PhiloStjo

Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

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Comment être sûr que vous n’êtes pas en train de rêver ?

Sans doute parce que vous ne rêveriez pas du blog « PhiloStjo »… :)

Vous reconnaissez peut-être ici la question au coeur du film Inception de Christopher Nolan (ou même Matrix). Mais ce que vous ne savez peut-être pas, ce sont les sources philosophiques d’une telle réflexion. En effet, ce n’est pas la première expérience de pensée qui doute de la réalité de nos perceptions, et du monde qui nous entoure. Platon,Aristote,Descartes,Kant, Freud, Husserl, Putnam et son cerveau dans une cuve ont fortement inspiré ce film (sur le rêve, la conscience, l’intersubjectivité, autrui, l’inconscient…)Vous trouverez ci-dessous des liens intéressants sur ce film, des références « classiques » philosophiques puis un extrait du livre Qu’est-ce que tout cela veut dire ? de Thomas Nagel dont je vous recommande vivement la lecture.

Synopsis : « Le film relate les aventures d’un groupe de voleurs tout à fait particulier : des voleurs de rêves qui, grâce à une technologie, entrent par effraction dans la conscience d’un individu pour lui dérober ses idées (extraction) ou les supprimer. L’inception, elle, va plus loin, consistant à implanter une idée dans la conscience d’un individu, à son insu. Cette technique comporte des risques pour les voleurs, lequel consiste à se perdre dans les méandres de leur propre conscience, les “limbes”.

La cible principale du film est l’héritier d’une multinationale de l’énergie. Le concurrent, M. Saito, souhaite que l’hériter démantèle la société de son père. Cobb, experimenté dans l’extraction et l’inception, incarné par Di Caprio, est le chef de l’équipe, composée de 4 membres :

  • un chercheur chargé de la compréhension du psychisme de la cible.
  • un faussaire, chargé de truquer l’identité des individus avec lesquelles la cible est familière.
  • un chimiste responsable des sérums permettant de réguler le rêve commun.
  • un architecte dont le rôle est de concevoir le monde du rêve

Pour mener à bien l’introduction de l’idée, l’équipe doit descendre littéralement dans la conscience de la cible, allant des couches supérieures de rêves vers les couches les plus profondes, permettant de créer pour la cible un sentiment  de réalité de plus en plus fort. Le but est ainsi que la cible confonde le rêve et la réalité, elle-même alors considérée comme une sorte de réalité augmentée ou alternative.

A l’issue de batailles oniriques, Cobb parviendra à réaliser l’inception, mais semble-t-il au prix de sa conscience et de la réalité. » extrait du site http://la-philosophie.com/inception-analyse

Références philosophiques qui ont traité du rapport rêve/réalité.

-Platon relate une discussion entre Socrate et un mathématicien athénien,Théétète. Ces deux-là se demandent ce qu’est la science, et donc la connaissance. Théétète avançant d’abord que la science c’est la sensation, Socrate réfute et conclut sur la différence entre perception et connaissance. C’est au cours de cet échange qu’intervient la question du rêve.

THÉÉTÈTE : Je n’ose dire, Socrate, que je ne sais que répondre, parce que tu m’as repris tout à l’heure de l’avoir dit. En réalité, cependant, je ne saurais contester que, dans la folie ou dans les rêves, on ait des opinions fausses, alors que les uns s’imaginent qu’ils sont dieux et que les autres se figurent dans leur sommeil qu’ils ont des ailes et qu’ils volent.

SOCRATE : Ne songes-tu pas non plus à la controverse soulevée à ce sujet, et particulièrement sur le rêve et sur la veille ?

THÉÉTÈTE : Quelle controverse ?

SOCRATE : Une controverse que tu as, je pense, entendu soulever plus d’une fois par des gens qui demandaient quelle réponse probante on pourrait faire à qui poserait à brûle-pourpoint cette question : dormons-nous et rêvons-nous ce que nous pensons, ou sommes-nous éveillés et conversons-nous réellement ensemble ?

THÉÉTÈTE : On est bien embarrassé, Socrate, de trouver une preuve pour s’y reconnaître ; car tout est pareil et se correspond exactement dans les deux états. Prenons, par exemple, la conversation que nous venons de tenir : rien ne nous empêche de croire que nous la tenons aussi en dormant, et lorsqu’en rêvant nous croyons conter des rêves, la ressemblance est singulière avec ce qui se passe à l’état de veille.

SOCRATE : Tu vois donc qu’il n’est pas difficile de soulever une controverse là-dessus, alors qu’on se demande même si nous sommes éveillés ou si nous rêvons. De plus, comme le temps où nous dormons est égal à celui où nous sommes éveillés, dans chacun de ces deux états notre âme soutient que les idées qu’elle a successivement sont absolument vraies, en sorte que, pendant une moitié du temps, ce sont les unes que nous tenons pour vraies et, pendant l’autre moitié, les autres, et nous les affirmons les unes et les autres avec la même assurance.

THÉÉTÈTE : Cela est certain.

SOCRATE : N’en faut-il pas dire autant des maladies et de la folie, sauf pour la durée, qui n’est plus égale ?

THÉÉTÈTE : C’est juste.

SOCRATE : Mais quoi ? est-ce par la longueur et par la brièveté du temps qu’on définira le vrai ?

THÉÉTÈTE : Ce serait ridicule à beaucoup d’égards.

SOCRATE : Mais peux-tu faire voir par quelque autre indice clair lesquelles de ces croyances sont vraies ?

THÉÉTÈTE : Je ne crois pas.

Pour Aristote, personne ne saurait croire que la réalité n’est pas ce que l’on connaît en étant éveillé, et nulle sensation n’est ressentie sans objet qui la cause. Mais ma sensation face à la même cause est amenée à varier selon mon état. Le perçu est donc subjectif, relatif. L’apparence n’est pas la vérité.

-Aristote, Métaphysique (fin du IVème siècle avant J.C.) – Livre IV, 1010b – 1011a6

Pour ce qui est de la vérité, plusieurs raisons nous prouvent que toutes les apparences ne sont pas vraies. Et d’abord, la sensation même ne nous trompe pas sur son objet propre ; mais l’idée sensible n’est pas la même chose que la sensation. Ensuite, on peut s’étonner à juste titre que ceux dont nous parlons restent dans le doute sur des questions comme celles-ci : Les grandeurs ainsi que les couleurs sont-elles réellement telles qu’elles apparaissent à ceux qui sont éloignés, ou telles que les voient ceux qui en sont près ? Sont-elles réellement telles qu’elles apparaissent aux hommes bien portants, ou telles que les voient les malades ? La pesanteur est-elle ce qui paraît pesant aux hommes de faible complexion, ou bien ce qui l’est pour les hommes robustes ? La vérité est-elle ce qu’on voit en dormant, ou ce qu’on voit pendant la veille ? Personne, évidemment, ne croit qu’il y ait sur ces points la plus légère incertitude. Y a-t-il quelqu’un, s’il rêvait qu’il est dans Athènes, alors qu’il serait en Afrique, qui s’imaginât, sur la foi de ce rêve, de se rendre à l’Odéon ? D’ailleurs, et c’est Platon qui fait cette remarque, l’opinion de l’ignorant n’a certainement pas une autorité égale à celle du médecin, quand il s’agit de savoir, par exemple, si le malade recouvrera ou ne recouvrera pas la santé. Enfin, le témoignage d’un sens sur un objet qui lui est étranger, ou même qui se rapproche de son objet propre, n’a pas une valeur égale à son témoignage sur son objet propre, sur l’objet qui est réellement le sien. C’est la vue qui juge des couleurs et non le goût ; c’est le goût qui juge des saveurs, et non la vue. Jamais aucun de ces sens, dans le même temps, quand on l’applique au même objet, ne nous dit que cet objet a et n’a pas à la fois telle propriété. Je vais plus loin encore. On ne peut pas contester le témoignage d’un sens, parce qu’en des temps différents il est en désaccord avec lui-même ; il faut adresser le reproche à l’être qui éprouve la sensation. Le même vin, par exemple, soit parce qu’il aura changé lui-même, soit parce que notre corps aura changé, nous paraîtra, il est vrai, doux dans un instant, le contraire dans un autre. Mais ce n’est pas le doux qui cesse d’être ce qu’il est ; jamais il ne dépouille sa propriété essentielle ; il est toujours vrai qu’une saveur douce est douce, et ce qui sera une saveur douce aura nécessairement pour nous ce caractère essentiel.

Or, c’est cette nécessité que détruisent les systèmes en question ; de même qu’ils nient toute essence, ils nient aussi qu’il y ait rien de nécessaire, puisque ce qui est nécessaire ne saurait être à la fois d’une manière et d’une autre. De sorte que s’il y a quelque chose qui soit nécessaire, les contraires ne sauraient exister à la fois dans le même être. En général, s’il n’y avait que le sensible, il n’y aurait rien, n’y ayant rien, sans l’existence des êtres animés, qui pût percevoir le sensible ; et peut-être alors serait-il vrai de dire qu’il n’y a ni objets sensibles, ni sensations; car tout cela est, dans l’hypothèse, une modification de l’être sentant. Mais que les objets qui causent la sensation n’existent pas, même indépendamment de toute sensation, c’est ce qui est impossible. La sensation n’est pas sensation d’elle-même ; mais il y a un autre objet en dehors de la sensation, et dont l’existence est nécessairement antérieure à la sensation. Car le moteur est, de sa nature, antérieur à l’objet en mouvement ; et admît-on même que dans le cas dont il s’agit l’existence des deux termes est corrélative, notre proposition n’en subsiste pas moins.

Voici une difficulté que se posent la plupart de ces philosophes, les uns de bonne foi, les autres seulement pour le plaisir de disputer. Ils demandent qui jugera de la santé, et en général, quel est celui qui jugera bien dans toutes les circonstances. Or, se faire une pareille question, c’est se demander si on est en ce moment endormi ou éveillé.

-René Descartes, Méditations métaphysiques (1641) : Première méditation (très proche du livre IV du Discours de la méthode)

Toutefois j’ai ici à considérer que je suis homme, et par conséquent que j’ai coutume de dormir et de me représenter en mes songes les mêmes choses, ou quelquefois de moins vraisemblables, que ces insensés, lorsqu’ils veillent. Combien de fois m’est-il arrivé de songer, la nuit, que j’étais en ce lieu, que j’étais habillé, que j’étais auprès du feu, quoique je fusse tout nu dedans mon lit ? Il me semble bien à présent que ce n’est point avec des yeux endormis que je regarde ce papier ; que cette tête que le remue n’est point assoupie ; que c’est avec dessein et de propos délibéré que j’étends cette main, et que je la sens : ce qui arrive dans le sommeil ne semble point si clair ni si distinct que tout ceci. Mais, en y pensant soigneusement, je me ressouviens d’avoir été souvent trompé, lorsque je dormais, par de semblables illusions. Et m’arrêtant sur cette pensée, je vois si manifestement qu’il n’y a point d’indices concluants, ni de marques assez certaines par où l’on puisse distinguer nettement la veille d’avec le sommeil, que j’en suis tout étonné ; et mon étonnement est tel, qu’il est presque capable de me persuader que je dors.

Supposons donc maintenant que nous sommes endormis, et que toutes ces particularités-ci, à savoir, que nous ouvrons les yeux, que nous remuons la tête, que nous étendons les mains, et choses semblables, ne sont que de fausses illusions ; et pensons que peut-être nos mains, ni tout notre corps, ne sont pas tels que nous les voyons. Toutefois il faut au moins avouer que les choses qui nous sont représentées dans le sommeil, sont comme des tableaux et des peintures, qui ne peuvent être formées qu’à la ressemblance de quelque chose de réel et de véritable ; et qu’ainsi, pour le moins, ces choses générales, à savoir, des yeux, une tête, des mains, et tout le reste du corps, ne sont pas choses imaginaires, mais vraies et existantes. Car de vrai les peintres, lors même qu’ils s’étudient avec le plus d’artifice à représenter des sirènes et des satyres par des formes bizarres et extraordinaires, ne leur peuvent pas toutefois attribuer des formes et des natures entièrement nouvelles, mais font seulement un certain mélange et composition des membres de divers animaux ; ou bien, si peut-être leur imagination est assez extravagante pour inventer quelque chose de si nouveau, que jamais nous n’ayons rien vu de semblable, et qu’ainsi leur ouvrage nous représente une chose purement feinte et absolument fausse, certes à tout le moins les couleurs dont ils le composent doivent-elles être véritables. Et par la même raison, encore que ces choses générales, à savoir, des yeux, une tête, des mains, et autres semblables, pussent être imaginaires, il faut toutefois avouer qu’il y a des choses encore plus simples et plus universelles, qui sont vraies et existantes ; du mélange desquelles, ni plus ni moins que de celui de quelques véritables couleurs, toutes ces images des choses qui résident en notre pensée, soit vraies et réelles, soit feintes et fantastiques, sont formées.

-Extrait du livre Qu’est-ce que tout cela veut dire ? de Thomas Nagel

« Si vous y réfléchissez bien, la seule chose dont vous puissiez être sûrs, c’est ce qui est à l’intérieur de votre propre esprit. Quelque soit votre croyance-qu’elle porte sur le soleil, la lune et les étoiles, la maison et le quartier dans lequel vous vivez, l’histoire, la science, les autres personnes, et même l’existence de votre propre corps-elle repose sur vos expériences et vos pensées, vos sentiments et vos impressions des sens. Vous n’avez rien d’autre sur quoi compter directement(…). D’habitude, vous ne doutez pas de l’existence du sol sous vos pieds ou de l’arbre derrière la fenêtre ou de l’existence de vos propres dents. (…)Mais comment savez-vous qu’elles existent réellement ?(…)Y aurait-il une différence quelconque pour vous si toutes ces choses n’existaient que dans votre esprit-si tout ce que vous avez pris pour un monde réel extérieur n’était qu’un rêve gigantesque ou une hallucination qui ne se dissiperait jamais ? (…)Si toute votre expérience était un rêve, auquel rien ne serait extérieur, tout ce qui pourrait vous servir à vous prouver qu’il existe un monde extérieur ne serez qu’une partie de ce rêve. Si vous tapez sur la table ou si vous vous pincez, vous entendez le bruit du coup et vous sentirez le pincement, mais cela sera encore quelque chose qui se passe dans votre esprit, comme tout le reste. (…)Comment savez-vous que vous n’êtes pas venus à l’existence il y a quelques minutes à peine, avec l’ensemble de vos souvenirs présents ?(…)  

Cet argument sceptique développé par Nagel est d’ailleurs une faille du film car pour savoir si l’on se trouve ou non dans le rêve de quelqu’un d’autre, il faut se munir d’un totem, un objet dont on connaît seul les caractéristiques, le poids ressenti… Notez bien qu’il serait absurde de penser faire la différence entre son propre rêve et la réalité avec ce stratagème (si je connais un objet, mon subconscient connaît le même objet et je n’aurai aucun mal à me le représenter en rêve)…

Citation de Morpheus, personnage de la trilogie Matrix: « As-tu déjà fait ces rêves Néo, qui semblent plus vrai que la réalité ? Si tu étais incapable de sortir d’un de ces rêves ? Comment ferais tu la différence entre le monde du rêve et le monde réel ? »

“All that we see or seem
Is but a dream within a dream.”

– Edgar Allan Poe, A Dream Within A Dream (1849)

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Prépa :Colles 1 Histoire

Les premières colles en culture générale (philosophie Mme Renard) débute la semaine prochaine. Elles porteront sur la notion histoire du programme de Terminale. Le choix de cette notion est directement lié au premier chapitre de votre programme d’ECE « l »héritage de la pensée gréco-romaine ». Le but est de réfléchir sur la notion d’héritage indissociable de l’histoire et de la façon dont on la fait, l’écrit, transmet.

Vous trouverez ici des liens pour réviser cette notion.

http://www.maphilo.net/histoire-cours.html

http://www.assistancescolaire.com/eleve/TES/philosophie/reviser-le-cours/l-histoire-t_i302

https://www.kartable.fr/terminale-es/philosophie/specifique/chapitres-35/l-histoire-1/cours/l-histoire/11689

https://www.youtube.com/watch?v=jeVg8FEQDIc

Les questions types qui peuvent tomber tournent autour de ces thèmes :

-L’histoire peut-elle être objective ?

-L’histoire a-t-elle un sens ?

-L’histoire arrive-t-elle à l’homme ou par lui ?

Je copie ici un résumé tiré du premier lien maphilo.net que je trouve efficace :

Ce qu’il faut retenir

 

–         Objectivité et subjectivité : L’histoire, si elle peut prétendre être une science, ne doit pas pour autant se confondre avec les sciences naturelles. Son objet, ce sont des évènements porteurs de sens qui requièrent la subjectivité de l’historien, son empathie, sa compréhension, et non une explication subsumant les faits sous des lois générales.

 

–         La naissance de l’histoire : L’histoire comme discipline naît en Grèce avec Hérodote et Thucydide. Le premier, déroule une « enquête » sur les guerres Médiques, insiste à la fois sur le souci de conservation des évènements passés et sur la recherche de leurs causes. Le second parfait les méthodes de la discipline historique, se souciant d’intelligibilité, d’exactitude et fait preuve d’une distance critique à l’égard de ses sources.

 

–         L’histoire comme salut : À la différence de l’histoire grecque qui est cyclique, l’histoire du peuple juif dans l’Ancien Testament est une histoire linéaire, située entre un commencement (la Création) et une fin (le Jugement dernier). Dans le christianisme, l’histoire « terrestre » trouve son intelligibilité dans l’Histoire sainte. La providence qui guide le monde offre à l’homme des perspectives de salut.

 

–         Les Lumières et le progrès : Les philosophes des Lumières appuient l’idée que c’est l’homme qui fait l’histoire. Celle-ci devient histoire universelle, développement progressif et indéfini de ce qui constitue l’humanité de l’homme, la Raison. Kant nuance ce « dogmatisme » en prenant en compte les antagonismes entre les hommes, les guerres, etc. Mais, dit-il, l’ « insociable sociabilité » de l’homme est ce qui le pousse à manifester ses talents individuels, à développer ses dispositions naturelles, à réaliser l’humanité (ce qui ne sera réellement le cas que dans le gouvernement civil).

 

–         Hegel et Marx : Pour Hegel, l’Histoire est le procès dialectique (opérant par dépassement progressif des contradictions) par lequel advient l’Esprit. La Raison est le sujet de l’histoire, les hommes et les peuples n’en sont que des instruments ou moyens. En ce sens, les passions humaines et leurs conséquences parfois funèbres (conflits, sacrifices) servent le dessein de l’histoire universelle ; elles sont des ruses de la raison. Marx critique cet idéalisme. L’histoire est histoire des forces productives, des conditions matérielles de vie, des rapports sociaux. Elle n’est rien d’autre que l’activité de l’homme quand bien même son cours serait déterminé, la révolution ne pouvant que provoquer une accélération des processus historiques.

 

–         La vie contre l’histoire : Pour Nietzsche, l’histoire n’a de valeur qu’en tant qu’elle sert la vie, celle-ci étant la force anhistorique de création. L’excès d’histoire est dangereux. Il menace de rendre la vie impuissante, soit que celle-ci se sente écrasée (histoire monumentale), soit qu’elle soit mortifiée (histoire antiquaire), soit encore qu’elle masque ses illusions en jugeant de celles du passé (histoire critique). Pour Spengler, l’histoire n’est rien d’autre que la répétition nécessaire d’un cycle de vie, un cycle biologique, qui va d’un barbarisme à un autre barbarisme en passant par l’art et la science ; l’idée de progrès est congédiée.

 

–         Un autre regard sur l’histoire : Pour Benjamin, on ne saurait considérer les violences que connaît l’époque moderne comme des ruses de la raison. L’état d’exception est devenu la règle. De plus, l’histoire ne doit pas s’intéresser qu’à ce qui a triomphé car les échecs sont eux aussi porteurs de sens, en quoi il faut faire une histoire des vaincus. Heidegger, quant à lui, considère l’être historique de l’homme, son historialité. L’histoire n’est pas une collection d’évènements révolus ; elle habite le présent en dévoilant à l’homme ses possibilités, en lui permettant de se projeter vers l’avenir. L’École des annales enfin, prône une conception de l’histoire comme étude non du temps court, des évènements politiques, mais du temps long, des organisations sociales et économiques, des mentalités, etc.

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La mémoire : supprimer ou modifier les souvenirs … Conséquences sur l’identité et la morale

J’ai un souvenir traumatisant, une expérience douloureuse, je ferais tout pour effacer de ma mémoire ces images qui me reviennent sans cesse.

Quelle frustration parfois de ne pas avoir vécu tel événement ! On se met souvent à rêver, imaginer vivre telle émotion, moment marquant.

Et si on pouvait avoir un accès à nos souvenirs de sorte qu’on puisse les modifier ou les supprimer, en créer de nouveaux ?

Non, nous ne sommes pas dans un film de science-fiction tel Total Recall, mais bien au cœur des recherches qui sont actuellement menées par le MIT, Massachussets Institute of Techonology.

Je vous invite à lire ces fascinantes découvertes :

http://www.slate.fr/life/75936/faux-souvenirs-implantation-memoire-souris

http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/de-faux-souvenirs-implantes-dans-la-memoire-de-souris_1269347.html

Quelles sont les conséquences imaginables d’une telle expérience sur l’homme ?

Pourquoi ,comme l’indique l’article, est-ce éthiquement inconcevable ?

Au premier abord, les possibilités que nous offrent ces avancées sont fabuleuses. On pourrait éviter les syndromes des soldats revenant de la guerre, des victimes de crimes… On pourrait s’implanter des souvenirs agréables et ainsi améliorer considérablement notre vie.

Cependant, souhaitons-nous réellement cela ? Si vous aviez la possibilité en absorbant une pilule de ne vous souvenir de rien de pénible ? Mieux, de vous remémorer vos dernières vacances à Taîti ? Faut-il préférer le bonheur à la vérité ? L’illusion d’une vie sans malheur est-elle préférable à l’authenticité d’une vie lucide ?

Notre identité nécessite deux facultés : la conscience et la mémoire. Si notre mémoire est altérée, supprimée, modifié, est-ce encore nous ? On pourrait douter de tout ce que nous vivons, est-ce bien réel ? ai-je bien vécu cela ?

La deuxième conséquence majeure toucherait le domaine de la morale et de la justice.

En effet, quelle crédibilité donner à un témoignage si la mémoire est modifiable ? Peut-on être responsable, coupable d’un fait dont on ne se souvient pas ? L’amnésie pourrait constituer un formidable subterfuge pour éviter la condamnation…

Cet article nous amène à réfléchir sur notre rapport à la science et la technique. Faut-il tout réaliser sous prétexte que c’est possible ? Quelles limites au « progrès » ?

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Textes sur la conscience

Je ne sais si je dois vous entretenir des premières méditations que j’y ai faites car elles sont si métaphysiques et si peu communes qu’elles ne seront peut-être pas au goût de tout le monde. Et toutefois, afin qu’on puisse juger si les fondements que j’ai pris sont assez fermes, je me trouve en quelque façon contraint d’en parler. J’avais dès longtemps * remarqué que, pour les moeurs * , il est besoin quelquefois de suivre des opinions qu’on sait être fort incertaines, tout de même que si * elles étaient indubitables * , ainsi qu’il a été dit ci-dessus * ; mais, pource qu’alors * je désirais vaquer * seulement à la recherche de la vérité, je pensai qu’il fallait que je fisse tout le contraire, et que je rejetasse, comme absolument faux tout ce en quoi je pourrais imaginer le moindre doute, afin de voir s’il ne resterait point, après cela, quelque chose en ma créance * , qui fût entièrement indubitable. Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu’il n’y avait aucune chose qui fût telle qu’ils nous la font imaginer. Et pource qu’il y a des hommes qui se méprennent en raisonnant, même touchant les plus simples matières de géométrie, et y font des paralogismes * , jugeant que j’étais sujet à faillir * , autant qu’aucun autre, je rejetai comme fausses toutes les raisons que j’avais prises auparavant pour démonstrations. Et enfin, considérant que toutes les mêmes pensées, que nous avons étant éveillés, nous peuvent aussi venir quand nous dormons, sans qu’il y en ait aucune, pour lors, qui soit vraie, je me résolus de feindre que * toutes les choses qui m’étaient jamais entrées en l’esprit, n’étaient non plus vraies que les illusions de mes songes. Mais, aussitôt après, je pris garde que, pendant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallait nécessairement que moi, qui le pensais, fusse quelque chose. Et remarquant que cette vérité : je pense, donc je suis était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques * n’étaient pas capables de l’ébranler * , je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la philosophie que je cherchais.

DESCARTES
Discours de la Méthode, IVe partie

Je vous conseille ce site.

La grandeur de l’homme est grande en ce qu’il se connait misérable. Un arbre ne se connait pas misérable. C’est donc être misérable que de se connaitre misérable; mais c’est être grand que de connaître qu’on est misérable.

Penser fait la grandeur de l’homme.

Je puis bien concevoir un homme sans mains, sans pieds, sans tête (car ce n’est que l’expérience qui nous apprend que la tête est plus nécessaire que les pieds). Mais je ne puis concevoir un homme sans pensée : ce serait une pierre ou une brute.

L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, puisqu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien.
Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C’est de là qu’il faut nous relever et non de l’espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale.
Roseau pensant. — Ce n’est point de l’espace que je dois chercher ma dignité, mais c’est du règlement de ma pensée. Je n’aurai pas davantage en possédant des terres : par l’espace, l’univers me comprend et m’engloutit comme un point ; par la pensée, je le comprends.

Pascal, Pensées (1670), fragments 347 et 348 dans l’édition L. Brunschvicg

Supposé que je perde entièrement le souvenir de quelques parties de ma vie, sans qu’il soit possible de le rappeler, de sorte que je n’en aurai peut-être jamais aucune connaissance ; ne suis-je pourtant pas la même personne qui a fait ces actions, qui a eu ces pensées, desquelles j’ai eu une fois en moi-même le sentiment positif, quoique je les aie oubliées présentement ? Je réponds à cela que nous devons prendre garde à quoi ce mot « je » est appliqué dans cette occasion. Il est visible que dans ce cas, il ne désigne pas autre choses que l’homme. Et comme on présume que le même homme est la même personne, on suppose aisément qu’ici le mot « je » signifie aussi la même personne. Mais s’il est possible à un même homme d’avoir en différents temps une conscience distincte et incommunicable, il est hors de doute que le même homme doit constituer différentes personnes en différents temps, et il paraît par des déclarations solennelles que c’est là le sentiment du genre humain. Car les lois humaines ne punissent pas l’homme fou pour les actions que fait l’homme de sens rassis, ni l’homme de sens rassis pour ce qu’a fait l’homme fou, par où elles en font deux personnes. Ce qu’on peut expliquer en quelque sorte par une façon de parler dont on se sert communément en français, quand on dit, un tel n’est plus le même [one is not himself], ou il est hors de lui-même [beside himself]. Expressions qui donnent à entendre en quelque manière que ceux qui s’en servent présentement, ou du moins qui s’en sont servis au commencement, ont cru que le soi était changé, que ce soi, dis-je, qui constitue la même personne, n’était plus dans le même homme.

John LOCKE, Essai sur l’entendement humain, Livre 2, ch. 27, § 20. (1690)

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Le sujet : Que puis-je savoir de moi ?

La conscience est la faculté qui permet à l’homme de prendre du recul sur ses pensées, actes, sentiments. Qui mieux que moi peut me connaître ? En ce sens, elle révèle sa dignité, en fait un être à part(Cf. texte de Kant). Elle apparaît même comme la seule vérité absolue, indubitable, immédiate (Cf. texte de Descartes).

Mais si elle se révèle comme la condition d’une connaissance de soi puisque sans ce recul, je ne pourrais me prendre comme objet, m’observer, me juger, elle manifeste aussi des limites, des failles qui peuvent sembler inévitables.

La connaissance de soi est :

-d’une part, partiale ( le moi juge est le moi jugé : donc il y a un parti-pris, un manque d’objectivité ), mon statut de sujet, centre de mes représentations ne m’empêche-t-il pas d’être objectif ? ne suis-je pas fatalement égocentré ?

-d’autre part, partielle (le fait que je ressente fierté, honte, remords, regrets manifestent que je ne me connaissais pas tout à fait sinon pourquoi être surpris…?).

Dès lors, un problème se pose puisque la conscience semble à la fois être la condition et la ruine de la connaissance de soi, son moyen privilégié et  son obstacle infranchissable. (C’est une problématique :) )

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Pour s’entraîner : Sujets de dissertation sur le Sujet

Voici une liste de sujets afin de vous entraîner, à faire des analyses, problématiques(…) sur la notion de Sujet (conscience/inconscient) :

Peut-on ne pas être soi-même ?

Changer est-ce devenir quelqu’un d’autre ?

Peut-on se mentir à soi-même ?

La conscience de soi est -elle une connaissance de soi ?

Suis-ce ce que j’ai conscience d’être ?

La conscience est-elle source d’illusions ?

Peut-on avoir la conscience tranquille ?

L’hypothèse de l’inconscient exclut-elle la liberté ?

En quel sens peut-on reprocher à quelqu’un d’être inconscient ?

Peut-il y avoir une science de l’inconscient?

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