Quand les mots de Tristan ont ouvert les fenêtres de la salle A09… (Colette)

Cette année en A09, on s’est installé en cercle pendant les récrés. On a tiré les chaises, on s’est assis sur les tables, parfois par terre et on a instauré trois règles :

  1. chacun.e écoute celui ou celle qui parle sans l’interrompre.
  2. chacun.e attend que la parole lui soit donnée pour parler en toute liberté.
  3. on ne commente et ne conseille que si on nous le demande explicitement.

Et au fil des récrés, j’ai pu écouter Nolan, Maxence, Rayan et Tyanis presque tous les jours. Ymeho, Lucile, Valentine, Thylia parfois. Et tant d’autres. Ancien.nes élèves ou non, régulièrement ou occasionnellement. Avec tristesse ou exaltation. On a beaucoup parlé de la mort des animaux domestiques, quelque fois d’amour, souvent des parents, et la plupart du temps des copains, des copines, des profs et des projets de vacances. C’était comme si on appuyait sur « pause ». C’était comme si on faisait vraiment connaissance. Et c’était vraiment bien.

Si cette année, j’ai ouvert grand les bras de mes récrés c’est que l’année dernière Tristan a changé ma vie de prof !

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Tristan a les yeux verts, d’un vert incroyable. Les cheveux longs jusqu’aux épaules et une dent de requin autour du cou. Il parle beaucoup, dès la rentrée. Il parle tout le temps. Très vite, je comprends à quel point cet enfant est singulier. Parce qu’il a des yeux verts, d’un vert incroyable mais surtout parce qu’il occupe l’espace à grands coups d’interjections, de commentaires déplacés, de prises de paroles intempestives. Très vite, il commence à rester dans la salle A09 aux récréations. Pour parler musique, sport, pour parler de sa petite sœur, de sa mère. Et puis de son père aussi. Et la colère déforme alors son visage.

Tristan s’invite ainsi toute l’année en A09, pendant les récréations, pour parler. De tout et de rien. Et je n’ose pas lui fermer la porte au nez. Pour des tas de raisons. Des raisons qui m’échappent et d’autres auxquelles je tiens. Très vite d’autres le suivent. Bérénice. Alyssa. Alice. Quelques minutes. Toute la récré. Mais c’est le brouhaha. Les élèves parlent tous.tes en même temps. Ils et elles ont tous.tes un immense besoin d’exister. Leurs mots m’envahissent, me débordent, me submergent. Et je ne sais pas alors si j’ai envie, moi, de les écouter. Mais je vois combien prendre le temps de les écouter fait briller leur regard et rallume leurs sourires parfois défaits.

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Un an plus tard, et après une deux jours de formation à la communication interpersonnelle, je décide que OUI, j’ai envie de les écouter. Et je décide qu’il est essentiel qu’ils et elles apprennent elleux aussi à écouter, qu’ils et elles transmettent ensuite ce bonheur particulier que procure l’écoute attentive et entière de l’autre. Une écoute qui repose l’esprit et tisse silencieusement des liens entre nous. Des liens légers qui tintent joyeusement dans notre journée si rythmée.

J’instaure alors officiellement des « cercles de parole en récré ».

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Tristan reviendra deux ou trois fois en septembre. Puis il ne viendra plus.

Mais je n’oublie pas ce que je lui dois. Je n’oublie pas tout ce qu’il m’a appris. Je n’oublie pas que c’est en bousculant mes codes qu’il a poussé les murs de ma salle de classe pour qu’elle devienne, le temps des récrés, jardin, oasis, foyer.

Le Jour où…. j’ai compris que l’enseignement était un métier de passion ! (Aude)

On commence nos chroniques d’été, même si notre été d’enseignant est déjà bien entamé.

Elles commenceront toutes par le jour où… ou l’élève qui…Nous aurons, on l’espère quelques professeurs invités à participer à cette chronique. L’idée est de déposer ici l’évènement, le projet, la classe, l’élève qui nous a fait changé notre façon d’enseigner ou qui a initié de nouvelles initiatives pédagogiques, bref qui a été pour nous un moment important voire déterminant dans notre vie pédagogique !

En ce qui me concerne, je pense que le jour le plus important pour moi, ce fut la clôture du projet Frankton dont je vous ai déjà parlé ici . c’était en 2013, j’avais une Troisième Bahamas dans le Nord Gironde dont j’étais professeur principal

On avait vécu un échange avec des anglais, des sorties, des commémorations, des week-end ensemble. Et, le dernier jour de l’année, je ne sais pas pourquoi je pleure, je pleure, je pleure, sans discontinuer, je suis une fontaine au point que je me demande comment je vais bien pouvoir accueillir mes élèves, je vis cette fin d’année comme une rupture, oui oui comme lorsque on doit dire au revoir à un ami qu’on ne verra plus jamais,…je m’agace parce que je ne sais pas mettre des mots sur ce que je ressens, sur mon corps qui s’exprime.

Heureusement ce jour-là mes élèves ont été bien meilleurs que moi pour me dire au revoir, ils avaient écrit un petit mot déposé dans une boîte que je devais lire à haute voix et deviner qui l’avait rédigé, bien sur il y avait un goûter et quelques cadeaux. On a pris des photos, on s’est embrassé, serré dans les bras, promis qu’on s’enverrait des nouvelles et la rupture a été plus douce.

Ce fut probablement l’un des plus beaux jours de ma carrière parce que ce jour là, j’ai d’abord compris qu’il n’y avait aucun problème à aimer ses élèves, à le leur dire, si si je leur dis que je les aime à mes élèves, je pleure avec eux, même quand on traverse des choses difficiles. Je suis désormais consciente que je m’attache à eux, qu’émotionnellement, je finirais, sans doute rincer à chaque fin d ‘année à les avoir un peu trop aimés mais je n’ai plus cette frustration que j’ai eu à ce moment là.

J’ai aussi compris que ce qui avait rendu le lien si fort était probablement mon implication dans ce projet et le fait que les élèves ne sont pas fous, ils en sont parfaitement conscients. Je me rends compte, avec les années à quel point mon métier, monter des projets pédagogiques, m’impliquer dans la vie de l’établissement fait partie de ma vie, m’anime, m’envahit parfois. A chaque fin d ‘année je me dis, à la rentrée, tu fais tes cours et c’est tout, tu es trop fatiguée, tu ne fais pas assez, tu n’as pas assez pris de temps pour toi, pour ta famille … Mais en fait, je pense que je ne sais pas faire autrement, j’ai besoin de faire ce métier avec passion, de croire à fond aux projets que je mène et les élèves me le rendent bien et j’ose même croire que lorsque certains de mes collègues sont lassés, je continue d’être enthousiaste face à ce métier, je me dis que quoi qu’il arrive, il y aura mes idées, mon envie de les réaliser et des élèves qui se laisseront embarquer.

Aude et Colette veillent… épisode 8

Le blog a été en veille en cette fin d’année scolaire. Happées par les échéances, par la fatigue nous nous sommes un peu mises en veille en terme d’écriture, mais néanmoins, la vie a continué et nous avons continué de nourrir nos activités pédagogiques.

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Les Pépites d’Aude

Dans un premier temps, je souhaitais parler du ciné-club thématique du cinéma de Saint Jean de Luz. Chaque année le cinéma le sélect propose 8 séances suivies d’une analyse filmique animée par Jean Vila professeur à l’UPPA de Bayonne en histoire du cinéma et de l’audiovisuel du mois de septembre ou mois de juin sur un thème : cette année le cinéma espagnol et l’an dernier le cinéma japonais.

Ainsi, je nourris ma culture cinématographique depuis deux ans et me surprend à être désormais sensible aux sons, aux lumières et aux citations présentes dans les films.

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Ensuite pour nourrir mes inspirations et mes envies d’une éducation à l’émerveillement, j’ai beaucoup écouter ce podcast :

François-Régis Gaudry nous invite à déguster à toutes les échelles, j’ai une grande affection pour les cinq premières minutes où chaque invité doit deviner les ingrédients de la dégustation proposée qui agitent mes papilles à distance.

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Enfin en Mai, nous avons pu profiter de l’organisation du festival « Lettres et le vivant » par la librairie le Cinquième art de Saint Jean de Luz riche en rencontre littéraire. Dans le même temps au lycée, nous avons eu la chance d’inviter Adrien Ballanger qui a écrit et auto-édité les guides Haize randonnées, je vous invite à aller découvrir toutes ces ressources qui personnellement poursuivent leur cheminement dans ma petite tête et font émerger des envies de club nature, randonnées, dégustations, ballades gourmandes, podcast,…. Bref il faut encore que tout ça murissent avant d’aboutir à des propositions pédagogiques mais je me suis régaler au sens propre et figuré !

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Les Pépites de Colette

En Mai, la médiathèque d’Artigues-près-Bordeaux a accueilli le jeu Dédikatz de la librairie Krazy Kat avec Laureline Mattiussi, qui a réalisé l’affiche 2023 du festival Faites des bulles. L’artiste dessinait en direct des illustrations en lien avec une œuvre littéraire ou cinématographique et le public, organisé en équipes, devait devinait le titre de l’œuvre en question. Il fallait être la première équipe a proposé la bonne réponse pour pouvoir espérer gagner le dessin en question dédicacé par l’autrice ! Au fil des 12 dessins, nous avons pu découvrir la palette incroyable de l’artiste ! Et c’est avec une représentation d’une scène de Mon voisin Totoro que nous sommes reparti.e.s !

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Et deux lectures prometteuses sur ma table de chevet :

La première est une bible facétieuse, riche, lumineuse et incroyablement efficace pour comprendre les rouages de la littérature jeunesse ! Le dernier titre de Clémentine Beauvais est un pu régal !

et le deuxième livre de Marie Petit : Elevés en plein air, comment l’école dehors reconnecte l’enfant à la nature nourrira notre prochain projet d’établissement : « Notre école faisons la dehors » !

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