Mai 11 2019

Las cosas de Sevilla

Qu’il est loin le temps où Séville put, avant de céder sa place à Amsterdam, être considérée comme la nouvelle Venise, capitale mondiale du commerce et des arts grâce à la prodigalité de ceux qui croulaient sous l’or, avant de couler. Ubi sunt la nef Victoria[1] puis les galions des Indes ? Après avoir perdu son monopole en 1765, l’ancienne Hispalis romaine puis l’Isbilia arabe et surtout son peuple, dans une période de décadence qu’elle ne voulait pas reconnaître, ont créé le toreo pour suppléer la mollesse de la noblesse en réinventant un idéal médiéval accessible à tous ceux se sentant capables de l’atteindre. Mais même si tous les ans elle rejoue le mythe de la Résurrection et si par moment elle a l’illusion baroque d’un rêve devenu réalité, comme pour son Expo’92, elle n’est plus le centre du monde, pire encore, a contrario de ce qu’elle croit, pas même du monde taurin.

La faute à qui ? A ceux qui prennent des vessies pour des lanternes, qui croient que tout ce qui brille est de l’or, qu’une torche dans une caverne est la clarté du jour, bref qui sacrifient la substance à l’apparence. De ce point de vu, le clair triomphateur d’une feria à cette heure encore inachevée est très clairement José Luque Teruel. A ne pas confondre avec le torero sévillan Daniel Luque, contraint à s’exiler en France comme d’autres avant lui et pour des raisons bien différentes; ce monsieur n’est pourtant pas torero même s’il est fils de banderillero et filleul de Luis Miguel Dominguín. Il a beau être juge, ce monsieur n’est pas impartial. Il a beau affirmer dans les colloques de l’ANPTE que chaque plaza a sa personnalité et son histoire et que les critères de ne sont pas les mêmes dans toutes les arènes, il ne fait pas honneur à la catégorie et à la grandeur de la Maestranza acquises au fil du temps, au cours de son Histoire, aussi placide que celui du Guadalquivir.

L’association des abonnés de la capitale andalouse a demandé à plusieurs reprises la destitution de ce monsieur auprès de la délégation concernée de la région autonome d’Andalousie. La nouvelle administration a jugé bon de le maintenir à un poste qu’il occupe comme titulaire depuis 2015. Entre rite et spectacle, les politiques, quels qu’ils soient, ont décidé : qu’on donne à la vox populi ce qu’elle souhaite faisant fi s’il le faut de l’éthique. Le populisme est partout, chez ceux qui nous honnissent comme chez ceux qui sont censés nous défendre. Méfions-nous de tous et – excusez la digression – en particulier de VOX qui ne nous rend pas une fière chandelle (même si son surgissement peut se comprendre comme une réaction aux positions ambigües ou clivantes de Podemos tant sur le plan culturel que sur le plan territorial). En dévalorisant la Maestranza, Monsieur Luque dévalorise la tauromachie, cette « Corrida plebéienne » pour reprendre un titre récent de Mundotoro à propos de celle de don Victorino, ce maquignon on ne plus roturier ayant gagné ses lettres de noblesse par le travail des champs. El señor Luque avait pris la décision de gracier Cobradiezmos dudit élevage en 2016 et comparé à l’indulto d’Arrojado de Cuvillo cinq années auparavant celui-ci n’avait rien de scandaleux mais peut-être s’est-il senti pousser des ailes car celui de l’an dernier par ce même président et par El Juli à Orgullito de Garcigrande (mort six mois plus tard tué par un congénère) est une honte qui vient entériner la suprématie de la noblesse mollasse sur la bravoure authentique. C’est à ce moment là que Séville a définitivement coulé, succombant aux voies d’eaux répétées. Tous, l’empresa comme les très influents maestrantes, ont mangé dans la main du Juli après son boycott sévillan, deux années durant. Que Monsieur Julián López préfère toréer du bétail de demi-caste nommé Garcigrande, libre à lui, grâce à sa catégorie professionnelle. Qu’il impose ses critères aux juges, NON ! Et il y aurait d’autres choses à dire, comme la présentation de certaines corridas ou l’attribution de trophées qui font de la Maestranza une arène de plus, un des éléments clefs d’une Champion’s League taurine purement mercantiliste. Notons simplement cette oreille protestée lors de la dernière Porte du Prince du Juli ou cette deuxième au dernier toro d’Aguado qui assombrit son triomphe au lieu de le mettre en valeur. La répétition exclue l’erreur, on est là dans une idéologie nous étant nuisible. Bravo Monsieur Luque vous êtes le véritable protagoniste de la feria, étant entendu que les toreros disent généralement cela des présidents peu complaisants. Vous avez fait très fort car vous avez largement dépassé le rubicond. Les toreros vont sans doute vous demander par contrat… si ce n’est pas déjà le cas.

[1] bateau de Magellan qui y revint en 1522 pour y conclure la toute première circumnavigation


Mai 1 2019

La trinité du toreo

          Le toro, on le sait, a des qualités ou des défauts en relation avec sa force (poder), son port de tête (humillación), sa fixité (fijeza), sa longueur de charge (recorrido), sa répétition (codicia).

           Quelles sont face à celles-ci les qualités requises chez un torero ? Elles sont au nombre de trois essentiellement : courage (au-delà du courage naturel qui peut être celui d’un jour, pundonor et ambition), personnalité ou art, capacité ou intelligence. C’est sur ce dernier point que nous nous attarderons maintenant.

            Il y a d’abord le choix des terrains et l’idée orthodoxe du parallélisme par rapport aux planches, nous y reviendrons, mais pour une série donnée, il y a trois aspects à prendre en compte.

  1. Distance: loin, proche et dessus

            Dans le toreo moderne, les cites de loin sont de moins en moins fréquents et ceux qui s’effectuent au plus près le sont par opposition de plus en plus. Question de modes et révélateur d’un manque de capacité. Un appel lointain est plus dangereux parce que le toro arrive plus vite et qu’il est moins fixé sur le seul leurre mais au-delà du courage que cela suppose il y a une question technique primordiale : une fois dans la muleta, le plus dur est de le maintenir (sujetar) pour ne pas le rejeter mais au contraire le conduire vers l’intérieur. Il est très rare de maintenir l’intensité de la passe de l’appel à la sortie. Quand cela arrive on assiste à un moment d’exception. Le tout n’est pas de placer le toro loin; c’est quand il se rapproche que tout se complique.

            Je ne m’attarderai pas ici sur le toreo de proximité dont j’ai déjà parlé par ailleurs. Dans les faits, au cœur de la faena, c’est le toreo de mi-distance qui s’impose mais cette distance peut être variable, entre 2 et 7 mètres environ. C’est à la fois le toro qui marque sa distance et le torero qui décide où il se sent le plus à l’aise, ce qui définit souvent son concept. C’est Manolete qui avait le premier escamoté le premier temps de la passe mais le toreo classique exige une certaine distance pour lancer la muleta, jouer avec ses plis et mieux « imprégner » (empapar) le toro dans le leurre pour le « templer ».

  1. Sitio: cite et repositionnement

            André Viard avait expliqué de manière magistrale, dans Comprendre la Corrida, les différentes positions occupées par le torero entre les passes : le toro s’arrêtant, il peut se retrouver à la queue de celui-ci ou excentré si l’animal s’ouvre ou bien enfermé s’il se serre, l’obligeant sans cesse à se repositionner et donc à rompre la liaison des passes. C’est aussi cela que doit observer le bon aficionado, le sitio initial en fonction du recorrido. Se croiser n’est pas bon avec tous les toros, c’est dur à accepter pour les tenants d’une orthodoxie aveugle et pourtant c’est une des grandes vérités du toreo. Et ces critiques sont d’autant plus surprenantes qu’elles émanent le plus souvent de ceux qui défendent l’idée suivante : « à chaque toro sa faena ». Pour un toro qui a tendance à se serrer (au moment de la rencontre, pas un toro qui gagne du terrain) le mieux est l’appel au fil de la corne et la passe n’aura de réelle valeur que si le torero ne déplace pas l’animal vers l’extérieur et qu’il profite de la tendance naturelle de l’animal pour terminer le muletazo derrière la hanche. Il n’y a que les tout meilleurs toros modernes qui permettent, par un équilibre entre force, recorrido et noblesse, la passe idéale qui est de fait et pour cette raison tellement rare, impliquant un double déplacement; elle est pour eux un exercice contre nature qui les tord dans une trajectoire en rond propice en soi au toreo classique mais en cercle presque complet plus qu’en arc de cercle. A ce propos, il ne faudrait pas confondre ce toreo parfait parfois rêvé avec les circulaire de fin de faena où un toro à l’arrêt et un torero entre ses cornes donne le plus souvent plusieurs petites passes enchaînées (deux généralement) plus qu’une seule en continu. Ce qui est certain c’est que, quoique difficile, on aimerait que les maestros s’ essayent plus souvent à ce toreo idéal quand le toro semble en offrir les possibilités.

Plus un toro est dur et plus il faudra revenir à une tauromachie de mouvement quitte à pratiquer le toreo par devant et de déplacement cher à Domingo Ortega (cf. Los arquitectos del toreo moderno, de Pepe Alameda), privilégiant le jeu de jambes sur le jeu de bras, l’esquive plus que le détournement.

  1. Hauteur du leurre : haute, mi-hauteur, naturelle et traînante

            Si une muleta basse est en théorie la meilleure des solutions pour dominer un toro, on voit depuis quelques années des toreros faire traîner la muleta en se pliant en deux pour allonger au maximum la passe pour profiter au mieux du recorrido optimal du toro moderne. A priori rien à objecter à cela, sauf que le plus souvent, pour rajouter encore un segment supplémentaire à la longueur de la passe elle se donne dans un cite marginal avec la jambe de sortie en retrait et, pire encore, dans une trajectoire oblique mais droite, en ligne donc où une virgule finale, à toro passé, vient ramasser l’animal pour préparer la passe suivante. Dans ce cas on a une impression de domination mais le torero profite surtout d’une charge « humiliée » et d’une trajectoire naturelle longue. S’il est vrai qu’un mauvais torero peut gâcher ces qualités, un bon torero tombe là dans la facilité. C’est aussi esthétiquement parlant que cette manière de toréer est discutable.

            Dans le toreo classique, tout doit se faire avec naturel. Nul besoin de se tordre ni de traîner la muleta plus que nécessaire. Le toreo doit sourdre de l’âme et couler lentement, le plus lentement possible. Belmonte disait en voyant Curro Romero que ce qu’il arrivait à faire, « templer » à mi-hauteur, était une des choses les plus difficiles à réaliser. Techniquement parlant cela peut aussi être nécessaire avec un animal (et il y en a de plus en plus) ayant une tendance naturelle à « humilier » mais sans la force nécessaire pour soutenir une charge antinaturelle (baisser la tête n’est naturel qu’un temps, pas en continu) nécessairement épuisante, surtout si le torero torée en rond.

            Pour ce qui est du toreo par le haut, il convient de rappeler qu’en principe il est antinomique avec l’idée de bravoure car un toro qui cherche les hauteurs est un toro qui se se défend. Ce type de charge est donc propice au toreo changé (cambiado) par le haut. Ceci dit, il est préférable d’éviter les généralités et indiquer qu’un toro brave peut, en fin de faena, nécessiter qu’on lui relève la tête mais dans ce cas les très classiques passes aidées à mi-hauteur conviendront toujours mieux que des manoletinas qui ne pèsent pas du tout sur l’animal.  

            L’association de ces trois facteurs techniques débouchera sur les deux piliers du toreo : le rythme et le dessin. Ils conditionnent pour bonne part le temple et le tracé de chaque passe mais aussi leur enchaînement même si interviennent aussi d’autres qualités, l’art du torero restant un art magique, inexplicable pour partie. Le bon concept et l’intelligence ou capacité torera permettent une bonne adéquation des vitesses qui donnera au geste toute son harmonie mais la capacité innée de certains toreros à ralentir la charge de certains toros se ressent plus qu’elle ne s’apprend. Le courage froid, quant à lui, sera la capacité à appliquer la bonne recette, à « consentir » le toro, à prendre des risques au moment crucial pour gagner un pari dangereux en lui donnant sa chance, celle de montrer qu’il peut se donner, ce qui revient à extraire sa bravoure; c’est en quelque sorte ce que les Espagnols appellent desengañar al toro, quoique on puisse douter du sens actuel de cet expression où, plus que révéler la bravoure, elle est parfois employée dans le sens de dresser la noblesse molle (la vraie noblesse se révèle aussi avec la bravoure). Il y a deux sortes de bons toreros, les musiciens et les peintres, ceux du rythme et ceux du dessin (j’éviterai de parler ici des bûcherons et des danseurs). Si faire passer un toro langoureusement est très dangereux c’est une qualité souvent considérée du point de vue de l’esthétique alors que le courage pur est censé être la base de la domination, celle qui va modeler dans l’espace plus que dans le temps la matière brute de la charge vierge. Ce qui est certain c’est que pour toréer bien un grand nombre de toros il est nécessaire (c’est ce qu’on appelle l’ambition torera ou la responsabilité) de modeler son toreo à chaque toro, ce qui implique de ne pas avoir un concept trop restreint et surtout, après s’être demandé ce qu’il faut faire, appliquer  cette idée et c’est là que tout devient plus compliqué. S’il était aussi facile de toréer que d’écrire je serai moi-même torero…


Avr 22 2019

Rivalités (VIII)

Aparicio vs Litri

Celle entre Aparicio et Litri a été la plus importante de l’histoire dans l’escalafón inférieur, à tel point qu’en 1950 il y eut plus du double de novilladas (303) que de corridas (145). S’il est vrai qu’il faudra attendre 1966 pour que ce phénomène s’inverse, ces deux toreros ne sont pas pour rien dans l’engouement suscité par les premières.

Dès le départ, Aparicio avait pour lui la qualité, notamment celle des triomphes à Madrid, 2 en 49 et 2 autres en 50 contre une seul pour Litri, le 18 mai 50 en mano a mano avec son rival qu’il accompagne en volandas. Ce dernier était plus populaire grâce à son toreo tremendista, l’un des tous premiers, impressionnant lorsqu’il faisait venir l’animal de loin, avec la muleta repliée, le célèbre cartucho.

En effet, après une saison épique, Julio Aparicio et Miguel Báez « Litri » unirent leur destin, professionnellement parlant s’entend, des mains de Cagancho, le 12 octobre 1950, à Valence, tant leur carrière était liée. Cette première confrontation en tant que matador tournera nettement à l’avantage du madrilène avec 4 oreilles.

Ils avaient commencé leur rivalité près de trois ans plus tôt, d’abord timidement, puis c’est l’explosion en 1949 (114 novilladas pour Litri) avec d’importants triomphes à Madrid pour Aparicio. Cette temporada va préparer l’apothéose de 1950 orchestrée par l’apoderado de Manolete, Manolo Camará.

Outre ses triomphes madrilènes, il faut noter les 4 oreilles et la queue coupées par Aparicio à Cordoue le 26 mars ou les 6 novilladas qui composèrent la feria valencienne de Juillet avec nos deux toreros à l’affiche dans toutes les courses.

La rivalité ne se maintiendra pas vraiment dans la catégorie supérieure, d’une part parce que l’année 1951, à l’instar de l’alternative, est incomparablement meilleure pour Aparicio qui triomphe dans la capitale où son classicisme est tout de suite apprécié alors que Litri aura besoin d’une année de rodage. Cependant, à Séville, c’est l’Andalou qui l’emporte par deux fois : deux oreilles le 17 puis le 23 avril (oreille puis blessure pour Aparicio).

Litri se retirera au cours de la saison de 1953, laissant seul son ancien compagnon. Ils se retrouvèrent cependant à partir 1956, une étape où ils ont connu ensemble un de leur plus grand succès, le 14 mai de l’année suivante, sortant a hombros des arènes de Las Ventas en compagnie de Manolo Vázquez. Il y eut finalement une dernière étape de rivalité entre 1964 et 1967.

Ils figurent tous les deux parmi les 10 toreros qui ont le plus triomphé à Madrid avec une égalité de 7 sorties a hombros mais une de plus pour Aparicio lors de la feria de San Isidro.

Leurs fils respectifs deviendront des toreros importants mais ils ne furent jamais des rivaux. En 1987, c’est avec le fils Camino que Litri donna l’alternative à son rejeton.


Avr 12 2019

Avec le temps…

Les arènes de la Porte d’Alcala ont été les premières arènes en dur de Madrid et celles qui ont le plus longtemps donné des spectacles taurins dans la capitale espagnole, 125 années durant, de 1749 à 1874.

Elles ont remplacé celles qui étaient construites en bois sur le même emplacement et qui ne durèrent guère plus de 10 années pour être remplacées par celles de la route d’Aragon.

Leur capacité était de 12 000 spectateurs, au moins dans un premier temps où les gradins étaient encore en bois, puis elles descendirent en-dessous de 10 000. L’affiche inaugurale du 3 juillet comprenait des noms qui ne sont pas passés à la postérité : José Leguregui « El Pamplonés », Juan Esteller et Antón Martínez.

Ces arènes furent de théâtre du développement de la tauromachie née en Andalousie mais les spectacles donnés pour des événements particuliers continuèrent à se dérouler sur la Plaza Mayor jusqu’en 1846.

Pepe Hillo y mourut en 1801, ce dont Goya nous a transmis un témoignage iconographique. C’est Lagartijo et Frascuelo qui la clôturèrent le 19 juillet 1874 avec des toros d’Aleas même s’il y eut des spectacles mineurs jusqu’au mois d’août. Elles laissèrent leur place au projet urbanistique qui donna naissance au quartier de Salamanque.

Elles auraient permis la célébration de plus de 2500 corridas où plus de 23 000 toros furent tués.


Déc 1 2018

Au pays des toros (37)

La place de la Corredera de Cordoue, à l’instar d’autres plazas mayores, a longtemps été le cadre des corridas de l’ancienne capitale califale.

Un mot aussi pour les arènes de Los Tejares, en activité de 1846 à 1965, détruites pour laisser la place au coso plus moderne et impersonnel de Los Califas. Le dernier spectacle y fut célébré le 18 avril alors que les nouvelles arènes furent inaugurées le 9 mai.

 


Nov 17 2018

Un élevage à l’honneur (102)

Si les élevages de Camargue sont presque légions, il y en a très peu dans le sud-ouest. L’un des plus en vue est celui que Jean-Louis Darré a créé en 2002 sous le nom de Camino de Santiago. C’est à Millas, en 2006, qu’il fait sa présentation en piquées.

Le propriétaire de L’Astarac (Pedrajas) a diversifié son cheptel avec ce deuxième fer d’origine Santafé Martón. Un semental de Marqués de Domecq et un autre de Conde de Mayalde ont aussi participé à la formation de cette ganadería.

Escribano et Ternero

 

Encaste : Marqués de Domecq

Devise : blanc et bleu

Ancienneté : aucune

 

Les animaux de ce fer paissent dans le domaine du Cantaou, au sud du Gers. Actuellement, une centaine de vaches mères et trois étalons le composent.

En 2010 le lot envoyé à Millas est très remarqué. Dans les années suivantes, ceux proposés à Mimizan également où la présentation en corridas a lieu en 2012. Depuis il a même « lidié  » en Espagne. En 2017, le toro Ternero auquel Escribano coupa les deux appendices à Aignan eut l’honneur posthume d’une vuelta. En 2018, le lot sortie à Mont de Marsan a permis la concession de 3 oreilles.


Nov 11 2018

Rivalités (VII)

José Tomás vs El Juli

Badajoz, 25 juin 2012

          Ceci est l’histoire d’une rivalité tronquée mais rivalité tout de même. On aurait préféré les voir plus souvent face à face sur les scènes les plus prestigieuses pour que l’afición se partage et s’enflamme et même s’affronte symboliquement mais une chose est claire : ils ont été avec le maestro Ponce, un poil plus âgé, les deux toreros les plus importants de ces 20 dernières années dans deux styles bien différents, le premier dans le classicisme le plus pur et sans concessions et le deuxième dans un toreo plus varié et moderne.

            Lors des derniers épisodes, le 14 août 2016, à Saint-Sébastien puis le 4 septembre suivant à Valladolid, chacun a montré ses arguments dans ce qui promettait être et fut finalement un grand moment de tauromachie dans le premier cas et un vibrant hommage à Víctor Barrio dans le second; numériquement le moins âgé des deux l’emporte à chaque fois mais dans le cœur des aficionados… L’important est que la Fiesta en sorte grandie quand ces deux géants se hissent à leur meilleur niveau.

            Voir José Tomás a l’affiche est depuis longtemps devenu chose rare mais le voir annoncé face à El Juli est un événement encore plus exceptionnel, cependant dans leur première étape, qui commence à remonter il est vrai, ils se sont affrontés plus d’une quarantaine de fois. L’un de mes plus grands souvenirs de corridas est d’ailleurs l’une de ces confrontations, le Dimanche de Pâques de 2001 à Séville où l’ambiance était électrique dans une alternance de l’éclair et du tonnerre pour obtenir la prééminence sur l’Olympe.

            La rivalité entre ces deux là a commencé à Lima fin 98 puis s’est poursuivie 18 fois l’année suivante. Parmi ces dates, la plus importante sans doute est celle du 13 juin à Barcelone, première rencontre en Espagne dans des arènes de première catégorie : 4 oreilles pour José Tomás dans ce qui sera son fief. Notons aussi que quelques jours plus tard, à León, a lieu une corrida où nos deux compères sont précédés d’Enrique Ponce dans un cartel cinq étoiles qui se répétera quelques fois (Puerto Banús et Haro cette même année). C’est à Mont de Marsan, le 20 juillet 1999 que débute leur rivalité sur le sol français mais c’est Manuel Caballero qui triomphe. En revanche, à Dax, le 13 août, avec le même cartel de toreros, c’est le torero de Galapagar qui l’emporte avec un trophée à chaque toro. Le lendemain il coupe un autre appendice à Donostia et le jour suivant a lieu une grande corrida dans la voisine Bayonne où César Rincón, José Tomás et El Juli sortent a hombros dans une corrida de Marca qui permet à chacun de couper 3 oreilles.

            Le 7 mai 2000 la rivalité se précise en même temps que ces deux jeunes toreros atteignent le firmament : José Tomás sort à nouveau en triomphe à Barcelone sous le regard d’El Juli. A Bilbao, le 16 juin, le trio magique se renouvelle mais seul le torero de Velilla touche du poil. Ponce accompagne à nouveau le binôme à Huelva le 3 août et c’est lui qui s’impose avec un double trophée même si José Tomás l’accompagne par la Grande Porte. A Valladolid les trois se retrouvent le 13 septembre  et ce sont les deux plus jeunes qui sortent a hombros. Six jours plus tard, cara y cruz, José Tomás est blessé à Salamanque et El Juli triomphe.

            Le 15 avril 2001 la confrontation a lieu au sommet, sur l’albero de la Maestranza : José Tomás sort par la Porte du Prince. Le 22 ils sortent tous les deux en triomphe des arènes de La Merced accompagnés de Finito. Le 25, à Cordoue, c’est El Juli qui prend sa revanche comme le premier septembre à Bayonne. Le 13 c’est Ponce, à Valladolid.

            Le 31 mars 2002 les deux madrilènes se retrouvent à Séville mais le succès de l’année précédente n’est pas renouvelé. José Tomás est sur le départ, les saisons longues ne sont semble-t-il pas pour lui. Le 31 août, à Bayonne, il est sifflé alors que le stakhanoviste Julián López obtient trois trophées. Du pareil au même à Salamanque le 10 septembre dans des affiches similaires avec Finito de Córdoba en ouvreur, puis le mythe fatigué se retire.

            Il faudra attendre cinq années pour que les deux grands toreros se revoient en piste : lors du mano a mano d’Avila du 22 juillet 2007 c’est El Juli qui remporte la mise, imparable. L’année suivante, le 20 avril, à Barcelone, une seule oreille, elle est pour El Juli. A partir de là les confrontations vont considérablement s’espacer : 3 oreilles chacun le 25 juin 2012 à Badajoz (avec Padilla en tête de l’affiche) avant les rencontres de 2016.

            La Corrida est un Art mais pas seulement. Les statistiques expriment quelque chose mais ne sauraient rendre compte de la puissance émotionnelle du toreo. Ceci dit, elles sont clairement à l’avantage d’El Juli, meilleur technicien que José Tomás : en 48 confrontations, 78 vs 66 oreilles et 27 vs 21 sorties en triomphe. Le reste est de l’ordre de l’ineffable.


Nov 1 2018

Demain je serai libre

Nestor García a côtoyé Iván Fandiño pendant 15 ans. Il l’a donc aidé à grimper au sommet puis l’a accompagné pendant sa disgrâce avant de lui tenir la main dans ses derniers instants. Son livre est celui d’un homme marqué. Ce n’est pas l’amertume qui parle contrairement à ce que diront certains, c’est la douleur, donc la vérité. C’est un livre fait d’ombres et de lumières, comme le toreo même, un livre aussi entier que son auteur, en blanc et noir. Il ne s’agit nullement d’une œuvre littéraire, là n’est pas la question. On n’y trouvera rien non plus de glauque ou d’indiscret sur la vie ou la mort du lion basque mais bien ce qui fait l’essence du toreo, l’exaltation de la vie, une vie vécue sans concessions, comme si chaque jour était le dernier (pour reprendre les mots d’une chanson bien connue) avec pour objectif avoué celui de la liberté. Fandiño n’a pas cherché la mort, il n’était nullement suicidaire contrairement à ce que pourront dire ceux qui l’ont vu tuer des toros sans muleta en se jetant entre les cornes. Il avait l’ambition de devenir quelqu’un dans la voie qu’il avait choisi qui est celle des héros. Être vrai, c’était sa manière d’être, dans la vie et dans l’arène. Il ne cherchait pas à paraître, même pas sympathique, mais à être ce qu’il était au fond de lui-même, un TORERO, pur, sans fioritures. Voilà ce qu’on apprend dans le livre même si entre les lignes on aperçoit un fils, un mari et surtout un père, un être qui ne peut être héroïque à tout moment, surtout quand s’immisce le doute et que les circonstances du quotidien et les questions sur l’avenir viennent troubler la permanence de l’être profond. Nestor García est un autre lion, il rugit dans un travail de deuil où il n’épargne personne en donnant son sentiment, tout d’abord sur les familles mafieuses (sic) et leurs toiles d’araignée qui tissent un système interconnecté, leur archaïsme et leur manque de parole et d’honneur dans un secteur où au contraire celui-ci devrait être magnifié. Il parle aussi des compañeros, ennemis dans les bureaux mais voulant curieusement être bons copains en piste : El Juli le premier. Il parle aussi du système des sites et revues taurines qui sont financés par la publicité des toreros, jusqu’à 15 000 euros dans son cas par saison jusqu’à ce qu’il dise stop. Bien-sûr ce livre est écrit depuis sa vision des choses, il n’est pas impartial, il est fandiñista. Mais comme disait Saint-Exupéry, on ne voit bien qu’avec le cœur. Et comme disait l’autre – Yiyo peut-être – pour ceux qui comme moi ont eu le cœur fendu ce 17 juin 2017 à Aire sur l’Adour, il s’agissait d’une lecture nécessaire. (Elle m’a permis de reprendre la plume, ce que je n’avais pas fait depuis lors.)


Oct 27 2018

Ponce et la tauromachie spectacle

Billet d’humeur publié sur le site de la FSTF en réaction à des opinions publiées  sur ce même site :

Je me suis toujours insurgé contre l’idée qu’il y a deux tauromachies irréconciliables qui n’auraient rien à voir l’une avec l’autre : la tauromachie spectacle et la tauromachie vérité.

Personnellement, je vais chaque année à Vic ou dans d’autres arènes pour voir des toros-toros et les tiers de piques qui vont avec.

J’allais aussi il y a peu de temps encore voir Morante pour le plaisir de le voir dessiner quelques splendides véroniques sans trop d’espoir pour la muleta.

Je suis aussi allé parfois voir le binôme Adalid-Sánchez. J’appréciai la torería et les estocades de Fandiño.

Parmi les tenants, voire les organisateurs de la tauromachie vérité, j’en vois souvent dans le callejón de courses on ne peut plus « toreristes » pendant les ferias estivales. Ils y prennent visiblement pas mal de plaisir, en particulier quand c’est Ponce qui torée.

Et c’est bien là la seule vérité que je connaisse : si on aime la tauromachie espagnole à pied et tout ce qui la compose on est obligé de voir un certain nombre de courses par an, diverses et variées.

Militant du poder et défenseur du tercio de piques, je constate que le monde n’est pas tel que je souhaiterais qu’il soit mais tel qu’il est. La vérité c’est que la caste et la « baston » (celle d’un Lamelas par exemple quoique très méritoire) ne suffisent pas. Une autre vérité c’est que le genio est un défaut (même si une dose de caractère est appréciale) et que la noblesse est une qualité, quoi qu’on en dise. Elle ne l’est cependant que si elle est accompagnée de force et de bravoure.

Ponce est sorti cette année par la Grande Porte de Madrid, il a triomphé à Bilbao avec un encaste qui les autres figuras rejettent et a coupé trois oreilles à Linares avec les toros de Samuel Flores.

Après plus de 25 ans d’alternative il est en passe d’être consacré triomphateur de la saison. On ne torée pas comme il le fait sans amour du toreo donc du toro et de la tauromachie. Prétend-il la suppression du tercio de piques, des banderilles et de l’estocade ? Serait-il un anti déguisé de lumières ? C’est ce que j’ai eu l’impression de lire dans certains propos.

En quoi est-ce dégradant pour la tauromachie de la revêtir de sons et de lumières ? Nous avons besoin d’expérimenter de nouvelles voies. Sans faire n’importe quoi, l’événementiel est primordial pour attirer le chaland, que ce soit via une goyesque ou par une affiche sortant de l’ordinaire : un mano a mano Ponce vs Tomás ? Si c’était moi qui choisissait le bétail ce serait deux pedrazas, deux alcurrucenes et deux victorinos. Mais même avec 6 toros de Victoriano del Río ce serait un événement, donc on en parlerait.

Oui Vic, Céret, Parentis font très bien les choses mais voir la tauromachie par ce seul triangle c’est passer à côté de beaucoup de choses car les meilleurs toreros ont le pouvoir de tomber dans la facilité, celle de ne pas affronter les élevages les plus durs mais ils sont surtout les auteurs du bon toreo, celui qu’on voit malheureusement assez rarement avec des toreros modestes face à du bétail compliqué.

Je regrette comme beaucoup l’absence ou la rareté de « gestes » des toreros-étoiles mais je leur reconnais un talent indéniable et leur personnalité est l’un des attraits de la tauromachie qui n’est plus au moins depuis plus d’un siècle une science appliquée où il ne conviendrait de donner des passes que dans un but technique comme préparation à l’estocade. D’ailleurs, au risque de me fâcher avec la moitié de l’afición, avec un toro à la défensive, à l’époque de Guerrita où le toreo se faisait encore sur les pieds, il était impensable d’enchaîner des passes sur un même côté et le classicisme le plus absolu voudrait qu’on le prépare à l’estocade par un macheteo qui peut revêtir lorsqu’il est bien fait une grande dose de torería. Mais j’arrête là car je suis fatigué de répéter des choses perçues par certains comme des inepties alors que pour d’autres ce ne sont que des évidences. Ce qui est irréconciliable ce sont certaines idées ou représentation des choses.

Pour ma part, ce qui m’a plu de point de vue conceptuel dans la corrida de Malaga en 2017 c’est l’utilisation de la cape (l’instrument de base du toreo) au dernier tiers comme avait voulu le faire le grand Ordóñez et surtout la série offerte à Conde qui a permis de confirmer les limitations dudit torero mettant de cette manière mieux en valeur l’animal.


Oct 20 2018

Un élevage à l’honneur (101)

L’élevage de El Retamar en a surpris plus d’un lors de la Pentecôte vicoise de 2018 en sortant un grand novillo primé d’une vuelta; son nom, Avecejón (photo ci-dessous de Pierre Delhoste).

Manuel Hurtado a créé cet élevage en 1984 avec un lot d’animaux de Carlos Núñez, ligne Rincón. Susana Hurtado apporte en 1996 le tiers de l’élevage El Álamo de même origine. Depuis 2012, c’est la famille Pinto-Marabotto qui est à sa tête.

Encaste : Núñez

Devise : vert et blanc

Ancienneté : 2003

Mayoral : Francisco Plazas

Les animaux de ce fer paissent sur 360 hectares au nord de Madrid, dans différents domaines, notamment Las Tejoneras, situés dans les commune de Colmenar Viejo, Becerril de la Sierra et Manzanares El Real.

Les 130 vaches de ventre permettent de produite jusqu’à une dizaine de lots par an, tous en novilladas.

Ce fer fait partie de l’Agrupación (AEGRB).