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Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

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Ecriture Vs Parole

Dans Les Origines de la pensée grecque, Jean Pierre Vernant retrace l’émergence de la philosophie (et de la démocratie) en Grèce antique. Il souligne l’importance de la révolution mentale opérée par le courant des « physiciens » (Thalès, Anaximandre) lorsque, pour la première fois, ils décidèrent de rompre avec le discours religieux officiel sur les origines du monde pour coucher par écrit (et sans aucun travail poétique de style) leurs réflexions cosmologiques.

L’écriture permet en effet plus de recul critique : proposer par écrit une théorie à la lecture d’un tiers, c’est d’emblée accepter qu’il pourra prendre tout son temps pour analyser l’enchaînement des idées et les tester. Ce comportement d’examen scrupuleux était alors radicalement nouveau, il tranchait avec la fascination qu’opérait la parole religieuse. En effet, jusque-là, le discours sur les origines du monde était le privilège (et le monopole) des personnalités sacerdotales : les Rois-magiciens, « maîtres de vérité ».

Une fois l’an, lors d’une grande commémoration rituelle, le roi-magicien racontait les origines du monde en même temps qu’il mimait le combat contre les Forces du Chaos ; la scénographie, à grand renfort d’encens, de torches et d’effets sonores, plongeait l’assistance dans la stupeur et ne contribuait pas peu à entretenir dans l’esprit du peuple le prestige symbolique du roi identifié au dieu vainqueur du Chaos. Le mythe que le roi (ou grand prêtre) proférait était reçu comme la vérité, inspirait la soumission et n’était pas discutable. A cette époque, la valeur antinomique de la vérité n’était pas l’erreur, mais l’oubli – un oubli sacrilège puisque le mythe était au fondement de toutes les hiérarchies instituées et de toutes les traditions d’usage.

Le courant des physiciens, en proposant par écrit des explications du commencement du monde qui refusaient de faire intervenir des agents divins, non seulement opérait une désacralisation du monde, mais permettait l’émergence d’un type de pensée extérieure à la religion et ouverte au débat d’idées.

C’est dans ce contexte démocratique que la parole joue le rôle essentiel qu’on lui connaît dans la Cité antique. Il aurait été certes impensable alors qu’un orateur lût son discours, tant l’écriture paraît figer un enseignement destiné au contraire à se vivifier par l’oralité spontanée. Telle est la conviction que manifeste Socrate dans le Phèdre : « Une fois écrit, tout discours roule de tous côtés ; il tombe aussi bien chez ceux qui le comprennent que chez ceux pour lesquels il est sans intérêt ; il ne sait point à qui il faut parler, ni avec qui il est bon de se taire. S’il se voit méprisé ou injustement injurié, il a toujours besoin du secours de son père, car il n’est pas par lui-même capable de se défendre ni de se secourir.» Dans l’Antiquité, privée des moyens techniques modernes qui lui donnent un autre statut, la parole remplit parfaitement ses trois fonctions qui sont d’exprimer, d’informer et de convaincre. Dans chacune d’elles, certes à des degrés divers, l’émetteur est bel et bien présent, mais c’est le récepteur qui la conditionne comme le montre le jeu subtil de cache-cache qui peut s’installer dans les fonctions du langage. 

écriture : L’invention de l’écriture 3000 av JC, est un tournant dans l’histoire de l’humanité. Les premiers signes écrits furent probablement destinés à consigner le montant des premières grandes récoltes : l’invention de l’écriture a permis d’organiser le développement économique et la gestion de l’agriculture mécanisée à une échelle inédite; c’est ainsi que l’on sort de l’économie de subsistance caractéristique des temps historiques cas avant l’écriture. la découverte de l’écriture en effet, enclenche l’histoire sa rationalité mais aussi ses violences : on voit immédiatement l’ambivalence des progrès constitutifs à cette invention. car instrument de différenciation : catégories socio économiques distinctes, castes, voire asservissement.

précieuse pour transmettre les idées indispensable pour fixer les savoirs et la mémoire sociale, l’écriture peut se retourner contre ce qui semble être sa vocation : faciliter et enrichir la communication et l’expression de la pensée.

Dans Phèdre, Platon présente ainsi ce don d’un dieu aux hommes comme un cadeau empoisonné : s’ils se reposent sur l’écriture les hommes épargneront puis finiront par négliger leur mémoire 274d. En outre et plus radicalement la connaissance indirecte, figée, extérieure, que fournit l’écrit n’est qu’un simulacre de savoir et non la science elle-même.

// Rousseau : froideur, sécheresse, inauthenticité de ce mode de communication. écriture alphabétique : rationalisation des langues triomphe de l’abstraction par rapport à l’immédiateté (transparence et intimité) des relations de proximité de l’homme à l’état sauvage : «  l’écriture qui semble devoir fixer la langue est précisément ce qui l’altère. »

Essai sur l’origine des langues chap 5

instrument particulièrement efficace et approprié au négoce et au commerce international l’écriture convient aux peuples policés, mais elle n’est qu’un succédané ou encore une parodie de la parole vive 

Chacun voit bien que l’écriture conformément aux intuitions de Rousseau ne fait souvent qu’accentuer les écarts que le langage tend à creuser entre les individus. cette fonction stigmatisante et discriminante de l’écriture et du langage a largement été dénoncée par de nombreux philosophes et sociologues contemporains. l’écriture n’est pas qu’un simple instrument (nocif voire improductif) : elle est au contraire douée d’une certaine autonomie d’une puissance vire d’une violence inattendue.

chez les grecs, tout dépendait du peuple et le peuple dépendait de la parole » Fenelon Lettre à l’Académie IV, : procédé de conservation est la mémoire personnelle et sociale civilisation de l’on-dit, de la rumeur, de la formule du secret de la magie l’autorité appartient aux anciens aux vieillards

à la civilisation orale correspond une culture diffuse une littérature anonyme où les oeuvres non signées appartiennent à tout le monde et à personne c’est l’âge patriarcal de l’épopée = ce qu’on exprime par la parole de la légende ce que l’on raconte de la ballade du conte du dicton inconscient collectif

la parole avait donné la domination de l’espace immédiat liée à la présence concrète l’écriture permet de séparer la voix de la présence réelle fixer le monde le stabiliser, signer son nom et s’affirmer au delà des limites de son incarnation l’écrit consolide la parole

la premiere écriture est magique sacrée hiéroglyphes signes divins réservés aux prêtres et aux rois droit écrit sur tables de la loi dieux communiquent aux hommes

la parole des dieux devient écriture sainte

on passe des orateurs aux lettrés

naissance de caste de privilégiés, langue écrite langue parlée ex : arabe littéraire et parle

invention de l’imprimerie  : pour tous l’esprit critique est né , l’humanisme de la Renaissance se fonde sur l’édition des classiques grecs et latins comme la réforme est rendue possible par la diffusion de la Bible imprimée.

le rôle de la parole ne cesse de diminuer tandis que l’imprimé multiplie sans fin la possibilité de communication entre les hommes

moyens d’enregistrement et diffusion

La parole Gusdorf :

p 113 Nous assistons à une restitution globale de la réalité comme si la civilisation contemporaine civilisation de masse qui rend les hommes absents les uns aux autres s’efforçaient de compenser cette absence en multipliant les possibilités de présence artificielle.

p114 futur :)

une telle transformation ne bouleversera pas seulement la pédagogie. Elle modifiera la structure meme de la pensée car la pensée n’existe pas en dehors de ses instruments et comme préalablement à son incarnation. De même que la parole n’est pas un moyen d’expression mais un élément constitutif de la réalité humaine de meme les techniques d’enregistrement mécanique feront très probablement sentir leur influence au niveau même de l’affirmation personnelle  dans un sens qui demeure pour nous imprévisible. La civilisation du livre cèdera la place à une civilisation de l’image et du son.

 la valeur de l’Ecriture

L’écriture apparaît tantôt comme une fixation trop rigide du langage oral, dont il faut se méfier si l’on veut conserver au langage sa fluidité et son pouvoir indéfiniment créateur ; tantôt comme un moyen précieux de donner au langage une stabilité qu’il ne possède pas naturellement, d’en étende la portée dans l’espace, d’en fixer dans le temps la durée. — On trouve chez Platon le mythe suivant. Le démon Theuth vantait les mérites de l’écriture, qu’il venait d’inventer, au roi égyptien Thamous : “L’enseignement de l’é­criture, ô roi, dit Theuth, accroîtra la science et la mémoire des égyptiens ; car j’ai trouvé là le remède de l’oubli et de l’igno­rance”. Mais Thamous contestait cela : “(…) elle produira l’oubli dans les âmes en leur faisant négliger la mémoire: confiants dans l’écriture, c’est du dehors, par des caractères étrangers, et non plus du dedans, du fond d’eux-mêmes qu’ils chercheront à susciter leurs souvenirs; tu as trouvé le moyen, non pas de retenir, mais de renouveler le souvenir, et ce que tu vas procurer à tes disciples c’est la présomption qu’ils ont la science, non la science elle-même; car quand ils auront beaucoup lu sans ap­prendre, ils se croiront très savants et ils ne seront le plus souvent que des ignorants de commerce incommode parce qu’ils se croiront savants sans l’être.” (Platon)

Julia Kristeva relève une autre fonction de l’écriture : celle qui permet à un sujet d’habiter un réel en le parcourant “horizontalement”, en le traversant infiniment, sans pouvoir cependant le dépasser vers un au-delà transcendant. L’écriture dure, se transmet, agit en l’absence des sujets parlants. Elle utilise pour s’y marquer l’espace, en lançant un défi au temps : si la parole se déroule dans la temporalité, le langage avec l’écriture passe à travers le temps en se jouant comme une configuration spatiale. Elle désigne ainsi un type de fonctionnement où le sujet, tout en se différenciant de ce qui l’entoure, et dans la mesure où il marque cet envi­ronnement, ne s’en extrait pas, ne se fabrique pas une dimension idéale (la voix, le souffle) pour y organiser la communication, mais la pratique dans la matière et l’espace même de cette réalité dont il fait partie, tout en s’en différenciant parce qu’il la marque. Acte de différenciation et de participation par rapport au réel, l’écriture est un langage sans au-delà, sans transcendance.”

Publié par Didier Moulinier à 17:26 pastedGraphic.png

Libellés : * Cours, Langage

 

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Corrigé du DS Grimaldi prépa

Corrigé :

Par la parole, l’absence fait intrusion dans la présence, l’intemporel dans le temporel, l’irréel dans le réel, le surnaturel dans la nature. 

Le désir et le temps Grimaldi

Analyse du sujet :

-La parole est d’emblée considérée comme un outil (« par la parole ») => interroger ce statut, la parole n’est-elle qu’un outil ? ex : elle permet la communication, l’échange, l’expression de la pensée… mais ne constitue-t-elle pas ce qu’elle permet ?

-la parole = toutes les paroles se valent-elles ? y a-t-il différents types de paroles ? ont-elles toutes cette capacité ?

il ne faudra pas se contenter d’analyser la parole de manière abstraite mais bien de faire une typologie de la parole (tri, distinctions…)

-faire intrusion = violence, s’immiscer, violence des mots, parole arme, désordre, bouleverse ordre établi, créé quelque chose de nouveau, perturber, vol, prendre la parole, couper la parole sans qu’on vous l’ai donnée, L’intrusion est le fait pour une personne ou un objet de pénétrer, dans un espace (physique, logique ou relationnel) défini où sa présence n’est pas souhaitée. La notion d’intrusion suppose qu’il existe une volonté de réserver l’accès à des personnes, des ressources physiques ou logiques, à certaines personnes désignées.

L’intrusion est constatée dès le franchissement de la limite entre l’extérieur et l’intérieur même si cette limite n’est que symbolique. (dans un second moment, on réfléchira à cet aspect intrusif de la parole, et du pouvoir que cela confère de la garder, de ne pas la donner…)

une séries de couples de notions antonymes : absence/présence, intemporel/temporel; irréel/réel; surnaturel/nature 

la parole semble permettre l’impossible technique, physique, moral, logique…

elle fusionne les contraires, unifie, réconcilie. ce qui se dégage de cette citation c’est le pouvoir unificateur de la parole.

Il s’agissait donc pour vous d’étudier ce pouvoir unificateur, de l’interroger, d’en voir les limites, les dangers. 

En outre, il peut être utile de remarquer que la citation ne fait pas mention d’autrui (On parle bien à quelqu’un), ni qui parle. Cet aspect peut faire l’objet d’un approfondissement dans une troisième partie. 

Enfin, y a-t-il seulement de la présence, du réel, du temporel ou de la nature sans parole..?  cad sans quelqu’un pour les nommer, en parler, les faire exister. 

problématique possible : La parole facteur d’unité ou de division ? rassemble-t-elle ou sépare-t-elle ? (condition ou ruine de l’unité…)

Exemple de plan possible :

I Le pouvoir unificateur et ses déclinaisons :

le sujet ne mentionne pas les fonctions pourtant apparemment premières de la parole qui sont d’exprimer, d’informer, de convaincre, peut être est-ce parce qu’elles sont contenues dans les différentes antinomies :

-absence/présence : 

signe, symbole permettent de se passer de la chose, ne plus être dans la situation immédiate, abstraction, concept maitrise , intelligence = absence, transcender cf Saussure , propre du langage humain

La parole permet d’exprimer des besoins, pensées, sentiments, souffrances, aspirations, du locuteur. exprimer = faire passer de l’intérieur (ruminement) à l’exterieur, faire savoir, faire exister aux autres

La parole peut aussi constituer une observation plus ou moins subjective des faits, ou encore être la formulation d’une demande. Elle permet de témoigner d’un changement de conception du monde. Dans ce sens, une vérité est la tentative de description de la réalité à l’aide de la parole.

L’origine tout intellectuelle de la parole est d’ailleurs attestée par son étymologie : le mot parole est une contraction du mot parabole (qui en grec ancien siginifie littéralement : lancer à côté). Celle-ci désigne en effet le détour que l’on choisit pour signifier plus éloquemment, l’analogie que l’on établit entre le récit et un discours qui se laisse ainsi mieux discerner que par un enseignement direct.

-intemporel/temporel

souvenirs passés, projections futurs, espoirs craintes angoisses

Mon enfance par exemple, qui n’est plus, se trouve dans le temps passé, qui n’est plus; mais quand je l’évoque et la raconte je regarde son image dans le temps présent car elle est encore dans ma mémoire. Les Confessions Saint Augustin

=> répéter, rapporter les parole de qqn 

-irréel/réel

La parole permet de communiquer l’abstraction et permet sa mémorisation. Une abstraction peut permettre la création de concepts nouveaux distincts de la réalité.

La puissance de la parole dans l’échange va plus loin : il est des mots qui ont du sens pour nous et qui évoquent des associations d’idées, mais qui n’ont pas d’autre réalité que linguistique ! Avec beaucoup d’ironie, Roman Jakobson dans son Essai de linguistique générale (1969), précise cette fonction essentielle de la parole qui n’est pas seulement de permettre d’échanger des sensations, mais de créer un univers de sens et d’inventer du sens à partager :

« Nous n’avons jamais bu d’ambroisie, ni de nectar et n’avons qu’une expérience linguistique (*) des mots « ambroisie », « nectar » et « dieux »- nom des êtres mythiques qui en usaient – néanmoins nous comprenons ces mots et savons dans quel contexte chacun d’eux peut s’employer. » La parole n’est donc pas seulement le moyen de communiquer des idées, elle permet aussi d’inventer des idées et (quand on y trouve un intérêt) de les imposer.

-surnaturel/nature

créer , nommer, faire exister,

Dans la Bible, le mot grec de logos, ?????, désigne la parole de Dieu en même temps qu’il en vient également à désigner Dieu lui-même, comme l’illustre l’évangile de Jean dans lequel il est écrit:

Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu. (Jean 1:1)4

Cet évangile est composé plusieurs siècles après les œuvres d’Anaxagore qui évoquaient le Noûs (????), l’esprit, et qui prétendaient que l’univers (perçu) est le fruit de l’intelligence, ainsi que de celles de Platon selon lesquelles Socrate voyait (dit-on) un univers créé par soi-même, c’est-à-dire par l’esprit.

Aussi, le christianisme considère le logos divin comme le commencent dont tout procède, c’est-à-dire comme l’origine de toute chose. Ainsi, la Genèse, récit de la Création, est le lieu d’un déploiement de la parole de Dieu d’où va naître la réalité. Par exemple, au verset 3, chapitre 1, la parole de Dieu apparaît, en effet, comme l’origine de la lumière quand il est écrit Dieu dit : Que la lumière soit et la lumière et il semble alors que l’extériorisation de la volonté de Dieu soit l’acte de fondation du réel.

Enfin, selon la tradition chrétienne héritée de l’évangile de Jean, le Verbe s’est doté d’une matérialité en se faisant chair, c’est-à-dire en s’incarnant dans la personne de Jésus-Christ, fils de Dieu.La parole revèle aussi des écritures bibliques. Ces écritures constituent la Parole écrite.

Les paroles considérées comme ayant une force, une puissance spécifique, notamment en parlant des mots d’une formule] Paroles cabalistiques, incantatoires, magiques. Dans le cérémonial de noces bédouin le plus ancien, le fiancé revêt la fiancée d’un manteau spécial appelé «aba» en prononçant ces paroles rituelles: «Que nul autre que moi ne te couvre jamais!» (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p.238).L’évêque fait une pause pour donner plus de solennité aux paroles consécratoires: «Conférez donc, ô père tout-puissant, nous vous en supplions, la dignité sacerdotale à votre serviteur (…)» (Billy, Introïbo, 1939, p.145).V. charmeur ex. 1.

? Paroles sacramentelles. Paroles rituelles essentielles prononcées lors de l’administration d’un sacrement. Monsieur le curé, lui dit-elle, donnez-moi l’absolution. Le Père Longuemare murmura gravement les paroles sacramentelles (A. France, Dieux ont soif, 1912, p.274).

pouvoir unificateur de la parole divine / la parole humaine divise

À cet égard, dans sa recherche sur le langage, Walter Benjamin reprend la distinction entre l’aspect communicatif et l’aspect symbolique du langage. Il dégage trois étapes dans la genèse du langage : une parole divine et créatrice — « le langage y est créateur de réalité » —, puis une parole nominatrice (dans le récit biblique) — c’est la fonction poétique du langage —, et enfin la perte du pouvoir magique de dénomination par l’épisode de la tour de Babel — le langage se « dégrade en pouvoir de communication».

l’homme transcende le monde en le nommant, si le langage ne crée pas le monde à proprement parler, au moins le place-t-il à la mesure de l’homme et lui permet-il de le comprendre et de se l’approprier. Notre monde est un espace de paroles où la dénomination situe chaque individu et chaque chose dans un environnement cohérent. La parole permet à l’homme d’exprimer (ce qui est invisible, irréel pour les autres), informer (pour ceux qui étaient absents) et convaincre cad changer le réel, modifier.

Transition :

pouvoir : problème pour ceux qui n’ont pas ou ont perdu l’usage de la parole

 

II Limites et dangers de ce pouvoir 

-La parole risque de diviser quand elle n’est pas partagée :

dans ce contexte démocratique, la parole joue le rôle essentiel qu’on lui connaît dans la Cité antique. Il aurait été certes impensable alors qu’un orateur lût son discours, tant l’écriture paraît figer un enseignement destiné au contraire à se vivifier par l’oralité spontanée. Telle est la conviction que manifeste Socrate dans le Phèdre : « Une fois écrit, tout discours roule de tous côtés ; il tombe aussi bien chez ceux qui le comprennent que chez ceux pour lesquels il est sans intérêt ; il ne sait point à qui il faut parler, ni avec qui il est bon de se taire. S’il se voit méprisé ou injustement injurié, il a toujours besoin du secours de son père, car il n’est pas par lui-même capable de se défendre ni de se secourir.» Dans l’Antiquité, privée des moyens techniques modernes qui lui donnent un autre statut, la parole remplit parfaitement ses trois fonctions qui sont d’exprimer, d’informer et de convaincre. Dans chacune d’elles, certes à des degrés divers, l’émetteur est bel et bien présent, mais c’est le récepteur qui la conditionne comme le montre le jeu subtil de cache-cache qui peut s’installer dans les fonctions du langage.

mais cette libération de la parole dialogue n’a été possible que par une multiplication des paroles permise par l’écrit. 

Dans Les Origines de la pensée grecque, Jean Pierre Vernant retrace l’émergence de la philosophie (et de la démocratie) en Grèce antique. Il souligne l’importance de la révolution mentale opérée par le courant des « physiciens » (Thalès, Anaximandre) lorsque, pour la première fois, ils décidèrent de rompre avec le discours religieux officiel sur les origines du monde pour coucher par écrit (et sans aucun travail poétique de style) leurs réflexions cosmologiques.

L’écriture permet en effet plus de recul critique : proposer par écrit une théorie à la lecture d’un tiers, c’est d’emblée accepter qu’il pourra prendre tout son temps pour analyser l’enchaînement des idées et les tester. Ce comportement d’examen scrupuleux était alors radicalement nouveau, il tranchait avec la fascination qu’opérait la parole religieuse. En effet, jusque-là, le discours sur les origines du monde était le privilège (et le monopole) des personnalités sacerdotales : les Rois-magiciens, « maîtres de vérité ».

Une fois l’an, lors d’une grande commémoration rituelle, le roi-magicien racontait les origines du monde en même temps qu’il mimait le combat contre les Forces du Chaos ; la scénographie, à grand renfort d’encens, de torches et d’effets sonores, plongeait l’assistance dans la stupeur et ne contribuait pas peu à entretenir dans l’esprit du peuple le prestige symbolique du roi identifié au dieu vainqueur du Chaos. Le mythe que le roi (ou grand prêtre) proférait était reçu comme la vérité, inspirait la soumission et n’était pas discutable. A cette époque, la valeur antinomique de la vérité n’était pas l’erreur, mais l’oubli – un oubli sacrilège puisque le mythe était au fondement de toutes les hiérarchies instituées et de toutes les traditions d’usage.

Le courant des physiciens, en proposant par écrit des explications du commencement du monde qui refusaient de faire intervenir des agents divins, non seulement opérait une désacralisation du monde, mais permettait l’émergence d’un type de pensée extérieure à la religion et ouverte au débat d’idées.

  • mais son partage risque sa dévalorisation :
  • la prolifération des paroles est aussi responsable de leur dévalorisation. Le mot parole peut être péjoratif quand il désigne le vain bavardage, le verbiage prétentieux, la logorrhée, voire le boniment du charlatan.

Thomas Hobbes, déterminant les quatre usages de la parole, mettait déjà en garde contre quatre abus qui manifestent tous la perversion du rapport sincère et bienveillant que la parole authentique doit ménager entre les hommes.

Le langage, ici, est défini par ses usages – formuler sa pensée, l’exprimer, instruire, agir sur autrui – et par ses abus – parler sans savoir ce que l’on dit « à cause de l’inconstance des mots », abuser des métaphores, se tromper sur ses propres volontés et nuire à autrui. Le bien-dire est la seule garantie dont nous disposions pour parvenir au vrai. « La vérité consiste en l’exacte mise en ordre des noms dans nos affirmations. » Il faut donc, selon Hobbes, procéder à la manière des géomètres et partir de définitions claires, afin de ne pas s’empêtrer dans la glue des mots vagues et des expressions insensées telles que les philosophes (avant tout les scolastiques) en ont abusé. Redonner un vrai sens aux mots de la tribu, tâche du souverain, revêt donc une portée éminemment politique : c’est éviter les fausses querelles qui conduisent aux guerres civiles, en créant les conditions de possibilité du lien social.

Au-delà de cet emploi malhonnête des mots, et de la manipulation que Machiavel jugeait nécessaire à l’homme d’Etat, il faut pointer le danger de fossilisation que court la parole lorsqu’elle ne correspond plus qu’à un discours formaté, et c’est peut-être ce que l’on constate le plus aujourd’hui dans une civilisation où le mot communication est à tous les carrefours de la vie publique. Merleau-Ponty écrit : « Nous vivons dans un monde où la parole est instituée. Pour toutes ces paroles banales, nous possédons en nous-mêmes des significations déjà formées. Elles ne suscitent en nous que des pensées secondes; celles-ci à leur tour se traduisent en d’autres paroles qui n’exigent de nous aucun véritable effort d’expression et ne demanderont à nos auditeurs aucun effort de compréhension. Ainsi le langage et la compréhension du langage paraissent aller de soi. Le monde linguistique et intersubjectif ne nous étonne plus, nous ne le distinguons plus du monde même, et c’est à l’intérieur d’un monde déjà parlé et parlant que nous réfléchissons. Nous perdons conscience de ce qu’il y a de contingent dans l’expression et dans la communication, soit chez l’enfant qui apprend à parler, soit chez l’écrivain qui dit et pense pour la première fois quelque chose, enfin chez tous ceux qui transforment en parole un certain silence. Il est pourtant bien clair que la parole constituée, telle qu’elle joue dans la vie quotidienne, suppose accompli le pas décisif de l’expression. Notre vue sur l’homme restera superficielle tant que nous ne remonterons pas à cette origine, tant que nous ne retrouverons pas, sous le bruit des paroles, le silence primordial, tant que nous ne décrirons pas le geste qui rompt ce silence. La parole est un geste et sa signification un monde.» (Phénoménologie de la perception).

-risque de « geler les paroles », de prendre pour des évidences, du bien connu nos habitudes, nos « tics » de langage, bref de croire aux mots que nous inventons (réel/irréel)

-créer des évènements, des problèmes en créant les mots et en en parlant : les journalistes pour Bourdieu

P. Bourdieu fustige d’ailleurs la mauvaise foi des journalistes qui prétendent ne parler de ces événements que pour les dénoncer alors qu’ils les renforcent en les représentant.

L’usage social de la parole a déterminé des langages particuliers nommés idiomes, langues, dialectes, parlers. L’utilisation d’une langue ou le choix des mots n’est pas neutre parce que le langage structure la pensée. Les querelles linguistiques ou atteintes aux langues peuvent être des tentatives de sujétion de l’Homme en imposant des paradigmes, comme dans le cas de la langue ou des expressions d’un groupe dominant.

=> ôter la parole, liberté de parole , porter la parole

-allégorie de la caverne Platon , parole apparences sophistes, Protagoras 

La philosophie nominaliste  dénonçait dans les idées générales, dans les abstractions, un artifice de la pensée; elle n’y voyait rien de plus consistant que les mots les désignant, un bruit de paroles, «flatus vocis» (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p.134):

« Ainsi m’est-il apparu une nouvelle vérité et c’est qu’il est vain et illusoire de s’occuper de l’avenir. Mais que la seule opération valable est d’exprimer le monde présent. Et qu’exprimer c’est bâtir avec le disparate présent le visage un qui le domine, c’est créer le silence avec les pierres. Toute autre prétention n’est que vent de paroles… » Saint-Exup., Citad., 1944, p.5

-même en science danger des idoles du forum dénoncés par Bacon 

-paroles en l’air, promesse , donner sa parole d’honneur Dégager, rendre, reprendre, retirer sa parole. Revenir sur un engagement. 

ne pas avoir, être de parole , homme de parole

III remise en cause du sujet 

-la question de l’écriture : les paroles s’envolent, les écrits restent

-la parole créatrice : Bien sûr le conformisme de l’habitude guette cet ensemble codifié pour y imposer une routine rassurante. Parfois il faut revivifier cette « parole gelée » et accepter le vertige soudain d’un univers méconnaissable. Ainsi en est-il de la parole poétique, qui doit s’écarter du langage utilitaire pour éveiller une compréhension inédite de l’univers par de nouvelles associations, de nouveaux sons, voire de nouveaux mots.

-la question d’autrui 

pour être authentique et unificatrice,  la parole doit se préoccuper du récepteur 

Il ne suffit pas pourtant de cultiver pour soi seul une parole affranchie des formule routinières. Celle-ci doit pour s’accomplir trouver son destinataire : « la parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l’écoute », dit Montaigne (Essais, III, XIII). Faute de cela, elle est en effet lettre morte. La parabole du Semeur désigne bien les responsables de cette stérilité : le manque de constance, la faiblesse, les tentations faciles et distrayantes offertes par le monde. Dans l’artisanat de la parole, ce travail rhétorique dont Platon a dénoncé la perversité chez les Sophistes, l’effort est autant à placer du côté de l’émetteur que du côté du récepteur. La bonne Parole n’est pas forcément celle qui a fourbi toutes les recettes et les astuces du langage, si elle ne doit plus aboutir qu’à s’imposer chez des auditeurs passifs, sans avoir à lever, comme le grain de la parabole. Car si la parole exprime la spécificité humaine, ce n’est pas tant par sa capacité à nommer les choses que par les relations qu’elle autorise à l’intérieur d’un groupe, scellant la vocation sociale de l’animal humain : « Si l’homme est infiniment plus sociable que les abeilles et tous les autres animaux qui vivent en troupe, c’est évidemment, comme je l’ai dit souvent, que la nature ne fait rien en vain. Or, elle accorde la parole à l’homme exclusivement. La voix peut bien exprimer la joie et la douleur ; aussi ne manque-t-elle pas aux autres animaux, parce que leur organisation va jusqu’à ressentir ces deux affections et à se les communiquer. Mais la parole est faite pour exprimer le bien et le mal, et, par suite aussi, le juste et l’injuste ; et l’homme a ceci de spécial, parmi tous les animaux, que seul il conçoit le bien et le mal, le juste et l’injuste, et tous les sentiments de même ordre, qui en s’associant constituent précisément la famille et l’État.» (Aristote, La Politique, Livre I § 10).

Considérant la parole en tant que rencontre, nous touchons alors à la question de la compréhension entre deux sujets qui établissent une communication, ce « rapport entre deux sujets dans un champ de compréhension ». Dans son texte, Georges Gusdorf souligne l’expression « champ de compréhension », parce qu’il fait appel à un troisième terme crucial, « l’autre ». Ainsi, l’homme appelle le monde à l’existence par sa parole : l’homme s’exprime, énonce, parle son point de vue, dit un discours, « mais un troisième terme s’avère nécessaire, c’est l’autre, auquel ma parole s’adresse. Je parle parce que je ne suis pas seul ». Le moi n’existe que dans la réciprocité avec l’autre : « La parole est ici comme le trait d’union »

Également, dans Problèmes de linguistique générale, Émile Benveniste rappelle que la conscience de soi, qui s’exprime par le « je », se pose avant tout en se distinguant de ce qui est autre qu’elle ; prendre conscience du « soi » présuppose le langage et la distinction je/tu. La subjectivité est traitée dans son rapport au langage comme « capacité du locuteur à se poser comme sujet » :

La conscience de soi n’est possible que si elle s’éprouve par contraste. Je n’emploie je qu’en m’adressant à quelqu’un, qui sera dans mon allocution tu. C’est cette condition de dialogue qui est constitutive de la personne, car elle implique en réciprocité que je deviens tu dans l’allocution de celui qui à son tour se désigne par je. Le langage n’est possible que parce que chaque locuteur se pose comme sujet, en renvoyant à lui-même je dans son discours.  cf Kant

L’effort du créateur demande en réciprocité un effort analogue de dépouillement : la communication implique un partage de difficulté. Or le lecteur moyen, l’auditeur ou le spectateur banal croient pouvoir obtenir sans y mettre le prix ce qui a coûté tant de peine au créateur : il préférera toujours l’écrivain ou l’artiste à la mode qui parle et qui sent comme tout le monde.

Pour Socrate, l’exercice de la parole consiste à faire découvrir à l’interlocuteur, par une série de questions, les vérités qu’il porte en lui. Ainsi dans le Gorgias, qui porte sur le thème de la rhétorique, Socrate réfute l’idée du pouvoir d’une parole qui peut faire croire n’importe quoi : « Il faut distinguer faire croire et faire savoir. Le savoir suppose l’acquisition raisonnée d’une connaissance ». De même, dans les récents travaux de Françoise Waquet sur l’oralité et la transmission du savoir, nous trouvons maintes descriptions et analyses des différentes formes de l’oralité qui se sont imposées pour la transmission du savoir (conversation, symposium, séminaire…), par « la supériorité de la parole sur l’écrit, et partant, de l’instruction orale sur celle donnée par les livres » dont parlait encore Socrate dans le Phèdre de Platon.

Et Socrate de montrer les effets féconds de la parole pour la communication du savoir, tout particulièrement lorsqu’elle se donne dans l’entretien entre le maître et l’élève, en fait, dans le dialogue.

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cadeaux ! De nombreux ouvrages en audio

https://archive.org/details/AuFilDesLectures

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Benvéniste, Piaget, Lacan, Levi-Strauss

http://apprendre-la-philosophie.blogspot.fr/2010/03/explication-dun-texte-de-emile.html

http://www.item.ens.fr/index.php?id=64244

http://dcalin.fr/textes/parole_enfant.html

 

un sujet proche de ce que j’ai donné en colle :

http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/langage/methode/sujets/dissert/langhum/langhum.htm

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Rousseau : origine du langage/langue

Essai sur l’origine des langues 

Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes 

http://m.antoniotti.free.fr/rousseau.htm

https://www.youtube.com/watch?v=O5yta_rafr4

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« Il pleure, que dit-il ? » Le langage universel du nourrisson.

http://www.lepoint.fr/societe/les-dix-mots-du-nouveau-ne-06-10-2016-2074068_23.php

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Génèse de la parole chez l’humain et l’enfant

CF Podcastscience

vidéo de Leroy-Gourhan

L’évolution du larynx et son fonctionnement

une superbe émission sur les origines du langage

enfant = celui qui ne parle pas !!!!!

acquisition du langage par l’enfant

Existence chez l’enfant d’activités langagières et cognitives qui précèdent la production d’un langage articulé et conceptuel (au sens cartésien du terme). ces activités pré linguistiques (combinaison de symboles ou faculté d’attribuer à un autre une croyance que l’on ne possède pas) opposent le jeune enfant au singe supérieur incapable de ce type de performances décisives pour le développement ultérieur de l’intelligence. 

L’apparition de la faculté linguistique est un phénomène long, lié à l’évolution de la boite crânienne et aux techniques de fabrication d’outils de l’Homo habilis (plus de 2 millions d’années) jusqu’à l’Homo sapiens beaucoup plus récent : « outils pour la main et langage pour la face sont deux pôles d’un même dispositif » affirme Leroi-Gourhan.

L’humanité se caractérise par la fonction symbolique car le pouvoir de substitution à des réalités matérielles ou spirituelles. grâce à elle, l’individu parvient à se soustraire à des situations pour profiter d’êtres situations et accéder aussi au plan de la représentation et, de ce fait, il intègre l’apport culturel du groupe social auquel il appartient.

le premier stade de l’activité intellectuelle de l’enfant est concentré dans le geste qui lui permet d’imiter les objets de sa perception d’abord en leur présence, ensuite en leur absence. énorme progrès car l’imitation  retardée engrange la puissance d’évocation de l’individu; l’ouverture à la voie représentative s’est donc manifestée ainsi que la reproduction du monde objectif par les moyens propres. Le progrès décisif provient de ce que ces activités ne sont pas de simples doublets des choses; l’enfant, en jouant sur leur absence puis leur présnece,, opère sur le monde, un peu comme les suites ordonnées de rites de la pensée primitive ont pour fonction de modifier certains rapports de la réalité.

De surcroit, à la capacité d’évocation de l’image, s’ajoute peu à peu l’apport linguistique. l’enfant s’aperçoit que le mot n’est ni le simple signal, ni l’indice des choses, qu’il n’a quasiment aucune correspondance analogique avec l’objet. Parvenue à ce stade, la pensée s’est complètement intériorisée, elle est devenue totalement symbolique. ce qui auparavant appartenait au domaine individuel de l’image s’est généralisé, la pensée conceptuelle a pu naitre. Il y a donc à la fois différence et continuité entre l’image et le concept, par l’osmose des expériences individuelles et des expériences collectives transmises par les mots.

Enfin l’apparition de la pensée catégorielle résulte de l’aptitude de l’esprit qui a mûri à reconnaitre et établir des liens entre les choses. C’est par elle que je suis capable de porter des jugements. le jugement est l’acte de l’entendement par lequel celui-ci met en relation une réalité singulière avec un concept. Par exemple, quand je dis : « Socrate est laid. « , je juge en attribuant le concept de laideur à l’individu unique Socrate. Or c’est par les catégories que notre pensée juge. Si, par exemple, j’affirme : « le baromètre baisse, il va pleuvoir. », j’établis une relation de cause à effet, ainsi mon jugement renvoie à la catégorie de la causalité. or ce que montrent Wallon et Piaget, c’est que les catégories ont une histoire. Ainsi, la catégorie d’abstraction dont on repère une étape essentielle dans la catégorie primitive de l’occulte : ‘Matrice des catégories par l’intermédiaire desquelles l’homme s’est efforcé, pour agir sur l’univers de le penser, de le connaitre, en le tenant pour distinct des simples situations qui appartiennent à l’expérience immédiate et brute. »(De l’acte à la pensée. Wallon 1ère partie chapitre 3

On constate donc que les catégories ne sont jamais définitivement scellées. La pensée catégorielle est en devenir. C’est l’humanité qui a forgé les catégories pour penser le monde, et l’enfant répète ce geste.

correspondance humanité enfant génèse, généalogie.

Cependant il ala chance de réaliser en quelques années ce que l’humanité a mis des millénaires à accomplir, il en est l’héritier.

La pensée enfantine est loin de détenir la spontanéité que généralement on lui octroie. les expériences de l’enfant sont imprégnées de la mémoire collective. C’est pourquoi nos connaissances immédiates ne le sont que prétendument. … opinions (penser par soi-même p 45

Marqué par la pauvreté de ses moyens d’action, sinon de ses besoins, le nourrisson serait bien incapable de survivre sans l’aide d’autrui. l’enfant est alors un flux d’énergie ouvert sur l’autre et la satisfaction de ses besoins élémentaires dépende l’entourage en particulier de sa mère. Ses premiers réactions ont comme effet, d’abord non voulu, de mettre en branle les personnes de son entourage qui donnent sens à ses manifestations les plus physiologiques. Une sociabilité initiale greffe ainsi l’enfant sur autrui, à travers ce que Wallon appelle le langage de l’émotion : c’est par ce dernier que l’enfant se structure et il est bien antérieur aux interactions entre l’individu et les objets matériels dans lesquelles Piaget voit quant à lui un des ressorts principaux de la construction des structures logiques de l’intelligence. Par ce langage de l’émotion, l’enfant fait l’expérience à la fois d’une participation à l’autre dans laquelle ne peut être précisée aucune délimitation nette entre les individus qui communiquent et d’un dédoublement qui entraine peu à peu la formation simultanée d’un pole subjectif et du pole constitué par l’autre.

Par là s’exerce une double causalité, à la fois biologique et relationnelle : le corps et les attitudes tonico-posturales de l’enfant vont prendre forme à partir du dialogue corporel avec autrui, et constituer l’étoffe, le matériau dont seront faites les émotions. Le langage de l’émotion repose sur la maturation biologique du diencéphale (thalamus) et des corps striés, mais si l’enfant éprouve les mouvements de la douleur de la joie du chagrin de l’impatience de la gaieté.. et se plait à jouer de leurs variations ce n’st pas sous l’effet d’une maturation simple qui conduirait une fonction potentielle à son actualisation : la fonction ne prend sens qu’à partir de la situation qui l’appelle, le dialogue avec autrui. Aussi l’enfant sauvage Victor de l’Aveyron dont les capacités physiques sont pourtant particulièrement exercées, commence par ne pas communiquer avec les humains qui l’ont recueilli et n’accède à l’échange affectif que très lentement après avoir partagé avec eux des expériences qui peu à peu l’humanisent.

A la double causalité, à la fois biologique et sociale, qui semble présider aux processus de subjectivation, va cependant s’en ajouter une nouvelle, à partir du moment où le sujet prend conscience de soi comme différent des autres, une causalité proprement psychologique : l’individu finit par intérioriser les personnes avec lesquelles, avant même qu’il puisse se saisir comme distinct, il a été lié, et le dialogue moi-autrui peut désormais se dérouler pour une grande part à l’intérieur du sujet lui-même. Le problème du devenir-sujet de l’individu se formule alors d’une manière plus subtile : si le sujet prend une part de plus en plus active à sa propre différenciation et deveniez dans une certaine mesure cause de soi-même il le fait aussi en fonction des influences qu’il a subies de la part de « cet étranger essentiel qu’est l’autre » et qu’il a intégré comme pole constitutif de lui-meme.

L’homme en tant qu »homme ne prend figure que dans une collectivité humaine et ses besoins avant meme d’être naturels sont historiques : l’enfant n’accède meme à la marche debout et à la parole que parce qu’il est elevé par des humains eux memes marchant et parlant ; livré à ses seules potentialités naturelles, jamais ces fonctions ne prendraient sens pour lui, comme en témoignent les enfants sauvages. L’homme est génétiquement social pad que sa genèse reçoit son impulsion de la société, trouve hors de soi à l’extérieur de son propre corps organique « cette somme de forces de production de capitaux de formes de relations sociales que chaque individu et chaque génération trouvent comme des données existantes. » Marx L’idéologie allemande.

et qui sont le point de départ historique de son développement l’essence haine sociale dans s réalité toujours concrète.

Tout langage est d’abord reçu. le petit enfant le reçoit tout fait du milieu, comme il en reçoit sa nourriture. … Les mots sont là avant même l’émergence de la conscience personnelle, à laquelle ils proposent ou imposent des sens cristallisés.

avant la parole il y a toujours eu une langue, avant le langage sujet un langage-objet, réalité en soi, constituée par les autres et dont les autres imposent à l’enfant l’apprentissage. Le langage est ici un monde, ou plutôt il est le monde qu’il faut découvrir mot à mot en passant du babillage « griffonnage articulé » Delacroix à la parole articulée. …il parle de lui à la troisième personne avant d’accéder à la première.

avant de prendre la parole, il faut l’avoir reçue toute faite. …si je parle c’est moins pour moi que pour l’autre; je parle pour m’adresser à l’autre, pour me faire comprendre. La parole est ici comme le trait d’union.

le langage enfantin demeure largement égocentrique : babillage et jeux de mots passe temps articulatoires, se situent en dehors de l’utilité pratique et de la réalité sociale.

seulement après 7 ans, que communication l’emporte sur l’expression.

quand plus besoin de s’exprimer plus envie de vivre

p71 Rien n’est tout à fait vrai pour nous aussi longtemps que nous ne pouvons pas l’annoncer au monde comme à nous-m^mes. la publicité fait partie de nos joies et de nos peines, l’amoureux ne peut s’empêcher de clamer son bonheur, le converti sa foi, le malheureux sa désespérance. l’expression est la prise de conscience : la parole atteste de la distance prise: passer de la passivité du rongement intérieur à l’activité créatrice, l’expression a valeur d’exorcisme

développement du langage chez l’enfant :

http://www.ac-grenoble.fr/savoie/mat/group_de/theorie/dev_lang.htm

 

Piaget : sur le développement mental de l’enfant lié au langage

http://books.openedition.org/pup/754?lang=fr

http://www.fondationjeanpiaget.ch/fjp/site/textes/VE/JP_26_repres_monde_intro.pdf

l’enfant n’était pas considéré dans l’Antiquité comme un sujet de droit, au Moyen Age comme une petit homme (en miniature) et sa parole n’était pas prise en compte.

https://www.cairn.info/revue-recherches-familiales-2012-1-page-131.htm

 

les rapports humains s’appuient sur le langage, la parole ne fait pas que faciliter les rapports elle les constitue. 

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A- Langage-Langue-parole

La parole comme seuil de l’univers humain, privilège de l’humanité ?

A -Langage langue parole , différence homme/animal 

langage 

Au sens large, le langage signifie tout système ou ensemble de signes permettant l’expression ou la communciation. En ce sens, on parle couramment de langage informatique ou langage animal. mais le langage au sens propre est une institution universelle et spécifique de l’humanité qui comporte des caractéristiques propres. 

Le langage est un système de signes permettant la communication entre deux individus dotés d’un code commun. On parle de langue naturelle pour qualifier l’institution proprement humaine, dans laquelle les signes sont constitués de sons et d’écrits.

on opposera le langage en tant que faculté ou aptitude à constituer un système de signes à la langue qui est l’instrument de la communication propre à une communauté humaine. une langue est un ensemble institué et stable de symboles verbaux ou écrits propres à un corps social et susceptible d’être bien ou mal traduit dans une autre langue. Enfin, le langage ne doit pas non plus être confondu avec la parole, qui est l’acte individuel par lequel s’exerce la fonction linguistique. 

En réalité nous avons trois notions bien distinctes et trois séries de problèmes.

1° D’abord la langue : la langue représente un système particulier de mots, un ensemble fixé dans une société donnée (ainsi parle-t-on de la langue française ou anglaise), un pur produit de l’histoire sociale et culturelle. La langue est définie généralement comme un système de signes.

Le langage lui-même se définit comme la principale faculté humaine de communication. Elle est universelle, tous les hommes la possèdent malgré les handicaps ou les pathologies possibles. Le problème est celui de la finalité de cette fonction : d’abord expression de soi, ou d’abord communication avec l’autre ?

La parole désigne l’acte individuel par lequel s’exerce concrètement la fonction du langage, et ceci grâce aux organes de la phonation (glotte, pharynx, etc.). Comme tout acte, cet acte de parole suppose un sujet. Et comme tout acte encore, il peut changer la réalité : la parole n’est pas sans conséquences ! La parole représente un pouvoir, un moyen pour le sujet d’influencer autrui et de transformer le monde ; c’est aussi et avant tout l’occasion de signifier son propre désir. C’est pourquoi il sera intéressant de poser le problème d’une éthique de la parole. Peut-on tout dire ? Quand faut-il prendre la parole ? Qu’est-ce qu’une parole vraie, authentique ? Qu’est-ce que bien se parler les uns les autres ?

Particularité du langage humain : apanage de l’humanité ?

parole comme seuil de l’univers humain ?

 

il ne manque à l’animal que la parole ??

le langage est la condition nécessaire et suffisante pour l’entrée dans la patrie humaine.

les bêtes ne parlent que dans les contes de fées. l’homme est l’animal qui parle. elle recouvre et absorbe les définitions traditionnelles par le rire ou la sociabilité.

L’espèce humaine est la seule à disposer d’un moyen d’expression et de communication dont la complexité et l’efficacité témoignent  d’une capacité elle aussi unique, celle de penser et de raisonner. les mots sont des signes qui renvoient à la fois à la réalité et aux images mentales que nous formons des choses, des êtres, des actions, des valeurs, auxquelles nous croyons. le sens d’un mot, c’est ce que nous voulons dire lorsque nous l’employons et ce qu’il évoque chez celui auquel il s’adresse. le sens n’est donc pas dans les choses elles memes. c’est notre façon d’organiser nos représentations et d’attribuer à chacune une place dans un système qui fait correspondre des signes aux choses et qui nous conduit à conférer à chacun de ce signes un sens particulier. avec l’apparition du langage, « lUnivers entier d’un seul coup, est devenu significatif. » levi Strauss

Il y a une grande différence entre le langage humain et le langage animal. Le cri des animaux exprime un affect, une émotion, parfois il annonce un comportement ou répond à celui d’un congénère. Il y a donc communication. 

Le langage humain est caractérisé par plusieurs faits essentiels :

1-il préexiste tout d’abord aux sujet qui l’utilisent, comme une institution dotée de normes et de règles transmissibles (langue)

2-il peut produire une infinité potentielle d’énoncés différents à partir d’un nombre limité de signes combinés (le langage est dit « génératif »). ;

3- dialogue d’idées :le dialogue est le propre de l’homme. Seul l’homme est capable de communiquer avec autrui, mais aussi d’échanger avec lui de questionner et de répondre. C’est que pour l’homme, le langage n’est pas essentiellement comme chez les animaux un outil de communication un simple relais d’action bien qu’il puisse l’être parfois notamment lorsqu’il sert à donner des ordres mais ce par quoi il accède à la pensée et à la représentation. le dialogue est échange d’idées.

  • 3- enfin il permet un usage métalinguistique c a d qu’il est possible d’en parler.
  • On distingue, outre ces traits essentiels, plusieurs fonctions possibles du langage : fonction de communication; d’expression des sentiments, fonction appellative (quand l’orateur cherche à provoquer chez l’auditeurs certaines émotions sans les partager lui-meme); fonction d’élaboration de la pensée: fonction esthétique; fonction métalinguistique; enfin fonction pratique ( les mots ne servant alors qu’à maintenir une sensation de contact entre les interlocuteurs comme dans le bavardage) mais pouvant également agir sur le monde et les autres.
  • Il semble que la fonction première soit bien celle de communiquer.

1 les animaux communiquent à l’aide de signaux ayant une signification précise et limitée (sinon unique). Tandis que le langage humain, intentionnel, conscient, souvent imprévisible ouvre des usages et des significations multiples, voire infinis.

traits spécifiques du langage humain : double articulation communes à toutes les langues naturelles et donc propre au langage humain : une première articulations découpe la langue en unités de sons en même temps que de sens (les mots ou syllabes dits monômes); une seconde la décompose en quelques dizaines d’unités phoniques élémentaires en nombre fini et fixe (les phonèmes). Ainsi avec une quarantaine de sons (et de signes correspondants), chaque langue peut effectuer des combinaisons (monèmes puis mots puis phrases) en nombre quasiment illimité tout en épargnant la mémoire. ce fonctionnement très particulier rend possible la constitution d’énoncés en nombre potentiellement infini à partir d’un nombre d’éléments extrêmement réduit, d’où la richesse et la flexibilité remarquable du langage humain. la langue est un sytème cas un assemblage d’éléments interdépendants qui se soutiennent mutuellement et qui ne peuvent se comprendre isolément ( dico caractère circulaire de la signification des mots.)

Saussure Cours de linguistique générale pas publiés mais notes d’élèves

la communication animale n’est pas articulée en phrases, elle n’est donc pas intelligente au sens où elle n’exprime pas la pensée logique. 

l’avènement du mot manifeste la souveraineté de l’homme. L’homme interpose entre lui et le monde le réseau de mots et par là le devient le maitre du monde

l’animal ne connait pas le signe mais le signal seulement c’est à dire la réaction conditionnelle à une situation reconnue dans sa forme globale mais non analysée dans son détail.

le mot humain intervient comme un abstrait de la situation. il permet de la décomposer et de la perpétuer cas d’échapper à la contrainte de l’actualité pour prendre position dans la sécurité de la distance et de l’absence.

le monde animal : succession de situations toujours présentes

le monde humain : ensemble d’objets stable

le monde humain n’est plus un monde de sensations et de réactions mais un univers de désignations et d’idées.

 Le signe linguistique

La langue est composée de signes. Le signe, pris en un sens très général, est un outil de représentation : il remplace quelque chose pour quelqu’un.

 Le signe s’adresse à quelqu’un et évoque pour lui un objet ou un fait – passé, présent, ou avenir – en l’absence de ceux-ci.

capacité d’abstraction, de se dédoubler, de se détacher de l’immédiat pour se projet dans le temps, l’espace

cf conscience, humanité singe, leroi gourant,  paléo, enfant

Les signes linguistiques présentent un aspect oral et un aspect écrit. On distingue classiquement trois grands types de notations écrites apparues dans l’histoire (depuis 4000 ans av. J.-C.). 1° Les pictogrammes sont des dessins complexes ou une série de dessins fixant un contenu sans se référer à sa forme linguistique (chez les Indiens d’Amériques, les Esquimaux…). Il n’y a pas de rapport entre le langage oral et le langage écrit. 2° Les idéogrammes (parfois appelés logogrammes) sont des marques des différents mots : contrairement au précédent, ce type d’écriture est déjà ordonné (exemple : les Chinois). 3° Les phonogrammes sont des marques des éléments minimaux de la langue parlée : les phonèmes. Les signes écrits, les lettres, sont des transcriptions plus ou moins fidèles des phonèmes oraux. Ces écritures phonétiques (arabe, hébreu, latin, grec, français, etc.) sont incontestablement les plus récentes et aussi les plus complexes.

2. L’arbitraire du signe

Contrairement aux symboles (donc aussi aux pictogrammes), les signes qui composent la langue ne ressemblent pas aux choses : on dit qu’ils sont conventionnels ou arbitraires. Le symbole au contraire est un signe qui ressemble à l’objet signifié (comme les signaux visuels du code de la route ressemblent aux divers obstacles rencontrés sur la route).

  1. Signe et référent. Le signe ne se caractérise pas d’abord par sa relation avec une chose mais par sa relation avec les autres signes. C’est pour cela que la langue est un système. Rappelons qu’un “système” est, selon l’expression de Condillac, « la disposition des différentes parties d’un art ou d’une science dans un ordre où elles se soutiennent toutes mutuellement et où les dernières s’expliquent par les premières. » Certes le signe (un mot par exemple) possède ce qu’on appelle un référent dans la réalité (une chose ou une classe de choses). Mais il n’est pas lié à ce référent par quelque lien naturel ou nécessaire ; au contraire d’après le linguiste Ferdinand de Saussure, ce lien doit être considéré comme conventionnel et arbitraire. Il n’y a aucun lien magique entre le chat et le mot « chat », aucune ressemblance. Il n’y aucune raison d’appeler un chat « chat », tout simplement parce que si le mot chat n’existait pas à côté, par exemple, du mot « lynx », eh bien on appellerait sans doute les chats « lynx »…
  1. Bien sûr la « magie » ancienne étaient fondée sur la croyance inverse : les mots étaient censés refléter les choses ! Une chose, un mot ; le mot, la chose. D’où la superstition qui entouraient certains mots “magiques” : manier le mot, c’était manier la chose ! Appeler le démon par son nom, c’était le faire sortir de sa boîte.

En revanche les liens qu’entretiennent les signes entre eux dans la langue sont tout à fait essentiels et déterminants. « Dans la langue il n’y a que des différences » écrit Saussure. Cela explique tout simplement le sens des mots !

« Dans la langue il n’y a que des différences. (…) Ce qu’il y a d’idée ou de matière phonique dans un signe importe moins que ce qu’il y a autour de lui dans les autres signes. La preuve en est que la valeur d’un terme peut être modifiée sans qu’on touche ni à son sens ni à ses sons, mais seulement par le fait que tel autre terme voisin aura subi une modification. (…) De même les synonymes « craindre, redouter » n’existent que l’un à côté de l’autre; “craindre” s’enrichira de tout le contenu de “redouter” tant que “redouter” n’existera pas. Même, allons plus loin: “chien” désignera le loup tant que le mot “loup” n’existera pas. Le mot, donc, dépend du système; il n’y a pas de signes isolés. (…) Si vous augmentez d’un signe la langue, vous diminuez d’autant la signification des autres. Réciproquement, si par impossible on n’avait choisi au début que deux signes, toutes les significations se seraient réparties sur ces deux signes. » (Saussure)

b) Signifié et signifiant. Mais la constitution du signe est un peu plus complexe, d’autant que le référent n’en fait pas lui-même partie. Le signe se compose d’un signifié et d’un signifiant, c’est-à-dire d’un contenu et d’une forme. Le signifié est l’ensemble de ses significations et de ses usages, tout ce qui compose le sens du mot. Le signifiant est son aspect matériel, à la fois écrit (avec ses lettres) et oral (sa prononciation). Il n’empêche, selon Saussure, le lien entre le signifié et le signifiant n’est pas moins arbitraire que le lien entre signe et référent : une simple comparaison entre les langues suffit pour nous en convaincre.

Ainsi l’idée de «sœur» n’est liée par aucun rapport intérieur avec la suite de sons s—ö—r qui lui sert de signifiant ; il pourrait être aussi bien représenté par n’importe quelle autre : à preuve les différences entre les langues et l’existence même de langues différentes : le signifié «bœuf» , a pour signifiant b—ö—f d’un côté de la frontière, et o—k—s (Ochs) de l’autre.” (Saussure)

Le fait que certaines onomatopées et exclamations semblent mimer les phénomènes réels ne doit pas nous leurrer : il s’agit en fait de cas assez rares et donc d’importance secondaire. Ce problème de l’arbitraire du signe fut déjà abordé par Platon dans son dialogue Cratyle, où les deux personnages, Cratyle et Hermogène, défendent des thèses contraires : le premier pense que si le nom représente justement l’objet, il doit lui ressembler jusque dans ses éléments derniers (cad que certaines lettres, par exemples, représenteront mieux la douceur, d’autres la dureté, etc.) ; mais le nom “sklêrotês” (dureté) par exemple, contient une lettre (le “l”) qui évoque au contraire la douceur ; or le nom “sklêrotês” est cependant compréhensible ; par conséquent l’on doit se ranger à l’avis d’Hermogène et dire plutôt que le mot représente la chose et son sens grâce à une part de convention (ce que Saussure appelle l’”arbitraire”).

3) La critique du signe

1° Pourtant la théorie du signe, qui a eu l’avantage, pour la première fois, de permettre d’étudier la langue comme un système rigoureux soumis à des lois et des structures ordonnées, est aujourd’hui critiquée. On ne considère plus que la langue est d’abord un système de signes, mais plutôt qu’elle est un support du discours. C’est l’énoncé, c’est-à-dire la phrase, qui est la véritable unité élémentaire du langage.

D’abord la théorie du signe réduit abusivement le langage et ses énoncés à une unité élémentaire qu’elle appelle “signe” mais qui repose en réalité sur le “mot”. Or il est de plus en plus difficile d’admettre que l’unité minimale de la langue soit le mot. En effet, le mot n’obtient sa signification complète que dans une phrase, c’est-à-dire dans un rapport grammatical ou plus précisément syntaxique. D’autre part, ce même mot est décomposable en éléments morphologiques, les morphèmes, plus petits que lui, porteurs eux-mêmes de signification. Par exemple dans les mots donner, don, donneur, on peut isoler le morphème don-, qui implique l’idée d’offre, et les morphèmes –er, -, –eur qui attribuent diverses modalités à la racine don-. Enfin, la signification de ce mot ne sera complète que si on l’étudie dans un discours, en tenant compte des circonstances entourant la prise de parole.

D’autre part, la notion de l’arbitraire du signe a été remise en question. Il s’agit en réalité d’un faux problème. Il n’y a évidemment aucun rapport “naturel” ou “nécessaire” entre un mot et une chose ou même entre un mot et une idée représentée ; mais il y a bien un rapport quand même établi par l’usage et ses évolutions selon des lois qui échappent en grande partie aux usagers de la langue (et parfois même aux linguistes !).

principal fondateur de la linguistique : rapport entre pensée et langage rapports entre langage et réel langue parole et production de sens. mais abordent en linguiste et grammairien donc pas question des sujets parlants.

découverte relative aux langues indo-européennes : reconstituer l’origine commune et les liens de filiation qui unissent la plupart des tagues parlées dans le vaste espace géographique qui va de l’Asie centrale à l’Atlantique (vieilles langues germaniques sanscrit mec latin issus de la meme langue mère

système primitif des voyelles dans les langues indo européennes et l’emploi du génitif absolu en sanscrit.

langue définie comme un produit social de la faculté du langage qui ne se confond ni avec cette faculté ni avec la parole; il analyse les liens entre langue et écriture entre sons et sens dans les signes linguistiques ; il montre comment la langue est de la pensée organisée dans la matière phonique en élaborant les catégories de signifiant et signifié et évolution et diversité des langues.

il compare le fonctionnement de la langue à celui d’un jeu d’échecs « la valeur respective des pièces dépend de leur position sur l’échiquier ». dans la langue comme aux échecs si « les changements ne portent que sur des éléments isolés », chaque changement « a un retentissement sur tout le système »; Cours de linguistique générale ».

interdépendance, système qui unit stabilité des structures et variabilité des éléments

Selon Saussure, il faut distinguer dans la langage, la langue, phénomène collectif, placé en dehors de la volonté de ceux qui parlent, une sorte de « dictionnaire » identique en chaque individu et la parole « la somme de ce que les gens disent » (p3) distinction capitale car selon Saussure seule la langue peut être objet de science. 

Chomsky néanmoins rejette cette distinction qui lui parait restreindre l’aspect créateur du langage à la seule parole, et donc négliger la créativité de la langue elle-même, ce qui rend chaque locuteur capable de former une série infinie de combinaisons différentes. Il importe alors de dégager les règles de la combinaison, les lois structurales profondes permettant d’engendrer l’organisation de la phrase. (Chomsky La linguistique cartésienne).

Peut-on considérer la parole comme une communication ? Tel est un des présupposés de Saussure, très répandu chez les linguistes, et théorisé par jakobson. Pour ce dernier, toute communication est constituée de six facteurs : le message, le destinateur qui l’envoie, le destinataire qui le reçoit, le contexte dont parle le message, le code dans lequel le message est écrit, et le contact permettant d’établir la communication. (J Essai de linguistique générale p 213)

Pour que la définition de la parole comme communication soit générale, les linguistes qui la proposent ont soin de ne faire référence à aucune situation particulière et de considérer les locuteurs de la façon la plus abstraite. On comprend dès lors que Chomsky ait pu dire sa linguistique « cartésienne ». le recours à des locuteurs désincarnés tend à reconduire la définition de l’homme comme simple conscience et porte à négliger la concrétude du dire (la réalité même de la parole). 

C’est pourquoi d’autres linguistes préfèrent s’attacher aux discours concrets : certains étudient les manières de parler propres à un groupe social donné (socio-linguistique), d’autres la manière dont un énoncé prend sens dans un contexte d’énonciation (« hier », par exemple, n’a de sens que par rapport au jour où je parle), d’autres enfin la façon dont un discours peut faire pression sur autrui, le pousser à agir, voire, dans certains cas, (promesses, menaces, serments, injures), être l’action elle-même (pragmatique). 

faut-il étudier la langue en elle-même ou dans ses rapports à la société ? La première position est celle de Saussure puis des structuralistes qui voient dans la langue une structure, cad « une entité autonome de dépendances internes ». Saussure voulait que l’on tienne la langue pour un système de signes dont chacun n’aurait de valeur que par différence avec tous les autres. la relation entre les signes est donc antérieure à la valeur propre à chacun d’eux, si bien que, chaque valeur suppose toute la langue et rien que la langue. Pour Saussure, l’histoire reste externe à ce réseau de relations entre les signes; il faut donc étudier ce réseau de manière synchronique en un instant de son évolution. 

Toute la linguistique d’inspiration marxiste a critiqué cette évacuation de l’histoire, Bakhtine, par exemple, a montré comment chaque signe prend plusieurs indices de valeurs contradictoires, justement parce que toutes les classes sociales utilisent la même langue pur formuler leur intérêt propre. le meme mot « nègre » peut de la sorte être présent aujourd’hui dans les injures racistes et dans la revendication antiraciste des Noirs. le signe devient : « l’arène où se déroule la lutte des classes ». (B Le marxisme et la philo du langage p 44). cf chapitre sur parole et pouvoir.

-Texte sur les abeilles de Karl Von Frish , : danse des abeilles

-points communs et différences entre la communication symbolique des abeilles et le langage humain. cf Notions de philosophie : le langage

-Cas de Sarah et les Premarck (comparaison langage des signes symbolique des chimpanzés et langage humain.)

-Texte de Descartes Discours de la méthode, Lettre à Morus

différence homme singe : la parole apparait comme une fonction sans organe

comparaison apprentissage enfant et chimpanzé

En quel sens le langage est-il le propre de l’homme ?

-on peut entre par là que le langage est dans la nature de l’homme. On insisterait alors sur ce qui oppose le langage humain, où un petit nombre de sons dépourvus de sens peuvent être combinés en un très grand nombre de mots et une infinité de phrases de sens différents, aux cris des animaux qui ne signifient chacun qu’une seule chose, toujours relative au besoin. 

-On peut aussi entendre que la nature de l’homme est dans le langage et étudier comment chaque être humain conquiert dans le langage à la fois son statut d’être humain et sa personnalité propre. 

Plusieurs philosophes l’ont souligné. Quand Aristote définit l’homme comme l’animal discursif (Politique I,2 1253a) cela ne signifie pas que l’homme possède la Raison, cette invention de l’âge moderne mais bien plutôt qu’il est habité par la parole. Certains philosophes actuels considèrent que l’homme n’est qu’un corps et du langage, en réduisant à ce dernier terme tout ce que l’on a pu nommer esprit.

soutenir que le langage est le propre de l’homme n’est donc pas comme on l’admet parfois faire injure au monde animal. C’est seulement faire valoir que parmi tous systèmes de communication celui des êtres humains comporte des caractères particuliers et indissociables des autres caractéristiques humaines. Pour Descartes, le langage témoigne d’une faculté de penser et de raisonner propre à l’homme; et si les animaux ne parlent pas c’est faute de penser et non faute de moyens de communication, comme le prouve le fait qu’ils savent fort bien exprimer leurs passions. sans contredire Descartes, on insistera davantage sur le caractère historique et social du langage qui ne peut se concevoir sans un apprentissage progressif ni hors de tout contexte culturel.  

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Introduction : la parole (notes)

pourquoi la philosophie juge-t-elle primordial de réfléchir sur le langage ?

penser le langage, est ce remettre la philo en question ?

philosophe monarque absolu de son dire ou déterminé par l’état de sa langue au moment où il pense ? (Benvéniste « Catégories de pensée et catégories de langue » dans Problèmes de linguistique générale)

=> examen minutieux des abus de pouvoir de la parole philosophique qui prétendrait disposer le réel à son image : la métaphysique. Nietzsche la soupçonnait de n’être qu’ »une transcription arbitraire de la grammaire ».  Par delà le bien et le mal ; qui prête au réel la forme de ses phrases suppose qu’à ses concepts correspondent tout naturellement des essences, et prend si facilement pour du réel ce dont elle peut parler : Dieu, âme, liberté…

=> cratylisme ?

En outre, le propre du grand philosophe est peut-être justement l’incapacité de s’entendre avec autrui 

débat que par texte interposé car sinon dialogue de sourds ?, le penseur n’écoute pas ce qu’on lui dit => dogmatisme ? (enjeu)

« la parole, on ne peut jamais l’expliquer que par le langage, c’est pour cela qu’en ce sens, on ne peut jamais expliquer le langage lui-même. » Wittgenstein Grammaire philosophique 

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Linguistique : Ferdinand de Saussure

La sémiologie a beaucoup apporté à la linguistique par son étude des systèmes de communication. Un des premiers sujets d’étude qui a retenu l’attention des chercheurs est la constitution du CODE servant à communiquer oralement. La définition de ce code et de son usage par les communautés linguistiques constitue une des préoccupations principales de la linguistique.

La transmission de sens d’un individu à un autre repose sur l’existence du signe linguistique. Ferdinand de Saussure a été le premier à définir de façon précise cette notion importante, à l’aide des notions suivantes:

Le signe est formé de deux parties:

a) une partie matérielle: le SIGNIFIANT (image acoustique, image mentale du signe, la représentation mentale sonore)

b) une partie immatérielle: le SIGNIFIÉ (partie conceptuelle du signe –notion).

Prenons un exemple, le mot « oiseau »:

SigneLinguistique1

Le signe linguistique est donc le résultat de l’association d’un signifiant (aspect physique du sens) et d’un signifié (le sens). Il est difficile de concevoir l’un sans l’autre.

Le signifié est en réalité différent de la définition mais on l’utilise ici comme remplacement par souci de simplicité. Le signifié est constitué d’éléments de sens qu’on appelle les « attributs sémantiques » (concept tiré de la sémantique). Les attributs sémantiques d’un signifié se combinent pour créer le sens du signe. Ces attributs sont habituellement représentés par les linguistes sous forme de caractéristiques binaires (qui sont actives ou inactives, notées par « + » ou « -« ). Le signifié de « table » pourrait ainsi comporter les attributs sémantiques qui suivent: [+meuble][+une surface plane horizontale] [+surface servant à manger]. En précisant que la table comporte une seule surface plane, on l’oppose à la bibliothèque qui en possède plusieurs. En précisant que c’est un meuble, on l’oppose au plancher, à la patinoire ou au plafond. (Beaudoin 2002)

À ces deux distinctions signifiant-signifié, il faut en ajouter une troisième. D’un côté, nous avons la réalité sonore (ou écrite mais qui ne fait que traduire la réalité sonore) dont nous parlons ([wazo]), d’un autre côté nous avons la NOTION de l’objet auquel on réfère. Cette notion existe dans l’esprit des locuteurs, et c’est ce qui leur permet de se comprendre. Cependant, nous n’avons pas parlé de l’objet lui-même, celui dont on parle. Il s’agit du référent (l’objet physique, matériel dont les locuteurs parlent).

Le rapport entre le signifié et le signifiant est non arbitraire et nécessaire car il fonde le signe lui-même. Par contre, le rapport entre une réalité elle-même et un signe (la signification) est, elle, arbitraire et elle est le résultat d’une convention entre les individus d’une communauté linguistique particulière. Ce rapport constitue la base de toute communication linguistique, alors que les mots, ou comme nous pouvons les appeler maintenant les signes, prennent vie lorsque le lien entre signifiant et signifié est effectué, ce qui nous donne une signification entre une image acoustique et une notion, une réalité mentale (signifié).

À partir des observations précédentes, nous pouvons affirmer que le signe linguistique se définit par son caractère:

a. arbitraire:
Comme nous l’avons mentionné auparavant, il n’y a pas de relation « naturelle » entre le mot (ou le signifiant) et la réalité physique qui lui est associée (le signifié).

Par exemple, le choix du mot « bureau » ne repose sur aucun critère qui aurait pu favoriser le choix d’un tel mot plutôt qu’un autre.

Une exception cependant: les onomatopées. Dans ce cas, les mots utilisés sont relativement proches du son que l’on veut décrire, et ce, dans toutes les langues. ex.: le chant du coq, le bruit de la vache, le jappement du chien.

le bruit d’un canard:
-français: couin-couin
-anglais: quack-quack
-allemand: pack-pack
-danois: rap-rap
-hongrois: hap-hap

Si ce lien obligé entre la réalité et le signe linguistique existait, tous les humains parleraient probablement la même langue. Ce caractère arbitraire du signe fait que l’on doive apprendre un large vocabulaire lorsqu’on apprend une langue, quelle soit maternelle ou seconde.

É videmment, ce caractère arbitraire du signe linguistique ne s’applique pas aux autres sortes de signes. Par exemple, les signaux routiers doivent se ressembler à cause du fait que l’action est la même dans toutes les langues. Par exemple, un panneau comportant un pain indiquera aux locuteurs de toutes les langues et cultures (ou presque) qu’il y a une boulangerie à proximité.

b. conventionnel:
Pour que les membres d’une communauté se comprennent, il faut qu’ils s’entendent sur les mêmes conventions ou sur les mêmes signes. En conséquence, les signes sont considérés, comme nous avons dit précédemment, comme étant conventionnels, en cela qu’ils résultent d’une convention entre les membres d’une communauté. En fait, partager la même langue, c’est également partager un certain nombre de conventions.

c. linéaire:
Le signifiant se présente de façon linaire dans l’axe du temps. il nous faut du temps pour prononcer un mot, pour le réaliser de façon physique. De même, il y a un ordre qui est suivi lors de sa prononciation. Dans la réalisation du signifiant [wazo], il ne m’est pas permis de prononcer les sons dans un ordre différent de celui que nous avons ci-haut si je veux que les autres locuteurs me comprennent. Les signes forment donc une successivité et non une simultanéité. Par opposition, les signes routiers peuvent se substituer: « obligation de tourner » et « tourner à gauche ».

Il est nécessaire de distinguer un signe d’un indice (signes non intentionnels): selon Prieto, il s’agit d’un fait immédiatement perceptible qui nous fait connaître quelque chose à propos d’un autre fait qui, lui, n’est pas immédiatement perceptible. Un indice est un phénomène naturel ou culturel, perceptible, involontaire ou non intentionnel et qui nous fait connaître quelque chose à propos d’un autre fait qui, lui, n’est pas immédiatement perceptible. 
ex.: symptômes d’une maladie, traces dans la neige, nuages noirs à l’horizon, etc.

Cependant, si je m’entendais avec quelqu’un pour lui dire que s’il voit des traces de pas dans le sable, en route pour mon chalet, il comprendra que je suis arrivé. L’intention de signification est essentielle dans l’identification d’un signal. Il en va de même de la présence d’une canne blanche pour indiquer un aveugle, trois coups cognés à la porte, les numéros de salle dans un édifice public, etc.

L’indice se différencie donc du signe par le fait que sa première fonction n’est pas celle de signifier quelque chose. Il peut très bien avoir une signification, mais ce n’est pas sa fonction première. Les signaux de fumée, s’ils ne sont pas effectués en vue de communiquer avec quelqu’un d’autre, ne constituent pas un signe mais bien un simple indice qui nous indique qu’il y a un feu à quelque part.

Aussi, nous pouvons effectuer une autre distinction entre un signe et un signal: un indice produit spécifiquement en vue de transmettre un message (contient les signes linguistiques, les symboles, et les signes non linguistiques)

Si j’élève la voix, si je me mets à crier, vous pourrez bien relier cet indice à ma condition psychologique et prendre cet indice comme indication que je suis un peu fâché, que je ne suis pas de bonne humeur.

L’indice est donc non conventionnel, involontaire, diversement interprétable mais signifiant (revenir là-dessus plus tard, après l’explication du signe linguistique).

Autre exemple: le voisin qui s’achète une Rolls Royce ou une Ferrari. Au départ, le fait de posséder cette voiture est un indice de sa richesse. Par contre, si le voisin en question a l’intention de lancer un message bien précis à ses propres voisins, celui qu’il est vraiment riche, qu’il a réussit, qu’il est dans une classe à part, alors cette même voiture deviendra un signe. Nous sommes en présence d’un message qui a été transmis avec une intention bien claire de le communiquer.

Comme nous l’explique Charles Peirce, lorsque deux signes sont liés par leur signifiés, on parle alors de symbolisation (ou connotation), et donc de la construction d’un symbole. Le symbole résulte d’une relation conventionelle et arbitraire commune à plusieurs cultures. Le signe linguistique est, en fait, un type particulier de symbole.

Ex. de symboles:

• une colombe symbolise un message de paix;
• un drapeau rouge symbolise une interdiction;
• signaux routiers : cercle rouge avec une ligne transversale symbolise aussi une interdiction.
• les tours du WTC de New York symbolisaient la suprématie financière de cette ville
• la couleur bleu poudre, dans les forces armées, symbolise une force neutre (casques bleus)
• le champagne (marque Dom Pérignon) symbolise la richesse et le luxe extrême

Il est également possible de transmettre du sens en utilisant une icone qui est créée par un lien analogique avec la réalité. Il y a une grande quantité d’icones largement utilisées par nos sociétés modernes et qui sont reconnaissables par un grand nombre d’individus dans les sociétés modernes. Considérez, par exemple, les images suivantes:

 

keybord
martini
computer mouse
printer
restaurant
tool

 

Il est relativement facile d’identifier, d’après les icones présentés ci-dessus, les significations de clavier, de bar, de souris, d’imprimante, de restaurant et de loupe pour modifier la taille d’un objet. Ces significations sont évidentes à cause du lien analogique direct entre l’élément utilisé pour représenter la réalité et son rapport extrêmement étroit avec l’objet qu’il représente.

En résumé, nous faisons les distinctions entre les notions suivantes:

SemiolRes1

Les langues naturelles comme le français et l’anglais par exemple sont des systèmes de communication basés sur l’utilisation de signes plutôt que de symboles et d’indices.

Cette relation entre le signifié et le signifiant nous amène à faire une autre distinction qui nous paraît importante du point de vue linguistique. Il s’agit de la double articulation du langage (deux types d’unités découpées sur deux niveaux distincts). Selon André MARTINET, la langue s’organise sur deux niveaux qui opèrent de façon différente. Pour lui, les unités qui s’enchaînent dans le discours ne s’enchaînent pas de la même façon et au même niveau.

André Martinet propose donc que la langue contient :
a) des unités de première articulation: les morphèmes (unités minimales de signification). Ce sont des noms (arbre, crayon, maison, etc.), verbes (manger, écrire, rêver, etc.), adjectifs (bleu, grand, rapide, etc.), etc. On note aussi que les « parties de mots » (comme le « -ons » dans le verbe « mangerons », ou le « eur » dans « réparateur ») qui ont une valeur grammaticale sont aussi appelées des morphèmes et qu’elles sont aussi porteuses de sens. En effet, à chaque fois qu’un verbe se termine par un « -ons », les locuteurs du français reconnaissent que le sujet est une première personne du pluriel (« nous »), peu importe le verbe.

Ex. 1:
a. « Je viens. » (2 morphèmes)
b. « Je viendrai. » (3 morphèmes)

1-je: pron. pers.
2-vien-: verbe venir
3-drai: futur, 1ere personne du sing.

Ex. 2 (utilisation du morphème « -ons »):
a. Nous viendrons.
b. Isabelle et moi voterons pour Steven Harper. 

Ce qu’il faut comprendre à ce moment et ce en quoi cette notion se rattache avec la sémiologie est que ces morphèmes sont constitués d’un signifiant ET d’un signifié.

L’analyse de la langue en morphèmes, champ d’étude fascinant, sera abordée de façon plus détaillée lorsque vous ferez de la morphologie dans le deuxième cours d’introduction offert au département (Fren 370).

b) des unités de seconde articulation: les phonèmes (unités minimales distinctives). Ce sont des sons distinctifs (ils changent le sens d’un mot (pont-bon, quand-banc) sans qu’ils ne soient porteurs de sens) propres à une langue.

Ces phonèmes ne sont constitués que d’un signifiant, sans signifié.
Autre illustration de la double articulation du langage: Combien de mots d’une seule syllabe pouvez-vous former qui se terminent par le son « -on »? Un étudiant bien inspiré pourrait arriver à cette simple liste qui contient un bon nombre de mots différent seulement par leur première consonne et qui se terminent tous par le son « -on »:

pont
bon
ton / taon
don / dont
con / qu’on
gong
font / fond
vont
son / sont
jonc
mon
non
long
rond

La langue peut donc « optimiser » son système en formant un grand nombre de mots différents avec une seule modification (remplacer un seul son) plutôt que de créer un nouveau mot complètement différent à chaque fois. Ceci est possible seulement par l’existence d’unités sans sens (les sons, ou phonèmes) que l’on peut substituer les unes aux autres pour changer le sens d’un mot. Cette particularité de créer un système productif contenant deux niveaux d’organisation pour communiquer constitue une différence majeure entre les systèmes de communication utilisés entre animaux et ceux utilisés par les humains.

En résumé, lorsque nous parlons de double articulation du langage, nous parlons de deux niveaux d’organisation du langage:

a) première articulation, les morphèmes (qui ont un signifié et un signifiant)

b) deuxième niveau d’organisation: les phonèmes (qui n’ont qu’un signifiant)

 

 

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