de Bachelard à la littérature jeunesse

Bachelard déclare que les images sont au service d’une imagination où chacun de nous y projette des impressions intimes sur le monde extérieur. De nouvelles impressions sur le monde et sur les autres émergent chez l’individu. Les images permettent ainsi « des mouvements, des bouleversements, des changements dans la pensée de l’homme »8. Le langage quand à lui  » instruit par les formes »9. Cependant le langage peut-être un moyen pour le lecteur de se positionner et de remettre en question ce qu’il voit, comprendre et remettre en question ce qu’il pense. Cette dynamique lui permet davantage d’accroître un esprit critique et une prise de recul. Mais il convient aussi de placer les mots comme étant le résultat d’une certaine représentation et qui ne fait pas mention de vérité générale. Les mots renvoient également à une image qui est propre à chaque individu. Par exemple deux personnes qui lisent le mot « ours » n’auront pas la même représentation physique de l’ours. Il s’agit de l’action de la lecture des mots qui provoque chez le lecteur un ensemble de représentations qui constituent un champ de pensées qu’il va créer. Le lecteur se retrouve à vivre une dialectique, une ambivalence entre l’image et le mot.

Aussi pour Bachelard les images disposent en nous une certaine mobilité de l’esprit et de l’être. Selon Bachelard, je cite: « L’imaginaire comme étant une activité de transfert symbolique des déterminations existentielles contingentes »10. Autrement dit, le lecteur à travers l’imaginaire effectue un travail sur ses représentations et images du monde. Le lecteur devient acteur : il met d’abord ses connaissances au service de la lecture et de la compréhension puis voit ensuite ses représentations interrogées et remises en cause au travers de l’histoire inscrite dans le livre.

L’imagination permet une véritable action du sujet qui entre en communication avec lui-même. Il s’interroge sur son identité. « Elle active une conquête psychologique de l’espace, ce qui permet une véritable application dans l’espace intérieur du moi. »11 Par conséquent, en s’interrogeant, le lecteur se transforme et réinvestit ses images.

Aussi la littérature de jeunesse se compose à la fois de textes et d’images, d’où le caractère dynamique que l’on peut lui attribuer. Celui-ci entraîne un rythme chez le lecteur. Elle le conduit à être actif, le provoque, le réveille et le pousse à l’effort. Bachelard quand à lui parle « d’animisme »12 au service de l’imagination. L’animisme se définit comme étant un ensemble d’objets en mouvement et qui amène le sujet à y porter de l’intérêt. De ce fait, la littérature de jeunesse telle qu’elle est entendue ici ne pourrait-elle pas constituer un objet en mouvement au service de l’imagination ?

 

  1. Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, op. Ct, 17.
  2. Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, op. Ct, 17.
  3. Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, op. Ct, p.34-35.
  4. Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, op. Ct, p.130-131.

altérité proche

J’ai compris que l’altérité n’était pas seulement le fait de découvrir une personne habitant à des milliers de kilomètres de nous, mais qu’elle pouvait être vécue à travers les camarades de classe, son voisin de table ou tout simplement à travers son équipe lors d’une séance de motricité. Pour pouvoir gagner, il était nécessaire que les élèves jouent et collaborent ensemble, c’était un travail d’équipe et certains élèves ne l’ont pas compris, je pense en particulier à un élève qui a accusé les membres de son équipe d’être la cause de la défaite de celle-ci et qu’au contraire lui faisait l’exercice parfaitement. C’est une situation que l’on pourrait mettre en lien avec l’extrait de Laplantine. Jouer en équipe consiste à devoir se décentrer de soi-même, l’élève ne joue pas seul, il doit apprendre à jouer ensemble et écouter, soutenir les autres, c’est l’équipe qui gagne ou perd mais ce n’est pas grâce à ou la faute à. On retrouve ici également, une forme d’ethnocentrisme, puisque cet élève pensait faire l’exercice parfaitement, il était finalement le joueur de référence, le meilleur, et comme son camarade n’a pas suivi son modèle, cet élève fut méchant verbalement envers son camarade en l’accusant d’avoir fait perdre l’équipe, qu’il n’avait pas été rapide et avait fait n’importe quoi.

de l’ERCAPP à l’ERVIP

L’année dernière en M1, lors de mes stages, nous avons travaillé sur le thème de la Russie et étudié quelques particularités (architecture, habitudes, climat, des croyances, la langue…) de ce pays à travers des contes, des photographies, une vidéo mais aussi la musique par l’écoute d’une œuvre  musicale et l’apprentissage d’un chant. Cependant, l’enseignant doit être attentif à ne pas créer des stéréotypes, des images préconçues : en effet, il ne faut pas que les enfants généralisent à partir de données singulières. C’est un aspect que les enseignants doivent réellement prendre en compte pour construire une approche complexe de la culture avec les élèves, et non stéréotypée, qu’on appelle aussi la « folklorisation ». Par exemple, lorsque nous avons travaillé sur l’architecture russe et les habitations, nous sommes partis d’un album puis de photographies de villages où il n’y avait pas que des isbas, des petites maisons en bois. Ainsi, les élèves ont pu observer et comprendre que tous les Russes ne vivent pas dans des Isbas.

L’art visuel peut aussi être un bon moyen de découvrir l’autre notamment avec l’étude en classe d’œuvres  sur le portrait d’autres enfants du monde par exemple mais aussi par la pratique, leurs productions. Dans un premier temps, l’élève serait amené à construire son propre portrait pour construire son identité, apprendre à se voir comme il est. Puis, dans un deuxième temps, chaque élève ferait le portrait d’un de ses camarades, le but étant d’inviter les élèves à se découvrir, « se re-rencontrer », voir les différences et les similitudes qu’il y a entre eux.

analyse de questionnaire

Mes élèves ont rempli le questionnaire de prise de représentation (annexe 1). Je leur ai expliqué toutes les questions. Certaines questions, surtout les deux premières, les questionnaient. J’ai donc spécifié aux élèves qu’ils devaient essayer de répondre à toutes les questions mais que si une question leur posait vraiment problème ils pouvaient la sauter.

En regardant les réponses de mes élèves, je me suis rendue compte que je n’aurai jamais du dire cela. Les élèves y ont vu une échappatoire. J’ai donc eu un certain nombre de questionnaire avec des réponses manquantes. Concernant les autres questionnaires, j’ai fais un résumé des réponses des élèves (annexe 2).

Les élèves ont tous compris ce qu’est la différence dans sa définition la plus commune. Ils l’opposent au fait d’être pareil. La majorité des élèves s’aide d’exemple pour la définir en opposant deux termes. Un élève m’a écrit quelque chose d’intéressant en disant que la différence c’est aussi le fait d’être différent des autres élèves. Pour cela il a pris un exemple en disant qu’il était différent de Margaux (prénom modifié).

Dans une question suivante, je demande aux élèves de dessiner des personnes différentes d’eux. Dans leurs dessins, on retrouve des élèves de la classe mais aussi des personnes qui sont physiquement très proches d’eux (peau blanche, cheveux bruns, etc). Je trouve cela très intéressant et c’est une bonne base pour commencer le travail sur l’acceptation des autres. Les élèves semblent conscients qu’un individu très proche d’eux physiquement reste différent d’eux.

Concernant la question de la culture, il y a une flagrante incompréhension du terme. Les élèves l’ont lu trop vite et l’ont confondu avec le terme de « sculpture ». Je suis consciente que le terme de « culture » est très compliqué pour des élèves de CE1 – CE2. De mon côté, ce terme était vague aussi. Il est difficile de définir ce terme en une phrase. La culture a de nombreuses facettes et donc de nombreuses définitions. Pour la définir en quelques mots, je trouve la définition de Jean-Claude Forquin dans « E?cole et culture » intéressante. La culture est définie comme un « patrimoine de connaissances et de compe?tences, d’institutions, de valeurs et de symboles constitue? au fil des ge?ne?rations et caracte?ristique d’une communaute? humaine particulie?re de?finie de manie?re plus ou moins large et plus ou moins exclusive ».  Je trouve que cette définition claire et concise. On y voit clairement sur quels points les cultures se différencient les unes des autres.

des pratiques à comparer

Je me suis intéressée au tutorat entre élèves, que je pratique en partie en classe. Un article du périodique Le nouvel Educateur9 (9 Le nouvel éducateur, collection EPI, 1978, Des enfants enseignent aux enfants ) explique le fonctionnement complet du tutorat, quand on le pratique de A à Z. Cette pratique permet de travailler sa relation à l’autre de façon efficace : en effet, l’enfant qui apprend de l’autre enfant adopte un regard différent. Il reçoit de l’autre et s’enrichit grâce à lui. L’enfant qui fait apprendre, lui, fait de l’autre une source de fierté, de reconnaissance. Grâce à lui, il s’est trouvé un rôle important qui lui permet de faire partager ses connaissances et de se rendre utile. Pour ma part, je pratique l’entraide en classe : quand un élève a besoin d’aide ou ne comprend pas un exercice, un autre élève qui maitrise la compétence est invité à l’aider. Cela fonctionne bien, les élèves s’investissent beaucoup et sont demandeurs. Ils veulent aider et coopérer. Attention néanmoins à ce que les élèves ne donnent pas les réponses : ils doivent amener l’élève en difficulté à construire la notion, mais pas à lui donner d’emblée. Dans l’article, le tutorat va encore plus loin : ce sont des élèves qui apportent le savoir à d’autres élèves, et non l’enseignant. Cette pratique, fascinante mais probablement difficile à mettre en place, semble également pratiquée en Allemagne sous l’appellation Lernen durch Lehren (en anglais, learning by teaching). Néanmoins, un de mes questionnements persiste : d’après ce que j’ai lu jusqu’à maintenant, il semblerait que cette pratique soit réservée à l’enseignement des langues en Allemagne. Pourtant, elle pourrait s’ouvrir au reste des apprentissages. J’espère donc pouvoir éclaircir cela lors de mon séjour.

Enfin, j’espère découvrir des pratiques allemandes s’apparentant au conseil d’élèves. J’ai mis en place ce conseil dans mes deux classes, en période 2 semaine 5, c’est donc tout récent. Nous avons fait notre premier conseil et cela s’est révélé très intéressant ; Les enfants ont su se remettre en question et ont accepté leurs tords, grâce aux explications des autres. Ils se sont ainsi rendu compte de leurs erreurs et ont compris qu’il était important de bien vivre ensemble, que cela permettait un meilleur climat de classe. Le conseil d’élèves est un moment institutionnalisé : il se tient à chaque début de séance d’EMC et dure 15 minutes. Le reste de la semaine, les élèves ont accès au cahier du conseil que j’ai créé, dans lequel se trouvent trois onglets : problèmes/reproches, félicitations/remerciements et idées/propositions pour la classe. Ils écrivent ainsi ce qu’ils veulent, en respectant bien sur les règles instaurées ensemble, et nous lisons le cahier lors du conseil. Nous réglons les problèmes ensemble et nous y trouvons des solutions. Une vidéo10 réalisée à l’école Freinet d’Hérouville Saint Clair permet de visualiser concrètement ces conseils d’élèves. Pour le moment, je suis encore en charge de la présidence du Conseil, mais c’est amené à changer.

lien théorie -pratique

Laplantine estime que l’homme (en l’occurrence l’observateur), par un mouvement de décentration de soi, doit s’extraire de ses conceptions normatives pour ne pas compromettre son rapport avec l’Autre. Réfléchir et déconstruire ses propres préjugés et stéréotypes, semblent deux étapes essentielles pour envisager la relation avec une personne différente et ce,de lamanière la plus «neutre» possible (dans le sens de la neutralité axiologique). Dans ce sens, «cet état initial de détachement» constitue «un avantage pour se rapprocher de sociétés différentes»4, affirme Lévi Strauss. Loin de prôner, de manière un peu naïve, une neutralité absolue (difficilement concevable et réalisable), ce dernier estime que c’est un objectif vers lequel tendre. Ainsi, «[d]’une certaine manière,  certes [l’ethnologue]se livre à la société qu’il étudie, et y fait «allégeance» (p.143). Mais cela ne s’entend que de manière relative et d’ailleurs limitée dans le temps: par définition, il restera spectateur de cette société, tandis qu’il était et demeurera, même de manière infinitésimale et discontinue un agent de transformation de la sienne(p.144)»5. Laplantine définit un double intérêt à la décentration : découvrir et donner du sens aux structures fondatrices d’une autre société mais également s’interroger sur notre propre fonctionnement sociétal. Parce que l’on prend généralement pour acquis ce que l’on vit, prendre du recul et se confronter à la différence, redessine cet état de fait pour devenir un Dans cette continuité, Christine Delory-Momberger et Béatrice Mabilon-Bonfils affirment que «le déplacement et le dépassement de soi qu’implique l’ouverture à l’autre mettent véritablement à l’épreuve la centration de chacun sur soi-même et sur ses propres habitus culturels ; bousculant les assises et les réflexes culturels d’origine –qui constituent notre armature dans l’existence. »Loin de vivre cette expérience de décentration de façon solitaire, les auteures penchent plutôt pour un «projet collectif», impliquant toute la classe. Véritable défi qui se pose devant lui, l’enseignant est amené à créer un réel «monde commun à construire ensemble», monde dans lequel chacun a sa place et où la diversité est valorisée comme source d’apprentissages (et non comme source de déstabilisation).

Ces premières réflexions sur la différence et la décentration nous invitent à réfléchir sur notre propre quotidien. Professionnel, tout d’abord. Comment, en tant qu’enseignante, puis-je proposer à mes élèves un cadre dans lequel mes élèves vont pouvoir découvrir, appréhender et vivre la différence au quotidien? Comment les amener à se décentrer et à accéder à la diversité culturelle qui les entoure? Personnel, dans un second temps. Quels éléments biographiques peuvent-ils éclairer ma pratique enseignante d’aujourd’hui? Pour quelles raisons, suis-je en train de m’interroger sur l’altérité? Ces deux pans de mon quotidien communiquent, s’alimentent et s’enrichissent.

 

Questionnement professionnel: ma classe de maternelle face à l’altérité

La confrontation à l’altérité va être déterminante dans la construction de la personnalité de mes élèves et de leur rapport avec autrui. Afin qu’ils puissent profiter au maximum de cette rencontre avec l’Autre, je souhaiterais leur proposer de véritables situations propices aux échanges et aux interactions sociales. Comment mettre en place cette «dynamique»6? Comment analyser et évaluer ces situations de communication? Rappelons que, compte tenu de l’âge de mes élèves (entre trois et quatre ans), leurs capacités de décentration ne sont pas encore mises en place, ils restent très égocentrés. Pour une partie de mes élèves (PS), c’est la première fois qu’ils sont confrontés à l’altérité et ce «nouvel univers culturel» que représente l’institution scolaire.

projet inter-classe

J’aimerais présenter un projet inter-classe qui est en train de se mettre en place et qui me semble pertinent, dans le cadre de l’ERVIP. En effet, évoluant dans une école maternelle à fort effectif, les classes PS/MS sont séparées (physiquement) de celles de MS/GS. Si bien que les échanges et les communications sont très peu nombreux entre les élèves (récréations et sorties différenciées par exemple). Avec la réaffirmation d’un cycle unique dans les nouveaux programmes et la promotion dans la continuité dans les apprentissages, il me paraissait important de créer du lien entre les différentes classes. Nous avons décidé, avec l’enseignant d’une classe de MS/GS, de concevoir des albums pour l’école, de l’élaboration de la trame narrative à la création de livres illustrés. Ainsi, dans un premier temps, pendant le décloisonnement, les élèves de MS/GS vont travailler avec moi sur l’invention d’histoires, à partir de cartes à contes. Ces derniers seront invités dans ma classe pour raconter leurs histoires et proposer à mes élèves de les illustrer. Les élèves, ensemble, valideront et choisiront les contes ainsi que les illustrations qui leur paraissent  les plus intéressantes et pertinentes (débats et justifications de leur choix). Suite à ce temps d’échanges et de créations collectif, différents groupes d’élèves des deux classes iront lire ou conter leurs histoires dans les autres classes.

L’interculturalité renvoie au sentiment de peur.

Okilélé. Claude Ponti

Pour ma part, travailler sur l’interculturalité renvoie en premier lieu à s’interroger sur le sentiment de peur que ressentent les individus lorsqu’ils sont confrontés à de l’inconnu. Je me suis permise de reprendre des éléments sur lesquelles j’ai travaillé lors de ma licence 3 en Sciences de l’éducation. A travers ce travail il était question de définir « la peur de l’autre au regard d’un support visuel et/ ou auditif). Pour ce travail j’ai fait le choix de travailler sur la chanson et le clip de Jean-Jacques Goldman : Peurs.

Avant de définir le sujet je commencerai par introduire le sentiment de peur qui fait lien pour moi avec les concepts d’altérité et d’interculturalité que je définirai ensuite. «  J’ai peur de l’autre que je ne connais pas ».

Tout d’abord un bébé ne naît pas avec des peurs. Les peurs vont se construire au sein d’un environnement ( notamment celui de sa famille). Françoise Dolto émet l’idée que « c’est la vérité qui constitue les enfants, les gens n’y pensent pas : ils n’ont qu’a dire la vérité ». Françoise Dolto accorde une grande importance à la parole dans la construction des individus. Elle évoque la notion « de parler vrai »1. Il faut donc essayer de ne pas mentir à un enfant car « on ne peut pas mentir à l’inconscient, il connaît toujours la vérité. Dans La difficulté de vivre, elle explique comment répondre à un enfant qui pose des questions autour de sa naissance. Le « parler vrai » paraît essentiel afin de pouvoir expliquer, de pouvoir éviter certaines peurs. De plus, en Sciences de l’éducation, la peur est définie comme quelque chose de légitime, mais la peur a tendance à entraîner de la méconnaissance. Il est proposé d’apprendre à se connaître et à connaître pour éviter les maladresses, les conflits. Par exemple, laisser place à l’imaginaire chez les enfants permet d’apprendre des valeurs et de faire un choix entre ce qui est acceptable ou non. Dans « La tempête » de Claude Ponti, l’immersion de rituels comme le doudou témoigne de la sécurité que ces rituels peuvent apporter à l’enfant face à des peurs ou des événements marquants. De plus, la peur est un sentiment qui se construit et qui va dans la plupart des cas entraîner de la méconnaissance et par la suite du jugement. La peur est un sentiment vécu et connu par tous.

L’effet « outsiders » dans le clip : montre la différence entre un groupe montré comme supérieur face à un individu seul, en l’occurrence l’autre qui est étranger au groupe, l’autre montré comme intrus voir « inférieur ». Idem dans la chanson avec l’emploi du pronom « on » qui nomme une pensée générale, une manière de penser émanant d’un groupe d’individus. Aussi la phrase  « On dit de source sûre qu’elle » à travers le clip montre que l’on peut apercevoir le sentiment de supériorité qui repose sur des croyances. Peu importe que les croyances soient véritables ou non.

Il apparaît dans le clip et dans les paroles une société ethnocentrique privée de toute communication. Les individus se regroupent par couleur de peau, ou à travers une croyance religieuse ou encore à travers les catégories socioprofessionnelles.

La peur est une émotion connue de tous, elle rassemble et en même temps sépare les individus. La peur de l’autre, de ce qui est étranger nous renvoie à nos façons de vivre et à nos positionnements.

Tous les groupes d’individus ont des craintes et des réactions communes. On peut le percevoir dans le clip à travers le groupe d’hommes de couleur noire qui observe l’homme de couleur blanche entrer dans l’ascenseur. L’observation peut à la fois montrer la méconnaissance mais aussi la peur de l’autre qui ne nous ressemble pas. De plus, le rire peut montrer un signe de supériorité mais pas seulement. Le rire peut être facteur de gène. Un groupe pour ne pas perdre la face va montrer des signes extérieurs comme le rire afin de s’attribuer une allure supérieure. Aussi dans le texte de Ferdinand Deligny, Les Vagabonds efficaces et autres récits, l’altérité est marquée par une bon nombre de rituels.2 Il évoque le passage d’un statut à un autre en l’occurrence. Dans cet extrait, est également évoqué l’entrée d’un nouveau venu dans un groupe déjà formé. L’entrée du nouveau venu passe d’un statut à un autre par une mise à l’épreuve commandée par le groupe qui domine. L’autre dérange, et par conséquent chaque groupe va tenter de légitimer ses craintes puis ses comportements. Le silence dérange dans l’ascenseur, un lieu qui habituellement est silencieux. Les groupes d’individus pour éviter de se confronter à l’authenticité de l’autre qui est étranger comblent pour la majorité d’entre eux par des regards complices, des rires. Mais on peut quand même souligner qu’ils sont dérangés et gênés.

Afin de mieux appréhender les peurs, il s’agirait peut être de développer la connaissance de l’autre, la connaissance des cultures. Mais cela ne veut pas dire qu’il faut arriver à s’en oublier soi.

La peur se construit chez l’individu, elle n’est pas innée en lui. Les peurs naissent en lien avec les interactions que l’individu côtoie. Mais la peur de l’autre parce qu’il est différend crée des groupes d’individus qui s’observent. se regardent, émettent des croyances les uns sur les autres sans se connaître.

Avant de s’interroger sur l’objet d’étude de cet écrit, il s’agit de définir les termes d’altérité et d’interculturalité :

Un consensus semble se dessiner autour de la définition de l’interculturalité. Elle se caractérise comme étant l’interaction, l’échange et la communication entre les cultures où une personne reconnaît et accepte la réciprocité d’autrui.

La reconnaissance de chaque culture isolément ne suffit pas à créer une vraie cohésion sociale. L’interculturalité suppose l’interaction c’est-à-dire la reconnaissance et la réciprocité de la culture d’autrui. Au-delà de la coexistence, c’est apprendre à se connaître en premier lieu. L’approche interculturelle fait valoir que la diversité culturelle ne menace pas le tissu social d’une société mais l’enrichit. De plus, Laplantine nous sous-entend l’idée que l’interculturalité est le résultat d’une rencontre entre deux cultures.3 L’interculturalité se définit donc d’abord par la prise en compte de différentes cultures. ( Rappelons que nous entendons par culture « un tout complexe qui inclut les connaissances, les croyances, l’art, la morale, les lois, les coutumes et toutes autres dispositions et habitudes acquises par l’homme en tant que membre d’une société »). Elle a pour principe fondamental la réciprocité, le dialogue, c’est à dire que les cultures (ou les êtres porteurs de cultures) font partie d’un échange, elles sont à la fois émetteurs et récepteurs de messages et ne jouent pas seulement un de ces rôles. Les différentes cultures apprennent donc les unes des autres. Cette rencontre de l’autre amène à s’interroger sur nos différences et nos ressemblances, à faire disparaître les stéréotypes et les idées reçues que l’on peut avoir. C’est un travail de réflexion en profondeur, « de décentration et de méta-connaissance de sa propre culture et du rôle qu’elle joue dans la construction de chacun »4 selon Jennifer Kerzil. Par conséquent la notion d’altérité peut s’en suivre.

L’altérité quant à elle renvoie à ce qui est autre. Se questionner sur l’altérité demande de s’interroger sur ce qui est différent de nous, les relations avec l’autre et les moyens de communication à mettre en place pour le connaître. Quand on évoque la tolérance, il ne s’agit pas d’altérité car on ne prend pas et on ne comprend pas l’autre dans son ensemble.

Mais les individus appartiennent pour la plupart à un groupe culturel avec des normes et des règles propres à leur mode de vie. L’autre et sa différence culturelle sont définis à travers le groupe culturel qui construit des représentations de l’autre à partir de sa propre culture. De ce fait, il peut s’observer une distance qui pose le problème d’une rencontre avec l’autre.

Afin de mieux appréhender les peurs, il s’agirait peut être de développer la connaissance de l’Autre, la connaissance des cultures.

Dans ce cas comment mettre en place dans le champ de l’éducation et à travers quel(s) outil(s) un travail sur l’interculturalité telle qu’elle est définie dans cet écrit. Comment tendre vers une connaissance plus fine de soi permettant une réelle approche de l’autre ? La peur est-il un sentiment qui peut-être abordé afin de mieux le comprendre et de le maîtriser ?

La littérature de jeunesse peut-elle amener les élèves à se positionner face à des histoires qui sont le miroir de ce qui se passe dans la société ? Peut-elle sensibiliser les élèves à la curiosité plutôt qu’à la méconnaissance et à la méfiance. Pour Bachelard « Imaginer c’est s’absenter et se lancer dans une vie nouvelle»5. Le lecteur va interpréter de différentes manières les images et le sens des textes. Il va interpréter en fonction de son vécu et des pensées qui l’entourent. Et c’est justement ce que l’on peut qualifier de va et vient entre les images et la réalité qui va permettre de travailler sur les écarts de ce qui est acceptable ou non.

En d’autres termes, la littérature de jeunesse ne pourrait-elle pas avoir une place particulière dans une construction de soi et de l’autre et par conséquent permettre l’interculturalité ? Autrement dit, comment l’imaginaire peut-il être un moyen de tendre vers la connaissance de l’autre et l’interculturalité ?

  1. 1. Françoise Dolto, la difficulté de vivre, Articles et conférences IV. Galimard, 1995. p. 2-
  2. 2. Les vagabonds efficaces, Éd. Victor Michon, Rééd, Maspéro, Coll. Textes à l’appui/pédagogie, Paris,
  3. 3. François Laplantine, L’Anthropologie, Paris, Payot, 1995
  4. 4. Jenifer Kerzil. (2002). L’éducation interculturelle en France : un ensemble de pratiques évolutives au service d’enjeux complexes. Carrefours de l’éducation, 2,p, 17-23.
  5. 5. Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, LIBRAIRIE JOSE CORTI, 1943, 9.

Recueil de données

Recueil de données

Le recueil de données est une étape de ce premier écrit qui me pose quelques problèmes : de quoi vais-je parler ? Par où commencer ? Vais-je répondre aux exigences attendues ?

Ne sachant pas encore vers quel sujet d’étude je vais me tourner pour réaliser cet ERVIP, j’ai choisi de commencer par écrire quelques idées et observations, reposant sur l’altérité, récoltées lors de mon premier stage en M2 NA et lors de mon travail dans une école de Caen.

Ma première idée était de partir sur comment lier les temps d’activités périscolaires (TAP) et l’ouverture interculturelle ? J’ai eu l’occasion de travailler pendant un mois dans une école de Caen où celle-ci proposait cette ouverture à travers un atelier « à la découverte de Madagascar » sur les temps d’activités périscolaires. Cet atelier était animé par une intervenante externe qui avait pour passion ce pays de Madagascar, elle souhaitait la partager avec les élèves et leur transmettre des connaissances culturelles. Lors de la présentation de cet atelier, l’intervenante à utiliser un livre de jeunesse représentant la vie d’une petite fille malgache et un chant traditionnel. Je me souviens avoir observé des élèves curieux et intrigués par cette nouvelle culture, notamment au moment du chant en malgache. Mais le plus intéressant fut le témoignage, l’intervention en classe d’une petite fille venue directement de Madagascar et la rencontre avec les élèves, tout simplement avec l’altérité.

Une autre idée a également retenu mon attention : la présence d’élèves allophones dans l’école. De nombreuses questions m’ont alors traversées l’esprit : comment intégrer un élève allophone dans une classe ? Quelle pédagogie adoptée ? Que peut penser un élève de maternelle sur son camarade qui ne parle pas la même langue que la sienne ? Ces questions pourraient faire l’objet de mon ERVIP.

Par ailleurs, lors de mon arrivée en stage, les élèves terminaient le thème de la Chine. Ce thème leur a permis de découvrir les particularités et des éléments de la culture de ce pays. Sur les temps de regroupement, je pense à un élève en particulier qui a voyagé avec ses parents en Chine ou tout simplement à d’autres qui avaient des objets représentant la Chine chez eux, venaient présentés des objets devant le groupe et cela donnait lieu à une discussion. Ce thème de la Chine reviendrait à refaire le même travail qu’en M1 où j’ai travaillé le thème de la Russie et la découverte de ses particularités.

De plus, durant ce stage j’ai réalisé une séquence de motricité basée sur les jeux collectifs. J’ai compris que l’altérité n’était pas seulement le fait de découvrir une personne habitant à des milliers de kilomètres de nous, mais qu’elle pouvait être vécue à travers les camarades de classe, son voisin de table ou tout simplement à travers son équipe lors d’une séance de motricité. Pour pouvoir gagner, il était nécessaire que les élèves jouent et collaborent ensemble, c’était un travail d’équipe et certains élèves ne l’ont pas compris, je pense en particulier à un élève qui a accusé les membres de son équipe d’être la cause de la défaite de celle-ci.

Problématique de Laplantine

Quel sens donner aux mots « différence », « décentration », « ethnocentrisme » ?

Laplantine nous amène à réfléchir à la problématique de la différence et sur le sens que porte ce mot. Il associe deux autres termes à la différence : la décentration et l’ethnocentrisme, étroitement liés à l’interculturalité.

Intéressons-nous de plus près à ces trois définitions :

La différence se définit, d’après le dictionnaire Larousse, comme « l’absence d’identité, de similitude entre des choses, des personnes », elle désigne « un caractère qui les distingue l’une de l’autre ». Ainsi, chaque personne dispose de caractéristiques propres en fonction de son pays, sa culture, chaque personne est unique et c’est « ce qui constitue un écart entre deux ou plusieurs personnes ».

Dans cet extrait, je pense que Laplantine nous incite de par ce mot différence, à regarder autour de nous et ne plus penser qu’à soi. Il faut observer les autres sociétés pour en déduire les différences avec la nôtre mais aussi pour mieux comprendre l’autre. Il parle alors de « décentration radicale » c’est-à-dire qu’il faut s’éloigner complétement de notre société, de notre propre personne, qui constitue notre unique centre d’intérêt. C’est en somme prendre du recul, pour mieux s’ouvrir aux autres, se mettre à leur place et les comprendre. C’est en s’ouvrant à l’autre, à sa culture, que l’on pourra apprendre à connaitre l’autre et la société dans laquelle il vit.

A ce terme, Laplantine oppose l’ethnocentrisme.  Selon Levis Strauss,  l’ethnocentrisme se définit comme « une attitude d’origine inconsciente qui consiste à considérer sa propre société comme un modèle et à voir toute différence par rapport à ce modèle comme un signe d’infériorité ». Nous avons donc tendance à voir notre société comme étant la société de référence et à rejeter ce qui n’appartient pas à notre culture, ce qui entraine souvent du racisme, de la violence, des préjugés mais aussi la peur de l’autre, de l’inconnu, sujets auxquels nous sommes confrontés chaque jour, de par l’actualité quotidienne de notre pays.

Pourquoi cette démarche, en plus de nous permettre de comprendre l’autre, nous amène-t-elle à nous comprendre nous-mêmes ?

En plus de nous permettre de comprendre l’autre, cette démarche de Laplantine, nous amène à nous comprendre nous-même, à réfléchir sur la société dans laquelle nous vivons, à son fonctionnement mais aussi sur le monde qui nous entoure. C’est en apprenant à connaitre l’autre que l’on se construit. En découvrant une nouvelle culture, de nouvelles façons de vivre, des pensées différentes, nous nous imprégnons de l’autre et nous nous forgeons notre propre avis. Je pense que cette décentration est nécessaire, pour éviter d’adopter une attitude ethnocentrisme, il faut aller voir au-delà des images toutes faites, des préjugés et découvrir l’autre simplement, tel qu’il est.  Je terminerai avec une citation de Jean-Paul Sartre « pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l’autre. L’autre est indispensable à mon existence ».

Comment, en tant qu’enseignant, puis-je mettre en œuvre cette approche dans ma classe ? Autour de quelles activités précises ?

Pour mettre en œuvre cette approche en classe, je pense qu’il faut que les élèves rencontrent l’autre directement, physiquement. Le voyage scolaire pourrait être un bon compromis mais toutes les écoles n’en ont parfois pas les moyens financiers. Par ailleurs, pour voyager, il n’est pas nécessaire de bouger, les élèves peuvent travailler en classe de manière transdisciplinaire sur un pays. Par exemple, l’année dernière en M1, lors de mes stages, nous avons travaillé sur le thème de la Russie et étudié quelques particularités (architecture, habitudes, climat, des croyances, la langue…) de ce pays à travers des contes, des photographies, une vidéo mais aussi la musique par l’écoute d’une œuvre musicale et l’apprentissage d’un chant.

Les arts visuels peuvent aussi être un bon moyen de découvrir l’autre notamment avec l’étude en classe d’œuvres sur le portrait d’autres enfants du monde par exemple mais aussi par la pratique, leurs productions. Dans un premier temps, l’élève serait amené à construire son propre portrait pour construire son identité, apprendre à se voir comme il est. Puis, dans un deuxième temps, chaque élève ferait le portrait d’un de ses camarades, le but étant d’inviter les élèves à se découvrir, « se re-rencontrer », voir les différences et les similitudes qu’il y a entre eux.

A cet âge, les élèves sont égocentriques et centrés sur leur personne, ils ont du mal à accepter, prendre en compte l’autre. Il faut donc amener les élèves, dès leur plus jeune âge à apprendre à vivre ensemble, écouter l’autre et à ne plus être le seul centre d’intérêt. En maternelle, chaque petit moment de regroupement sont propices à ce développement. Ces moments peuvent être l’occasion pour un  élève de présenter un objet ou parler d’un sujet qui lui tient à cœur à ses camarades, puis les autres élèves pourraient aussi s’exprimer. Ces moments de regroupement, permettent aux enfants de se décentrer.

De plus, comme évoqué ci-dessus, pour rencontrer l’autre, il n’est pas nécessaire de se déplacer, l’autre peut venir à nous.

En effet, certaines écoles organisent des journées, des moments de rencontres, de découverte d’autres cultures. Le but étant de faire découvrir aux élèves les origines, la culture de leurs camarades. Des parents d’élèves, d’origines différentes, viennent présenter aux autres élèves un morceau de leur culture en leur proposant des ateliers, comme des ateliers culinaires, de dégustation de produits et plats typiques (épices, pâtisserie…) ce qui favorise aussi la découverte des sens. Des ateliers de danse sont peuvent être également proposés aux élèves, des mamans espagnoles viennent faire découvrir le flamenco et les habits traditionnels. Chaque famille apporte un bout de soi, de sa culture à l’école pour le faire découvrir aux autres, ce sont des moments de partage, tout simplement d’altérité.