PhiloStjo

Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

Archive for the 'prépa' Category

La parole : condition du politique ? Une seule langue est-elle souhaitable ?

Cf. Aristote les Politiques 

Pour Hobbes, l’homme est un être naturel capable d’artifice : le langage, une convention arbitraire pour enregistrer ses pensées, des noms, signes pour communiquer. Le langage est condition de la sociabilité. Sans lui « il n’y aurait eu pas plus de république, de société, de contrat et de paix que parmi les lions, les ours et les loups. » Léviathan IV cette capacité à réfléchir et à communiquer à partir de signes arbitraires ou de dénominations conventionnelles est ce que Hobbes appelle « raison ». L’homme qui raisonne ne se contente pas d’observer comme peuvent le faire les animaux, des ressemblances entre les phénomènes de la perception, mais il perçoit des rapports entre des signes. Ce calcul suppose une forme d’abstraction, puisque calculer ce n’est pas percevoir mais bel et bien raisonner c’est à dire combiner des signes et effectuer des opérations.

L’homme est à la fois un animal politique et un être parlant. De meme que la parole ne lui est pas donnée mais suppose un apprentissage, de meme l’homme n’est pas un animal politique par nature mais par discipline c’est à dire par artifice et par institution. La parole est à la fois ce qui permet aux hommes de s’accorder et de se contredire.  En ce sens, elle fait de la sociabilité et de la politique des problèmes plutôt que des évidences. (=> Cf. question de l’autorité chez Hobbes)

La loi devient la parole de celui qui doit commander aux autres.

Le contrat linguistique est un des aspects les plus fondamentaux du contrat social : une même nation, un patrimoine commun, une même langue. Mais ce n’est pas un système fermé. Toute tentative pour fixer une langue par voie d’autorité s’est vu soldée par un échec ainsi qu’en témoigne l’expérience de l’Académie française chargée par Richelieu qui fonde la monarchie absolue, de faire régner l’ordre dans le langage. Le dictionnaire, code du bon usage, ne peut le fixer. L’arbitraire royal est ici sans pouvoir. Une langue n’est pas une somme mais un horizon mouvant; la langue fournit le cadre de la parole mais n’existe que dans la parole qui l’assume et la promeut.

 

Le langage contribue-t-il à unir ou à diviser les hommes ?

 


Analyse des termes du sujet

Le langage est à la fois

  1. la faculté propre à l’être humain de créer et d’utiliser des systèmes de signes pour communiquer ;
  2. la langue comme système de signes au sens de Ferdinand de Saussure.

Une langue, selon la définition de Ferdinand de Saussure, est un système de signes conventionnel et doublement articulé qui sert de moyen de communication et d’échange. Une langue est propre à une culture, ou une nation, avec une grammaire, une syntaxe, un vocabulaire spécifiques.

Si communiquer permet d’établir des liens, la diversité des langues semble créer des barrières. Mais le problème de la division ne se ramène pas à celui de la diversité des langues ; de même, l’union ne serait pas garantie par l’existence d’une langue universelle.

Mais avant d’aller plus loin dans la réflexion, Il convient de remarquer que unir/diviser sont des termes vagues qui peuvent avoir différentes significations.  Ce sont des termes antagonistes (antonymes), ce qui laisse présupposer que le « ou » du sujet est un ou exclusif : l’un ou l’autre mais pas les deux.

Unir, au sens large du terme, veut dire lier. En général, l’union intervient entre des termes qui sont différents. Il ne faudra pas confondre union et uniformisation (rendre semblable) ou unification (rendre unique). Cependant, il se peut que l’uniformisation favorise l’union et l’unification peut être considéré comme un cas limite de l’union.

Le langage étant une faculté commune à tous les hommes et la langue étant définie comme un moyen de communication, on voit immédiatement en quoi le langage, aux deux sens dégagés plus haut, crée un lien entre les hommes. Cependant, il peut y avoir différents types de liens entre les hommes : des liens sociaux, économiques, culturels, personnels … Et ces liens peuvent être plus ou moins étroits : être unis, c’est être en harmonie, ou complémentaires ou solidaires ou complice ou indissociables … Il ne faut donc pas s’en tenir au lien le plus évident, en particulier à celui de la communication.

L’union est souvent associée à l’entente qui ne signifie ni simplement communication ni, de manière plus positive, concorde. S’entendre, c’est communiquer mais aussi partager, s’accorder, se comprendre. Ainsi on peut communiquer sans pour autant se comprendre et s’accorder.

Diviser, au sens large du terme, veut dire séparer. L’idée que le langage séparerait les hommes semble paradoxale. Comment un moyen de communication qui lie par définition, peut-il séparer ? De même qu’il y a plusieurs façon d’être unis, il y a plusieurs façon d’être séparés. La séparation peut prendre la forme de l’absence de communication, de l’absence de collaboration, de l’absence de compréhension, de l’absence de reconnaissance. La division peut se manifester par l’indifférence, l’exploitation, le mépris ou la guerre.

Le langage peut contribuer à, c’est-à-dire être un facteur d’union ou de division parce qu’il en est soit une condition nécessaire, soit une condition suffisante, soit une condition à la fois nécessaire et suffisante ou encore parce qu’il est simplement un élément favorisant sans être ni nécessaire ni suffisant.

Problématique

Partons de ce simple constat : les hommes sont unis puisqu’ils vivent en société ; ils sont divisés puisqu’ils sont en perpétuel conflit.

Si le langage est spécifiquement humain, quel rôle joue-t-il dans ce double processus ?

Les hommes communiquent grâce au langage. Ils sont donc, en un certain sens, unis par le langage, comme le montre le simple schéma d’une situation de communication :

Mais le simple fait que des divisions existent semblent indiquer que la communication linguistique n’est pas une condition suffisante de l’union à tous les sens du terme. En est-il au moins une condition nécessaire ?


Eléments pour le développement

1 – Le langage en tant qu’il favorise la communication est nécessaire à la constitution de liens sociaux.

Pas de société sans moyen de communication (langage au sens large).

Vivre ensemble suppose un minimum de coordination et d’échange, donc un minimum de communication entre les membres de la communauté. Ex. : les codes de signaux des insectes sociaux.

Or, le langage humain, en associant dans les signes une chose matérielle quelconque (sonorité, dessin, geste…) et un concept de façon conventionnelle et arbitraire, constitue un puissant moyen de communication : il est polyvalent (on peut virtuellement échanger sur tout), économique (grâce à la double articulation) et évolutif (il peut toujours s’adapter et s’enrichir). Il permet donc au plus haut point la coordination de l’action et l’échange d’information.

En tant que moyen de communication, le langage humain permet l’intersubjectivité. Descartes voit même dans le langage la seule façon de sortir de l’isolement de la conscience de soi : je sais que je ne suis pas le seul être pensant au monde parce que les autres hommes, contrairement aux animaux, parlent comme moi pour exprimer leurs pensées. Le langage permet la communication des consciences.

Pas de société proprement humaine sans langage au sens étroit du terme (système de signes conventionnel et doublement articulé).

Plus particulièrement, pas d’état de droit sans langage.

Le caractère abstrait et conventionnel du langage humain permet la relation contractuelle. De la simple promesse au Code civil en passant par le contrat juridique, le langage lie les contractants par la parole engagée ou le texte signé qui remplacent les mécanismes innés et les simples rapports de force naturels. Le langage, par l’intermédiaire du droit, règle les relations humaines sur la base d’un consensus (accord volontaire).

Ainsi, ce que le langage permet d’élaborer, c’est un monde commun qui n’est pas seulement un monde de choses, mais un ensemble de valeurs. Le langage unit non seulement parce qu’il favorise la communication, mais aussi parce qu’il favorise la « communion », c’est-à-dire l’instauration des règles communes morales, juridiques ou esthétiques. Les notions de Bien/Mal, Juste/Injuste, Beau/Laid comme d’ailleurs celles de Vrai/Faux n’existent que dans et par le langage. Elles supposent le jugement.

Le langage en ce sens n’est pas seulement un outil qui permet de communiquer les valeurs communes, il contribue à les céer. La linguistique a bien montré que la langue modèle et construit notre rapport au monde : on pense comme on parle. Une communauté linguistique est une communauté culturelle. On résume cette idée sous le nom de deux linguistes « hypothèse de Sapir et Whorf ».

Voir Annexe 1 ci-dessous.

Pas de transmission culturelle sans langage

Non seulement le langage, en tant que porteur d’une vision du monde, unit culturellement les membres d’une même communauté linguistique, grâce au langage, cette vision commune est transmise de génération en génération. L’union des individus dépasse donc le cercle de la communauté réelle des vivants : en transmettant l’héritage culturel, le langage permet de lier les générations présentes aux générations passées et aux générations futures.

Porteur de l’identité culturelle, le langage n’est-il pas en même temps porteur de la diversité culturelle, justement pour la même raison : son caractère conventionnel ?


2 – Le langage n’est pas une condition suffisante de l’union : en unissant, il divise en tant qu’il renforce la diversité et crée la discrimination

La diversité des langues et des cultures divise les êtres humains

On communique et on s’identifie – du moins, on le peut -, grâce au langage. Mais se comprend-on ?
Evidence contraire à celle de la première partie : on communique souvent sans pouvoir pénétrer les subtilités de telle ou telle culture et la langue de la communication, des échanges ou des contrats ne nous rapproche pas toujours suffisamment de nos interlocuteurs.

C’est qu’autre chose se joue dans la langue qu’une simple fonction générique – ce que nous avons nommé plus haut fonction linguistique : il s’y joue aussi le rapport avec une culture, une vision du monde, des valeurs.
Il faut donc prendre au sérieux l’obstacle et sous les conflits de mots, il faut savoir saisir les conflits de choses ou d’intérêts.

A l’intérieur d’une même communauté, la langue peut être un instrument de malentendus ou de discrimination 

Le langage peut être source de malentendus, volontaires (le mensonge) ou involontaires. (Il faut analyser pourquoi. Cela tient à la nature même du langage).

Le langage peut être un instrument de violence symbolique : insultes, manipulations, mensonges.  Ex. : les discours racistes

Cependant, la prise de conscience de l’obstacle et de sa nature est peut-être moins une menace qu’un espoir.


3 – Le langage unifie en tant qu’il permet la recherche de la vérité dans le dialogue

Le langage permet de connaître des cultures différentes et de les accepter

Savoir s’unir, c’est peut-être d’abord savoir entendre et accepter ce qui nous sépare. La langue est à ce titre un vecteur essentiel. Comme on l’a vu, c’est en elle et par elle que sont véhiculées les visions du monde propres à chaque peuple. Mais une langue peut toujours s’apprendre. La faculté du langage chez l’homme n’est pas restreinte à l’utilisation d’un code de signaux prédéterminé. Ce qui permet la diversité culturelle permet aussi la compréhension transculturelle. Cette diversité des langues et des cultures, dont on a vu qu’elle était facteur de dissension, est aussi une richesse. Dès lors, vouloir la supprimer, ce serait vouloir supprimer des différences (et l’effort pour comprendre des différences) sans lesquelles il n’y aurait pas d’échange de culture et, finalement de véritable union entre les peuples !

L’ethnocentrisme qui consiste à rejeter dans la nature (sous le nom de « barbarie ») les formes culturelles les plus éloignées de celles qui nous sont familières divise et détruit (ex. : le colonialisme). Mais le vrai barbare n’est-il pas celui qui, par étroitesse d’esprit, refuse de reconnaître la différence ? Ainsi, dit Lévi-Strauss : « Le barbare est celui qui croit en la barbarie ». (Etymologiquement, le mot « barbare » renvoie au chant inarticulé des oiseaux.

Peut-on « entendre » ceux qui ont été réduits au silence ? La véritable entente ne passe-t-elle pas par l’acceptation d’entendre les différences ? Et, de ce point de vue, le langage, s’il n’est pas suffisant à garantir l’union (au sens de la compréhension) entre les hommes, en est la condition nécessaire

L’effort pour se mettre d’accord sur des valeurs fondamentales communes au-delà de la diversité culturelle témoigne de cette conciliation grâce au dialogue entre les peuples. : Déclaration universelle des droits de l’Homme de l’ONU. Il s’agit bien d’un texte rédigé dans le dialogue.

Le langage permet aux individus, et pas seulement aux groupes, de confronter des points de vue différents, de les tolérer et, dans le meilleur des cas, d’atteindre une vérité partagée.

Voir le texte de Merleau-Ponty sur le dialogue.

Qu’est-ce qu’un dialogue ? Le véritable dialogue est plus qu’un simple échange de parole. D’où la nécessité, nous dit Platon, de respecter certaines règles (ne pas se contredire, être de bonne foi, écouter, accepter l’objection, être prêt à reconnaître ses erreurs…)

Le dialogue s’oppose à la fois au discours et à la simple conversation. C’est une communication linguistique orale qui suppose l’échange de vues

Dans le dialogue, les interlocuteurs prennent tour à tour la parole. Les rôles émetteur/récepteur sont interchangeables entre les interlocuteurs. Le canal est réversible. Mais le véritable dialogue est plus qu’un simple échange de paroles : l’échange dialogué suppose un partage d’idées et non la pure affirmation dogmatique d’une opinion. D’où la nécessité, nous dit Platon, de respecter certaines règles (ne pas se contredire, être de bonne foi, écouter, accepter l’objection, être prêt à reconnaître ses erreurs…). La parole échangée suppose la recherche d’une vérité partagée et non la pure affirmation dogmatique d’une opinion. Dans l’échange, on est prêt éventuellement à changer de point de vue.

Le Dialogue, dit Merleau-Ponty, nous fait sortir de notre subjectivité en créant un « tissu commun ».

Que faut-il entendre par « tissu commun »? Il s’agit d’une même vérité. De plus, Merleau-Ponty nous dit que ce tissu se fait à deux : comme dans un tissage, il faut deux fils, la trame et la chaîne; l’un des interlocuteurs fournit la trame, l’autre la chaîne et la signification commune (le tissu commun) est la résultante des deux. Le dialogue crée ainsi un « terrain commun ».  Il s’agit du monde en tant qu’il est non seulement mon monde, mais aussi le vôtre. Le langage, et plus particulièrement son exercice dans le dialogue, est une condition de possibilité de l’objectivitéCela ne veut pas dire que moi et mon interlocuteur avons les mêmes pensées, les mêmes points de vue. Bien au contraire : il faut deux fils distincts pour faire un tissu, la chaîne et la trame qui s’entrecroisent mais ne se confondent jamais. Nous pensons différemment, mais nous pensons ensemble. « Penserions-nous beaucoup et penserions-nous bien si nous ne pensions pas pour ainsi dire en commun avec les autres? » (Kant)

Ainsi, Le dialogue libère de l’opinion. C’est la liberté de pensée, la pensée libérée de la subjectivité, autrement dit, c’est l’objectivité que le langage rend possible. Le lien par excellence entre les hommes n’est-il pas cette possibilité d’une science partagée ?

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comment (1)

La liberté d’expression

http://barthes.ens.fr/scpo/Presentations99-00/Bjorstad/

Aussi loin que l’on puisse remonter dans l’Histoire, on observe que l’expression des idées, principalement sous sa forme verbale, mais aussi par l’écrit, a suscité l’intérêt des penseurs.

À l’origine, elle était avant tout considérée comme un élément essentiel du processus de structuration sociale permettant d’atteindre les idéaux suprêmes de vérité, de perfection et de justice.

Ainsi dès les vie et ve siècles avant l’ère chrétienne, en Chine, si certaines des maximes attribuées à Lao Tseu semblaient surtout inciter le sage à mener une vie purement intérieure sans exprimer ses idées, Confucius recommandait l’attitude inverse aux êtres supérieurement évolués, affirmant qu’il leur incombait de faire œuvre de pédagogue en enseignant les lois du ciel au peuple., car « l’homme parfait ne se borne pas à se perfectionner lui-même et s’arrêter ensuite; c’est pour cette raison qu’il s’attache aussi à perfectionner les autres êtres ».

Dans sa réflexion sur la détermination des valeurs sociales, l’antiquité gréco-romaine, considérant l’expression orale comme une forme naturelle de communication sonore propre à la société humaine, accordera elle aussi une place essentielle à son usage, dont le procédé du dialogue platonicien offre une illustration patente. Ainsi, pour Aristote : «La nature, qui ne fait rien en vain, n’a départi qu’à l’homme seul le don de la parole qu’il ne faut pas confondre avec les sons de la voix. Ceux-ci ne sont que l’expression des sensations agréables ou désagréables dont les autres animaux sont susceptibles comme nous. La nature leur a donné un organe borné à ce seul effet, mais nous avons de plus qu’eux, sinon la connaissance développée, au moins tous le sentiment obscur du bien et du mal, de l’utile et du nuisible, du juste et de l’injuste; objets pour la manifestation desquels nous a été principalement accordé l’organe de la parole. C’est ce commerce de la parole qui est le lien de toute société domestique et civile». Cicéron, persuadé que le premier principe naturel de la société résidait dans «le commerce de la raison et de la parole», considérait lui aussi que «c’est en s’instruisant les uns les autres, en se communiquant leurs pensées, en discutant, en portant des jugements, que les hommes se rapprochent et forment une certaine société naturelle. Rien ne nous distingue davantage des bêtes : dans quelques-unes nous reconnaissons la force, comme dans les chevaux et les lions mais jamais nous ne leur attribuons l’équité, la justice, la bonté, parce qu’elles n’ont ni la raison, ni la parole».».

Déjà à cette époque, l’expression des idées était considérée différemment en fonction de la valeur prêtée à leur contenu, puisqu’on estimait que celles imposées à l’aide d’arguments fallacieux alors qu’elles étaient mauvaises ou injustes pouvaient s’avérer nuisibles pour la société. Ainsi, Platon, recensant les défauts des systèmes politiques de l’époque, dénonçait les courtisans qui par leurs conseils intéressés induisaient en erreur les gouvernants. Aristote analysait les multiples facteurs susceptibles d’affecter la vérité des discours et affirmait que «celui qui fait un mauvais usage de cette puissance de la parole peut faire beaucoup de mal». Cicéron lui aussi, bien qu’ayant initialement assuré que l’éloquence ferait triompher le bon et le juste, n’en reconnaissait pas moins par la suite qu’il était possible qu’un homme utilise la parole sans se soucier de la morale et du devoir, ce qui le rendait «inutile à lui-même, et nuisible à sa patrie».

Si on estimait que le risque d’un mauvais usage de la parole ne justifiait pas qu’on l’interdise, puisque selon Aristote, une telle objection pouvait «être également dirigée contre toutes les bonnes choses, et surtout contre ce qu’il y a de plus utile, comme la force, la santé, les richesses, l’art militaire», on n’en admettait pas moins qu’un traitement différent soit réservé à l’expression selon son contenu et selon son auteur.

Le Procès de Socrate, poursuivi et condamné pour avoir tout à la fois corrompu la jeunesse, méprisé les dieux de la Cité et tenté de leur en substituer de nouveaux, illustrait bien les risques encourus à exprimer des conceptions heurtant les titulaires du pouvoir.

Platon en avait conclu que les dirigeants des cités grecques n’avaient pas la sagesse nécessaire à l’exercice de leurs fonctions, et qu’à l’époque il fallait absolument «quand on veut combattre pour la justice et si l’on veut vivre quelque temps, se confiner dans la vie privée et ne pas aborder la vie publique». Aussi, dans La République, prônait-il un schéma de Cité idéale dans laquelle la magistrature suprême devait être confiée à une aristocratie de philosophes spécialement recrutés et formés, détenteurs de la connaissance puisqu’ils «contemplent les choses dans leur essence». Un tel mode d’organisation impliquait lui aussi une inégalité de traitement entre gouvernants et gouvernés dans l’usage des facultés d’expression. En effet, à la différence des philosophes, la masse du peuple, faute d’appréhender les «essences», était réputée incapable de sagesse. Platon estimait qu’elle ne pouvait juger que «sur l’apparence», et ne lui prêtait donc pas de véritables «connaissances», mais des «opinions», c’est-à-dire «quelque chose d’intermédiaire entre la science et l’ignorance». Aussi, les critiques et suggestions qu’elle ne manquerait pas de formuler ne pouvaient qu’être illégitimes et dangereuses, et pour préserver le bon fonctionnement des institutions les magistrats devaient les ignorer, alors qu’eux-mêmes étaient autorisés, «pour tromper l’ennemi ou les citoyens dans l’intérêt de l’État», à utiliser le mensonge, en revanche interdit aux citoyens.

Durant quelques siècles, on continuera à apprécier la transmission des idées par référence à la nécessité de protéger des valeurs sociales, essentiellement religieuses, considérées comme suprêmes. Ainsi, pour Saint Augustin, les discussions autour de la foi en Dieu étaient toujours vaines et oiseuses puisque l’homme aspirant à vivre selon lui-même vit en réalité selon le mensonge alors que seul Dieu est la Vérité.

C’est à partir de la Renaissance que dans un contexte d’exacerbation des tensions interconfessionnelles, le courant humaniste, amplifié par le développement de l’imprimerie, s’efforcera de présenter l’expression des convictions comme un moyen d’accomplissement personnel et d’émancipation de l’individu en plaidant notamment pour la tolérance dans l’approche de la différence des croyances religieuses. Ainsi, au moment même où commencent les guerres de religion, Sébastien Castellion, théologien protestant originaire du Bugey, constatant que les deux camps témoignaient de la même violence fanatique, les adjurait de ne pas utiliser la force contre ceux qu’ils jugeaient hérétiques, et de leur résister «par parole s’ils n’usent que de parole», en citant en exemple les Turcs, qui considéraient leurs sujets indépendamment de leur religion

En 1651, dans un Chapitre XI (De la différence des manières) de son Léviathan , Hobbes, analysant les conditions devant permettre aux hommes de «vivre en paix et en harmonie»constatait avec réalisme que leur manque de jugement les porte à s’en remettre à des ambitieux sachant se donner une apparence de sagesse en maniant éloquence et flatterie, appuyées par la «réputation militaire». Aussi évoquait-t-il avec beaucoup de pragmatisme la diffusion des idées, en insistant sur la prudence et la discrétion avec lesquelles elles devaient être exprimées, et surtout sur le relativisme des jugements qu’elles pouvaient susciter. Dans la version initiale (en anglais) de l’ouvrage, il constatait que «…l’on donne différents noms à une seule et même chose selon la différence des passions individuelles. Ainsi, ceux qui approuvent une opinion particulière l’appellent Opinion, mais ceux qui ne l’approuvent pas l’appellent Hérésie; et pourtant le mot hérésie ne signifie rien de plus qu’opinion particulière, avec seulement une nuance de colère plus marquée».

Le mouvement dit des «Lumières» contribuera à l’essor et à la diffusion de ces conceptions valorisant la place de l’individu dans le système social, pour aboutir à la consécration de la liberté d’expression comme norme juridique.« Sans la liberté de blâmer il n’est pas d’éloge flatteur ». La célèbre réplique de Figaro, personnage principal du Mariage de Figaro de Beaumarchais, fait de cet auteur une figure phare de la liberté d’expression

En 1784, Kant observait que «les Lumières sont pour les gens l’issue à leur propre irresponsabilité…», car selon lui, l’apport essentiel de la période était la possibilité offerte aux sujets d’exprimer leur opinion, même en critiquant les lois. Il considérait en effet que la liberté était un droit inné (naturel) de l’individu, et comprenait notamment la liberté de pensée et son corollaire la liberté d’expression.

Dans la pensée kantienne, la liberté n’est cependant pas sans limites. Celles-ci sont d’abord d’ordre moral. Ainsi, si dans leurs relations entre eux, les individus peuvent s’exprimer librement, l’usage de propos tels que mensonge, médisance, raillerie, est contraire à la «vertu» parce que manquant de respect à autrui.

Les restrictions sont aussi d’ordre juridique, car si le droit naturel pose pour principe la liberté individuelle, il l’assortit des bornes logiquement nécessaires à sa conservation, la liberté n’existant qu’«en tant qu’elle peut s’accorder, suivant une loi générale, avec la liberté de chacun». Ainsi, les règles de droit régissant la communication entre individus peuvent s’accommoder de la pratique moralement condamnable du mensonge, mais seulement tant qu’elle ne porte pas «directement atteinte au droit d’autrui», par exemple à ses biens. De même, le droit dont disposent naturellement les gouvernés de critiquer les gouvernants ne va pas jusqu’à les dispenser de leur obéir, même lorsqu’ils deviennent oppressifs, car pour Kant, admettre le contraire serait remettre en cause le fondement même du système juridique.

En 1859, John Stuart Mill s’inspirera des mêmes principes dans son essai «De la liberté», devenu un des ouvrages de référence du libéralisme, mais entretemps, le droit d’exprimer ses convictions aura été formellement consacré comme liberté individuelle par des textes solennels à valeur de norme juridique.

Les pensées pouvant porter sur des questions hétérogènes, aussi bien triviales que métaphysiques, dès les premiers textes normatifs évoquant la liberté de les extérioriser, les convictions religieuses ont été distinguées des autres.

En Amérique, en 1669 déjà, quelques articles des « Constitutions fondamentales de Caroline » de 1669, ébauche d’organisation gouvernementale préparée par les grands propriétaires fonciers de la colonie avec le concours de John Locke, garantissaient la liberté religieuse et encadraient l’expression des opinions, mais le texte était demeuré au stade de projet. Vingt ans plus tard, en Angleterre, les monarques Guillaume III et Marie II avaient dû concéder au Parlement le Bill des droits de 1689 reconnaissant, entre autres le droit de pétition et la liberté d’expression des parlementaires.

Amorcé un siècle plus tôt, le mouvement s’accéléra le 12 juin 1776, lorsque la colonie américaine de Virginie se dota d’une «Déclaration des droits»garantissant entre autres les libertés de la presse et de religion.

Si ces principes n’ont été mentionnés ni dans la Déclaration d’indépendance adoptée trois semaines plus tard à Philadelphie par les délégués des treize colonies anglaises en rupture avec leur métropole, ni dans le texte initial de la Constitution dont elles se dotèrent en 1787, ils ont été expressément repris en septembre 1789 dans un document qui après ratification deux ans plus tard par leurs législatures, constitue la Déclaration des droits des États-Unis. Ce texte comprend dix amendements, dont le premier dispose: «Le Congrès ne fera jamais de loi concernant la fondation d’une religion ou interdisant le libre exercice de celle-ci, ou limitant la liberté de parole ou de la presse, ou le droit du peuple de se rassembler pacifiquement pour demander au Gouvernement la réparation des torts».

Entretemps, le 26 août 1789, en France, l’Assemblée nationale devenue Constituante, avait adopté la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, dont les articles 10 et 11 proclament respectivement «Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi» et «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi»

Les conditions dans lesquelles s’applique la liberté d’expression sont ambivalentes.

  • D’une part elle est considérée comme fondamentale, car conditionnant l’exercice d’autres libertés. Ainsi, les juridictions supérieures, aussi bien supranationales que nationales, consacrent son importance en des termes analogues. Pour la Cour européenne des droits de l’homme, elle «constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun». En France, selon le Conseil Constitutionnel, elle est «d’autant plus précieuse que son existence est une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés». Le Conseil d’État, dans une formule synthétisant les deux précédentes, considère que «l’exercice de la liberté d’expression est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés».
  • D’autre part, les règles qui en posent solennellement le principe en lui conférant un large champ d’application l’assortissent aussi de nombreuses possibilités de limitations, elles aussi virtuellement très étendues, et largement utilisées.

.https://fr.wikipedia.org/wiki/Liberté_d’expression

.

posted by charlierenard in la parole,prépa and have Comments (2)

La politesse : ce qu’il faut dire ou ne pas dire (sans interdiction légale ou tabou)

Argot

Parler c’est utiliser une langue (le français, par ex.), et une langue, comme le note Emile Benveniste, reflète une culture donnée avec notamment ses normes et ses interdits. On dira donc que la langue impose un code à ses utilisateurs. “Langue et société ne se conçoivent pas l’une sans l’autre. (…) J’appelle culture le milieu humain, tout ce qui, par-delà l’accomplissement des fonctions biologiques, donne à la vie et à l’activité humaine forme, sens et contenu. La culture est inhérente à la société des hommes, quel que soit le niveau de civilisation. Elle consiste en une foule de notions et de prescriptions, aussi en des interdits spéci­fiques (…)” (Benveniste). De fait, comme la culture, la langue contient des interdits et toute la grammaire est là pour indiquer ce qu’il est possible et ce qu’il n’est pas possible de dire…

Remarquons à l’inverse que si la langue est l’outil par lequel se formule, voire se fabrique les interdits, il n’y aurait pas d’exercice possible du langage sans que n’existe une Loi sous-jacente aux lois, une règle de culture plus fondamentale que les règles juridiques, une loi constituante pour le psychisme de tout homme car elle lui permet normalement accéder au désir via la demande, il s’agit bien sûr de l’interdit de l’inceste… Si cet interdit n’était pas observé, quel besoin auraient les hommes de parler ? Ou plutôt quel désir ? Ne seraient-ils pas dans la réalisation absolument mortelle de leur désir le plus secret, le plus originel, si l’on en croit Freud, à savoir le désir incestueux ?

Un article très intéressant sur les variations culturelles de la politesse :

 

http://www.scienceshumaines.com/les-cultures-de-la-conversation_fr_12008.html

 

 

posted by charlierenard in la parole,langage,morale,prépa and have Comments (2)

Le tabou : ce qu’il ne faut pas dire

« Tabou » est un mot que l’on retrouve dans toutes les langues polynésiennes sous la forme tapu1, kapu2… Il fut popularisé en Europe par James Cook au retour de sa première circumnavigation durant laquelle il séjourna à Tahiti. Il désigne, dans la littérature ethnologique, une prohibition à caractère sacré dont la transgression est susceptible d’entraîner un châtiment surnaturel3. En tahitien entre autres, le contraire de tabou se dit noa : ce qui est ordinaire, accessible à tous.

Par extension, le terme « tabou » désigne, dans son acception la plus générale, un sujet qu’il est préférable de ne pas évoquer si l’on veut respecter les codes de la bienséance d’une société donnée.

Les ethnologues ont fait de ce mot polynésien un terme générique s’appliquant à toutes les interdictions d’ordre magique, religieux ou rituel, quel que soit le peuple qui formule ces interdictions.

Émile Durkheim estime qu’il est fâcheux d’étendre ainsi l’acception d’une expression étroitement locale et dialectale. Il n’y a pas de religion où les interdictions ne jouent pas un rôle considérable. Les termes « interdit » ou « interdiction » seraient préférables. En outre, « tabou » désigne aussi bien l’interdiction que la chose interdite.

  • Le tabou est un phénomène religieux qui peut être vu comme la forme négative du sacré. Il exprime à la fois son caractère contagieux et dangereux. Il comprend trois éléments : une croyance dans le caractère impur ou sacré de telle personne ou de telle chose; une prohibition : l’interdiction de toucher ou d’user de cette personne ou de cette chose; la croyance que la transgression de cet interdit entraîne automatiquement la punition du coupable, qui verra, par exemple, son corps enfler ou dépérir; il aura un accident, perdra ses récoltes ou bien ses parents mourront. La transgression du tabou est punie de mort ou au moins d’ostracisme.
  • Le tabou, toujours en tant que phénomène religieux, peut aussi être vu comme un avertissement : une chose, une personne est chargée de puissance. La violation du tabou n’entraîne pas forcément un châtiment mais une réaction de la puissance. Celle-ci fascine l’être humain mais engendre aussi de la crainte. À tel point que le tabou fait éviter la parole, par peur de la puissance. « Quand elle persiste, la crainte se fixe en une observance […] nous saisissons dès lors comment, à la longue, le frisson devait nécessairement passer à l’état d’observance, et la crainte vivante dégénérer en formalisme. »4.

Le premier tabou de l’humanité est le tabou de l’endogamie : interdiction d’avoir des relations sexuelles avec sa parentèle. Il évoluera ensuite en tabou de l’inceste avec la complexification des sociétés humaines consécutives à son application.

  • La maladie (en particulier le sida ou le cancer) et la mort ;
  • Les odeurs corporelles, les excréments, le manque d’hygiène dans les lieux publics ;
  • La sexualité et le désir, notamment dans leurs formes jugées déviantes, tels l’inceste dans les sociétés traditionnelles, la pédophilie, le viol dans les sociétés modernes;
  • L’argent et la mendicité ;
  • Le lesbianisme, dans certains milieux et à certaines époques ;
  • L’affaire Dreyfus, à la fin du XIXe siècle ;
  • La Commune de Paris, à la fin du XIXe siècle et début du XXe siècle ;
  • Le nazisme et les faits s’y rapportant, par exemple la collaboration durant l’Occupation allemande ;
  • La critique de la religion.
  • Certaines maladies psychiatriques (trouble de la personnalité paranoïaque et états délirants, notamment).

 

http://www.patrickbanon.com/fondsdocumentaire/livres/TabousetInterdits-introduction.pdf

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,langage,prépa,religion and have Comment (1)

Corrigé : Avoir la parole

  • Faculté de parler.

    -Discours (ce que l’on dit)

    Promesse, engagement donné verbalement.

    Avoir la parole s’offre à nous comme une évidence : il est naturel de parler comme marcher, ou respirer. Cette aptitude semble même définir l’homme de sorte qu’il ne viendrait pas à l’idée de priver l’enfant de l’apprentissage de la parole. Nous parlons avant même de réfléchir aux mots que nous utilisons, avant même de connaître toutes les subtilités grammaticales du discours. Avoir la parole, c’est en premier lieu être doté d’un outil de communication qui nous permet de transmettre une information à autrui.
     Mais s’il peut nous arriver de trébucher ou tousser, cela est sans comparaison avec la fréquence des échecs de la parole. Qu’elle nous échappe, que les mots nous manquent, ou qu’ils aient dépassé notre pensée, la parole se révèle souvent inefficace, inadéquate, inappropriée, inutile ou déplacée. Ainsi avoir la parole (capacité) et savoir parler (apprentissage de la langue) ne suffirait pas pour avoir la parole facile ou le bon mot, c’est-à-dire, pour prétendre la maitriser afin de toujours parfaitement exprimer ce que l’on VEUT dire.
  • Autrement dit, qu’est- ce que cette faculté sonore et intérieure qui nous sert à communiquer et qui se révèle inapte à sa fonction première ? Quelle est cette énigme qui fait que notre aptitude nous dessert plus souvent qu’elle ne nous sert ?

    De plus, la parole sert à engendrer, à façonner, à communiquer, à traduire mais elle sert aussi à travestir et à tromper. Ainsi avoir la parole c’est aussi pouvoir la donner et la recevoir (avoir la parole de quelqu’un) mais prendre le risque que l’autre revienne dessus ou ne la tienne pas. Cette ambivalence est à la source même de sa richesse. « Words, words, words » s’exclame le Prince du Danemark, perdu dans le labyrinthe des mensonges et faux semblants qui enserrent son existence… Comment parvenir à la vérité des êtres s’ils vous mentent ? Comment accéder à autrui s’il s’échappe par le subterfuge du langage ? 

    Car avoir la parole n’est pas seulement parler de quelque chose mais surtout à quelqu’un : interlocuteur qui fonde ma parole au sens où toute parole est d’abord reçue. Avoir la parole c’est donc un don d’autrui qui confère, un temps donné, de la légitimité à mes dires, du poids à mes mots. Mais qui donne la parole à qui et au nom de quoi ? Selon quels critères ?  Car ce temps de parole, même (d’autant plus ?) quand il se veut équitable, se doit d’être le plus clair et efficace possible, laissant donc tout le monopole aux « professionnels de la parole » et devenant par la même facteur d’inégalité. Avoir la parole serait donc le spectacle du « droit du plus fort », où les vainqueurs ne seraient pas les plus véraces mais les plus éloquents, où les mots seraient « des pistolets chargés ».

     

I Faculté Conditions techniques pour avoir la parole : privilège de l’humanité ?

phrase thèse : apanage et privilège

On a considéré cette énigme de la parole qui transforme le son en significations comme une qualité humaine impropre à l’animal (pour preuve l’anecdote, racontée par Diderot dans le troisième Entretien, du cardinal Melchior de Polignac : « parle et je te baptise » aurait-il dit à un orang-outan présenté au jardin du roi).

Avoir la parole, c’est avoir une capacité innée, une faculté spécifique, propre à l’humanité.

-avoir la parole c’est avoir un langage et une langue : particularités du langage humain par rapport à la communication animale (temps, conditionnel, abstraction, signes, objet non déterminé, pas suscité pour besoins, métalinguistique, connaissance, dialogue,)

Benvéniste Problèmes de linguistique générale : « C’est un code de signaux. Tous les caractères en résultent : la fixité du contenu, l’invariabilité du message, le rapport à un seule situation, la nature indécompable de l’énoncé, sa transmission unilatérale. »

Descartes, enfant sauvage, Rousseau, expérience des Primarck, Karl von Frish, Saussure

-c’est pouvoir dire Je et se détacher du monde, le nommer, pour le connaître, énoncer des jugements sur lui.

Kant, Descartes,

-conditions de la vie sociale et politique Rousseau, Aristote,

la parole semble tellement une caractéristique humaine que les muets ont longtemps été considérés comme des idiots, fous ou sous-hommes. parole outil de communication mais sert et dessert. pb d’échecs de la communication, quiproquo, mensonge…

Avoir la parole ne suffit pas pour savoir s’en servir. C’est donc un pouvoir dont l’usage peut varier.

II Usage , Maitrise,

  • Si on remonte aux origines, prêtons l’oreille à Esope : on raconte que son maître lui demanda un jour de disserter habilement devant les invités d’un banquet. Le docte esclave devait exposer ce qu’était la meilleure chose au monde. Il répondit que c’était la langue parce qu’elle servait à s’exprimer, à louer les dieux, à faire des serments d’amour… Le maître fut satisfait. Renouvelant plus tard l’expérience, il exigea d’Esope qu’il décrive devant les convives la pire des choses. L’esclave expliqua qu’il s’agissait de la langue qui sert à mentir et se parjurer, maudire les dieux et tromper qui vous aime… laissant maîtres et invités dans la plus grande des confusions.

    -possibilité de dysfonctionnement

    -nécessité d’apprendre pas juste inné comme le langage , langue, => perfectibilité Rousseau possibilité d’échec de la transmission, ou perte

    -échec de communication :

    -capacité d’inventer des mots pour des choses qui n’existent pas = croire au lieu de savoir, fiction, fabulation (étymologie)

    -travestir la réalité, la déguiser : les sophistes

    transition : => parole = acte  car toute parole a des conséquences sur le monde et autrui; pas juste des paroles en l’air ; possibilité de faire un usage immoral, faire du mal et le mal

III Morale et Droit : responsabilité éthique de la parole révèle l’humanité morale de l’homme sa dignité. avoir la parole de quelqu’un, n’avoir qu’une parole

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,méthode,prépa and have Comment (1)

Peut-on tout dire (à autrui) ?

I- Peut-on tout dire (à autrui) ?

 

Les différentes formes de l’impossibilité de dire : de l’interdiction logique,technique, sociale (tabous), à l’interdiction morale (le respect et le tact), en passant par le problème de la liberté d’expression.

Possibilité technique et logique :

-le contradictoire

-l’irréel : ce qui n’existe pas

-l’insensé, incompréhensible « charabia » : grâce à la structure du langage, phonème/monème pouvoir génératif infini

Pb : en disant tout, on vide la parole de tout contenu, de sa raison d’être et son authenticité.

Impossibilités et interdictions sociales et morales :

  1. A) Le tabou : Ce qui se dit/ce qui ne se dit pas. (Origine et fonction du tabou : d’où viennent les tabous ?) : La  loi du silence  comme instrument de domination et de protection des groupes qui détiennent le pouvoir (cf. : le secret de famille, les villages, petites sociétés) ? Faut-il vivre sans tabous ? Peut-on tout dire (pour autant !) ?

Débat possible : sur Le problème de la liberté d’expression et de ses limites. Films possibles : Chomsky & Cie (Dvd 1, chapitre 5) (ex : propos racistes, Noam Chomsky sur Faurisson). + « C’est dur d’être aimé par des cons » sur le procès de Charlie Hebdo et des caricatures. Se donner la possibilité de différencier le tabou (interdiction silencieuse) et la loi.  

  1. B) Le tact, la délicatesse et la politesse : Différence entre le tabou social et la parole respectueuse : ce qui n’est ni tabou, ni interdit par la loi et qui pourtant ne se dit pas. La politesse comme espace public non contigu. Pour une éthique du tact, de la politesse (2 figures de la délicatesse) comme éthique du langage même (cf. Barthes, Cours sur le Neutre LN3,  4e scintillation de la figure portant sur la « délicatesse » : la politesse 17m30s-22m28s. Ex. du Tao et de la politesse du mort… + La société intégrale, Cédric Lagandré. +Le pathos de la distance chez Nietzsche, 25 Par de-là le Bien et le MalGénéalogie de la Morale 1 §2 lié au problème de la hiérarchie et à la critique de l’égalitarisme et de l’indifférenciation)+ Norbert Elias, La civilisation des moeurs. 
  2. C) L’éthique de la discussion, Jurgen Habermas. Introduit par la chanson « Paroles, paroles… »  Dalida et Alain Delon. Les paroles ne sont-elles que des mots ? Parler c’est « prendre la parole », « donner sa parole », s’engager, « prendre position », se mettre à exister hors de soi, dans l’espace public.  

 

  II-Y a-t-il de l’indicible ? (Ce que le langage ne parvient pas à dire) (soit excès soit pas assez)

  1. A) Le langage et l’indicible : 

 

  1. a) La critique Bergsonienne du langage : Nommer c’est classer (classer c’est « subsumer ») Qu’est-ce que Nommer ? Dieu le Verbe, l’enfant… Les catégories du langage correspondent-elles à la réalité ?

 

  1. b) « Le réel est ce contre quoi je bute », Lacan. Ce qui nous arrive de grand nous prive de parole : être « sans voix », l’impuissance du discours. « Y’a pas de mots !!! » (ex : la mort , la joie, le coup de foudre…). FRAGMENTS D’UN DISCOURS AMOUREUX,Roland Barthes : tentative de description de l’être aimé. Adorable p.   . Nommer c’est réduire (le désir d’être sans noms). Impossibilité de dire ou difficulté à dire ?

 

  1. c) Débat sur les images et l’inimaginable : L’interdiction de la représentation…
  • Shoah, Claude Lanzmann : Dire l’indicible ?

(Transition : à mettre en // avec la polémique autour des films La vie est belle de Roberto Benigni et La liste de Schindler de Steven Spielberg)

  • Images malgré tout,  Georges Didi-Huberman. La shoah est-elle inimaginable ? INIMAGINABLE ET IMPENSABLE. (+ Ce qui reste d’Auschwitz, Giorgio Agamben). Textes : La polémique autour de l’exposition (4e de couverture), l’accusation de Lanzmann de vouloir produire une fascination par l’horreur, la tentative nazie de détruire les images et de produire de l’inimaginable, inimaginable et impensable, l’image comme source de connaissance consciemment lacunaire et comme libération (Naufragé et rescapé, Primo Lévi sur son agacement face au thème de l’incommunicable. Jorge Semprun, L’écriture ou la vie : devant les images de son camp vue aux actualités).
  1. B) L’indicible et l’impensable : Peut-on penser sans les mots ?
  2. a) La critique hégélienne de l’indicible (ineffable) :

intro : On a souvent l’impression qu’on peut avoir compris sans réussir à réexpliquer (cf en cours !). On dit alors « J’ai saisi mais  je ne sais pas comment dire. J’ai pas les mots… ». Qu’ai-je lorsque je n’arrive pas attraper ce que j’ai saisi !?

Texte de Hegel, Phénoménologie de l’Esprit (compléter avec le texte de Merleau-Ponty sur le fait de « penser dans les mots »)

 

  1. b) Si on pense dans et avec les mots : La langue dans laquelle on s’exprime influence-t-elle notre pensée ? + problème linguistique et métaphysique Sans les mots y aurait-il des choses ? Texte de Martinet « La langue n’est pas un calque du monde » Texte de Nietzsche, Le livre du philosophe : « Derrière chaque grammaire se trouve une métaphysique ». Le problème de la création des langues chez Nietzsche : Introduction théorétique sur la vérité et le mensonge du point de vue extra-moral.

+ texte de Benveniste

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,langage,morale,prépa and have Comments (2)

Peut-on parler pour ne rien dire ? Corrigé

 

Pour commencer, un travail d’analyse du sujet très intéressant :

http://www.lfm.edu.mx/media/1900/peut-on-parler-pour-ne-rien-dire.pdf

 

Peut-on parler pour ne rien dire ?

Si nous considérons le langage comme un instrument destiné à traduire la pensée, il semble impossible de parler pour ne rien dire. En ce sens, parler  devrait toujours signifier quelque chose. Il faut donc prendre ce sujet en un sens métaphorique pour essayer de savoir dans quelle mesure nous pourrions parler pour ne rien signifier, c’est-à-dire pour ne rien dire de particulier, dire des choses inutiles ou dépourvues de sens.

« Le langage est à la fois le bien le plus précieux et le plus dangereux qui ait été donné à l’homme, a dit le poète allemand Friedrich Hölderlin. Ce « bien précieux », ne le gaspillons-nous pas lorsque nous « parlons pour ne rien dire », c’est-à-dire lorsque nous bavardons ? Faut-il alors préférer à la futilité du bavardage, à son inutilité, le sérieux et l’efficacité de la parole ?

« Bavarder » vient de « baver » ; bavarder, c’est parler abondamment de choses oiseuses, insignifiantes. Parler et bavarder sont deux modalités du langage ; le langage est le moyen de communiquer sa pensée à autrui, c’est du moins ce qu’affirme le sens commun. Parler, c’est donc mettre en oeuvre une intention active et consciente de communication ; la parole vise à l’efficacité, elle se veut utile, sérieuse, individualisée. Le bavardage, au contraire, est une parole oiseuse, inutile, stéréotypée, impersonnelle.

Toutefois, même dans ce cas, il est possible de nous demander si le langage ne traduit rien. Ce qui est absurde ou inutile dit encore des choses sur celui qui le dit. Une parole insignifiante (sans importance) est-elle pour autant non signifiante (dépourvue de signification) ? Dit-on quelque chose même quand on ne veut rien dire ?

De plus, comme la raison humaine est limitée (nous ne pouvons tout savoir ni tout entendre), il apparaît que nous ne disons rien quand nous parlons si nous n’arrivons pas à formuler clairement ce que l’on veut dire ou à faire comprendre ce que l’on a dit. L’intention de communiquer suffit-il pour dire quelque chose ? Nos paroles, mêmes confuses et vides, seraient  alors toujours en excès, en diraient toujours plus. La parole se réduit-elle à son contenu ?

Enfin on peut se demander si nous parlons « pour dire quelque chose ». Y a-t-il d’autres fonctions du langage que celle du transfert d’information ? Une parole dont le but n’est pas d’informer ne dit-elle rien ? Le sens se limite-t-il au contenu informatif du message ?

Nous réfléchirons ,dans un premier temps, sur le pourquoi de cette parole « sans importance » que nous opposerons dans un second temps au sérieux des discours. Puis nous nous demanderons si le « dire » est le domaine d’une parole authentique.

I/ Bavarder  

Ils jacassent, glosent, bavardent, devisent, papotent, blablatent, caquètent, jactent, jaspinent ou encore si nous étions en Belgique, ils babelent, ou au Québec, ils placotent. Toutes ces paroles pour ne rien dire. Toute cette salive gaspillée pour ne rien dire. Toute cette énergie, toute ce brouhaha pour au bout du compte ne rien dire. Beaucoup de bruit pour rien en quelque sorte …

  1. Pourquoi parle-t-on pour ne rien dire ?

-(cause) Contrairement aux animaux, dont la communication est directement motivée par des besoins (nutrition, reproduction, prédation), l’homme peut parler pour ne rien dire. En effet, l’objet de la communication n’est pas déterminé à l’avance comme c’est le cas par exemple des abeilles. Leur communication est une réponse à un stimulus ou attend en retour une réaction et non un dialogue. L’homme peut parler de tout (et donc de rien !) puisque le lien entre sa communication et et son objet n’est pas programmé.

but premier communication seconde pour l’animal / inverse pour l’homme. De plus, la structure du langage composé de morphèmes et phonèmes permet une infinité de combinaisons possibles (pouvoir génératif du langage). Le lien entre signifiant et signifié étant conventionnel, on peut aussi imaginer inventer des mots qui ne correspondent à rien qui existe, à des pures abstractions.

Cf. Saussure

– (but) Pour échapper à l’ennui, pour passer le temps, pour se distraire (cf. le thème du « divertissement » dans « Les Pensées » de Pascal). On parle « de tout et de rien », est-ce pour échapper à la peur du « rien » ? Ne pouvant parler du « tout » (Dieu, l’infini), on comblerait notre finitude par une logorrhée indigeste.

  • Pour échapper à la solitude, pour établir un lien, même superficiel, éphémère et dérisoire avec autrui (cf. la notion de « contagion affective » dans « Nature et formes de la sympathie » de Max Scheler)

 

b) Le caractère superficiel du bavardage (de rien d’intéressant en particulier): On bavarde « de choses et d’autres », « de tout et de rien ». Si l’on passe aussi facilement d’un sujet à l’autre, c’est que tous les sujets se valent et qu’ils valent tous aussi peu. L’opinion ne dispense d’une justification, argumentation, n’étant que la rumeur, le oui-dire, le cancan ou le commérage qui ne survit qu’en s’altérant dans la bouche de ses colporteurs.

ex : proverbes, lieux communs, prêt à penser, légendes urbaines, superstitions…

Cf. Bachelard « l’opinion a en droit toujours tort » Formation de l’esprit scientifique. 

c) Le caractère impersonnel et stéréotypé du bavardage (de rien de personnel, intime, singulier) :

  • Le bavardage requiert et maintient l’anonymat des consciences ; le « je » et le « tu » s’abolissent dans l’anonymat du « on ». Le bavardage relève de l’opinion : ce qui intéresse tout le monde n’intéresse personne en particulier. Le bavardage dégrade la relation en contact et fait du message un prétexte. Pour Soren Kirkegaard, le verbiage est la caractéristique essentielle de la foule. »
  • Bourdieu : sujets des journaux pour susciter le consensus, langue de bois

d) Inutilité du bavardage :

Le bavardage ne vise aucune fin particulière, il est à lui-même sa propre fin.

 

Transitions-objections ;  personne n’échappe tout à fait à la fonction « phatique » du langage. le « bavardage » n’est pas « inutile », il a une fonction sociale bien précise : établir un contact, créer des liens ; De ces petites paroles de la vie qui ne disent rien : « ça va ? », « il fait beau aujourd’hui ». Sommes-nous sûrs de vraiment considérer la santé de la personne à laquelle on s’adresse ? Que dire des interjections, des accents, des formes verbales ? Tout cela serait-il un parasitage du message ? On peut en effet s’accorder sur les multiples façons de n’avoir rien à dire, même lors qu’on veut dire quelque chose. On rate le message, l’adresse, et la personne à laquelle on parle ne comprend rien. Dans une telle situation, qui ne comprend pas ? Celui qui s’exprime ou celui qui écoute ? Où se trouve le parasite ? Quand bien même c’est le locuteur qui émet les parasites avec des « euh » par exemple, est-ce de son initiative seule ou est-ce induit par celui qui écoute ? Qui produit le parlé ? Celui qui parle ou celui qui écoute ? Est-ce parce que quelqu’un écoute qu’on parle ou est-ce parce qu’on parle que quelqu’un écoute ?

qui sommes-nous, après tout pour décider que telle parole est « oiseuse » et que telle autre ne l’est pas ? 

 

 II/ « Parler pour dire » : 

 

a) Pourquoi parle-t-on ?

 

– La parole se veut « sérieuse » (cf. les termes « animaliers » pour désigner le bavardage. On ne cherche pas à s’évader de la réalité, mais à la rejoindre, à la comprendre, à agir sur elle.

  • Parler, c’est transmettre un message à autrui, déployer une intention active et consciente de communication, c’est la fonction référentielle du langage comme le décrit Jakobson – (ou « dénotative » : le message est centré sur le référent ; le langage parle du « monde ».)

Nous parlons pour dire quelque chose :

Parler, au sens large = utiliser une langue, pas nécessairement oralement, pour communiquer. Une langue est un système de signes qui sert à communiquer (Ferdinand de Saussure).

Nous parlons pour communiquer, c’est-à-dire transmettre par un canal à un récepteur un message au sujet d’un référent. Ce message n’a-t-il pas un sens ?

En règle général, donc, parler, c’est dire quelque chose à quelqu’un.

 

b) Ce message pour ne pas être vide doit respecter certaines conditions. Toute parole ,pour ne pas parler de rien, doit s’exprimer de façon claire et argumentée. En ce sens, si « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement », une parole pour ne pas être palabre, ou verbiage doit contenir un minimum de rhétorique. Si le rien est le contradictoire, alors pour parler de quelque chose, il faut les respecter les règles de tout discours cohérent. (Cf. Organon Aristote).

c) La parole authentique se distingue de l’opinion. Elle s’assume, se défend, s’argumente. Elle ne craint pas les oppositions car elle est construite et claire. Ainsi parler c’est risquer le dissensus, le désaccord, le conflit. C’est non seulement discuter mais aussi disputer. C’est fuir les stéréotypes, les lieux communs pour une parole authentique, personnelle. C’est parfois être le seul à défendre ses idées contre tous.

Cf. Montaigne, Voltaire, Zola, Martin Luther King…

Objections-Transitions  :

Cependant cette critique du bavardage et cette valorisation d’une parole dont la fonction serait de dire quelque chose présuppose d’une part que celui-ci se servirait à rien et ne signifierait rien, d’autre part que elle-là n’aurait d’autre fonction, pouvoir que de véhiculer une information. Ce serait à condition d’omettre les différentes fonctions de la parole.

Ainsi même si son objet peut être irréel (mythe ou fable), c’est-à-dire rien qui n’existe, la parole, en ne disant rien, peut servir plus efficacement les buts pédagogiques ou didactiques par exemple. 

Plus généralement, aucune parole n’est neutre mais vise l’efficacité (Les techniques modernes de communication cherchent à agir sur autrui, la science parle en langage mathématique, condition d’une action sur les choses.)

La parole revêt elle aussi, par son souci de sérieux, souvent un caractère anonyme, impersonnel (la propagande, la publicité, le langage scientifique et technique…) On se sert souvent du langage pour communiquer des données impersonnelles ; la communication sociale nous fait participer à un monde commun, mais ce monde est un monde de concepts et non de consciences. La caractère impersonnel du bavardage pourrait donc n’être qu’une caractéristique plus essentielle de toute parole (publique). 

De plus, le langage devrait-il toujours servir à « dire quelque chose » ? Sommes-nous sûrs dès lors que nous disons toujours quelque chose lorsque nous parlons ? Que dire alors de ces formes de langage comme la poésie dadaïste par exemple ? Ou encore de ces chansons dans une langue inconnue ? De la musique même ? 

 

III Les fonctions d’une parole authentique

a- la communication d’un message ou l’expression d’un sentiment n’est pas la seule fonction de la parole

Outre le fait que certaines parole soient insignifiantes(c’est-à-dire sans importance ou hors de propos) ou même incohérentes (le cas du délire), certaines fonctions du langage ne visent pas directement à transmettre un sens (Cf. les différentes « fonctions » du langage selon Roman Jacobson) :

Parler peut être un moyen d’établir le lien préalable à toute communication. C’est la fonction phatique (établir le contact entre l’émetteur et le récepteur, attester d’une reconnaissance réciproque). Ex. « Allô ? ». Dans ce cas, je ne parle pas pour dire quelque chose mais avant de dire quelque chose pour m’assurer que quand je dirai quelque chose, mon message sera bien transmis (c’est une des fonctions du bavardage). => Mauss don http://www.cairn.info/revue-transversalites-2009-3-page-115.htm

Parler peut aussi consister à faire quelque chose plutôt qu’à dire quelque chose (conative). C’est la fonction performative (Austin). Dire « je te promets de venir demain », ce n’est pas simplement communiquer l’information que je viendrai, c’est aussi faire la promesse de venir. Il n’y a pas d’autres façons de promettre que de dire que l’on promet (d’où le titre de l’ouvrage de Austin : Quand dire, c’est faire).

https://fr.wikipedia.org/wiki/Acte_de_langage

https://fr.wikipedia.org/wiki/Performativité

Parler peut enfin consister à créer des formes. C’est la fonction esthétique (créer un univers poétique). La forme du message est alors plus importante que le contenu du message. « Il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville » n’est pas équivalent à « je suis très triste ». Le poème n’informe pas sur les états d’âme du poète, mais crée un univers poétique indépendant du sens propre. C’est particulièrement évident dans le cas des poèmes de Mallarmé du fait que leur interprétation littérale est impossible. //fin en soi

En outre, la parole peut également ne rien dire au sens où elle est circulaire (ou elle parle d’elle-même) jusqu’à ne désigner rien d’autre qu’elle-même. C’est la fonction « métalinguistique » : le message est centré sur le langage lui-même (les grammairiens, les linguistes décrivent le fonctionnement du langage), on fait jouer la fonction métalinguistique lorsqu’on explicite ce que l’on dit (« je veux dire… », « c’est-à-dire… », « en d’autres termes… »)

 

b – Enfin, toute parole n’a-t-elle pas un sens malgré tout ?

1- La parole insignifiante peut avoir plus de portée qu’on ne pense.

•Le sens ne dépend pas seulement du locuteur mais aussi du récepteur.

Si autrui pourrait considérer qu’on parle pour ne rien dire alors que nous voulons dire quelque chose, c’est donc que le sens est une construction commune. Il n’y a pas de parole solitaire, de sens sans échange. Parler c’est aussi s’assurer qu’on est compris, et écouter c’est permettre à l’autre de parler aisément. En ce sens, les discours totalitaires parlent pour ne rien dire car ils n’attendent pas de dialogue, ne proposent pas une construction commune.

Le langage comme système de signes est un système d’oppositions qui confère à ses éléments un sens par le simple jeu des relations et des différences entre ces éléments. Le meilleur exemple en est le S+7 inventé par Queneau. Si dans un texte on remplace tous les substantifs par le septième substantif qui le suit dans un dictionnaire, le texte obtenu n’a pas de sens, il est absurde. Et pourtant, il n’est pas totalement privé de signification. Les associations arbitraires créées par le jeu des substitutions évoquent chez l’auditeur des sens insoupçonnés qui charment, font sourire ou inquiètent. Le surréalisme d’un Paul Eluard (la terre est bleu comme une orange) en est l’illustration.

2- La parole, délirante ou non, peut avoir un sens inconscient

Cf. les thèses de Freud https://www.cairn.info/revue-de-metaphysique-et-de-morale-2004-2-page-259.htm

3- Même quand on communique pour d’autres buts que simplement dire quelque chose, on dit toujours quelque chose.

-son âge, son humeur, son statut social, ses origines, sa volonté d’appartenir à un groupe…

Cf. Ernaux, Maupassant, Hugo, Bourdieu…

On ne pourrait donc avoir accès à la totalité de la parole, à son authenticité qu’à condition de lâcher du lest au vouloir dire, de ne pas la réduire à la fonction référentielle mais de lui permettre de s’ouvrir un champ des possibles de l’esthétique, inconscient, social, voire religieux.

Ainsi, il semblerait qu’on puisse tomber dans deux excès : ne pas prendre la parole au sérieux (bavarder) ou bien l’asservir au sérieux (ne parler que pour dire, instrumentaliser la parole).

C’est de ce constat que nait le besoin d’éprouver la fécondité du silence : les grandes spiritualités nous invitent à faire l’expérience du silence (bouddhisme zen, monachisme chrétien). On parle souvent « pour éviter l’indiscrétion du silence », on a peur du silence, de « l’inquiétante étrangeté » du « rien ». On trouve le concept d’aphasie dans la philosophie grecque antique, notamment chez Pyrrhon d’Elis. Celui-ci enseignait que l’essence des choses est indéterminable et indicible. L’aphasie est donc le fait de ne rien pouvoir dire sur les choses. Le fait que les jugements contraires ont exactement la même force conduit Pyrrhon à l’absence totale d’opinion et à l’absence de parole vraie.

http://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/PyrrhonD’Elis_OntDitSur.htm

Plus généralement, avant de combler le vide par du rien, les sagesses nous invitent à apprendre à écouter autrui et le monde, pour « voir » et non pour « comprendre » ou pour « agir » ; abandonner un peu la « raison raisonnante » pour « entrer en résonnance ».

S’il est possible de vouloir ne rien dire, il est impossible de ne rien dire du tout à partir du moment où l’on prend la parole. Toute parole échappée laisse échapper du sens. On ne peut ne rien dire qu’en se taisant. Mais même se taire peut vouloir dire quelque chose (ex.: la minute de silence, « un silence en dit long »…).

posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comments (2)

expressions, citations, évènements pour disserter…

  • parole d’évangileSens : Propos indiscutable, vérité absolue.
  • parole d’honneurSens : Promesse. Signifie une chose ou une action que l’on s’engage à faire. Caractérisel’accomplissement d’un acte, l’engagement de contracter une obligation que l’on nepeut rompre sans se déshonorer.
  • Parole sacrée.Sens : Parole sainte.
  • Parole dissidente.Sens : Parole révoltante.
  • Parole consolatrice.Sens : Discours qui console un individu.
  • Parole élogieuse.Sens : Parole composée de louanges.
  • Parole mémorable.Sens : Parole dont on se souviendra toujours.
  • Parole obscure.Sens : Discours sombre.
  • Parole timide.Sens : Parole craintive.
  • Parole arrogante.Sens : Parole prétentieuse.
    • Adresser la parole.Sens : Donner la parole.
    • Prêcher la bonne parole.Sens : Prôner la bonne parole.
    • Parole libre.Sens : Parole osée.
    • Demander la parole.Sens : Réclamer la parole.
    • Refuser la parole.Sens : Ne pas autoriser quelqu’un à parler.
    • Liberté de parole.Sens : Droit de parole.
    • Parole d’honneur.Sens : Promesse faite sur l’honneur.
    • Bercer de parole.Sens : Endormir avec des paroles.
    • Revenir sur sa parole.Sens : Ne pas tenir sa promesse.
    • Parole d’évangileSens : Quelque chose de sûr et indiscutable.Origine : Cette expression fait références aux Évangiles qui racontent la vie et le message de Jésus-Christ. Ces récits représentent une vérité que l’on ne peut remettre en question. On emploie donc cette locution lorsque l’on fait référence à quelque chose de sûr et d’indiscutable.
      • Parole apaisanteSens : Propos tranquillisant.
      • Avoir la paroleSens : Avoir le droit de parler.
      • Engager sa paroleSens : Promettre.
      • Droit de paroleSens : Droit de parole désigne le droit que possède tout citoyen de s’exprimer librement s’il ne porte pas atteinte à autrui.Origine : Cette expression a vu le jour au début du XXe siècle et portait son sens actuel, c’est-à-dire de droit de s’exprimer librement. Néanmoins, aujourd’hui on parlera plus volontiers de liberté d’expression que de droit de parole.Lire la suite
      • Joindre le geste à la paroleSens : Faire ce qu’on dit.Origine : Cette expression est utilisée pour parler de quelqu’un qui fait ce qu’il dit, le geste représentant ici le fait d’agir et la parole symbolisant évidemment les dires de cette personne.Lire la suite
      • Être (homme) de paroleSens : Etre quelqu’un qui tient ses promesses.Origine : Cette expression tire sa signification du mot « parole » pris dans son sens de « promesse » et qui désigne « l’assurance verbale par laquelle on s’engage à faire quelque chose ».Lire la suite
      • Être esclave de sa paroleSens : Ne pas être libre de dire ce que l’on veut.Origine : Pour comprendre l’expression, il faut en définir le terme principal. L’esclave est celui qui n’est pas libre, à la fois prisonnier et serviteur d’un autre. Au sens figuré « être esclave de sa parole » signifie donc avoir dit quelque chose qui porte préjudice ou qui entrave sa liberté de parler librement.Lire la suite
      • Reprendre sa paroleSens : Annuler une promesse que l’on avait faite.Origine : Cette expression fait référence à une personne qui aurait donné sa parole avant de la reprendre, et ce, afin de donner l’idée que cette personne est revenue sur une promesse qu’elle avait faite, en l’annulant ou ne la tenant pas.Lire la suite
      • Des paroles sibyllinesSens : Paroles obscures, énigmatiques.Origine : Cette expression remonte à la Grèce Antique, dans laquelle Sibylle était une prêtresse qui pouvait réaliser des prophéties. Ses paroles étaient très difficiles à interpréter, très obscures d’où l’expression « des paroles sibyllines ».Lire la suite
      • Surveiller ses paroles.Sens : Contrôler ses paroles.
        • Torrent de paroles.Sens : Flots de propos.
        • Paroles de circonstancesSens : Propos adaptés à la situation.
        • Paroles mémorablesSens : Propos inoubliables.
        • Paroles vainesSens : Propos inutiles.
        • Paroles vulgairesSens : Propos outranciers.
        • Prononcer des parolesSens : Parler.
        • Échanger des parolesSens : Discuter.
        • Mesurer ses parolesSens : Surveiller ses propos.
        • Regretter ses parolesSens : Déplorer ses propos.
        • les paroles s’envolent, les écrits restentSens : Incite à la prudence en rappelant que les écrits peuvent laisser des traces, des preuves, à l’inverse des paroles.Origine : Traduction de l’expression latine d’Horace « verba volant, scripta manent ». Durant l’Antiquité, on l’utilisait pour inciter à retranscrire les connaissances à l’écrit dans un but de transmission des savoirs.
        • De belles parolesSens : Paroles futiles, promesses appelées à ne pas être tenues.Origine : Comme dans l’expression beau parleur, l’adjectif beau, belle est utilisé ici dans son sens péjoratif, afin de qualifier quelque chose ou quelqu’un qui se concentre sur sa forme, son apparence, et non pas sur son fond, son contenu.Lire la suite
        • Histoire sans parolesSens : « Histoire sans paroles » désigne une histoire dont on ne comprend le déroulement qu’à travers des images (dessinées ou en vidéo), car elle ne possède pas de texte et n’est pas non plus narrée.Origine : Il semble que l’origine de cette expression soit directement liée à l’émission du même nom qui avait été diffusée à partir des années 60 à la télévision. Cette dernière montrait des petits films muets.Lire la suite
        • Faire paroliSens : Gagner au jeu.Origine : L’expression est tirée du monde du jeu. Le paroli est en effet, dans certains jeux, l’action de doubler ce que l’on a joué la première fois. Par extension, faire paroli signifie donc gagner au jeu.Lire la suite
        • Faire ravaler ses paroles à quelqu’unSens : Retenir une personne de dire quelque chose.Origine : L’expression est composée de deux termes principaux. Le verbe « ravaler » qui, au sens propre, signifie « avaler de nouveau » et le terme « paroles » qui implique l’idée d’expression. Lorsqu’une personne fait ravaler ses paroles à une autre, elle l’empêche ainsi de s’exprimer ou l’oblige à se rétracter.Lire la suite
        • Bercer quelqu’un de parolesSens : Tromper quelqu’un par l’espoir.Origine : Pour comprendre l’expression, c’est au verbe qu’elle renferme qu’il faut se référer. Bercer signifie balancer doucement, afin d’apaiser ou d’endormir. Par extension et au sens figuré, il s’agit ici d’entretenir quelqu’un de fausses espérances.

 

 

Parole historique,  mémorable,  donnée,  rendue,  divine,  amère.
Parole osée,  libre,  choquante,  incongrue,  banale.
Paroles insensées,  aimables,  magiques,  dites,  hostiles,  hachées.
Paroles captieuses,  mielleuses,  emmiellées,  édulcorées.
Paroles violentes.
Paroles adressées à quelqu‘un.
Paroles attribuées à un homme célèbre.
Parole de Dieu.
Parole d’ honneur !
Paroles de bienvenue.
Paroles d‘ une chanson, d‘ un disque, d‘ une livret d‘ opéra.
Paroles qui amadouent,  assomment,  assourdissent,  excèdent.
Paroles qui blessent,  décontenancent,  étourdissent.
Ma parole !
Ma parole d‘ honneur !
Parole qui échappe à quelqu‘un.
Paroles qui froissent,  peinent,  vexent,  déplaisent,  choquent.
Paroles qui indisposent,  désobligent,  surprennent,  heurtent.
Paroles qui atteignent,  offensent quelqu‘un.
La parole est à la défense.
La parole est d‘ argent et le silence est d‘ or.
Les paroles s’ envolent,  les écrits restent.
Ces paroles m’ ont échappé.
Bonne parole.
Belles paroles.
Dernières paroles( d‘ un mourant).
Porte-parole.
Homme, femme de parole.
Temps de parole.
Déluge,  flot de paroles.
Usage,  troubles,  organes,  apprentissage de la parole.
Reconnaissance,  synthèse de la parole.
Auteur des paroles d‘ une chanson.
Sens de ses paroles.
Moulin à paroles.
Attaque en paroles ou en action.
Histoire sans paroles.
Ouvre musicale sur les paroles de quelqu‘un.
En paroles.
Sur parole.
Ce sont ses propres paroles.
Vous avez la parole.
Vous avez ma parole.
Je le crois homme de parole.
Il ne lui manque que la parole.
Que signifient vos paroles ?
Accompagner ses paroles de gestes.
Accorder la parole à quelqu‘un.
Accueillir des paroles.
Adresser la parole à quelqu‘un.
Adresser des paroles à quelqu‘un.
Arracher une parole à quelqu‘un.
Assommer quelqu‘un de paroles.
Avoir la parole.
Avoir la parole facile.
Avoir envers quelqu‘un des paroles tendres.
Boire les paroles de quelqu‘un.
Céder la parole à quelqu‘un.
Citer des paroles.
Colporter la parole divine.
Communiquer par la parole.
Composer ses paroles.
Conclure( une affaire) sur parole.
Consigner la parole de Dieu dans la Bible.
Couper la parole à quelqu‘un.
Crédibiliser des paroles.
Critiquer les paroles de quelqu‘un.
Croire quelqu‘un sur parole.
Déformer les paroles de quelqu‘un.
Dégager sa parole.
Dégager quelqu‘un de sa parole.
Demander la parole.
Dénaturer les paroles de quelqu‘un.
Désavouer les paroles de quelqu‘un.
Dire une( ou des) parole.
Dire quelques paroles.
Dire quelques paroles de bienvenue.
Donner la parole à quelqu‘un.
Donner sa parole.
Donner sa parole d‘ honneur.
Douter de la parole de quelqu‘un.
Écouter les paroles de quelqu‘un.
Écrire les paroles d‘ une chanson.
Émettre des paroles.
Encourager quelqu‘un de la parole et du geste.
Endormir quelqu‘un avec des paroles mielleuses.
Engager sa parole.
Enjôler quelqu‘un par de belles paroles.
Entendre les paroles de quelqu‘un.
Exciter quelqu‘un par des paroles.
Faire entendre la parole de Dieu.
Faire rentrer les paroles dans la gorge.
Interpréter des paroles.
Joindre le geste à la parole.
Laisser la parole à quelqu‘un.
Manquer de parole.
Manquer à sa parole.
Ménager ses paroles.
Mesurer ses paroles.
Mettre des paroles à profit.
Minimiser la parole de quelqu‘un.
Modérer ses paroles.
N’ avoir qu‘ une parole.
Ne pas dire une parole de la journée, de la soirée.
Nuancer des paroles.
Obtenir la parole.
Passer la parole à quelqu‘un.
Payer quelqu‘un en paroles.
Perdre la parole.
Peser ses paroles.
Porter la bonne parole.
Prêcher la parole de Dieu.
Prêcher la bonne parole.
Prendre la parole.
Prendre la parole au nom de quelqu‘un.
Prendre la parole en public.
Prêter la parole à un objet.
Prodiguer de bonnes paroles.
Prononcer les paroles magiques.
Prononcer des paroles.
Rapporter les paroles de quelqu‘un.
Réciter des paroles.
Refuser la parole à quelqu‘un.
Relâcher quelqu‘un sur parole.
Rendre sa parole.
Répéter des paroles.
Reprendre la parole.
Reprendre sa parole.
Respecter sa parole.
Retirer la parole à quelqu‘un.
Retirer sa parole.
Savourer les paroles de quelqu‘un.
Se complaire à ses propres paroles.
Se délecter de certaines paroles.
Séduire par la parole.
Séduire quelqu‘un par de belles paroles.
Se gargariser de certaines paroles.
Se griser de( ses propres) paroles.
S‘enivrer de paroles.
S‘entraîner à prendre la parole en public.
S‘étourdir de paroles.
S‘excuser d‘ une parole trop libre.
S‘exercer à la parole.
Tenir( sa) parole.
Tenir quelqu‘un pour un homme( ou une femme) de parole.
Transmettre( une tradition) par la parole.

  • « La parole est au peuple. La parole du peuple, c’est la parole du souverain. »Charles de Gaulle
  • « La parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. »Stendhal
  • « Je parle. Il le faut bien. L’action met les ardeurs en oeuvre. Mais c’est la parole qui les suscite. »Charles de Gaulle
  • « La parole ne représente parfois qu’une manière, plus adroite que le silence, de se taire. »Simone de Beauvoir
  • « Ce que je cherche dans la parole, c’est la réponse de l’autre. »Jacques Lacan
  • « Ce qui guérit l’autre, ce n’est pas la parole, c’est mon être. »Confucius
  • « Danton fut l’action dont Mirabeau avait été la parole. »Victor Hugo
  • « Est-ce que vous croyez qu’on puisse faire l’amour sans proférer une parole. »Voltaire
    • « Il est dans les moeurs d’un sot de s’extasier à toute parole. »Héraclite
    • « Il suffit en France d’affirmer un chose avec autorité pour être cru sur parole. »Alexandre Minkowski
    • « La parole apaise la colère. »Eschyle
    • « La parole émancipe. »Amélie Nothomb
      • « La parole est d’argent, le silence est d’or. »le Talmud
      • « La parole est un laminoir qui allonge toujours les sentiments. »Gustave Flaubert
      • « La parole est une sorte de tableau dont la pensée est l’original. »Denis Diderot
      • « La parole fait tourner la girouette, l’action l’immobilise. »Jules Renard
      • « La parole n’a pas été donnée à l’homme : il l’a prise. »Louis Pauwels
      • « La parole reflète l’âme. »Sénèque
        • « La parole, les mots, la langue sont fixés par une convention et un accord humains. »David Hume
        • « La raison et la parole unissent les hommes entre eux. »Cicéron
        • « Nous n’existons que parce que nous sommes reliés aux autres par la parole. »Françoise Dolto
    « Evite que ta parole ne devance ta pensée. »Chilon De Sparte
      • « Sans la parole le plaisir de l’amour diminue au moins de deux tiers. »Giovanni Giacomo Casanova
      • « Tout homme, parce qu’il parle, croit pouvoir parler de la parole. »Johann Wolfgang von Goethe
      • « Une aimable réponse apaise la fureur, une parole blessante fait monter la colère. »Confucius
      • « Une bonne parole éteint mieux qu’un seau d’eau. »Miguel de Cervantès
      • « Une parole honnête fait impression quand elle est dite simplement. »William Shakespeare
        « Plutôt ne pas en avoir, que d’avoir deux paroles dont une est de trop. »William Shakespeare
        « Trop de paroles, péché certain. »Chrétien de Troyes
        « Nous ne sommes hommes et nous ne tenons les uns aux autres que par nos paroles. »Michel Eyquem de Montaigne
      • « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. »La Bible

 

Evènements marquants sur la parole :

1894
1 novembre Alors que le journal « le Figaro » a eu des renseignements dès le 28 octobre sur l’arrestation d’un officier de l’armée pour trahison, il dévoile le nom de Dreyfus. Son concurrent d’extrême droite, « La Libre Parole », titre le même jour sur cette culpabilité. Vitrine française de l’antisémitisme, le journal de Drumont met immédiatement l’accent sur l’origine juive d’Alfred Dreyfus et en fait un argument a priori de sa culpabilité. Mieux, misant sur une théorie du complot, « La Libre Parole » affirme que l’Etat souhaite étouffer l’affaire parce que Dreyfus est juif. L’emballement de la presse, et notamment chez les nationalistes, monarchistes et catholiques ne tardera pas.

1945
23 juillet Inculpé de crime de haute trahison pour avoir collaboré avec l’Allemagne de 1940 à 1945, le maréchal Philippe Pétain comparaît devant la Haute Cour de justice de Paris. Il se contente de donner lecture d’une déclaration liminaire et refusera de prendre la parole durant toute la durée de son procès. La confusion des débats ne permet pas de lever le voile sur les vraies responsabilités du maréchal et des institutions de la IIIème République pendant la collaboration. Pétain sera condamné à mort le 15 août, radié de l’Académie française et démuni de tous ses biens. Le général De Gaulle lui accordera la grâce présidentielle en commuant sa peine en détention à perpétuité. Incarcéré sur l’île d’Yeu, il y mourra six ans plus tard. 

 

1931
17 octobre Le gangster américain Al capone surnommé « Scarface » est arrêté et emprisonné pour fraude fiscale. Il est accusé d’avoir approvisionné en alcool de nombreux bars clandestins de Chicago pendant la prohibition et d’être à la tête de ce commerce illicite. Condamné à purger 11 ans de prison à Alcatraz en Californie, il n’en fera que 8 pour des raisons de santé et sera libéré sur parole.
1866
1 janvier Le poète Baudelaire a un grave malaise dans l’église de Namur. Il est frappé à la fois d’hémiplégie et d’aphasie (perte de la parole).
1980
19 mars Invité sur le plateau du journal télévisé d’Antenne 2 face à Mitterrand notamment, Daniel Balavoine se met en colère et adresse un avertissement aux politiques et journalistes. Il affirme que « la jeunesse se désespère », que les propos des médias n’intéressent personne et que ceux-ci passent à côté des vrais problèmes. Cette dénonciation de l’absence de droit à la parole des jeunes dans les médias restera une expression du caractère passionné du chanteur.
1665
31 mai Shabbetaï Zevi est né en 1626. Il est le créateur de « la secte des Sabbatéens ».
Le 31 mai 1665, il se proclame Messie dans la ville de Gaza. Il se rebelle contre les rabbins qui décident de le chasser de Jérusalem.
Il voyage à travers le monde pendant plusieurs années, tentant de répandre sa bonne parole aux nombreux croyants.
De ce fait, de nombreux juifs se convertissent à la religion islamique.
Il est arrêté le 30 décembre à Istanbul par le sultan, inquiet de voir autant de monde adhérer à ses discours.
1791
15 décembre Le 15 décembre 1791 fut ratifiée la Déclaration des droits, le Bill of Rights. Cette déclaration regroupe les dix premiers amendements de la constitution des Etats-Unis d’Amérique. Elle symbolise les piliers de la loi américaine comme la liberté de religion, de la presse, de la parole ou encore de port d’armes. Pour son rédacteur James Madison, Il s’agissait d’octroyer plus de libertés individuelles en limitant les prérogatives et le pouvoir de l’état central.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Déclaration_des_droits Bill of right anglais

1510
25 mars Né le 25 mars 1510 à Barenton, dans la Manche, Guillaume Postel a été un philosophe, astronome, professeur de langues et théosophe. Convaincu d’avoir été élu par Dieu pour prêcher une nouvelle monarchie universelle, il tenta de convertir François Ier à ses idées, sans succès, ce qui le poussa à prêcher sa bonne parole auprès de l’empereur d’Autriche, puis des Turcs. Souffrant probablement de mégalomanie ou de paranoïa, il est interné et finit ses jours au cloître de Saint-Martin-des-Champs de Paris.
1529
avril Aux mois d’avril et mai 1529, le moine augustin Martin Luther publie son « Grand » et son « Petit catéchisme », un ouvrage qui visait à rendre accessible à tous l’enseignement de la Parole de Dieu. Fervent militant de la nouvelle religion baptisée « protestantisme », Martin Luther s’appuiera sur son œuvre pour promouvoir une vision différente de la religion chrétienne, une démarche qui le conduira à être en conflit avec le pape tout au long de son existence.
1905
17 octobre Le manifeste d’Octobre fut signé par le tsar Nicolas II de Russie le 17 octobre 1905, à la suite de la révolution russe de 1905. Dans ce texte, le tsar s’engage à accorder diverses libertés civiques au peuple : liberté de culte, de parole, de réunion et d’association, ainsi que l’introduction du suffrage universel masculin. Pour autant, ce manifeste n’a pas empêché le tsar de continuer à utiliser son droit de veto sur la Douma d’État et de la dissoudre à plusieurs reprises, empêchant ainsi la Russie de devenir une véritable monarchie constitutionnelle.
1924
21 janvier Le 21 janvier 1924, le fondateur de l’Union soviétique Lénine s’éteint à Gorki en Russie à l’âge de 53 ans. Suite à une tentative d’assassinat orchestrée contre le leader soviétique en 1918, Lénine conserve une balle proche de la colonne vertébrale impossible à retirer, qui lui causera trois attaques entre mai 1922 et mars 1923. Privé de parole, paralysé, Lénine s’éteint le 21 janvier 1924. À sa mort, de nombreux monuments, statues et mémoriaux seront érigés à sa gloire.
1829
Louis Braille publie un ouvrage destiné aux personnes aveugles. Il l’intitule « Procédé pour écrire les paroles, la musique et le plain-chant au moyen de points ». Lui-même atteint par ce handicap, il travaillait depuis quelques temps à l’amélioration du système de Charles Barbier. Ce dernier avait en effet inventé une forme d’écriture pour aveugle représentant les sons. Louis Braille mettra également au point une machine à écrire en 1847. Transcrivant plutôt l’alphabet sous forme de points saillants, le système Braille connaîtra un fort succès et sera peu à peu employé dans plusieurs pays.
650
Le Calife Othman confie aux disciples de Mahomet la transcription des révélations de Gabriel dans une version officielle du Coran. En effet, selon les croyances musulmanes, Mahomet reçut en arabe les paroles sacrées d’Allah par l’intermédiaire de l’ange. Après sa mort, en 632, ses fidèles tentèrent de mettre par écrit ce qui jusqu’alors se transmettait oralement. La recension sous Othman établit concrètement les textes coraniques qui feront l’objet de contestations. Par ailleurs, écrits dans un arabe encore peu courant, ces derniers seront sujets à différentes interprétations. Ils n’en constitueront pas moins la version définitive du livre sacré.

Paroles historiques :

Responsable mais pas coupable. 

: Sur TF1 en novembre 1991 s’expliquant sur le scandale du sang contaminé  – Georgina Dufoix

  • Boire ou conduire il faut choisir. 

     1980 – Conseil de la sécurité routière 

  • Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. 

     la crise de l’esprit – Paul Valéry 

  • Il y a beaucoup de causes pour lesquelles je suis prêt à mourir mais aucune cause pour laquelle je suis prêt à tuer. 

    – Gandhi 

Le plus important aux Jeux olympiques n’est pas de gagner mais de participer, car l’important dans la vie ce n’est point le triomphe mais le combat ; l’essentiel, ce n’est pas d’avoir vaincu mais de s’être bien battu. 

 Devenu « L’important c’est de participer » pour la vox populi – Pierre de Coubertin 

 

Élémentaire, mon cher Watson !. 

 Les Exploits de Sherlock Holmes – Adrian Conan Doyle (le fils de Sir Arthur Conan Doyle) – Adrian Conan Doyle

Vous n’avez pas le monopole du cœur. 

 le 10 mai 1974, au cours du débat télévisé de l’entre deux-tours – Valery Giscard d’Estaing 

Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré !. 

– De Gaulle 

La vérité est en marche, rien ne peut plus l’arrêter. 

– Zola 

Et s’il n’en reste qu’un, je serais celui la !. 

 Victor Hugo 

Il ne faut pas être plus royaliste que le roi. 

 François René de Chateaubriand 

L’exactitude est la politesse des rois. 

 Louis XVIII 

De ce jour et de ce lieu date une nouvelle époque dans l’histoire du monde et vous pourrez dire : j’y étais. 

 Goethe 

S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent de la brioche !. 

 Marie Antoinette

Je suis jeune, il est vrai mais aux âmes bien nées – La valeur n’attend pas le nombre des années. 

Le Cid – Corneille 

Mon royaume pour un cheval !. 

Mots historiques – Richard III 

Paris vaut bien une messe. 

Mots historiques – Henri IV 

Vox populi, vox Dei. 

 voix du peuple, voix de Dieu – Alcuin 

L’ Etat, c’est moi. 

 Louis XIV 

Ich bin ein Berliner !. 

John Fitzgérald Kennedy

La France a perdu une bataille, mais la France n’a pas perdu la guerre. 

 De Gaulle 

Je vous ai compris. 

– De Gaulle 

A coeur vaillant, rien d’impossible !. 

Jacques Coeur 

Euréka ! Euréka ! J’ai trouvé ! J’ai trouvé !. 

 Archimède 

Messieurs, honni soit qui mal y pense. 

– Edouard III 

Qui m’aime me suive !. 

 – Philippe VI de Valois

Qui ne dit mot consent. 

qui tacet consentire videtur – Benedetto Caetani Boniface 

Souviens-toi du vase de Soissons !. 

 Clovis 

Salut César, ceux qui vont mourir, te saluent. 

 Ave Caesar morituri te salutant – Suétone 

Qu’ils me haïssent, pourvu qu’ils me craignent !. 

– Caligula 

Il faut rendre à César ce qui appartient à César. 

Jésus-Christ 

Alea jacta est. 

 Jules César 

Veni, vidi, vici     Jules César en 47 av. J-C. Elle peut être traduite en français par « je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu »

http://www.levif.be/actualite/international/les-10-meilleurs-discours-de-l-histoire/article-normal-89739.html

 

posted by charlierenard in la parole,méthode,prépa and have No Comments

Parole et pouvoir : les sophismes

https://atelierphilosophique.wordpress.com/2016/09/07/exercice-identifier-des-sophismes/

Un sophiste (du grec ancien sophistès : « spécialiste du savoir », formé à partir de sophia : « savoir, sagesse ») désigne à l’origine un orateur et un professeur d’éloquence de la Grèce antique, dont la culture et la maîtrise du discours en font un personnage prestigieux dès le ve siècle av. J.-C. (en particulier dans le contexte de la démocratie athénienne), et contre lequel la philosophie va en partie se développer.

La sophistique désigne par ailleurs à la fois le mouvement de pensée issu des sophistes de l’époque de Socrate, mais aussi le développement de la réflexion et de l’enseignement rhétorique, en principe à partir du ive siècle av. J.-C., en pratique à partir du IIe siècle dans l’Empire romain. Leurs détracteurs (dont le plus célèbre fut Platon) estiment que, n’ayant en vue que la persuasion d’un auditoire, que ce soit dans les assemblées politiques ou lors des procès en justice, les sophistes développent des raisonnements dont le but est uniquement l’efficacité persuasive, et non la vérité, et qui à ce titre contiennent souvent des vices logiques, bien qu’ils paraissent à première vue cohérents : des « sophismes ». Les sophistes ne s’embarrassaient pas de considérations quant à l’éthique, à la justice ou à la vérité.

Cependant, depuis le XIXe siècle et parallèlement à l’effondrement progressif des principes moraux et éthiques acquis depuis l’antiquité, certains commencent à voir en eux non plus des rhéteurs vaniteux ou des jongleurs d’idées sans principes, mais des penseurs sérieux, parfois tragiques militants d’un humanisme qu’on rapprocherait à bon droit de l’époque des Lumières, à moins qu’ils ne soient les précurseurs de notre « postmodernité

À l’origine, l’appellation de sophiste n’est pas considérée comme injurieuse. Le philosophe Socrate et son élève Platon ont changé la connotation du nom de sophiste.

Le Pseudo-Platon définit le sophiste : « Chasseur salarié de jeunes riches et distingués ». C’est Platon qui a popularisé le mot dans un sens péjoratif par ses dialogues, dans lesquels Socrate discute souvent avec des sophistes pour analyser leurs raisonnements : opposé aux méthodes sophistiques, il s’y intéressa pour leur concept de « relativisme de la vérité », concept en totale opposition avec la philosophie socratique selon laquelle il n’existe qu’une vérité et c’est en la cherchant que l’on est dans le Bien, le Beau, et le Juste. Il peut ainsi s’exercer à combattre les impostures qui jouent sur la vraisemblance pour piéger leurs auditeurs, ou encore paraître avoir raison en toute circonstance, buts considérés immoraux.

Xénophon, autre disciple de Socrate, va jusqu’à donner le nom de sophiste aux pythagoriciens ; Aristote a ensuite fondé la science de la logique, visant à classer les différentes formes de raisonnement (ou syllogismes) en faisant le tri entre ceux qui sont cohérents et ceux qui font simplement semblant de l’être, en particulier dans le traité intitulé Réfutations sophistiques.

Les Grecs faisaient la différence entre la sophrôsuné (sagesse-mesure/modération) et la sophia (sagesse-savoir). Parmi ceux qui s’intéressaient à cette dernière, il y eut d’abord les sophoi (sages, en particulier les Sept sages), puis les philosophoi (chercheurs de sophia, philosophes – voir Pythagore). Entre les deux se situent les sophistai (spécialistes de sophia, les premiers emplois du mot portent surtout sur un savoir technique, par ex. la musique). Sans pour autant former une école en soi, les membres de ce groupe avaient en commun plusieurs idées nouvelles. Au cours du Ve siècle av. J.-C., un certain nombre de sophistes, issus pour la plupart de cités périphériques ou de petite taille, parcourent la Grèce pour donner des leçons de sophia. Ces leçons sont payantes et même très chères, mais les sophistes promettent à leurs élèves (le plus souvent, de jeunes aristocrates) une rapide réussite. Au contraire du sophos ou du philosophos, qui tendent à transformer leurs disciples en sophoi et philosophoi à leur tour, les sophistes ne veulent pas former des sophistai, mais, concrètement, des gens aptes à réfléchir, à prendre des décisions, à argumenter et à gouverner. Ils détournèrent leur attention des sciences et de la philosophie pour la porter sur des études plus pratiques, principalement la rhétorique, la politique et la loi, compétences dont avaient besoin les jeunes Grecs afin d’assurer leur succès. Une partie de leur idéal éducatif survit encore dans la notion moderne de « sophistication ». Ils encourageaient aussi une certaine connaissance des arts et métiers. Ils suscitent un grand engouement, mais aussi des réactions de la part de ceux qui estiment qu’ils sont des révolutionnaires. On ne possède presque rien de leurs œuvres, sans doute parce que leur enseignement était payant : ils n’avaient pas intérêt à l’offrir librement au public.

Les sophistes célèbres furent Protagoras, expert en droit, Gorgias, maître de la rhétorique, Prodicos, l’un des premiers à étudier le langage et la grammaire, Antiphon (un des rares sophistes Athéniens) et Hippias d’Élis, une véritable encyclopédie vivante qui prétendait tout savoir. Il y en eut bien d’autres, dont certains charlatans, qui pouvaient porter l’éristique à un état dérisoire. Pour eux, la finalité se limitait à la victoire des arguments face à l’adversaire. Par exemple, Thrasymaque prétendait que par nature, le faible n’a aucun droit sur le fort ; Calliclès, dont l’existence réelle est controversée, est aussi en tout cas un excellent exemple et pour ainsi dire un archétype de cette tendance. À cause de joutes oratoires, Aristote a qualifié d’agonistique (d’????, signifiant « lutte ») cette pratique de la parole. Mais en dépit de cet aspect douteux, c’est entre autres à travers la critique socratique des arguments des sophistes que s’est constituée la méthodologie philosophique, sans oublier leur contribution aux progrès des sciences grammaticales et linguistiques.

Prodicos fit évoluer l’analyse du langage par son approche des différentes significations des mots. Sa contribution la plus significative se trouve dans sa méfiance de l’utilisation polysémique du verbe qui le pousse à établir un usage de mots ayant un sens précis dans lequel chaque expression doit faire référence à une seule et même chose.

Bien qu’on connaisse mal le détail des idées professées par les sophistes, il y avait certainement de grandes différences de l’un à l’autre. Cependant, ils semblent tous s’être intéressés aux domaines suivants :

  • L’analyse rationnelle des situations, des caractères, des lieux, des événements ;
  • L’étude non spéculative (comme celle des anciens physiciens d’Ionie), mais pragmatique de tous les domaines qui puissent être connus. En d’autres termes, face à un phénomène donné, la pensée traditionnelle faisait appel à la mythologie, les physiciens à une théorie sur la constitution du monde, tandis que les sophistes en faisaient une étude phénoménologique et posaient les questions : À quoi cela peut-il me servir ? Comment pourrais-je le maîtriser ? D’une certaine manière, les sophistes sont les ancêtres de la pensée techno-scientifique.
  • L’analyse du langage, non pour lui-même, mais en tant que moyen de persuasion, c’est-à-dire la rhétorique ;
  • L’usage synonymique des mots, dans un sens strict, en vertu duquel chaque nom doit se référer à un seul et unique objet.

La curiosité sans limites des sophistes et leur pragmatisme font qu’ils ont souvent été jusqu’à remettre en cause l’existence des dieux. Les œuvres de Protagoras auraient été détruites par autodafé

Pour Platon, les sophistes ne sont pas un simple repoussoir, mais des adversaires sérieux dont les doctrines méritent d’être combattues. Socrate attaque les sophistes qui, par leur relativisme et leur nominalisme, sont les ennemis de l’idéalisme platonicien. Platon ne critique cependant que modérément les « grands » sophistes : les dialogues de Platon mettent en scène des joutes entre des disciples de ceux-ci et Socrate, qui en vient aisément à bout, les déconsidère et les ridiculise. Les principaux reproches portent sur les points suivants :

  • Les sophistes font payer leurs leçons comme d’autres maîtres de technaï (sculpteurs, potiers, etc.), alors que la sagesse (sophia) ne peut être ravalée au rang de technè et que la faire payer, c’est la corrompre. Platon était issu de l’aristocratie, alors que les sophistes étaient issus du peuple et des classes populaires (et souvent étrangers ou métèques dans la Grèce antique).
  • Les sophistes sont amoraux, puisque leur enseignement peut servir tout aussi bien à donner des armes à l’injustice, alors qu’ils prétendent donner à leurs élèves une éducation.
  • Les sophistes manipulent le langage et préfèrent l’efficacité à la vérité.

Cependant, certaines thèses philosophiques défendues par les sophistes sont prises au sérieux par Platon :

  • Thèses épistémologiques : Les sophistes sont considérés comme relativistes par Platon. Protagoras affirme ainsi que « L’homme est la mesure de toute chose ». Cela signifie que la vérité n’est pas quelque chose d’indépendant de l’homme, mais qu’elle dépendra de sa perspective. En allant à peine plus loin, on soutiendra la thèse que rien n’est vrai, et que tout est relatif. Il n’y a pas de doute que la doctrine des Idées est une tentative de sortir du relativisme des sophistes.
  • Thèses politiques : Elles ne sont pas séparables des thèses épistémologiques. Si l’homme est la mesure de toute chose, alors les lois de la cité ne sont pas guidées par ce qui est bien en soi, mais par ce que les hommes sont convenus d’adopter. C’est le positivisme juridique, par opposition au naturalisme. Les lois sont conventionnelles et non pas fondées sur une morale transcendante. Il est évident que le projet de fonder la politique sur la compétence de ses dirigeants à saisir l’Idée du Bien, c’est-à-dire à être philosophe, est la réponse de Platon au conventionnalisme politique.
  • Thèses morales : Si rien n’est vrai en soi, alors rien n’est bien en soi, d’où l’assimilation de la vertu à la puissance. Est vertueux celui qui est capable d’assouvir ses désirs, c’est-à-dire son bien propre, plutôt que le bien commun. De plus, ce bien est assimilé au plaisir, alors que Platon veut l’associer au respect de la justice.
posted by charlierenard in HLP1ère,la parole,prépa and have Comments (2)

La violence des mots

La violence du langage s’exerce sans plus se dissimuler

posted by charlierenard in la parole,prépa and have Comment (1)

buy windows 11 pro test ediyorum