Les sorties cinéma : se former le regard … et le coeur !

Comme vous l’aurez compris depuis le début de ce blog, on aime bien les mois thématiques alors en ce mois de Janvier, on va explorer le thème de la sortie culturelle au cinéma.

Avec Colette, on adore aller au cinéma avec nos élèves depuis déjà très longtemps. Comme vous vous en doutez, au cinéma, comme dans nos classes, on a vécu de grands moments d’émotions avec nos élèves. Il était donc important pour nous de vous présenter nos top 3 à chacune.

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En ce qui me concerne, la première claque cinématographique en milieu scolaire a eu lieu avec La Vague de Denis Gansel sorti en 2008.

Le film s’appuie sur l’essai de Todd Strasser. L’enseignant Mr Winckel propose de faire comprendre la notion d’autocratie par l’expérience à ses élèves. Il fait le pari qu’au bout d’une semaine tous les élèves auront basculé dans l’autocratie en appliquant les moyens de soumission et de propagande caractéristiques des régimes autoritaires.

Pourquoi  ce film a- t-il été important dans ma carrière ? Parce qu’il a suscité une véritable réaction chez mes élèves : de la curiosité, mais aussi de la colère  et un vrai débat, certes autour de l’autocratie et des chapitres comme le totalitarisme mais aussi sur l’école, la place de l’enseignant, la responsabilité qu’il a dans ses choix pédagogiques. A quel moment est-on démagogique ? A quel point, l’enseignant que nous sommes, fait-il ce métier là parce qu’il est gratifiant, parce qu’on a une certaine reconnaissance, qu’il peut parfois flatter notre égo ?  Je ne peux m’empêcher quand je mène un projet dans lequel je m’éclate clairement d’un point de vue pédagogique d’avoir parfois des moments auto-réflexifs justement pour me demander si tous les élèves s’y retrouvent, en apprennent quelque chose, en tirent une satisfaction, du plaisir… C’était donc extrêmement chouette d’aboutir à ces questionnements qui n’étaient au départ pas l’objet du visionnage. Je me rappelle d’ailleurs qu’il était dans une sélection pour sensibiliser les élèves à la notion de harcèlement. Donc vous l’aurez compris, La Vague a de multiples facettes et il peut être étudié sur le plan historique, mémoriel, civique mais aussi social.

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Pour le deuxième film, il s’agit des Enfants loups de Mamoru Hosoda sorti en 2012, il était il y a maintenant six ou sept ans dans la sélection de « Collège au cinéma » des sixièmes-cinquièmes.

D’abord c’est un film très poétique, dans son utilisation géographique, je l’avais utilisé pour la notion d’habiter un espace de faibles et fortes densités dans l’ancien programme mais moi je garde de ce film un souvenir maternel. La force de cette maman qui a des enfants loups qu’elle ne comprend pas toujours mais qui fait le choix de vivre en forêt pour qu’ils s’épanouissent et choisissent leur vie, leur chemin. J’ai des jumelles et j’essaie toujours d’être cette maman qui guide, qui propose un cadre de vie, des activités, conseille, donne un modèle de façon de vivre mais elles choisiront la voie qui leur convient tant qu’elles seront épanouies, je ferais en sorte d’accepter leurs choix de vie. En tant qu’enseignante, je trouve toujours important d’aiguiller aussi les parents vers cette écoute, cette idée que l’enfant prend à un moment donné une voie dont on ne maîtrise pas tous les obstacles et embûches, parfois on ira le relever et parfois non, il faut savoir accepter de lâcher la main, que l’enfant ose prendre un risque même si il nous fait très peur et nous angoisse, il faut apprendre à écouter son intuition pour qu’il soit heureux. C’est donc un film sur la parentalité et l’un de mes conseils aux parents parfois perdus c’est de leur dire on fait comme on peut et non comme on veut parce que votre enfant, il a son caractère, ses droits, c’est une personne et un adulte en devenir à qui il faudra lâcher la main !

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Mon dernier coup de cœur c’est Tomboy de Céline Sciamma sorti en 2011. C’est l’histoire d’un enfant de 10 ans qui a été élevé sans stéréotype de genre qui joue au foot et a des poupées, aime conduire des camions et danser avec sa sœur.

Les 12 premières minutes sont extraordinaires a utilisé en cycle 3 et même quand ils sont plus grand. Leur étonnement à ce moment là du film, leur réaction, leur colère, leur dégoût, leur empathie, leur pitié,… Toutes leurs émotions, il faut toutes le relever, il faut les déconstruire, quel formidable moment de débat, de discussion et de tolérance. Oui quand vous visionnez Tomboy avec vos élèves, vous œuvrez pour la tolérance, vous enseignez l’amour et le respect, l’ouverture d’esprit et vous invitez les élèves à réfléchir sur l’éducation qu’ils ont reçu parfois même pour la première fois, ils ‘interroge sur les activités qu’ils font, les cadeaux qu’on leur a offert, les réflexions de leur parents et c’est toujours un incroyable moment pédagogique.

Je laisse maintenant Colette vous parler de ces trois films préférés. Quant à moi, je pars à la recherche d’autres films qui pourraient animer mes cours et des moments privilégiés avec mes élèves.

Aude

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A mon tour !

Les sorties culturelles ont très vite fait partie intégrante de ma pédagogie, dès mon année de stage, d’autant plus que j’enseignais dans la ville du Festival de la BD et que ma participation à cet évènement littéraire quelques années plus tôt avait auréolé cette ville d’une lumière particulière en terme de culture. Enseignante en lycée lors de mon année de stage, j’ai inscrit ma classe de seconde à « Lycéens au cinéma ». Un des films les plus marquants parmi ceux visionnés cette année là fut Shining de Stanley Kubrick.  Nous étions allés à pieds (!) au cinéma du C.N.B.D.I, ce qui déjà en soi me paraît être un évènement quand je vois combien il est compliqué de rejoindre un lieu culturel maintenant que j’enseigne en milieu rural. Je ne connaissais pas le film. Comment dire à quel point j’ai été surprise que l’on propose un film d’horreur psychologique à des élèves de 15 ans ! Mais ce fut ma première expérience d’analyse de l’image mobile et je me souviens que j’ai adoré partir de ce film là, si perturbant, aussi bien en terme de narration que d’esthétique, pour débattre avec mes élèves autour du traitement de l’angoisse sur grand écran. Nous avions organisé un débat interprétatif, format que j’ai ensuite gardé à chaque retour du cinéma, que ce soit avec des lycéens ou des collégiens.

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Le film que j’ai le plus étudié en classe depuis sa sortie est le film La Vie scolaire de Grand Corps malade et Mehdi Idir dont j’ai déjà parlé ici. En effet ce fut la première sortie au cinéma que j’organisais de A à Z en dehors du dispositif « Collège au cinéma ». En 2019, nous étions allés le voir au cinéma avec 4 classes de 3e dès septembre car se joue dans ce film une sorte de mise en abyme de la situation de nos élèves : la rentrée en 3e et son angoissante question de l’orientation. C’était aussi l’occasion de travailler la perception de différents territoires et de ce qui s’y joue, entre le collège rural de Haute-Gironde où étudient nos élèves et le collège de la cité des Francs-Moisins à Saint-Denis où évoluent les personnages principaux du film. Pour la première fois, je consacrais toute une séquence à l’analyse d’un film : analyse d’affiches, horizon d’attente, bande-annonce, scène d’ouverture, plan séquence, lecture de paysage et lecture analytique des chansons qui tissent la bande originale du film, le cinéma c’est aussi l’occasion de multiplier les supports d’analyse et d’aiguiser son esprit critique.

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Mais mon chouchou de tous les temps, c’est le film Billy Elliot de Stephen Daldry sortie en 2000 que nous avons vu avec des élèves de 6e dans le cadre de « Collège au cinéma ».

Non seulement pour les débats incroyables que ce film génère sur l’éducation, les préjugés liés au genre, l’amitié, la famille, la fraternité, le travail, le pouvoir de la grève, l’art, le parcours de vie, les relations adultes-enfants, mais surtout parce que ce film est une pure merveille pour faire toucher du doigt cette notion si importante en analyse littéraire et cinématographique : l’implicite ! Car tout est à déchiffrer dans ce film qui met à l’honneur des personnages masculins particulièrement taciturnes ! Sans cesse l’image, le mouvement nous invitent à nous interroger sur les motivations des personnages et les liens qui les unissent sans que jamais ils ne le revendiquent. Car oui, j’ai une tendresse particulière pour ces amours qui nous traversent mais ne se disent jamais. Vous savez cet amour dont il ne faut absolument pas dire le nom mais qui unit, par exemple, chaque enseignant.e à ses élèves.

Colette.

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