PhiloStjo

Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

Archive for novembre, 2016

Méthode- Corrigé Dissertation « la question « qui suis-je… »

Voici la copie d’une élève ayant traité le Sujet : « la question « qui suis-je » admet-elle une réponse exacte ? »

corr suisje exacte

posted by charlierenard in actualités,autrui,conscience,méthode,révision,sujet and have Comment (1)

Parole politique : Langue de bois ?

cours-langue-bois-enajargon

Je ne saurais que trop vous conseiller d’écouter ce petit billet délicieux sur la langue de bois des politiciens

 

http://www.europe1.fr/emissions/la-morale-de-linfo/quand-limbecile-montre-la-lune-le-sage-regarde-le-doigt-2903957 

et cette chanson de Frédéric Romet sur France Inter

http://www.scoopnest.com/fr/user/franceinter/794638046943551488

Pour illustrer les propos de Bourdieu sur la télévision et la mise en scène des débats

 

 

posted by charlierenard in actualités,HLP1ère,la parole,prépa and have Comment (1)

II Fonctions de la parole : l’expression des besoins et passions

L’expression

a) les besoins

Quand on se demande, pourquoi le langage, pourquoi ce besoin de parler, on est tenté justement de répondre comme Lucrèce : par besoin ! L’expression du besoin et le besoin de communiquer semblent d’emblée aller de paire.

« Quant aux divers sons du langage, c’est la nature qui poussa les hommes à les émettre, et c’est le besoin qui fit naître les noms des choses : à peu près comme nous voyons l’enfant amené, par son incapacité même de s’exprimer avec la langue, à recourir au geste qui lui fait désigner du doigt les objets présents. Chaque être en effet a le sentiment de l’usage qu’il peut faire de ses facultés. Avant même que les cornes aient commencé à poindre sur son front, le veau irrité s’en sert pour menacer son adversaire et le poursuivre tête baissée. Les petits des panthères, les jeunes lionceaux se défendent avec leurs griffes, leurs pattes et leurs crocs, avant même que griffes et dents leur soient poussées. Quant aux oiseaux de toute espèce, nous les voyons se confier aussitôt aux plumes de leurs ailes, et leur demander une aide encore tremblante. Aussi penser qu’alors un homme ait pu donner à chaque chose son nom, et que les autres aient appris de lui les premiers éléments du langage, est vraiment folie. Si celui-là a pu désigner chaque objet par un nom, émettre les divers sons du langage, pourquoi supposer que d’autres n’auraient pu le faire en même temps que lui ? En outre, si les autres n’avaient pas également usé entre eux de la parole, d’où la notion de son utilité lui est-elle venue ? De qui a-t-il reçu le premier le privilège de savoir ce qu’il voulait faire et d’en avoir la claire vision ? De même un seul homme ne pouvait contraindre toute une multitude et, domptant sa résistance, la faire consentir à apprendre les noms de chaque objet ; et d’autre part trouver un moyen d’enseigner, de persuader à des sourds ce qu’il est besoin de faire, n’est pas non plus chose facile : jamais ils ne s’y fussent prêtés ; jamais ils n’auraient souffert plus d’un temps qu’on leur écorchât les oreilles des sons d’une voix inconnue. »
Lucrèce, De la Nature, Livre V, vers 1028-1070.

la clairvoyance des yeux n’a pas été créée, comme tu pourrais croire, pour nous permettre de voir au loin ; ce n’est pas davantage pour nous permettre de marcher à grands pas que l’extrémité des jambes et des cuisses s’appuie et s’articule sur les pieds ; non plus que les bras que nous avons attachés à de solides épaules, les mains qui nous servent des deux côtés ne nous ont été données pour subvenir à nos besoins. Interpréter les faits de cette façon, c’est faire un raisonnement qui renverse le rapport des choses, c’est mettre partout la cause après l’effet. Aucun organe de notre corps, en effet, n’a été créé pour notre usage ; mais c’est l’organe qui crée l’usage. Ni la vision n’existait avant la naissance des yeux, ni la parole avant la création de la langue : c’est bien plutôt la naissance de la langue qui a précédé de loin celle de la parole ; les oreilles existaient bien avant l’audition du premier son ; bref, tous les organes, à mon avis, sont antérieurs à l’usage qu’on en a pu faire. Ils n’ont donc pu être créés en vue de nos besoins.

Lucrèce, De la nature des choses (Ier siècle)

textes de Rousseau

Quelle est l'origine des langues? Rousseau

Pourtant certains philosophes ont vu surtout dans le langage, notamment sous son aspect phonique, une première expression des passions. L’on peut en effet considérer que la tonalité et l’accent, si importants, expriment en priorité le niveau affectif du sujet. “Ce n’est ni la faim, ni la soif, mais l’amour, la haine, la pitié, la colère, qui leur ont arraché les premières voix. Les fruits ne se dérobent point à nos mains ; on peut s’en nourrir sans parler ; on poursuit en silence la proie dont on veut se repaître : mais pour émouvoir un jeune cœur, pour repousser un agresseur injuste, la nature dicte des accents, des cris, des plaintes. Voilà les plus anciens mots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes et passionnées avant d’être simples et méthodiques. (Rousseau, Essai sur l’origine des langues “ (1781). On remarque tout d’abord que l’expression des passions ne s’effectue nullement en dehors de la communication. Simplement, insister sur les passions plutôt que sur le besoin revient à humaniser d’emblée le langage, car pour Rousseau la passion et la sensibilité représentent les qualités essentielles de l’homme, à côté de la raison qui intervient plus tard dans le processus d’éducation et de « perfectionnement ». Cela revient aussi à prétendre que le langage n’a pas seulement une fonction utilitaire ; d’emblée il s’avère ludique, séducteur, passionné, si humain !

b) les passions

« L’invention de l’art de communiquer nos idées dépend moins des organes qui nous servent à cette communication, que d’une faculté propre à l’homme, qui lui fait employer ses organes à cet usage, et qui, si ceux-là lui manquaient, lui en ferait employer d’autres à la même fin. Donnez à l’homme une organisation tout aussi grossière qu’il vous plaira : sans doute il acquerra moins d’idées ; mais pourvu seulement qu’il y ait entre lui et ses semblables quelque moyen de communication par lequel l’un puisse agir et l’autre sentir ils parviendront à se communiquer enfin tout autant d’idées qu’ils en auront.
Les animaux ont pour cette communication une organisation plus que suffisante, et jamais aucun d’eux n’en a fait cet usage. Voilà ce me semble, une différence bien caractéristique. Ceux d’entre eux qui travaillent et vivent en commun, les castors, les fourmis, les abeilles, ont quelque langue naturelle pour s’entre-communiquer je n’en fais aucun doute. Il y a même lieu de croire que la langue des castors et celle des fourmis sont dans le geste et parlent seulement aux yeux Quoi qu’il en soit, par cela même que les unes et les autres de ces langues sont naturelles, elles ne que sont pas acquises ; les animaux qui les parlent les ont en naissant : ils les ont tous, et partout la même ; ils n’en changent point, ils n’y font pas le moindre progrès. La langue de convention n’appartient qu’à l’homme. Voilà pourquoi l’homme fait des progrès, soit en bien soit en mal, et pourquoi les animaux n’en font point. »
RousseauEssai sur l’origine des langues, 1781, Chapitre I.

à partir de 12 mins

 

Voir la page originale : http://www.site-magister.com/prepas/page27c.htm#ixzz4QIdABB7N
Site protégé par droits d’auteur
Under Creative Commons License: Attribution Non-Commercial No Derivatives
Follow us: @sitemagister on Twittersitemagister on Facebook

La parole distingue l’homme entre les animaux : le langage distingue les nations entre elles ; on ne connaît d’où est un homme qu’après qu’il a parlé. L’usage et le besoin font apprendre à chacun la langue de son pays ; mais qu’est-ce qui fait que cette langue est celle de son pays et non pas d’un autre ? Il faut bien remonter, pour le dire, à quelque raison qui tienne au local, et qui soit antérieure aux mœurs mêmes : la parole, étant la première institution sociale, ne doit sa forme qu’à des causes naturelles.
Sitôt qu’un homme fut reconnu par un autre pour un être sentant, pensant et semblable à lui, le désir ou le besoin de lui communiquer ses sentiments et ses pensées lui en fit chercher les moyens. Ces moyens ne peuvent se tirer que des sens, les seuls instruments par lesquels un homme puisse agir sur un autre. Voilà donc l’institution des signes sensibles pour exprimer la pensée. Les inventeurs du langage ne firent pas ce raisonnement, mais l’instinct leur en suggéra la conséquence.
Les moyens généraux par lesquels nous pouvons agir sur les sens d’autrui se bornent à deux, savoir, le mouvement et la voix. L’action du mouvement est immédiate par le toucher ou médiate par le geste : la première, ayant pour terme la longueur du bras, ne peut se transmettre à distance : mais l’autre atteint aussi loin que le rayon visuel. Ainsi restent seulement la vue et l’ouïe pour organes passifs du langage entre des hommes dispersés. Quoique la langue du geste et celle de la voix soient également naturelles, toutefois la première est plus facile et dépend moins des conventions : car plus d’objets frappent nos yeux que nos oreilles, et les figures ont plus de variété que les sons ; elles sont aussi plus expressives et disent plus en moins de temps. L’amour, dit-on, fut l’inventeur du dessin ; il put inventer aussi la parole, mais moins heureusement. Peu content d’elle, il la dédaigne : il a des manières plus vives de s’exprimer. Que celle qui traçait avec tant de plaisir l’ombre de son amant lui disait de choses ! Quels sons eût-elle employés pour rendre ce mouvement de baguette ?
Nos gestes ne signifient rien que notre inquiétude naturelle ; ce n’est pas de ceux-là que je veux parler. Il n’y a que les Européens qui gesticulent en parlant : on dirait que toute la force de leur langue est dans leurs bras ; ils y ajoutent encore celle des poumons et tout cela ne leur sert de guère. Quand un Franc s’est bien démené, s’est bien tourmenté le corps à dire beaucoup de paroles, un Turc ôte un moment la pipe de sa bouche, dit deux mots à demi voix, et l’écrase d’une sentence. Depuis que nous avons appris à gesticuler, nous avons oublié l’art des pantomimes, par la même raison qu’avec beaucoup de belles grammaires nous n’entendons plus les symboles des Égyptiens. Ce que les anciens disaient le plus vivement, ils ne l’exprimaient pas par des mots, mais par des signes ; ils ne le disaient pas, ils le montraient.
Ouvrez l’histoire ancienne ; vous la trouverez pleine de ces manières d’argumenter aux yeux, et jamais elles ne manquent de produire un effet plus assuré que tous les discours qu’on aurait pu mettre à la place. L’objet offert avant de parler ébranle l’imagination, excite la curiosité, tient l’esprit en suspens et dans l’attente de ce qu’on va dire. J’ai remarqué que les Italiens et les Provençaux, chez qui pour l’ordinaire le geste précède le discours, trouvent ainsi le moyen de se faire mieux écouter et même avec plus de plaisir. Mais le langage le plus énergique est celui où le signe a tout dit avant qu’on parle. […]
Ainsi l’on parle aux yeux bien mieux qu’aux oreilles. Il n’y a personne qui ne sente la vérité du jugement d’Horace à cet égard. On voit même que les discours les plus éloquents sont ceux où l’on enchâsse le plus d’images ; et les sons n’ont jamais plus d’énergie que quand ils font l’effet des couleurs. Mais lorsqu’il est question d’émouvoir le cœur et d’enflammer les passions, c’est toute autre chose. L’impression successive du discours, qui frappe à coups redoublés, vous donne bien une autre émotion que la présence de l’objet même, où d’un coup d’œil vous avez tout vu. Supposez une situation de douleur parfaitement connue, en voyant la personne affligée vous serez difficilement ému jusqu’à pleurer ; mais laissez-lui le temps de vous dire tout ce qu’elle sent, et bientôt vous allez fondre en larmes. Ce n’est qu’ainsi que les scènes de tragédie font leur effet
J’ai dit ailleurs pourquoi les malheurs feints nous touchent bien plus que les véritables. Tel sanglote à la tragédie, qui n’eut de ses jours pitié d’aucun malheureux. L’invention du théâtre est admirable pour enorgueillir notre amour-propre de toutes les vertus que nous n’avons point. […]
Ceci me fait penser que si nous n’avions jamais eu que des besoins physiques, nous aurions fort bien pu ne parler jamais, et nous entendre parfaitement par la seule langue du geste. Nous aurions pu établir des sociétés peu différentes de ce qu’elles sont aujourd’hui, ou qui même auraient marché mieux à leur but. Nous aurions pu instituer des lois, choisir des chefs, inventer des arts, établir le commerce, et faire, en un mot, presque autant de choses que nous en faisons par le secours de la parole. […] Il paraît encore par les mêmes observations que l’invention de l’art de communiquer nos idées dépend moins des organes qui nous servent à cette communication, que d’une faculté propre à l’homme, qui lui fait employer ses organes à cet usage, et qui, si ceux-là lui manquaient, lui en ferait employer d’autres à la même fin. Donnez à l’homme une organisation tout aussi grossière qu’il vous plaira : sans doute il acquerra moins d’idées ; mais pourvu seulement qu’il y ait entre lui et ses semblables quelque moyen de communication par lequel l’un puisse agir et l’autre sentir, ils parviendront à se communiquer enfin tout autant d’idées qu’ils en auront. Les animaux ont pour cette communication une organisation plus que suffisante, et jamais aucun d’eux n’en a fait cet usage. Voilà, ce me semble, une différence bien caractéristique. Ceux d’entre eux qui travaillent et vivent en commun, les castors, les fourmis, les abeilles, ont quelque langue naturelle pour s’entre-communiquer, je n’en fais aucun doute. Il y a même lieu de croire que la langue des castors et celle des fourmis sont dans le geste et parlent seulement aux yeux. Quoiqu’il en soit, par cela même que les unes et les autres de ces langues sont naturelles, elles ne sont pas acquises ; les animaux qui les parlent les ont en naissant, ils les ont tous, et partout la même ; ils n’en changent point, ils n’y font pas le moindre progrès. La langue de convention n’appartient qu’à l’homme. Voilà pourquoi l’homme fait des progrès soit en bien soit en mal, et pourquoi les animaux n’en font point. Cette seule distinction paraît mener loin : on l’explique, dit-on, par la différence des organes. Je serais curieux de voir cette explication. […]
Il est donc à croire que les besoins dictèrent les premiers gestes, et que les passions arrachèrent les premières voix. En suivant avec ces distinctions la trace des faits, peut-être faudrait-il raisonner sur l’origine des langues tout autrement qu’on n’a fait jusqu’ici. Le génie des langues orientales, les plus anciennes qui nous soient connues, dément absolument la marche didactique qu’on imagine dans leur composition. Ces langues n’ont rien de méthodique et de raisonné ; elles sont vives et figurées. On nous fait du langage des premiers hommes des langues de géomètres, et nous voyons que ce furent des langues de poètes.
Cela dut être. On ne commença pas par raisonner, mais par sentir. On prétend que les hommes inventèrent la parole pour exprimer leurs besoins; cette opinion me paraît insoutenable. L’effet naturel des premiers besoins fut d’écarter les hommes et non de les rapprocher. Il le fallait ainsi pour que l’espèce vînt à s’étendre, et que la terre se peuplât promptement ; sans quoi le genre humain se fût entassé dans un coin du monde, et tout le reste fût demeuré désert.
De cela seul il suit avec évidence que l’origine des langues n’est point due aux premiers besoins des hommes ; il serait absurde que de la cause qui les écarte vînt le moyen qui les unit. D’où peut donc venir cette origine ? Des besoins moraux, des passions. Toutes les passions rapprochent les hommes que la nécessité de chercher à vivre force à se fuir. Ce n’est ni la faim, ni la soif, mais l’amour, la haine, la pitié, la colère, qui leur ont arraché les premières voix. Les fruits ne se dérobent point à nos mains, on peut s’en nourrir sans parler ; on poursuit en silence la proie dont on veut se repaître : mais pour émouvoir un jeune cœur, pour repousser un agresseur injuste, la nature dicte des accents, des cris, des plaintes. Voilà les plus anciens mots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes et passionnées avant d’être simples et méthodiques.
Jean-Jacques ROUSSEAU, Essai sur l’origine des langues(1781)
.

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comments (2)

II les pouvoirs et fonctions de la parole

http://classiques.uqac.ca/contemporains/gusdorf_georges/la_parole/la_parole.pdf

Textes colles la parole

1-Exprimer  (ou fonction expressive et logique):

a) les besoins

b) les passions

c) les pensées

La parole est-elle le meilleur moyen d’échanger des idées ?

d)les sentiments

problème : pour que l’autre me comprenne, il faut que le langage de l’autre soit le mien. étouffe une voix originale ? cf expression

2) Communiquer (ou fonction informative) :

a)demander

b)nommer, prendre possession du monde, avoir, prendre, connaître la place de chaque chose  dans le monde -mémoriser et transmettre la mémoire du passé

=> un acte de discours s’adresse toujours à quelqu’un (même de manière indirecte), la parole a d’abord une fonction sociale de communication avant l’expression. On ne parlerait pas sans autrui (interlocution).

Cf. Peut-on parler tout seul ?

(monologue parole intérieure, (Dujardin, Faulkner, James Joyce Ulysse monologue intérieur d’un seul personnage pendant une journée)  

mais ce n’est pas le paradigme de toute parole car ce que l’on se dit à soi meme on ne saurait le soutenir devant autrui : rêverie d’une existence qui n’a pas la force de se réaliser.) donc point de départ = dialogue . Le monologue est le commencement de la folie;  l’affrontement avec autrui est le commencement de la sagesse. 

http://medias.dunod.com/document/9782100578887/Feuilletage.pdf

Peut-on parler pour ne rien dire ?

3) La fonction sociale (phatique, performative et  conative)  :

a)phatique, entretenir le lien social (bavardage, faire la conversation…), interpeller, s’assurer du contact, réponse, réception, signifier une appartenance culturelle, sociale (même lexique, grammaire…) : argot, banlieu, jeune/vieux, armée, corps de métier…

La parole : condition du politique ? Une seule langue est-elle souhaitable ?

b)véhiculer règles, codes, valeurs, normaliser (interdits, tabous, blasphème, contexte, ce qu’il faut dire ou ne pas dire…; différences culturelles…) quand, à qui, comment je parle ….? ; loi du silence, omerta, non dits

Peut-on tout dire ?

c)véhicule une mise en forme du réel ( préjugés, croyances, discriminations…) qui reflète et entretient l’organisation sociale.

Ce que parler veut dire  (Bourdieu): langue dominante/ dominée; instrument de domination

d) contracter : coopérer, négocier, échanger, promettre, s’engager, testament, rendre hommage, fêter, célébrer  => début du droit (parole devant les autres– création de l’espace publique// démocratie / ésotérisme)…

parole comme action socio- politique : la parole au chef/au peuple (porte-parole), parler au nom du peuple 

L’oral peut-il s’enseigner ?

http://libertaire.pagesperso-orange.fr/archive/2000/228-mai/clastres2.htm : parler c’est avant tout détenir le pouvoir de parler

la parole du chef 

Faut-il donner la parole au peuple ?

La parole rapproche-t-elle les hommes ?

=> la parole : droits et devoirs (liberté d’expression)

droit de l’enfant : parole et expression 

4) Quand dire c’est faire : la parole comme action (parler pour ne rien dire…)

On parle à quelqu’un, devant, pour les autres, la parole est donc un moyen d’agir sur les autres et sur le monde => éthique de la parole

fonction performative

a)pouvoir créateur de la parole – nommer c’est faire exister : religion, chamanisme, magie (invoquer, superstition…)/  parler de autrui : le reconnaitre comme sujet, nom propre mais rumeur, ragot, bavardage…

Le cratylisme politique : corriger le monde en se contentant de rectifier son langage

Quand le politicien parle au nom de, « leur » parle-t-il ?

b)Parole : pouvoir de en pouvoir sur => parler avec autrui : domination, persuader/convaincre, rhétorique, commander, faire faire, violence, menacer, injurier, blâmer, complimenter, flatter, séduire, maudire, la parole comme outil de contestation et de subversion (parole et violence) la parole : outil de domination ?

1984 Orwell  : appauvrir la parole pour dominer les hommes, Le langage totalitaire au prisme de l’analyse de discours

Langue de bois, jargon 

sophismes

c)Parler à autrui :

-bien dire (morale) : parole comme don, qui ouvre, donne la parole à l’autre (quand ? que ? à qui ?) parole consolante, motivante, guérir par la parole / discours fermé du dictateur, pub ou Etat qui prétend légiférer bonheur, désir des gens… /

esthétique du dire (comment bien parler ? ) forme, intonation, figures de style, métaphore, parabole… plaisir, « changez de ton, mettre les formes, esprit de finesse, citation, poésie, rire, humour, plaisanterie, ironie…

CF. Suffit-il de communiquer pour dialoguer ?

« Au commencement était le Verbe »… nous voilà prévenus. La tradition des religions révélées ne tergiverse pas : il faut la Parole pour créer le monde. Le démiurge ressemble à l’écrivain : il doit nommer les choses pour leur donner l’existence. La parole sert à engendrer, à façonner, à communiquer, à traduire mais elle sert aussi à travestir et à tromper. Cette ambivalence est à la source même de sa richesse. « Words, words, words » s’exclame le Prince du Danemark, perdu dans le labyrinthe des mensonges et faux semblants qui enserrent son existence… Comment parvenir à la vérité des êtres s’ils vous mentent ? Comment accéder à autrui s’il s’échappe par le subterfuge du langage ?

Si on remonte aux origines, prêtons l’oreille à Esope : on raconte que son maître lui demanda un jour de disserter habilement devant les invités d’un banquet. Le docte esclave devait exposer ce qu’était la meilleure chose au monde. Il répondit que c’était la langue parce qu’elle servait à s’exprimer, à louer les dieux, à faire des serments d’amour… Le maître fut satisfait. Renouvelant plus tard l’expérience, il exigea d’Esope qu’il décrive devant les convives la pire des choses. L’esclave expliqua qu’il s’agissait de la langue qui sert à mentir et se parjurer, maudire les dieux et tromper qui vous aime… laissant maîtres et invités dans la plus grande des confusions.

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have No Comments

Analyse concerto pour la main gauche Ravel

D78FE4255C76CAEB14BB6CDDE7896715

Vous trouverez sur ce site de très riches informations pour analyser l’oeuvre

I. LENTO
Introduction + thème A1 Introduction + thème A1 (contrebasson)
Idée fixe Idée fixe
Thème A2 Thème A2
Idée fixe (tutti) Idée fixe
Entrée piano Entrée piano
A1 Piano A1 Piano
A3 Piano A3 Piano
A1 + A2 Orchestre A1 + A2 Orchestre
Thème B piano Thème B piano
A1 Orchestre et piano A1 Orchestre et piano
Pont Pont
II. ALLEGRO
Introduction + motifs jazz Introduction + motifs jazz
Thème C Thème C
« Chinoiserie 1 » Chinoiserie 1
Idée fixe Idée fixe
Idée fixe + thème C (développement) Idée fixe
Thème C + motif jazz Thème C
« Chinoiserie 2 » Chinoiserie 2
Pont Pont
III. LENTO
A3 (orchestre) A3
Cadence piano – idée fixe Cadence piano – idée-fixe
Cadence piano – thème B Cadence piano – thème B
Cadence piano – A1 Cadence piano – A1/A2
Piano (Idée fixe) / Orchestre (A1) Idée fixe-orchestre
Coda ( accords) Coda 1
Coda (reprise Allegro) Coda 2

Ce qu’il faut retenir pour l’analyse comparative :

main gauche; forme concerto (inversée) ; orchestre symphonique; timbres; influence orientale (chinoiserie); pentatonique; jazz; virtuosité; musique descriptive (dépeint les tourments de la guerre, malaise…)

posted by charlierenard in musique and have Comments (2)

Les pouvoirs et fonctions de la parole -introduction

Pourquoi parlons-nous ?

 


Analyse des termes du sujet et Révision de la première partie :

La question « pourquoi? » peut renvoyer à trois interrogations différentes :

  • Quelle est la/les cause(s) ?
  • Quel est le but(s) ?
  • à quoi bon ? (la parole ne rate-t-elle pas son but ?)

Nous avons vu dans notre première partie les causes à l’origine de la parole chez l’homme. Nous allons voir dans cette deuxième partie les fonctions, buts et pouvoirs que confère la parole.

Parler, au sens large, c’est transmettre un message de quelque façon que ce soit. C’est en ce sens que l’on dit par exemple « ce tableau me parle ».
Au sens étroit, parler, c’est faire usage d’un langage articulé, oral. Nous, les êtres humains, sommes doués de parole en ce sens.Il faudra réfléchir sur les raisons qui nous poussent à communiquer en général, mais aussi sur les raisons qui nous poussent à communiquer oralement en particulier.

Problématique

  • Quelles sont les différentes fonctions du langage?
  • Au-delà de ces fonctions, quelles motivations profondes poussent l’être humain à communiquer linguistiquement ?
  • Pourquoi utiliser la parole (langage oral) plutôt qu’un autre type de langage (l’écrit, par exemple)?

Développement

A.  Nous parlons pour communiquer

Parler, c’est utiliser utiliser une langue, c’est-à-dire un système de signes qui sert à communiquer (Ferdinand de Saussure).

Donc, nous parlons pour communiquer, c’est-à-dire transmettre un message, par un canal, à un récepteur, au sujet d’un référent.

Mais la communication peut avoir différentes fonctions (Cf. G. Mounin: les fonctions du langage selon Roman Jakobson) :

Nous parlons pour dire quelque chose  (5) :

  • Fonction informative (fonction de base de communication d’une information sur le référent du message).
  • Fonction expressive (manifestation de l’état du locuteur, en particulier de son état affectif).
  • Fonction métalinguistique (quand le langage se prend lui-même pour objet, c’est-à-dire quand il est utilisé pour parler du langage lui-même, comme dans le cas d’un livre de grammaire française écrit en français).
  • Fonction d’élaboration de la pensée, ou logique (énoncer, préciser, développer, illustrer, argumenter une thèse, comme dans l’exercice de dissertation). Logos, en grec, c’est à la fois le langage et la pensée.
  • Fonction conative (provoquer une réaction de la part du récepteur, soit sous la forme d’un comportement comme obéir à un ordre, soit sous la forme d’un état d’esprit comme réagir à un discours persuasif ou à une pièce de théâtre). => plus pour l’effet produit => action

Nous parlons pour ne rien dire (3):

  • Parler peut être un moyen d’établir le lien préalable à toute communication. C’est la fonction phatique (établir le contact entre l’émetteur et le récepteur, attester d’une reconnaissance réciproque).
  • Parler peut aussi consister à faire quelque chose plutôt qu’à communiquer quelque chose. C’est la fonction performative (Austin). Dire « je te promets de venir demain », ce n’est pas simplement communiquer l’information que je viendrai, c’est aussi faire la promesse de venir. Il n’y a pas d’autres façons de promettre que de dire que l’on promet (d’où le titre de l’ouvrage de Austin : Quand dire, c’est faire).
  • Parler peut enfin consister à créer des formes. C’est la fonction esthétique (créer un univers poétique).

B.  Mais pourquoi communiquer ? (pouvoirs)

  • Nous parlons pour communiquer mais à quoi sert la communication? Pourquoi vouloir communiquer?
  • Nous parlons pour créer des liens avec autrui. Le langage permet l’intersubjectivité sans laquelle l’objectivité n’aurait aucun sens (Michel Tournier, Vendredi ou les limbes du pacifique). Descartes voit même dans le langage la seule façon de sortir de l’isolement du Cogito : je sais que je ne suis pas le seul être pensant au monde parce que les autres hommes parlent comme moi pour exprimer leurs pensées. La fonction expressive a pour finalité la communication des consciences.
  • Nous parlons pour connaître et manipuler le monde. Sans le langage, la science serait impossible. Pour connaître, il faut pouvoir abstraire, pour abstraire, il faut pouvoir représenter symboliquement. La fonction d’élaboration de la pensée a elle-même pour finalité de nous rendre « maître et possesseur de la nature ». (Descartes)
  • Nous parlons pour manipuler, ordonner, dominer. Le langage produit et reproduit un ordre social. C’est un puissant instrument de domination. (La Nov Langue de 1984 de George Orwell). Summum de la fonction conative.
  • Nous parlons pour contester, renverser l’ordre établi. Le langage est aussi un puissant instrument de subversion. Le langage permet de rêver. Il permet l’utopie. Mais l’utopie, justement parce qu’on la sait non réalisée n’est pas pure illusion : elle se donne comme projet. Nous parlons pour pouvoir concevoir l’avenir et ainsi travailler à le faire advenir.

C.  Pourquoi communiquer par la parole ?

  • La parole est orale. Le canal utilisé est l’onde sonore. La parole = acte singulier d’utilisation de la langue par la production de son articulés.
  • La parole échangée est l’espace du dialogue. (Cf texte de Merleau-Ponty sur le dialogue)
  • Dans le dialogue, les interlocuteurs prennent tour à tour la parole. les rôles émetteur/récepteur sont interchangeables entre les interlocuteurs. Le canal est réversible. Mais le véritable dialogue est plus qu’un simple échange de parole. D’où la nécessité, nous dit Platon, de respecter certaines règles (ne pas se contredire, être de bonne foi, écouter, accepter l’objection, être prêt à reconnaître ses erreurs…). La parole échangée suppose un partage d’idées et non la pure affirmation dogmatique d’une opinion. Dans l’échange, on est prêt éventuellement à changer de point de vue.
  • La parole est vivante. L’écriture totalitaire fige la pensée, momifie la créativité, adresse une fin de non recevoir à toute mise en question. N’est-ce pas la raison pour laquelle Socrate accusait l’écriture de rester lettre morte et lui préférait le dialogue, véritable accoucheur des âmes ? « L’écriture », dit Socrate dans le Phèdre, « a de graves inconvénients, tout comme la peinture. Les produits de la peinture semblent vivants, mais posez leur une question, ils gardent gravement le silence. Il en est de même des discours écrits.

par Maryvonne Longeart http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/langage/methode/sujets/dissert/parler/parler.htm#haut

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comment (1)

Conditions de la parole

La parole est un processus qui nécessite plusieurs conditions afin de se réaliser efficacement :

-des conditions psychologiques : être un individu conscient de soi-même et de la collectivité (reconnaissance par et d’autrui), sociabilité

=> -avoir quelque chose à dire, avoir envie, besoin, plaisir à autrui

-des conditions socio-politiques : appartenir à une collectivité disposant d’un code commun, une langue ; maîtriser les règles, normes du discours (tour de parole, se taire, prendre, donner la parole…); connaître ce que l’on doit taire ou dire (liberté, tabou, non-dits, blasphème…)

-des conditions biologiques, anatomiques et physiologiques : organe phonatoire, cerveau (aires), capacité d’abstraction (pas seulement expression des besoins mais communication débats d’idées)

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comments (2)

Fonctionnement et dysfonctionnement de la parole-cerveau…

Langage : notre cerveau a la parole 

fonctionnement de l’appareil phonatoire 

Un trouble de la parole est un problème de communication lié à la parole. Il s’agit d’un trouble caractérisé par l’impossibilité d’émettre un son articulé et modulé dont l’enchaînement des syllabes constitue des mots compréhensibles. Un trouble de la parole génère donc un trouble du langage, mais l’inverse n’est pas vrai puisqu’on peut dire des mots dont l’association n’a aucun sens.

Une personne dans l’incapacité de parler à cause d’un trouble de la parole est désignée comme muette.

La classification de la parole normale et du trouble de la parole sont plus problématiques qu’il n’y parait. Par une classification stricte, seulement 5 % à 10 % de la population possède une manière normale de communiquer par la parole (avec respect de tous les paramètres) et une voix correcte; tous les autres souffrent de dysfonctionnement ou autres.

  • Bégaiement, affecte approximativement 1 % de la population.
  • Dysprosodie, le plus rare trouble neurologique de la parole. Caractérisé par des changements dans l’intensité, dans la synchronisation des mots et dans le rythme, la cadence et l’intonation de mots.
  • Mutisme ou aphasie, incapacité de parler.
  • Troubles des cordes vocales, implique une difficulté à produire des sons vocaux (plus souvent des consonnes, comme /s/ or /r/).
  • Troubles de la voix, implique des difficultés, souvent physiques, dans la fonction du larynx ou de la résonance vocale.
  • Dysarthrie, faiblesse ou paralysie des cordes vocales causée par des dommages aux nerves et/ou au cerveau. La dysarthrie est souvent causée par un accident vasculaire cérébral, la maladie de Parkinson, SLA, des blessures à la tête ou au cou, un accident chirurgical, ou une infirmité motrice cérébrale.
  • Apraxie de la parole, peut être le résultat d’un accident vasculaire cérébral ou être en développement, et implique une production de sons incohérentes de la parole dans un mot (par ex. « patate » peut devenir « tapate » et prochainement « tetapa »). La production des mots devient plus difficile avec l’effort, mais des phrases communes peuvent spontanément être parlées sans effort.

Il existe trois différents types de classification pour déterminer la magnitude des troubles de la parole et les traitements et thérapies à proprement parler

Le bégaiement (également appelé bégaiement persistantbégaiement développemental persistant, ou bégaiement chronique) est un trouble de la parole affectant le débit de la parolecaractérisé par des répétitions et prolongations involontaires des sons, syllabes, mots ou phrases, et par des pauses silencieuses involontaires dans lequel le « bègue » (terme désignant un individu souffrant de bégaiement ou d’un trouble lié) est incapable de produire un son. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) le définit comme une « parole caractérisée par une répétition fréquente de sons et de syllabes ou par des hésitations ou pauses fréquentes, pendant au moins 3 mois », et le classe parmi les « troubles émotionnels ou comportementaux ».

Le bégaiement est défini par d’autres institutions concernées et disciplines médicales, ceci étant souvent l’objet de débats. Le ministère français de la Santé le définit comme un « trouble de l’expression verbale affectant le rythme de la parole en présence d’un interlocuteur ». Le DSM-IV des psychiatres américains le classe comme un « trouble de la communication ». Certains spécialistes francophones ont classé les bégaiements parmi les dyslalies.

Le bégaiement comprend souvent des répercussions psychologiques et sociales modérées voire très lourdes pour la personne affectée. Il existe des cas de suicide où les conséquences du bégaiement sont un facteur avéré mais également à cause des moqueries dont les bègues sont victimes. Dans un grand nombre de pays, et pour les cas assez sévères, il est reconnu par les administrations comme étant un handicap. Certaines personnes concernées refusent au contraire les termes de maladie ou de handicap.

L’aphasie, parfois appelée mutisme dans le langage populaire, est une pathologie du système nerveux central, due à une lésion caractéristique d’une aire cérébrale (l’aire de Broca). Le mot « aphasie » vient du grec « phasis » (parole) et signifie « sans parole ». Ce terme a été créé en 1864 par Armand Trousseau. Depuis cette époque, le mot a pris du sens, en désignant un trouble du langage affectant l’expression ou la compréhension du langage parlé ou écrit survenant en dehors de tout déficit sensoriel ou de dysfonctionnement de l’appareil phonatoire.

On trouve le concept d’aphasie dans la philosophie grecque antique, notamment chez Pyrrhon d’Elis. Celui-ci enseignait que l’essence des choses est indéterminable et indicible. L’aphasie est donc le fait de ne rien pouvoir dire sur les choses. Le fait que les jugements contraires ont exactement la même force conduit Pyrrhon à l’absence totale d’opinion et à l’absence de parole vraie. De plus, la conscience de l’indifférence absolue des choses provoque l’absence d’inclination et son corollaire, l’ataraxie, définie comme l’absence de troubles ou la tranquillité de l’âme. La notion d’ataraxie est commune aux différents courants de la philosophie hellénistique, les Stoïciens, les Epicuriens et les Pyrrhoniens.

Je vous invite à consulter pour plus d’informations l’article sur l’aphasie.

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comment (1)

Ecriture Vs Parole

Dans Les Origines de la pensée grecque, Jean Pierre Vernant retrace l’émergence de la philosophie (et de la démocratie) en Grèce antique. Il souligne l’importance de la révolution mentale opérée par le courant des « physiciens » (Thalès, Anaximandre) lorsque, pour la première fois, ils décidèrent de rompre avec le discours religieux officiel sur les origines du monde pour coucher par écrit (et sans aucun travail poétique de style) leurs réflexions cosmologiques.

L’écriture permet en effet plus de recul critique : proposer par écrit une théorie à la lecture d’un tiers, c’est d’emblée accepter qu’il pourra prendre tout son temps pour analyser l’enchaînement des idées et les tester. Ce comportement d’examen scrupuleux était alors radicalement nouveau, il tranchait avec la fascination qu’opérait la parole religieuse. En effet, jusque-là, le discours sur les origines du monde était le privilège (et le monopole) des personnalités sacerdotales : les Rois-magiciens, « maîtres de vérité ».

Une fois l’an, lors d’une grande commémoration rituelle, le roi-magicien racontait les origines du monde en même temps qu’il mimait le combat contre les Forces du Chaos ; la scénographie, à grand renfort d’encens, de torches et d’effets sonores, plongeait l’assistance dans la stupeur et ne contribuait pas peu à entretenir dans l’esprit du peuple le prestige symbolique du roi identifié au dieu vainqueur du Chaos. Le mythe que le roi (ou grand prêtre) proférait était reçu comme la vérité, inspirait la soumission et n’était pas discutable. A cette époque, la valeur antinomique de la vérité n’était pas l’erreur, mais l’oubli – un oubli sacrilège puisque le mythe était au fondement de toutes les hiérarchies instituées et de toutes les traditions d’usage.

Le courant des physiciens, en proposant par écrit des explications du commencement du monde qui refusaient de faire intervenir des agents divins, non seulement opérait une désacralisation du monde, mais permettait l’émergence d’un type de pensée extérieure à la religion et ouverte au débat d’idées.

C’est dans ce contexte démocratique que la parole joue le rôle essentiel qu’on lui connaît dans la Cité antique. Il aurait été certes impensable alors qu’un orateur lût son discours, tant l’écriture paraît figer un enseignement destiné au contraire à se vivifier par l’oralité spontanée. Telle est la conviction que manifeste Socrate dans le Phèdre : « Une fois écrit, tout discours roule de tous côtés ; il tombe aussi bien chez ceux qui le comprennent que chez ceux pour lesquels il est sans intérêt ; il ne sait point à qui il faut parler, ni avec qui il est bon de se taire. S’il se voit méprisé ou injustement injurié, il a toujours besoin du secours de son père, car il n’est pas par lui-même capable de se défendre ni de se secourir.» Dans l’Antiquité, privée des moyens techniques modernes qui lui donnent un autre statut, la parole remplit parfaitement ses trois fonctions qui sont d’exprimer, d’informer et de convaincre. Dans chacune d’elles, certes à des degrés divers, l’émetteur est bel et bien présent, mais c’est le récepteur qui la conditionne comme le montre le jeu subtil de cache-cache qui peut s’installer dans les fonctions du langage. 

écriture : L’invention de l’écriture 3000 av JC, est un tournant dans l’histoire de l’humanité. Les premiers signes écrits furent probablement destinés à consigner le montant des premières grandes récoltes : l’invention de l’écriture a permis d’organiser le développement économique et la gestion de l’agriculture mécanisée à une échelle inédite; c’est ainsi que l’on sort de l’économie de subsistance caractéristique des temps historiques cas avant l’écriture. la découverte de l’écriture en effet, enclenche l’histoire sa rationalité mais aussi ses violences : on voit immédiatement l’ambivalence des progrès constitutifs à cette invention. car instrument de différenciation : catégories socio économiques distinctes, castes, voire asservissement.

précieuse pour transmettre les idées indispensable pour fixer les savoirs et la mémoire sociale, l’écriture peut se retourner contre ce qui semble être sa vocation : faciliter et enrichir la communication et l’expression de la pensée.

Dans Phèdre, Platon présente ainsi ce don d’un dieu aux hommes comme un cadeau empoisonné : s’ils se reposent sur l’écriture les hommes épargneront puis finiront par négliger leur mémoire 274d. En outre et plus radicalement la connaissance indirecte, figée, extérieure, que fournit l’écrit n’est qu’un simulacre de savoir et non la science elle-même.

// Rousseau : froideur, sécheresse, inauthenticité de ce mode de communication. écriture alphabétique : rationalisation des langues triomphe de l’abstraction par rapport à l’immédiateté (transparence et intimité) des relations de proximité de l’homme à l’état sauvage : «  l’écriture qui semble devoir fixer la langue est précisément ce qui l’altère. »

Essai sur l’origine des langues chap 5

instrument particulièrement efficace et approprié au négoce et au commerce international l’écriture convient aux peuples policés, mais elle n’est qu’un succédané ou encore une parodie de la parole vive 

Chacun voit bien que l’écriture conformément aux intuitions de Rousseau ne fait souvent qu’accentuer les écarts que le langage tend à creuser entre les individus. cette fonction stigmatisante et discriminante de l’écriture et du langage a largement été dénoncée par de nombreux philosophes et sociologues contemporains. l’écriture n’est pas qu’un simple instrument (nocif voire improductif) : elle est au contraire douée d’une certaine autonomie d’une puissance vire d’une violence inattendue.

chez les grecs, tout dépendait du peuple et le peuple dépendait de la parole » Fenelon Lettre à l’Académie IV, : procédé de conservation est la mémoire personnelle et sociale civilisation de l’on-dit, de la rumeur, de la formule du secret de la magie l’autorité appartient aux anciens aux vieillards

à la civilisation orale correspond une culture diffuse une littérature anonyme où les oeuvres non signées appartiennent à tout le monde et à personne c’est l’âge patriarcal de l’épopée = ce qu’on exprime par la parole de la légende ce que l’on raconte de la ballade du conte du dicton inconscient collectif

la parole avait donné la domination de l’espace immédiat liée à la présence concrète l’écriture permet de séparer la voix de la présence réelle fixer le monde le stabiliser, signer son nom et s’affirmer au delà des limites de son incarnation l’écrit consolide la parole

la premiere écriture est magique sacrée hiéroglyphes signes divins réservés aux prêtres et aux rois droit écrit sur tables de la loi dieux communiquent aux hommes

la parole des dieux devient écriture sainte

on passe des orateurs aux lettrés

naissance de caste de privilégiés, langue écrite langue parlée ex : arabe littéraire et parle

invention de l’imprimerie  : pour tous l’esprit critique est né , l’humanisme de la Renaissance se fonde sur l’édition des classiques grecs et latins comme la réforme est rendue possible par la diffusion de la Bible imprimée.

le rôle de la parole ne cesse de diminuer tandis que l’imprimé multiplie sans fin la possibilité de communication entre les hommes

moyens d’enregistrement et diffusion

La parole Gusdorf :

p 113 Nous assistons à une restitution globale de la réalité comme si la civilisation contemporaine civilisation de masse qui rend les hommes absents les uns aux autres s’efforçaient de compenser cette absence en multipliant les possibilités de présence artificielle.

p114 futur :)

une telle transformation ne bouleversera pas seulement la pédagogie. Elle modifiera la structure meme de la pensée car la pensée n’existe pas en dehors de ses instruments et comme préalablement à son incarnation. De même que la parole n’est pas un moyen d’expression mais un élément constitutif de la réalité humaine de meme les techniques d’enregistrement mécanique feront très probablement sentir leur influence au niveau même de l’affirmation personnelle  dans un sens qui demeure pour nous imprévisible. La civilisation du livre cèdera la place à une civilisation de l’image et du son.

 la valeur de l’Ecriture

L’écriture apparaît tantôt comme une fixation trop rigide du langage oral, dont il faut se méfier si l’on veut conserver au langage sa fluidité et son pouvoir indéfiniment créateur ; tantôt comme un moyen précieux de donner au langage une stabilité qu’il ne possède pas naturellement, d’en étende la portée dans l’espace, d’en fixer dans le temps la durée. — On trouve chez Platon le mythe suivant. Le démon Theuth vantait les mérites de l’écriture, qu’il venait d’inventer, au roi égyptien Thamous : “L’enseignement de l’é­criture, ô roi, dit Theuth, accroîtra la science et la mémoire des égyptiens ; car j’ai trouvé là le remède de l’oubli et de l’igno­rance”. Mais Thamous contestait cela : “(…) elle produira l’oubli dans les âmes en leur faisant négliger la mémoire: confiants dans l’écriture, c’est du dehors, par des caractères étrangers, et non plus du dedans, du fond d’eux-mêmes qu’ils chercheront à susciter leurs souvenirs; tu as trouvé le moyen, non pas de retenir, mais de renouveler le souvenir, et ce que tu vas procurer à tes disciples c’est la présomption qu’ils ont la science, non la science elle-même; car quand ils auront beaucoup lu sans ap­prendre, ils se croiront très savants et ils ne seront le plus souvent que des ignorants de commerce incommode parce qu’ils se croiront savants sans l’être.” (Platon)

Julia Kristeva relève une autre fonction de l’écriture : celle qui permet à un sujet d’habiter un réel en le parcourant “horizontalement”, en le traversant infiniment, sans pouvoir cependant le dépasser vers un au-delà transcendant. L’écriture dure, se transmet, agit en l’absence des sujets parlants. Elle utilise pour s’y marquer l’espace, en lançant un défi au temps : si la parole se déroule dans la temporalité, le langage avec l’écriture passe à travers le temps en se jouant comme une configuration spatiale. Elle désigne ainsi un type de fonctionnement où le sujet, tout en se différenciant de ce qui l’entoure, et dans la mesure où il marque cet envi­ronnement, ne s’en extrait pas, ne se fabrique pas une dimension idéale (la voix, le souffle) pour y organiser la communication, mais la pratique dans la matière et l’espace même de cette réalité dont il fait partie, tout en s’en différenciant parce qu’il la marque. Acte de différenciation et de participation par rapport au réel, l’écriture est un langage sans au-delà, sans transcendance.”

Publié par Didier Moulinier à 17:26 pastedGraphic.png

Libellés : * Cours, Langage

 

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comment (1)

Corrigé du DS Grimaldi prépa

Corrigé :

Par la parole, l’absence fait intrusion dans la présence, l’intemporel dans le temporel, l’irréel dans le réel, le surnaturel dans la nature. 

Le désir et le temps Grimaldi

Analyse du sujet :

-La parole est d’emblée considérée comme un outil (« par la parole ») => interroger ce statut, la parole n’est-elle qu’un outil ? ex : elle permet la communication, l’échange, l’expression de la pensée… mais ne constitue-t-elle pas ce qu’elle permet ?

-la parole = toutes les paroles se valent-elles ? y a-t-il différents types de paroles ? ont-elles toutes cette capacité ?

il ne faudra pas se contenter d’analyser la parole de manière abstraite mais bien de faire une typologie de la parole (tri, distinctions…)

-faire intrusion = violence, s’immiscer, violence des mots, parole arme, désordre, bouleverse ordre établi, créé quelque chose de nouveau, perturber, vol, prendre la parole, couper la parole sans qu’on vous l’ai donnée, L’intrusion est le fait pour une personne ou un objet de pénétrer, dans un espace (physique, logique ou relationnel) défini où sa présence n’est pas souhaitée. La notion d’intrusion suppose qu’il existe une volonté de réserver l’accès à des personnes, des ressources physiques ou logiques, à certaines personnes désignées.

L’intrusion est constatée dès le franchissement de la limite entre l’extérieur et l’intérieur même si cette limite n’est que symbolique. (dans un second moment, on réfléchira à cet aspect intrusif de la parole, et du pouvoir que cela confère de la garder, de ne pas la donner…)

une séries de couples de notions antonymes : absence/présence, intemporel/temporel; irréel/réel; surnaturel/nature 

la parole semble permettre l’impossible technique, physique, moral, logique…

elle fusionne les contraires, unifie, réconcilie. ce qui se dégage de cette citation c’est le pouvoir unificateur de la parole.

Il s’agissait donc pour vous d’étudier ce pouvoir unificateur, de l’interroger, d’en voir les limites, les dangers. 

En outre, il peut être utile de remarquer que la citation ne fait pas mention d’autrui (On parle bien à quelqu’un), ni qui parle. Cet aspect peut faire l’objet d’un approfondissement dans une troisième partie. 

Enfin, y a-t-il seulement de la présence, du réel, du temporel ou de la nature sans parole..?  cad sans quelqu’un pour les nommer, en parler, les faire exister. 

problématique possible : La parole facteur d’unité ou de division ? rassemble-t-elle ou sépare-t-elle ? (condition ou ruine de l’unité…)

Exemple de plan possible :

I Le pouvoir unificateur et ses déclinaisons :

le sujet ne mentionne pas les fonctions pourtant apparemment premières de la parole qui sont d’exprimer, d’informer, de convaincre, peut être est-ce parce qu’elles sont contenues dans les différentes antinomies :

-absence/présence : 

signe, symbole permettent de se passer de la chose, ne plus être dans la situation immédiate, abstraction, concept maitrise , intelligence = absence, transcender cf Saussure , propre du langage humain

La parole permet d’exprimer des besoins, pensées, sentiments, souffrances, aspirations, du locuteur. exprimer = faire passer de l’intérieur (ruminement) à l’exterieur, faire savoir, faire exister aux autres

La parole peut aussi constituer une observation plus ou moins subjective des faits, ou encore être la formulation d’une demande. Elle permet de témoigner d’un changement de conception du monde. Dans ce sens, une vérité est la tentative de description de la réalité à l’aide de la parole.

L’origine tout intellectuelle de la parole est d’ailleurs attestée par son étymologie : le mot parole est une contraction du mot parabole (qui en grec ancien siginifie littéralement : lancer à côté). Celle-ci désigne en effet le détour que l’on choisit pour signifier plus éloquemment, l’analogie que l’on établit entre le récit et un discours qui se laisse ainsi mieux discerner que par un enseignement direct.

-intemporel/temporel

souvenirs passés, projections futurs, espoirs craintes angoisses

Mon enfance par exemple, qui n’est plus, se trouve dans le temps passé, qui n’est plus; mais quand je l’évoque et la raconte je regarde son image dans le temps présent car elle est encore dans ma mémoire. Les Confessions Saint Augustin

=> répéter, rapporter les parole de qqn 

-irréel/réel

La parole permet de communiquer l’abstraction et permet sa mémorisation. Une abstraction peut permettre la création de concepts nouveaux distincts de la réalité.

La puissance de la parole dans l’échange va plus loin : il est des mots qui ont du sens pour nous et qui évoquent des associations d’idées, mais qui n’ont pas d’autre réalité que linguistique ! Avec beaucoup d’ironie, Roman Jakobson dans son Essai de linguistique générale (1969), précise cette fonction essentielle de la parole qui n’est pas seulement de permettre d’échanger des sensations, mais de créer un univers de sens et d’inventer du sens à partager :

« Nous n’avons jamais bu d’ambroisie, ni de nectar et n’avons qu’une expérience linguistique (*) des mots « ambroisie », « nectar » et « dieux »- nom des êtres mythiques qui en usaient – néanmoins nous comprenons ces mots et savons dans quel contexte chacun d’eux peut s’employer. » La parole n’est donc pas seulement le moyen de communiquer des idées, elle permet aussi d’inventer des idées et (quand on y trouve un intérêt) de les imposer.

-surnaturel/nature

créer , nommer, faire exister,

Dans la Bible, le mot grec de logos, ?????, désigne la parole de Dieu en même temps qu’il en vient également à désigner Dieu lui-même, comme l’illustre l’évangile de Jean dans lequel il est écrit:

Au commencement était le Verbe et le Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu. (Jean 1:1)4

Cet évangile est composé plusieurs siècles après les œuvres d’Anaxagore qui évoquaient le Noûs (????), l’esprit, et qui prétendaient que l’univers (perçu) est le fruit de l’intelligence, ainsi que de celles de Platon selon lesquelles Socrate voyait (dit-on) un univers créé par soi-même, c’est-à-dire par l’esprit.

Aussi, le christianisme considère le logos divin comme le commencent dont tout procède, c’est-à-dire comme l’origine de toute chose. Ainsi, la Genèse, récit de la Création, est le lieu d’un déploiement de la parole de Dieu d’où va naître la réalité. Par exemple, au verset 3, chapitre 1, la parole de Dieu apparaît, en effet, comme l’origine de la lumière quand il est écrit Dieu dit : Que la lumière soit et la lumière et il semble alors que l’extériorisation de la volonté de Dieu soit l’acte de fondation du réel.

Enfin, selon la tradition chrétienne héritée de l’évangile de Jean, le Verbe s’est doté d’une matérialité en se faisant chair, c’est-à-dire en s’incarnant dans la personne de Jésus-Christ, fils de Dieu.La parole revèle aussi des écritures bibliques. Ces écritures constituent la Parole écrite.

Les paroles considérées comme ayant une force, une puissance spécifique, notamment en parlant des mots d’une formule] Paroles cabalistiques, incantatoires, magiques. Dans le cérémonial de noces bédouin le plus ancien, le fiancé revêt la fiancée d’un manteau spécial appelé «aba» en prononçant ces paroles rituelles: «Que nul autre que moi ne te couvre jamais!» (J. Bousquet, Trad. du sil., 1936, p.238).L’évêque fait une pause pour donner plus de solennité aux paroles consécratoires: «Conférez donc, ô père tout-puissant, nous vous en supplions, la dignité sacerdotale à votre serviteur (…)» (Billy, Introïbo, 1939, p.145).V. charmeur ex. 1.

? Paroles sacramentelles. Paroles rituelles essentielles prononcées lors de l’administration d’un sacrement. Monsieur le curé, lui dit-elle, donnez-moi l’absolution. Le Père Longuemare murmura gravement les paroles sacramentelles (A. France, Dieux ont soif, 1912, p.274).

pouvoir unificateur de la parole divine / la parole humaine divise

À cet égard, dans sa recherche sur le langage, Walter Benjamin reprend la distinction entre l’aspect communicatif et l’aspect symbolique du langage. Il dégage trois étapes dans la genèse du langage : une parole divine et créatrice — « le langage y est créateur de réalité » —, puis une parole nominatrice (dans le récit biblique) — c’est la fonction poétique du langage —, et enfin la perte du pouvoir magique de dénomination par l’épisode de la tour de Babel — le langage se « dégrade en pouvoir de communication».

l’homme transcende le monde en le nommant, si le langage ne crée pas le monde à proprement parler, au moins le place-t-il à la mesure de l’homme et lui permet-il de le comprendre et de se l’approprier. Notre monde est un espace de paroles où la dénomination situe chaque individu et chaque chose dans un environnement cohérent. La parole permet à l’homme d’exprimer (ce qui est invisible, irréel pour les autres), informer (pour ceux qui étaient absents) et convaincre cad changer le réel, modifier.

Transition :

pouvoir : problème pour ceux qui n’ont pas ou ont perdu l’usage de la parole

 

II Limites et dangers de ce pouvoir 

-La parole risque de diviser quand elle n’est pas partagée :

dans ce contexte démocratique, la parole joue le rôle essentiel qu’on lui connaît dans la Cité antique. Il aurait été certes impensable alors qu’un orateur lût son discours, tant l’écriture paraît figer un enseignement destiné au contraire à se vivifier par l’oralité spontanée. Telle est la conviction que manifeste Socrate dans le Phèdre : « Une fois écrit, tout discours roule de tous côtés ; il tombe aussi bien chez ceux qui le comprennent que chez ceux pour lesquels il est sans intérêt ; il ne sait point à qui il faut parler, ni avec qui il est bon de se taire. S’il se voit méprisé ou injustement injurié, il a toujours besoin du secours de son père, car il n’est pas par lui-même capable de se défendre ni de se secourir.» Dans l’Antiquité, privée des moyens techniques modernes qui lui donnent un autre statut, la parole remplit parfaitement ses trois fonctions qui sont d’exprimer, d’informer et de convaincre. Dans chacune d’elles, certes à des degrés divers, l’émetteur est bel et bien présent, mais c’est le récepteur qui la conditionne comme le montre le jeu subtil de cache-cache qui peut s’installer dans les fonctions du langage.

mais cette libération de la parole dialogue n’a été possible que par une multiplication des paroles permise par l’écrit. 

Dans Les Origines de la pensée grecque, Jean Pierre Vernant retrace l’émergence de la philosophie (et de la démocratie) en Grèce antique. Il souligne l’importance de la révolution mentale opérée par le courant des « physiciens » (Thalès, Anaximandre) lorsque, pour la première fois, ils décidèrent de rompre avec le discours religieux officiel sur les origines du monde pour coucher par écrit (et sans aucun travail poétique de style) leurs réflexions cosmologiques.

L’écriture permet en effet plus de recul critique : proposer par écrit une théorie à la lecture d’un tiers, c’est d’emblée accepter qu’il pourra prendre tout son temps pour analyser l’enchaînement des idées et les tester. Ce comportement d’examen scrupuleux était alors radicalement nouveau, il tranchait avec la fascination qu’opérait la parole religieuse. En effet, jusque-là, le discours sur les origines du monde était le privilège (et le monopole) des personnalités sacerdotales : les Rois-magiciens, « maîtres de vérité ».

Une fois l’an, lors d’une grande commémoration rituelle, le roi-magicien racontait les origines du monde en même temps qu’il mimait le combat contre les Forces du Chaos ; la scénographie, à grand renfort d’encens, de torches et d’effets sonores, plongeait l’assistance dans la stupeur et ne contribuait pas peu à entretenir dans l’esprit du peuple le prestige symbolique du roi identifié au dieu vainqueur du Chaos. Le mythe que le roi (ou grand prêtre) proférait était reçu comme la vérité, inspirait la soumission et n’était pas discutable. A cette époque, la valeur antinomique de la vérité n’était pas l’erreur, mais l’oubli – un oubli sacrilège puisque le mythe était au fondement de toutes les hiérarchies instituées et de toutes les traditions d’usage.

Le courant des physiciens, en proposant par écrit des explications du commencement du monde qui refusaient de faire intervenir des agents divins, non seulement opérait une désacralisation du monde, mais permettait l’émergence d’un type de pensée extérieure à la religion et ouverte au débat d’idées.

  • mais son partage risque sa dévalorisation :
  • la prolifération des paroles est aussi responsable de leur dévalorisation. Le mot parole peut être péjoratif quand il désigne le vain bavardage, le verbiage prétentieux, la logorrhée, voire le boniment du charlatan.

Thomas Hobbes, déterminant les quatre usages de la parole, mettait déjà en garde contre quatre abus qui manifestent tous la perversion du rapport sincère et bienveillant que la parole authentique doit ménager entre les hommes.

Le langage, ici, est défini par ses usages – formuler sa pensée, l’exprimer, instruire, agir sur autrui – et par ses abus – parler sans savoir ce que l’on dit « à cause de l’inconstance des mots », abuser des métaphores, se tromper sur ses propres volontés et nuire à autrui. Le bien-dire est la seule garantie dont nous disposions pour parvenir au vrai. « La vérité consiste en l’exacte mise en ordre des noms dans nos affirmations. » Il faut donc, selon Hobbes, procéder à la manière des géomètres et partir de définitions claires, afin de ne pas s’empêtrer dans la glue des mots vagues et des expressions insensées telles que les philosophes (avant tout les scolastiques) en ont abusé. Redonner un vrai sens aux mots de la tribu, tâche du souverain, revêt donc une portée éminemment politique : c’est éviter les fausses querelles qui conduisent aux guerres civiles, en créant les conditions de possibilité du lien social.

Au-delà de cet emploi malhonnête des mots, et de la manipulation que Machiavel jugeait nécessaire à l’homme d’Etat, il faut pointer le danger de fossilisation que court la parole lorsqu’elle ne correspond plus qu’à un discours formaté, et c’est peut-être ce que l’on constate le plus aujourd’hui dans une civilisation où le mot communication est à tous les carrefours de la vie publique. Merleau-Ponty écrit : « Nous vivons dans un monde où la parole est instituée. Pour toutes ces paroles banales, nous possédons en nous-mêmes des significations déjà formées. Elles ne suscitent en nous que des pensées secondes; celles-ci à leur tour se traduisent en d’autres paroles qui n’exigent de nous aucun véritable effort d’expression et ne demanderont à nos auditeurs aucun effort de compréhension. Ainsi le langage et la compréhension du langage paraissent aller de soi. Le monde linguistique et intersubjectif ne nous étonne plus, nous ne le distinguons plus du monde même, et c’est à l’intérieur d’un monde déjà parlé et parlant que nous réfléchissons. Nous perdons conscience de ce qu’il y a de contingent dans l’expression et dans la communication, soit chez l’enfant qui apprend à parler, soit chez l’écrivain qui dit et pense pour la première fois quelque chose, enfin chez tous ceux qui transforment en parole un certain silence. Il est pourtant bien clair que la parole constituée, telle qu’elle joue dans la vie quotidienne, suppose accompli le pas décisif de l’expression. Notre vue sur l’homme restera superficielle tant que nous ne remonterons pas à cette origine, tant que nous ne retrouverons pas, sous le bruit des paroles, le silence primordial, tant que nous ne décrirons pas le geste qui rompt ce silence. La parole est un geste et sa signification un monde.» (Phénoménologie de la perception).

-risque de « geler les paroles », de prendre pour des évidences, du bien connu nos habitudes, nos « tics » de langage, bref de croire aux mots que nous inventons (réel/irréel)

-créer des évènements, des problèmes en créant les mots et en en parlant : les journalistes pour Bourdieu

P. Bourdieu fustige d’ailleurs la mauvaise foi des journalistes qui prétendent ne parler de ces événements que pour les dénoncer alors qu’ils les renforcent en les représentant.

L’usage social de la parole a déterminé des langages particuliers nommés idiomes, langues, dialectes, parlers. L’utilisation d’une langue ou le choix des mots n’est pas neutre parce que le langage structure la pensée. Les querelles linguistiques ou atteintes aux langues peuvent être des tentatives de sujétion de l’Homme en imposant des paradigmes, comme dans le cas de la langue ou des expressions d’un groupe dominant.

=> ôter la parole, liberté de parole , porter la parole

-allégorie de la caverne Platon , parole apparences sophistes, Protagoras 

La philosophie nominaliste  dénonçait dans les idées générales, dans les abstractions, un artifice de la pensée; elle n’y voyait rien de plus consistant que les mots les désignant, un bruit de paroles, «flatus vocis» (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p.134):

« Ainsi m’est-il apparu une nouvelle vérité et c’est qu’il est vain et illusoire de s’occuper de l’avenir. Mais que la seule opération valable est d’exprimer le monde présent. Et qu’exprimer c’est bâtir avec le disparate présent le visage un qui le domine, c’est créer le silence avec les pierres. Toute autre prétention n’est que vent de paroles… » Saint-Exup., Citad., 1944, p.5

-même en science danger des idoles du forum dénoncés par Bacon 

-paroles en l’air, promesse , donner sa parole d’honneur Dégager, rendre, reprendre, retirer sa parole. Revenir sur un engagement. 

ne pas avoir, être de parole , homme de parole

III remise en cause du sujet 

-la question de l’écriture : les paroles s’envolent, les écrits restent

-la parole créatrice : Bien sûr le conformisme de l’habitude guette cet ensemble codifié pour y imposer une routine rassurante. Parfois il faut revivifier cette « parole gelée » et accepter le vertige soudain d’un univers méconnaissable. Ainsi en est-il de la parole poétique, qui doit s’écarter du langage utilitaire pour éveiller une compréhension inédite de l’univers par de nouvelles associations, de nouveaux sons, voire de nouveaux mots.

-la question d’autrui 

pour être authentique et unificatrice,  la parole doit se préoccuper du récepteur 

Il ne suffit pas pourtant de cultiver pour soi seul une parole affranchie des formule routinières. Celle-ci doit pour s’accomplir trouver son destinataire : « la parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l’écoute », dit Montaigne (Essais, III, XIII). Faute de cela, elle est en effet lettre morte. La parabole du Semeur désigne bien les responsables de cette stérilité : le manque de constance, la faiblesse, les tentations faciles et distrayantes offertes par le monde. Dans l’artisanat de la parole, ce travail rhétorique dont Platon a dénoncé la perversité chez les Sophistes, l’effort est autant à placer du côté de l’émetteur que du côté du récepteur. La bonne Parole n’est pas forcément celle qui a fourbi toutes les recettes et les astuces du langage, si elle ne doit plus aboutir qu’à s’imposer chez des auditeurs passifs, sans avoir à lever, comme le grain de la parabole. Car si la parole exprime la spécificité humaine, ce n’est pas tant par sa capacité à nommer les choses que par les relations qu’elle autorise à l’intérieur d’un groupe, scellant la vocation sociale de l’animal humain : « Si l’homme est infiniment plus sociable que les abeilles et tous les autres animaux qui vivent en troupe, c’est évidemment, comme je l’ai dit souvent, que la nature ne fait rien en vain. Or, elle accorde la parole à l’homme exclusivement. La voix peut bien exprimer la joie et la douleur ; aussi ne manque-t-elle pas aux autres animaux, parce que leur organisation va jusqu’à ressentir ces deux affections et à se les communiquer. Mais la parole est faite pour exprimer le bien et le mal, et, par suite aussi, le juste et l’injuste ; et l’homme a ceci de spécial, parmi tous les animaux, que seul il conçoit le bien et le mal, le juste et l’injuste, et tous les sentiments de même ordre, qui en s’associant constituent précisément la famille et l’État.» (Aristote, La Politique, Livre I § 10).

Considérant la parole en tant que rencontre, nous touchons alors à la question de la compréhension entre deux sujets qui établissent une communication, ce « rapport entre deux sujets dans un champ de compréhension ». Dans son texte, Georges Gusdorf souligne l’expression « champ de compréhension », parce qu’il fait appel à un troisième terme crucial, « l’autre ». Ainsi, l’homme appelle le monde à l’existence par sa parole : l’homme s’exprime, énonce, parle son point de vue, dit un discours, « mais un troisième terme s’avère nécessaire, c’est l’autre, auquel ma parole s’adresse. Je parle parce que je ne suis pas seul ». Le moi n’existe que dans la réciprocité avec l’autre : « La parole est ici comme le trait d’union »

Également, dans Problèmes de linguistique générale, Émile Benveniste rappelle que la conscience de soi, qui s’exprime par le « je », se pose avant tout en se distinguant de ce qui est autre qu’elle ; prendre conscience du « soi » présuppose le langage et la distinction je/tu. La subjectivité est traitée dans son rapport au langage comme « capacité du locuteur à se poser comme sujet » :

La conscience de soi n’est possible que si elle s’éprouve par contraste. Je n’emploie je qu’en m’adressant à quelqu’un, qui sera dans mon allocution tu. C’est cette condition de dialogue qui est constitutive de la personne, car elle implique en réciprocité que je deviens tu dans l’allocution de celui qui à son tour se désigne par je. Le langage n’est possible que parce que chaque locuteur se pose comme sujet, en renvoyant à lui-même je dans son discours.  cf Kant

L’effort du créateur demande en réciprocité un effort analogue de dépouillement : la communication implique un partage de difficulté. Or le lecteur moyen, l’auditeur ou le spectateur banal croient pouvoir obtenir sans y mettre le prix ce qui a coûté tant de peine au créateur : il préférera toujours l’écrivain ou l’artiste à la mode qui parle et qui sent comme tout le monde.

Pour Socrate, l’exercice de la parole consiste à faire découvrir à l’interlocuteur, par une série de questions, les vérités qu’il porte en lui. Ainsi dans le Gorgias, qui porte sur le thème de la rhétorique, Socrate réfute l’idée du pouvoir d’une parole qui peut faire croire n’importe quoi : « Il faut distinguer faire croire et faire savoir. Le savoir suppose l’acquisition raisonnée d’une connaissance ». De même, dans les récents travaux de Françoise Waquet sur l’oralité et la transmission du savoir, nous trouvons maintes descriptions et analyses des différentes formes de l’oralité qui se sont imposées pour la transmission du savoir (conversation, symposium, séminaire…), par « la supériorité de la parole sur l’écrit, et partant, de l’instruction orale sur celle donnée par les livres » dont parlait encore Socrate dans le Phèdre de Platon.

Et Socrate de montrer les effets féconds de la parole pour la communication du savoir, tout particulièrement lorsqu’elle se donne dans l’entretien entre le maître et l’élève, en fait, dans le dialogue.

posted by charlierenard in la parole,prépa and have No Comments

buy windows 11 pro test ediyorum