et j’allai chercher à manger pour les hommes. Le garde-manger était vide. Le lion avait tout mangé ! 

Les jours suivants furent horriblement durs : il n’y avait plus de nourriture pour nous et pour tous les animaux. Le lendemain, j’ouvris la fenêtre et il n’y avait plus d’eau sur la terre ! Les animaux sortirent à toute vitesse.  Je sortis avec tous les autres et nous allâmes nous jeter sur les arbres à fruits pour manger. Il n’y eut plus jamais de déluge. Oh non, plus jamais ! 

(Manon G.)

J’ai ajouté un titre à ce texte très réussi, car il n’en avait pas. Bravo Manon !

Les nouvelles aventures de maître Renart (suite)

Voici une autre « ruse de Renart », rédigée par l’un de mes élèves de cinquième. Cette fois, l’action se passe dans une usine de steaks hachés :

Un chômeur glouton

Un matin d’hiver, alors que Renart avait très faim, comme tous les matins, il décida de se mettre  à chercher de quoi se remplir l’estomac. Il réfléchissait à une ruse quand il eut une idée lumineuse. Il avait entendu parler d’une recherche d’emploi dans une usine de steaks hachés, pour les mettre dans des boîtes. Tout de suite, il s’installa sur son ordinateur et répondit à la demande.

Le lendemain, déjà, il avait reçu un mail du directeur de l’usine disant qu’il était embauché. Renart sauta de joie un moment puis il prit son manteau, enfourcha son vélo et se mit en route à folle allure vers l’usine où il fut accueilli à bras ouverts par le directeur qui lui montra son poste. Aussitôt, Renart se mit au travail et dès que le directeur fut parti, il commença à remplir les poches de sa veste de steaks hachés surgelés. 

Quand il rentra le soir chez lui, il en fit cuire deux, un pour lui et un autre pour sa femme, puis il écrivit un mail au directeur pour dire que son usine était nulle et qu’il démissionnait. En effet, il avait assez de viande pour un mois !

(Guillaume D.)

Les nouvelles aventures de maître Renart

Mes élèves de cinquième étudient le Roman de Renart. Je leur ai demandé d’inventer « une nouvelle ruse de Renart », en la situant dans notre époque, ce qu’a fait Wes Anderson, en 2009, dans un film d’animation qui est l’adaptation du roman écrit par Roald Dahl en 1970, Fantastique maître Renard. Nous avons vu le film au cinéma avant les vacances de février. Il a certainement inspiré l »auteur de ce récit car Wes Anderson a fait construire un supermarché miniature pour les besoins de son tournage ! Mais le plus important reste la ruse employée par le roi de la fourberie, Maître Renart en personne…

Maître Renart

Maître Renart avait faim, très faim. Il n’avait pas mangé depuis deux jours. Il devait absolument trouver un moyen [de] se procurer de la nourriture.Il se posa la question : « Où y aurait-il un endroit peu surveillé et où il y aurait beaucoup de nourriture ? » Il réfléchit et choisit un supermarché. Puis il se reposa la question de savoir comment il allait s’y prendre.

Au bout de quelques minutes, il se leva et partit chez son cousin Ysengrin le loup. Il lui dit : « Tu vois, cousin, nous avons faim, et puis tu as du mal à nourrir ta famille. » Maître Renart lui raconta son plan et ils parlèrent durant vingt minutes. Ils se donnèrent rendez-vous devant le supermarché « Leclar », car ils savaient que le surveillant était incompétent et dormait tout le temps. Ils se placèrent dans un rayon n’ayant point de personnes et Ysengrin cria : « Les mains en l’air. »Maître Renard répondit en se lamentant : « Non, ne tirez pas, j’ai une famille ! »

La foule, prise de panique, sortit du supermarché en courant et en criant. Alors les deux cousins remplirent leur chariot, heureux de leur exploit, et sortirent par la porte de derrière pour ne pas être vus. Ils se quittèrent et rentrèrent chez eux. Maître Renart mangea à sa fin et nourrit sa famille pendant plusieurs mois.

(Axel K.)

Ecrire « renart » avec un « t » n’est pas une faute de frappe ou d’orthographe, mais une référence. Cette graphie est celle utilisée au Moyen-âge, à l’époque où « Renart » était un prénom. Les renards, à cette époque, s’appelaient les « goupils », mais les aventures de maître Renart connurent un tel succès que le mot « renart » devient un nom commun qui remplaça « goupil » et fut orthographié, un peu plus tard, avec un « d »…

Le salon du capitaine Nemo

Voici le salon du capitaine Nemo décrit par un élève de cinquième. J’avais demandé de faire cette description à l’imparfait, dans un récit au passé simple.J’ai réorganisé le texte, qui était un peu compact, en paragraphes.

« On mit une serviette d’eau froide sur mon front brûlant. Je me réveillai. Je vis le visage de mon meilleur ami Guillaume, penché sur moi. Je regardai  autour de moi. Sur ma droite, je vis des murs flamboyants sur lesquels étaient accrochés de magnifiques tableaux. Sur ma gauche, il y avait une étagère en bois impressionnante, appuyée contre le mur orange. Au dessus de moi, je vis le plafond où resplendissaient de belles peintures, [peintes] avec des couleurs très vives.

Je me relevai. J’aperçu le capitaine Nemo, barbu et brun, affalé dans un canapé jaune et moelleux. Il essaya de se relever pour m’accueillir, mais il eut beaucoup de mal car il était si bien assis qu’il ne pouvait plus se relever. Il m’accueillit avec un grand sourire. Il nous demanda si moi et mes compagnons nous avions soif. Nous répondîmes « non » d’un hochement de tête.

Le capitaine nous emmena visiter son salon en détail. Il nous montra en premier l’arrière du salon. Nous aperçûmes le globe terrestre recouvert d’un vêtement sombre. Le capitaine ne devait pas apprécier la terre…Ensuite, il nous montra son plus beau tableau, [enfermé] dans un coffre-fort. La bibliothèque, située au fond de la pièce, était splendide. Sur les rayons, étaient exposés de nombreux ouvrages très célèbres, comme les Misérables.

Au milieu de la pièce, il y avait une fontaine décorée d’anges blancs et de cygnes majestueux. Puis nous retournâmes dans la pièce principale où nous attendait un succulent dîner : des foies de dauphins cuits au bain-marie, des filets de tortue de mer accompagnés de quelques crustacés…

Une fois ce merveilleux repas englouti mes fidèles compagnons, Guillaume et Rémi, partirent se coucher après cette longue et éprouvante journée. Moi, je restai encore un peu pour discuter avec le capitaine Nemo. Je le trouvais très curieux et très étrange. 

A 23 h 30, mort de fatigue, je partis me coucher. Arrivé à mon lit, je tombai sur mon matelas et je m’endormis facilement.

(Benjamin F.)

Sur l’arche de Noé

L’Arche de Noé par Marta Nevès

Je suis en train de corriger les entraînements d’écriture de notre dernière unité consacrée aux grandes figures bibliques (Adam et Eve, Noé, Moïse…) Le nouveau sujet que j’ai donné à mes classes de sixième est le suivant : « Vous êtes un enfant sur l’arche de Noé. Racontez cette aventure au passé, de préférence,  en structurant votre récit par des compléments circonstanciels de lieu et de temps ». Parmi les copies que je viens de parcourir, j’ai particulièrement aimé ces deux textes :

La dure loi du déluge

Tous ceux qui étaient à l’extérieur [de l’arche] étaient noyés ou décimés par l’eau qui recouvrait toute la planète, à présent. Il pleuvait par tous les temps : en été comme en hiver, au printemps et en automne, c’était pareil.

Le jour où il s’arrêta de pleuvoir, il y avait tellement de brume qu’on aurait dit que nous naviguions sur une mer de nuages. C’était très beau, mais la réserve de nourriture était beaucoup moins belle. Il restait peu de nourriture et les animaux avaient faim. Certains avaient tellement faim  qu’ils mangeaient les barreaux de leur cage. 

J’étais sur le pont. Je pris un bout de l’arche et un fil et je pêchai un million de poissons pour tout le monde, mais Noé disait qu’à bord de l’arche, il y avait les carnivores au troisième et au quatrième étages, mais aussi les herbivores au premier et au deuxième étages. Il fallait donc pêcher des algues. J’en pêchai un million et demi.

Quand nous eûmes accosté, je fus soulagé de ne plus avoir à pêcher ! 

(Sylvain D.)

Bravo ! On s’y croirait !

L’Arche de Noé par Sriram R.

Le pire déluge du monde

Bonjour, je m’appelle Malo. Je suis le neveu de Noé. Je dors dans la cale avec les animaux. Mes parents sont très méchants et lui, Noé, je ne sais même pas s’il sait que j’existe. 

Aujourd’hui, c’est dimanche. Mes parents me donneront du bon pain et leurs restes. Voilà deux mois que je suis là ! Je ne suis monté qu’une fois [dans les étages de l’arche]. En haut, il y a les autres enfants qui dorment et mangent. Souvent, je m’ennuie [et] je regarde par la fenêtre de la cale.  

Aujourd’hui quelqu’un a toqué. Il m’a dit de venir au troisième étage. Alors j’ai attrapé Mouké, mon chien, et j’ai grimpé à l’échelle et j’ai rejoint le pont. Et là, j’ai vu quelque chose que personne n’aurait aimé voir. J’ai fermé les yeux. Je me suis bouché les oreilles. J’ai entendu le bruit, ce bruit horrible…

Il y avait des animaux en train de se faire manger par des requins ! Ce que je vais vous dire est horrible, alors soit vous continuez votre lecture, soit vous arrêtez. Ma mère, oui, ma mère, s’est évanouie et est tombée à l’eau. Mon père s’est jeté après elle et ils ont commencé à se faire dévorer par les requins.

Moi, même si je les trouvais méchants, j’ai sauté. J’ai souffert pendant cinq minutes, ensuite, j’étais mort, mort à onze ans. Voilà toute l’histoire du neveu de Noé.

(Malo C.)

Quelle imagination et quel suspense !

L’Arche de Noé par Malo C.

Les gens de nulle part

J’anime aussi un atelier d’écriture, au collège Fernand Gregh. Cette année, les élèves de l’atelier ont réalisé une activité appelée « Les gens de nulle part ». Nous avons commencé par regarder des tableaux futuristes dont j’essaierai de mettre des reproductions un peu tard. Ces tableaux représentent des personnages d’une manière non figurative, ce qui laisse place au rêve et à l’imagination.

Ensuite j’ai demandé aux élèves d’imaginer des « gens de nulle part » – ceux des tableaux, par exemple, mais pas nécessairement. Nous avons écrit la consigne suivante : « Imaginez des gens venus de nulle part et décrivez-les. Comment sont-ils ? Que font-ils ? Pour les décrire, pensez à des couleurs, des formes, des odeurs, des textures, etc. Vous pouvez les dessiner. »

Certains élèves ont commencé par décrire leurs personnages. D’autres les ont dessinés avant d’écrire quoi que ce soit. (Cette liberté de commencer par le texte ou par le dessin est importante, d’après moi, car certains élèves sont plus à l’aise avec les mots et d’autres avec le dessin, l’un et l’autre étant complémentaires, au sein de l’atelier.)

La deuxième étape a été de transformer ces brouillons en textes poétiques, à partir d’une structure et de quelques consignes : « Utilisez cette structure pour écrire votre texte : « Ils venaient de nulle part / adjectif, adjectif, adjectif/ On ne savait rien d’eux… / Ils étaient … Ils avaient…/ Un jour, on finit par savoir… »

Puis nous avons travaillé sur les sonorités des brouillons obtenus et leur mise en forme pour mettre en valeur certains éléments .

Ensuite, nous avons eu l’idée de réaliser les personnages en papier mâché et de les peindre.

Nous avons peint nos personnages, puis les élèves les ont redessinés, à nouveau, sur de grandes feuilles de papier canson. Ils les ont mis en couleur et ont recopié leurs textes autour.

L’ensemble de ces étapes nous a pris plusieurs heures.

Voici un exemple de ce travail, pour la partie texte et dessin :

Je mettrai d’autres photos très bientôt. Il faut que j’emporte mon appareil au collège, où sont stockées les réalisations.

 

 

Au temps des chevaliers

Un petit retour en arrière ! Avec la classe de cinquième, nous avons commencé l’année par une unité sur les chevaliers. J’avais demandé à mes élèves de présenter un chevalier en insistant sur ses qualités physiques et morales et en insérant des comparaisons dans la description. L’une de mes élèves a rédigé ce petit texte en vers, sur le modèle des romans de chevalerie du Moyen-âge, qui étaient rédigés en octosyllabes à rimes plates, le plus souvent :

A l’orée de la forêt, rentrant de la chasse

Le chevalier Valentant de Carelegant

Descend majestueusement et avec grâce

De son magnifique et vaillant destrier blanc.

Il est vêtu d’une armure resplendissante,

Il est rusé, audacieux et persévérant, 

Tel un renard tapi parmi les chênes lièges, 

Près à combattre pour la dame de Pépin. 

Après de nombreux exploits, il tient même un siège,

Il sauve sa dame et suit un autre destin. 

(Ambre A.)

Pour introduire cet exercice, j’avais donné deux textes aux élèves : le premier en Ancien français et l’autre en français moderne.

Un jor de Pasque, au tens novel ,

A Caradigant son chastel

Ot li rois Artus cort tenue.

Onc si riche ne fut veüe,

Car mout i ot boens chevaliers,

Hardiz et corageus et fiers,

Et riches dames et puceles,

Filles de rois, gentes et beles.

(Chrétien de Troyes, Erec et Enide.)

Tens = saison ; ot tenue = eut tenu ; li = le ; cort = court ; onc = jamais ; mout = beaucoup; i ot = il y eut ; boens = valeureux ; puceles = demoiselles ; gentes = gracieuses.

Il faisait partie de la Table Ronde

et jouissait d’une très grande faveur à la cour.

Depuis qu’il y séjournait,

il n’y eut chevalier plus aimé

et il était d’une beauté en nulle terre

on ne pouvait espérer trouver plus beau que lui.

Plein de beauté, de prouesse et de noblesse,

 Il n’avait pourtant pas vingt-cinq ans. 

Jamais homme de son âge

Ne fut de plus grande bravoure.

Que dirais-je de ses qualités ?

Il était monté sur un destrier

Et vêtu d’un manteau d’hermine ;

Il suit au galop le chemin,

Portant une cotte en brocart somptueux, tissé à Constantinople,

Des chausses en tissu de soie,

Parfaitement confectionnées et taillées.

Il était campé sur ses étriers

Et avait mis une paire d’éperons en or.

(Chrétien de Troyes, Erec et Enide.)

Un peu plus tard dans l’unité, j’ai donné un sujet d’écriture plus complexe :

« Rédigez un récit d’une quinzaine de lignes au présent dans lequel vous raconterez le combat de votre chevalier avec une créature imaginaire comme une licorne, un dragon, un serpent… Insistez sur la vaillance du chevalier. »

La même élève a mis en scène, de nouveau, le chevalier de Calogrenant !

Le chevalier Valentant de Calogrenant se promène avec son cheval dans la forêt de Brocéliande en quête de nouvelles aventures car les paysans de la Seigneurie voisine lui ont fait remarquer qu’une créature vile crachant du feu piétine et brûle les champs et les potagers, depuis peu de temps.

« La Grande-Bretagne est pleine d’aventures fantastiques », se dit le chevalier, avec enthousiasme. Tout à coup, il entend un bruit sourd résonant dans la belle forêt. Résultat, les oiseaux s’envolent, les biches courent à l’abri, les lapins rentrent dans leurs terriers et les poissons [vont] à la recherche d’un refuge dans les profondeurs du lac. La forêt grouille de peur comme une belette face à un ours.

Le chevalier Valentant de Calogrenant se dresse sur son cheval. Il accourt vers une grotte car c’est de là que vient le bruit. Quand il y arrive, il voit un spectacle extraordinaire : un dragon d’or se bat contre un dragon noir, plein de malignité. Le chevalier Valentant de Calogrenant ne s’attarde pas point à se faire supplier pour venir en aide au dragon d’or plein de noblesse.

Le combat prend place : le chevalier plein de vaillance s’interpose entre les deux dragons; il se protège des flammes avec son bouclier qui fait partie de ses armes vermeilles; il esquive les coups de pieds que le dragon noir lui donne; il tranche sa queue et met en pièces sa tête. Le chevalier, victorieux, se fait désormais appeler le chevalier au dragon d’or.  

La machine à explorer le temps

Le 15 février, mes élèves de 5ème B ont rédigé un texte à partir des consignes suivantes : « Vous avez inventé une machine à explorer le temps et vous l’utilisez pour la première fois. Racontez votre arrivée dans un autre monde à l’aide de cette machine et faites une description précise du monde que vous découvrez. Rédigez votre récit au passé. » Cette évaluation a conclu une unité sur « l’aventure et la science », pendant laquelle nous avons étudié des textes de Jules Verne (Vingt mille lieues sous les mers, Robur le conquérant, Maître du Monde) ainsi qu’un extrait de La Machine à remonter le temps d’H.G Wells. Durant cette unité, nous avons révisé l’imparfait et le passé simple, nous avons appris à raconter une aventure, à décrire un lieu romanesque et à exprimer des émotions. Nous avons également étudié les compléments circonstanciels et la phrase complexe, entre autres choses…

Comme d’habitude, voici des textes rédigés par les élèves. Leurs auteurs ne leur ont pas donné de titre, aussi les ai-je ajoutés :

 Le monde sous la neige

Il y a environ quatre ans, j’avais construit une machine  à explorer le temps avec l’aide de mon meilleur ami Guillaume. Deux ans après le commencement de l’engin, nous avions fini de le construire. Nous préparions donc nos valises pour partir dans le futur ou le passé, sur une autre planète ou sur Terre. Nous rentrâmes dans la machine et Guillaume actionna le levier. La machine se secoua et tourbillonna, puis d’un seul coup, tout s’arrêta.

J’ouvris la porte. Je vis un magnifique paysage. Devant nous, il y avait un espace dégagé, recouvert de neige blanche et fine. A droite, il y avait des arbres aux feuilles vertes, des buissons fleuris. A gauche, je vis la forêt avec de multiples champignons et espèces de fleurs.

Soudain, devant notre merveilleuse machine, j’aperçus une étrange créature qui marchait dans la neige. Elle était mi-bleue, mi-rose et plate comme une feuille de papier. Elle nous aperçut, s’arrêta, puis hurla de toutes ses forces.   Ce cri était strident et effroyable. Nous eûmes très peur. Puis la créature s’arrêta de hurler et partit en courant à toute vitesse. Guillaume et moi partîmes à sa poursuite. Elle courait très vite.

Devant moi, il y avait une branche par terre. Je ne la vis pas et je trébuchai. Guillaume continua de courir sans faire attention à moi. Je restai donc seul par terre, dans le froid de la neige. Je contemplai le paysage plus en détail. Je vis des fleurs écloses et une allée éclairée par des lampes  à huile par terre. Je m’engageai dans ce chemin caillouteux. Je regardai au loin. Je vis de la fumée. J’accélérai le pas. La fumée se faisait de plus en plus noire. J’entendis des hurlements de plus en plus forts. J’avais horriblement peur…  

(Benjamin F.)

                                                   Le monde des petits êtres

Il y a six ans, moi, Nicolas Stoti, j’inventai une machine  à explorer le temps. La machine était grande et allait très vite. Je me préparai pour mon premier voyage. Je démarrai ma machine et elle s’envola directement dans le temps. Le voyage fut très agité. Je pris une météorite en plein dans mon pare-brise, mais puisque j’étais équipé et que j’avais mis un pare-brise pare-balles, je résistai au choc.

L’atterrissage fut très violent, car la machine aurait dû se poser doucement, mais elle se posa brusquement. J’étais arrivé dans le futur. Je vis des grands arbres, mais par contre, [je vis aussi] des maisons et des immeubles [pas plus] grands que mes pieds. Ceux qui les habitaient étaient aussi grands que mon petit doigt. Ces êtres ne parlaient pas.

J’aperçus un grand mur qui séparait cette partie du monde et une autre, plus lointaine. Je fus tellement curieux que j’allai voir. De l’autre côté du mur, je vis des êtres aussi petits que ceux d’avant, mais ils étaient très piquants, sautaient et vous lançaient des pics. J’eus très peur de ces êtres et des larmes me vinrent aux yeux.   

(Rémi F.)

En complément de ces réalisations, voici les deux textes de Vingt mille lieues sous les mers que nous avons étudiés :

Extrait n°1 :

Le capitaine Nemo livre les secrets du Nautilus, le sous-marin qu’il a construit et que le monde entier a pris pour un monstre marin :

« — Ah ! commandant, m’écriai-je avec conviction, c’est vraiment un merveilleux bateau que votre Nautilus !

— Oui, monsieur le professeur, répondit avec une véritable émotion le capitaine Nemo, et je l’aime comme la chair de ma chair ! Si tout est danger sur un de vos navires soumis aux hasards de l’Océan, si sur cette mer, la première impression est le sentiment de l’abîme, comme l’a si bien dit le Hollandais Jansen, au-dessous et à bord du Nautilus , le cœur de l’homme n’a plus rien à redouter. Pas de déformation à craindre, car la double coque de ce bateau a la rigidité du fer ; pas de gréement que le roulis ou le tangage fatiguent ; pas de voiles que le vent emporte ; pas de chaudières que la vapeur déchire ; pas d’incendie à redouter, puisque cet appareil est fait de tôle et non de bois ; pas de charbon qui s’épuise, puisque l’électricité est son agent mécanique ; pas de rencontre à redouter, puisqu’il est seul à naviguer dans les eaux profondes ; pas de tempête à braver, puisqu’il trouve à quelques mètres au-dessous des eaux l’absolue tranquillité ! Voilà, monsieur. Voilà le navire par excellence ! Et s’il est vrai que l’ingénieur ait plus de confiance dans le bâtiment que le constructeur, et le constructeur plus que le capitaine lui-même, comprenez donc avec quel abandon je me fie à mon Nautilus, puisque j’en suis tout à la fois le capitaine, le constructeur et l’ingénieur ! »

Le capitaine Nemo parlait avec une éloquence entraînante. Le feu de son regard, la passion de son geste, le transfiguraient. Oui ! il aimait son navire comme un père aime son enfant !

Mais une question, indiscrète peut-être, se posait naturellement, et je ne pus me retenir de la lui faire.

« Vous êtes donc ingénieur, capitaine Nemo ?

— Oui, monsieur le professeur, me répondit-il, j’ai étudié à Londres, à Paris, à New York, du temps que j’étais un habitant des continents de la terre.

— Mais comment avez-vous pu construire, en secret, cet admirable Nautilus ?

— Chacun de ses morceaux, monsieur Aronnax, m’est arrivé d’un point différent du globe, et sous une destination déguisée. Sa quille a été forgée au Creusot, son arbre d’hélice chez Pen et C°, de Londres, les plaques de tôle de sa coque chez Leard, de Liverpool, son hélice chez Scott, de Glasgow. Ses réservoirs ont été fabriqués par Cail et Co, de Paris, sa machine par Krupp, en Prusse, son éperon dans les ateliers de Motala, en Suède, ses instruments de précision chez Hart frères, de New York, etc., et chacun de ces fournisseurs a reçu mes plans sous des noms divers.

— Mais, repris-je, ces morceaux ainsi fabriqués, il a fallu les monter, les ajuster ?

— Monsieur le professeur, j’avais établi mes ateliers sur un îlot désert, en plein Océan. Là, mes ouvriers c’est-à-dire mes braves compagnons que j’ai instruits et formés, et moi, nous avons achevé notre Nautilus . Puis, l’opération terminée, le feu a détruit toute trace de notre passage sur cet îlot que j’aurais fait sauter, si je l’avais pu.

— Alors il m’est permis de croire que le prix de revient de ce bâtiment est excessif ?

— Monsieur Aronnax, un navire en fer coûte onze cent vingt-cinq francs par tonneau. Or, le Nautilus en jauge quinze cents. Il revient donc à seize cent quatre-vingt-sept mille francs, soit deux millions y compris son aménagement, soit quatre ou cinq millions avec les œuvres d’art et les collections qu’il renferme.

— Une dernière question, capitaine Nemo.

— Faites, monsieur le professeur.

— Vous êtes donc riche ?

— Riche à l’infini, monsieur, et je pourrais, sans me gêner, payer les dix milliards de dettes de la France ! »

Je regardai fixement le bizarre personnage qui me parlait ainsi. Abusait-il de ma crédulité ? L’avenir devait me l’apprendre. »

(Jules Verne, Vingt mille lieues sous les mers, 1870, chapitre XIII)

–        Extrait n° 2 :

Le capitaine Nemo a recueilli le savant Aronnax et ses deux compagnons à bord du Nautilus. Il les convie à un dîner plein de surprises, puis s’adresse au savant :

Je suivis le capitaine Nemo, et dès que j’eus franchi la porte, je pris une sorte de couloir électriquement éclairé, semblable aux coursives d’un navire. Après un parcours d’une dizaine de mètres, une seconde porte s’ouvrit devant moi.

J’entrai alors dans une salle à manger ornée et meublée avec un goût sévère. De hauts dressoirs de chêne, incrustés d’ornements d’ébène, s’élevaient aux deux extrémités de cette salle, et sur leurs rayons à ligne ondulée étincelaient des faïences, des porcelaines, des verreries d’un prix inestimable. La vaisselle plate y resplendissait sous les rayons que versait un plafond lumineux, dont de fines peintures tamisaient et adoucissaient l’éclat.

Au centre de la salle était une table richement servie. Le capitaine Nemo m’indiqua la place que je devais occuper.

« Asseyez-vous, me dit-il, et mangez comme un homme qui doit mourir de faim. »

Le déjeuner se composait d’un certain nombre de plats dont la mer seule avait fourni le contenu, et de quelques mets dont j’ignorais la nature et la provenance. J’avouerai que c’était bon, mais avec un goût particulier auquel je m’habituai facilement. Ces divers aliments me parurent riches en phosphore, et je pensai qu’ils devaient avoir une origine marine.

Le capitaine Nemo me regardait. Je ne lui demandai rien, mais il devina mes pensées, et il répondit de lui-même aux questions que je brûlais de lui adresser.

« La plupart de ces mets vous sont inconnus, me dit-il. Cependant, vous pouvez en user sans crainte. Ils sont sains et nourrissants. Depuis longtemps, j’ai renoncé aux aliments de la terre, et je ne m’en porte pas plus mal. Mon équipage, qui est vigoureux, ne se nourrit pas autrement que moi.

— Ainsi, dis-je, tous ces aliments sont des produits de la mer ?

— Oui, monsieur le professeur, la mer fournit à tous mes besoins. Tantôt, je mets mes filets à la traîne, et je les retire, prêts à se rompre. Tantôt, je vais chasser au milieu de cet élément qui paraît être inaccessible à l’homme, et je force le gibier qui gîte dans mes forêts sous-marines. Mes troupeaux, comme ceux du vieux pasteur de Neptune, paissent sans crainte les immenses prairies de l’Océan. J’ai là une vaste propriété que j’exploite moi-même et qui est toujours ensemencée par la main du Créateur de toutes choses. »

Je regardai le capitaine Nemo avec un certain étonnement, et je lui répondis :

« Je comprends parfaitement, monsieur, que vos filets fournissent d’excellents poissons à votre table ; je comprends moins que vous poursuiviez le gibier aquatique dans vos forêts sous-marines ; mais je ne comprends plus du tout qu’une parcelle de viande, si petite qu’elle soit, figure dans votre menu.

— Aussi, monsieur, me répondit le capitaine Nemo, ne fais-je jamais usage de la chair des animaux terrestres.

— Ceci, cependant, repris-je, en désignant un plat où restaient encore quelques tranches de filet.

— Ce que vous croyez être de la viande, monsieur le professeur, n’est autre chose que du filet de tortue de mer. Voici également quelques foies de dauphin que vous prendriez pour un ragoût de porc. Mon cuisinier est un habile préparateur, qui excelle à conserver ces produits variés de l’Océan. Goûtez à tous ces mets. Voici une conserve d’holoturies qu’un Malais déclarerait sans rivale au monde, voilà une crème dont le lait a été fourni par la mamelle des cétacés, et le sucre par les grands fucus de la mer du Nord, et enfin, permettez-moi de vous offrir des confitures d’anémones qui valent celles des fruits les plus savoureux. »

Et je goûtais, plutôt en curieux qu’en gourmet, tandis que le capitaine Nemo m’enchantait par ses invraisemblables récits.

« Mais cette mer, monsieur Aronnax, me dit-il, cette nourrice prodigieuse, inépuisable, elle ne me nourrit pas seulement ; elle me vêtit encore. Ces étoffes qui vous couvrent sont tissées avec le byssus de certains coquillages ; elles sont teintes avec la pourpre des anciens et nuancées de couleurs violettes que j’extrais des aplysis de la Méditerranée. Les parfums que vous trouverez sur la toilette de votre cabine sont le produit de la distillation des plantes marines. Votre lit est fait du plus doux zostère de l’Océan. Votre plume sera un fanon de baleine, votre encre la liqueur sécrétée par la seiche ou l’encornet. Tout me vient maintenant de la mer comme tout lui retournera un jour !

— Vous aimez la mer, capitaine.

— Oui ! je l’aime ! La mer est tout ! Elle couvre les sept dixièmes du globe terrestre. Son souffle est pur et sain. C’est l’immense désert où l’homme n’est jamais seul, car il sent frémir la vie à ses côtés. La mer n’est que le véhicule d’une surnaturelle et prodigieuse existence; elle n’est que mouvement et amour; c’est l’infini vivant, comme l’a dit un de vos poètes. Et en effet, monsieur le professeur, la nature s’y manifeste par ses trois règnes, minéral, végétal, animal. Ce dernier y est largement représenté par les quatre groupes des zoophytes, par trois classes des articulés, par cinq classes des mollusques, par trois classes des vertébrés, les mammifères, les reptiles et ces innombrables légions de poissons, ordre infini d’animaux qui compte plus de treize mille espèces, dont un dixième seulement appartient à l’eau douce. La mer est le vaste réservoir de la nature. C’est par la mer que le globe a pour ainsi dire commencé, et qui sait s’il ne finira pas par elle ! Là est la suprême tranquillité. La mer n’appartient pas aux despotes. A sa surface, ils peuvent encore exercer des droits iniques, s’y battre, s’y dévorer, y transporter toutes les horreurs terrestres. Mais à trente pieds au-dessous de son niveau, leur pouvoir cesse, leur influence s’éteint, leur puissance disparaît ! Ah ! monsieur, vivez, vivez au sein des mers ! Là seulement est l’indépendance ! Là je ne reconnais pas de maîtres ! Là je suis libre ! »

Jules Verne, (Vingt mille lieues sous les mers, 1870, chapitre X)

Voici aussi les extraits de Robur le conquérant et de Maître du monde :

Extrait n° 1 Afin de prouver la supériorité du « plus lourd que l’air », Robur, le génial inventeur de l’Albatros, a combattu et détruit en vol le dirigeable de deux défenseurs du « plus léger que l’air ». Son délit commis, il s’adresse à la foule :                                                                                             

Uncle Prudent et Phil Evans étaient donc redevenus les prisonniers de l’ingénieur Robur. Puisqu’il les avait repris, allait-il les entraîner de nouveau dans l’espace, là ou il était impossible de le suivre?

On pouvait le croire.

Cependant, au lieu de remonter dans les airs, l’Albatros continuait de s’abaisser vers le sol. Voulait-il atterrir? On le pensa, et la foule s’écarta pour lui faire place au milieu de la clairière.

L’émotion était portée à son maximum d’intensité.

L’Albatros s’arrêta à deux mètres de terre. Alors, au milieu du profond silence, la voix de l’ingénieur se fit entendre.

« Citoyens des Etats-Unis, dit-il, le président et le secrétaire du Weldon-Institute sont de nouveau en mon pouvoir. En les gardant, je ne ferais qu’user de mon droit de représailles. Mais, à la passion allumée dans leur âme par le succès de l’Albatros, j’ai compris que l’état des esprits n’était pas prêt pour l’importante révolution que la conquête de l’air doit amener un jour. Uncle Prudent et Phil Evans, vous êtes libres ! »

Le président, le secrétaire du Weldon-Institute, l’aéronaute et son aide, n’eurent qu’à sauter pour prendre terre.

L’Albatros remonta aussitôt à une dizaine de mètres au-dessus de la foule.

Puis, Robur, continuant :

« Citoyens des Etats-Unis, dit-il, mon expérience est faite; mais mon avis est dès à présent qu’il ne faut rien prématurer, pas même le progrès. La science ne doit pas devancer les mœurs. Ce sont des évolutions, non des révolutions qu’il convient de faire. En un mot, il faut n’arriver qu’à son heure. J’arriverais trop tôt aujourd’hui pour avoir raison des intérêts contradictoires et divisés. Les nations ne sont pas encore mûres pour l’union.

« Je pars donc, et j’emporte mon secret avec moi. Mais il ne sera pas perdu pour l’humanité. Il lui appartiendra le jour où elle sera assez instruite pour en tirer profit et assez sage pour n’en jamais abuser. Salut, citoyens des Etats-Unis, salut! »

Et l’Albatros, battant l’air de ses soixante-quatorze hélices, emporté par ses deux propulseurs poussés à outrance, disparut vers l’est au milieu d’une tempête de hurrahs, qui, cette fois, étaient admiratifs.

Les deux collègues, profondément humiliés, ainsi que tout le Weldon-Institute en leur personne, firent la seule chose qu’il y eût à faire : ils s’en retournèrent chez eux, tandis que la foule, par un revirement subit, était prête à les saluer de ses plus vifs sarcasmes, justes à cette heure!

(Jules Verne, Robur-Le-Conquérant, 1886, chapitre XVIII.)

Extrait n°2 Aux Etats-Unis, on a signalé un engin terrestre et aquatique d’une vitesse prodigieuse qui sème la terreur. Les gouvernements américain et européens, désireux de s’approprier cette technologie, offrent une somme fabuleuse au mystérieux inventeur de la machine. Une réponse par lettre leur parvient bientôt :

« À bord de l’Épouvante »,

« Ce 15 juillet. »

« À l’Ancien et au Nouveau Monde,

« Les propositions émanant des divers États de l’Europe, comme celles qui ont été faites en dernier lieu par les États-Unis d’Amérique, ne peuvent attendre d’autre réponse que la présente :

« C’est un refus absolu et définitif du prix offert pour l’acquisition de mon appareil.

« Cette invention ne sera ni française, ni allemande, ni autrichienne, ni russe, ni anglaise, ni américaine.

« L’appareil restera ma propriété, et j’en ferai l’usage qui me conviendra.

« Avec lui, j’ai tout pouvoir sur le monde entier, et il n’est pas de puissance humaine qui soit en mesure de lui résister dans n’importe quelle circonstance.

« Qu’on n’essaie pas de s’en emparer. Il est et sera hors de toute atteinte. Le mal qu’on voudrait me faire, je le rendrais au centuple.

« Quant au prix qui m’est proposé, je le dédaigne, je n’en ai pas besoin. D’ailleurs, le jour où il me plairait d’avoir des millions ou des milliards, je n’aurais qu’à étendre la main pour les prendre.

« Que l’Ancien et le Nouveau Continent le sachent, ils ne peuvent rien contre moi, et je puis tout contre eux. » Et cette lettre, je la signe : « Maître du Monde. »

(Jules Verne, Maître du Monde, 1904, chapitre IX, seconde lettre.)