Cet été des profs se racontent – épisode 1 – Romuald.

Aujourd’hui, Romuald inaugure les portraits d’été,  il a accepté de répondre à notre questionnaire long et parfois un peu difficile et nous l’en remercions.

Bonne lecture!

Du rêve à la réalité du métier…

1.  Quelle est la matière que tu enseignes ? A quels niveaux ?

Histoire Géographie Enseignement Moral et Civique  à des lycéens (2nde et 1ère Gale et Technologique) après 15 ans de collège.

  1. Depuis quand enseignes tu ?

J’ai commencé ma carrière en septembre 2006 comme stagiaire.

  1. Pourquoi as-tu choisi d’exercer ce métier ?

Tout petit déjà j’adorais l’Histoire, que ce soit dans les livres, les films ou encore les jouets. En classe de troisième, lorsque mon professeur principal, M. David, m’a fait travailler sur mon orientation et mon projet professionnel, j’ai décidé de devenir enseignant car j’aimais aider mes camarades à faire leurs devoirs.

  1. Est-ce que la réalité de ton métier coïncide à ce pourquoi tu as choisi de l’exercer ? Pourquoi ?

Lorsque j’ai choisi ce métier, je l’ai fait en sachant deux choses. Premièrement, il fallait quitter mon Pays Basque natal pendant plusieurs années, sauf à enseigner dans le privé, ce qui était incompatible avec mes convictions politiques et personnelles. Deuxièmement, je ne deviendrais jamais riche. Sur ces deux points, la réalité du métier ne m’a pas surpris. Néo-titulaire, j’ai été muté dans l’académie de Versailles où je suis resté deux ans, ce qui est finalement très peu. Revenu en Aquitaine, j’ai dû patienter 12 ans dans le Nord-Gironde avant de revenir enfin à Saint Jean de Luz. En ce qui concerne le salaire, j’estime qu’avec 2 000 € nets (hors heures supplémentaires) après 15 ans de carrière, je ne suis effectivement pas riche.

Dans mon quotidien de professeur, je suis confronté au peu d’appétence de mes élèves pour l’Histoire Géographie. Là non plus je ne suis pas étonné car déjà en tant qu’élève, je voyais bien que j’étais le seul ou presque de ma classe à aimer ça, donc devoir batailler pour que mes élèves s’y intéressent me paraît normal. En revanche, c’est le manque d’intérêt pour l’école en général qui me choque. De par l’éducation que j’ai reçue dans ma famille, j’ai toujours considéré l’école comme une priorité et comme le moyen d’accéder à la vie d’adulte que je souhaitais. Je suis bien obligé de constater que pour un grand nombre d’élèves et de leurs parents, l’école passe bien après les vacances, les activités sportives, les loisirs, etc.

  1. Raconte-nous un de tes plus précieux souvenirs pédagogiques, une belle surprise que tu as pu vivre dans ce métier.

En préparant mon cours sur la ville de demain en classe de sixième, j’avais prévu de leur faire réaliser, en groupe, un plan imaginaire en tenant compte des problématiques de développement durable étudiées pendant le cours. Je craignais le pire (absence de travail, dessins hors de propos, agitation et bruit incontrôlable, etc.) mais finalement, j’ai été bluffé par leur investissement, la qualité de leur travail et de leurs productions.

  1. Quels sont tes projets, tes envies, tes ambitions pédagogiques pour la rentrée 2022 ?

Travaillant dans un lycée proposant de nombreuses sections spécifiques, j’ai eu envie de monter un projet qui concerne tout un niveau et pas seulement telle ou telle section. J’ai donc choisi le Festival International du Film d’Histoire de Pessac dont le thème 2022 « Masculin Féminin » s’intègre dans le programme d’EMC de 1ère et va permettre à toute l’équipe d’Histoire-Géographie de participer au projet.

D’autre part, j’ai choisi d’enseigner la spécialité Histoire-Géographie-Géopolitique-Sciences Politiques en classe de 1ère afin de découvrir un enseignement nouveau pour moi et qui s’adresse à des élèves très investis, dans la mesure où c’est un choix de leur part de suivre cet enseignement de spécialité.

 

Du lien aux liens…

 

  1. Que dirais-tu des relations que tu tisses avec tes élèves ?

J’ai le sentiment que j’arrive à instaurer une relation de confiance entre eux et moi, que j’essaie d’entretenir en leur parlant de la manière la plus sincère possible. Je n’interdis aucun questionnement a priori, car je préfère entendre leur opinion ou leurs doutes, même s’ils peuvent être déplacés ou dérangeants. Pour moi, cela fait partie de mon métier de les aider à réfléchir à tout ce qui les concerne, même en dehors de l’Histoire Géographie.

J’essaie également de les connaître davantage, en m’intéressant à leurs activités extra-scolaires, ce qui me permet de mieux les comprendre et donc de mieux les accompagner dans leurs apprentissages.

  1. Que dirais-tu des relations entre membres de l’équipe pédagogique ?

Il me semble que les relations sont plutôt bonnes. Bien évidemment, vu le nombre de professeurs, il existe forcément des affinités et des inimitiés mais cela n’entrave pas, de mon point de vue, le bon fonctionnement du lycée. Heureusement que des opinions contraires existent et peuvent s’exprimer dans une salle des professeurs, sinon ce serait triste.

  1. Que dirais-tu des relations que tu as pu construire avec les familles ?

En restant 12 ans dans le même établissement, j’avais réussi à obtenir de bonnes relations avec la plupart des familles. Lorsque j’accueillais en classe le deuxième ou troisième enfant d’une même fratrie, les retrouvailles avec les parents étaient très amicales.  J’ai toujours choisi de privilégier les rencontres physiques en rendez-vous plutôt que les échanges écrits ou téléphoniques qui laissent trop de possibilités de malentendu. Cela me permet souvent de désamorcer les conflits.

  1. Depuis tes débuts, quelles évolutions as-tu constatées dans le métier pour toi ? Pour tes élèves?

Ayant commencé à enseigner en 2006, pour moi c’est la place de l’informatique qui a le plus évolué. Alors que dans mes premières années, j’utilisais encore le format papier pour les cahiers de texte de la classe, les appels de début de cours, etc., aujourd’hui tout est informatisé. Mis à part lorsque je suis en classe face à des élèves, j’ai le sentiment d’effectuer un travail de bureau. Paradoxalement, l’informatisation a alourdi les procédures. Pour demander une subvention pour un projet, il fallait auparavant justifier la demande en rédigeant simplement le projet pédagogique. Désormais, il faut compléter un formulaire en ligne de 50 ou 70 questions, pas toujours adaptées à la situation. Une fois le projet réalisé, il faut encore faire un bilan en ligne qui consiste à redonner les mêmes réponses aux mêmes questions que lors de la demande. Que de temps et d’énergie perdus…

Un autre changement important est le développement de l’école inclusive. Enfin, prétendument inclusive. Car qui peut croire qu’inclure un élève à besoins particuliers dans une classe de cinquième de 30 élèves, sans lui adjoindre d’Accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH), est un service à lui rendre ? Dans quel monde les autres élèves de la classe vont, gentiment et sérieusement, réaliser en autonomie le travail proposé par l’enseignant(e), pendant que ce(tte) dernier(ère) répond aux besoins particuliers de cet élève ? L’institution ment aux familles en leur faisant croire que les besoins de leur enfant sont pris en compte. Au final, c’est la persévérance de la famille qui permettra, ou pas, à l’élève d’obtenir les aménagements auxquels il a droit, pendant que son enseignant(e) produit de la paperasse pour permettre à l’institution d’affirmer que la situation particulière de l’élève a été prise en compte.

Enfin, pour les élèves, le développement des outils numériques a eu des effets très antagonistes. D’une part, ils peuvent bénéficier de ressources pédagogiques plus diversifiées, qui permettent davantage de participation des élèves, et d’une communication plus facile et plus directe à leur(e) professeur(e). D’autre part, certains(e)s élèves en viennent à penser, à tort, que le cours est moins important car les ressources seront à disposition sur l’environnement numérique de travail. De plus, la non-maîtrise des codes de langage entraîne des messages inappropriés, malpolis, ou revendicatifs à l’excès.

 

De maintenant à demain…

 

  1. Comment et où te vois-tu dans cinq ans?

Étant donné que je viens d’arriver en lycée, je pense que dans cinq ans je n’aurais toujours pas terminé mon adaptation. J’imagine simplement que je serai en capacité de proposer davantage de projets à mes élèves.

  1. Si tu pouvais demander une chose au ministre de l’éducation nationale ce serait quoi ?

Puisque l’Éducation est nationale et se doit d’accompagner tous les élèves, quel que soit leur niveau scolaire et leur degré de pénibilité, je lui demanderais de supprimer l’enseignement privé.

  1. Quelle serait ton école du futur idéale ?

Ce serait une école où les choix et la réussite des élèves ne seraient pas conditionnés par le milieu familial, la carte scolaire, la carte des langues et/ou des options disponibles sur le secteur.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

buy windows 11 pro test ediyorum