Le Lion et le Rat

Il faut, autant qu’on peut, obliger tout le monde :
On a souvent besoin d’un plus petit que soi.
De cette vérité deux Fables feront foi,
Tant la chose en preuves abonde.
Entre les pattes d’un Lion
Un Rat sortit de terre assez à l’étourdie.
Le Roi des animaux, en cette occasion,
Montra ce qu’il était, et lui donna la vie.
Ce bienfait ne fut pas perdu.
Quelqu’un aurait-il jamais cru
Qu’un Lion d’un Rat eût affaire ?
Cependant il advint qu’au sortir des forêts
Ce Lion fut pris dans des rets,
Dont ses rugissements ne le purent défaire.
Sire Rat accourut, et fit tant par ses dents
Qu’une maille rongée emporta tout l’ouvrage.
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage.

C’est une fable à double morale si on peut l’exprimer ainsi.

La première se situe dans les premiers vers :

« Il faut, autant qu’on peut, obliger tout le monde :

On a souvent besoin d’un plus petit que soi. »
En plaçant la morale dès le début de la fable on comprend que Jean de la Fontaine veut nous énoncer ici une vérité générale, c’est une maxime de vie qui n’a comme but que de faire prendre du sens à des idées abstraites. Il décide de démontrer avec ce petit exemple que la faiblesse de prime abord n’en est peut être pas une car là où le rat excelle le lion n’en vaut pas une. Chacun a ses qualités et ses défauts et ce n’est pas un titre assurant la puissance qui vous sera utile pour des situations dans lesquels vous êtes incompétents. Il vaut mieux respecter ceux qui paraissent faibles car ils ont très certainement un éventail de compétences dans lesquels vous êtes démunis.

Ironiquement la seconde morale de cette fable est celle qui est devenue la plus célèbre, elle est positionnée à la fin et sert d’introduction à la fable qui la suit (la fourmi et la colombe) :

« Patience et longueur de temps

Font plus que force ni que rage. »

Cette morale « juge » le comportement du lion une fois qu’il est pris au piège, il a beau rugir, il a beau se débattre avec passion et rage, il ne peut se sortir de ce guet-apens, toute sa rage et toute sa force sont inutiles. C’est alors que le rat pointe le bout de son nez et de ses dents aiguisées et entame un véritable marathon de patience, petit à petit il ronge les mailles et le filet finit par se briser, grâce au travail méticuleux du rat, le roi retrouve sa liberté.

il ne faut pas mépriser les plus petits, ou les plus faibles  ; chacun a ses qualités et apporte quelque chose aux autres.

imane kojok

Toi, dit l’enfant blanc

J’enseigne en PS, mais j’ai déjà utilisé ce poème lors d’un remplacement, il y a longtemps déjà, au Gabon en CM1 que m’avait laissé le PE que je remplaçais, dans son cahier journal. J’avais eu l’idée des animaux.

TOI, DIT L’ENFANT BLANC

Toi, dit l’enfant blanc
À l’enfant noir
Tu te fonds
Dans la nuit noire

Toi, dit l’enfant jaune
À l’enfant blanc
Tu te fonds
Dans l’aube blanche

Toi, dit l’enfant rouge
À l’enfant jaune
Tu te fonds
Dans le midi du jour

Toi, dit l’enfant noir
À l’enfant rouge
Tu te fonds
Dans le cuivre du couchant

Mais alors, mais alors
Dirent les quatre enfants
Nous sommes
Les heures vives
De la vie.

Yves Yanec

Cette poésie peut être étudiées en CM1.

En liaison avec la grammaire, on travaillera sur les pronoms : TOI, TU, TE. Nous pourrons prolonger ce travail avec les autres pronoms, MOI / JE / ME ou LUI / IL ou ELLE / SE.

Dans un premier temps, pour comprendre ce poème, on pourra observer la musicalité dans le rythme et les répétitions TOI, TU TE. Puis les images ou métaphores:

rouge cuivre couchant pour parler de la couleur du soleil au crépuscule.

Ensuite, les élèves seraient amenés à produire « A la manière de… » une strophe ou deux à partir d’une liste d’animaux et certaines de leur caractéristique et/ou leur couleur en utilisant les pronoms :

MOI/JE/ME avec aussi : LUI/IL/ELLE/ SE (VOUS-NOUS-NOUS) (ELLES/ILS/LEURS)

Baleine – océan – bleue

Lion – crinière – marron

Cheval – galop – quatre pattes (par opposition à 2 pattes ou à des nageoires, etc…)

Etc…

Exemple de productions :

Moi, dit la baleine bleue,

Au lion marron

Je me fonds dans l’océan

Ou ma peau disparaît.

Différence

Des fois je ne comprend pas

Ils ne m’expliquent pas

Font-ils exprès de me rejeter?

Font-ils exprès de me différencier?

Est-ce possible de me regarder,

Rendre ma vie plus belle

En m’acceptant,en m’aimant?

Ne plus me tenir eloigné

C’est ce que j’aimerais

Est-ce que vous le pouvez ?

Fanchon

Ce poème relate un des soucis majeur de notre société qui n’est autre que le racisme ; lorsque nous évoquons le racisme , le racisme peut prendre plusieurs formes il n’y a pas que le racisme de couleur, nous pouvons vivre un racisme social, culturel et parfois même une forme de ségregation raciale

Ce poème explique ce qu’une personne dite « différente » peut ressentir, elle nous fait part de ses ses sentiments , de ses interrogations, afin d’interpeler les personne susceptibles de les juger ou de les moquer … Une manière de les inviter à revoir leurs positions et préjugés pour être dans l’acceptation de l’autre.

Vivre l’altérité en Poésie – Marie Raynaud – classe de CM1

Cher frère blanc,
Quand je suis né, j’étais 
noir,
Quand j’ai grandi, j’étais 
noir,
Quand je suis au soleil, je suis 
noir,
Quand je suis malade, je suis 
noir,
Quand je mourrai, je serai 
noir.

Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais 
rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es 
rouge,
Quand tu as froid, tu es 
bleu,
Quand tu as peur, tu es 
vert,
Quand tu es malade, tu es 
jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.

Alors, de nous deux,
Qui est l’homme de couleur ?

Léopold Sédar Senghor

 Je procèderai à une première lecture. Puis j’afficherai la poésie au rétroprojecteur.

Nous expliquerons ensemble le vocabulaire, assez simple pour cette poésie. Et nous chercherons ensemble le message qu’a voulu faire passer l’auteur.

Ensuite les élèves copieront la poésie et feront leur illustration.

Enfin nous l’apprendrons, le début ensemble puis en autonomie à la maison pour le reste (niveau CM1). Nous travaillerons ensemble sur l’expression, les gestes que l’on peut faire en récitant la poésie.

J’aime beaucoup ce poème. Le poète nous fait réfléchir sur le thème du racisme.

Sans être polémique, il renverse le modèle du monde moderne, où l’homme blanc est au centre de tout et l’homme noir est qualifié d’ « homme de couleur ».

Ce poème démontre effectivement que l’homme de couleur ne devrait pas être celui qui a la peau noire mais plutôt celui qui a la peau blanche.

 

En parallèle, nous travaillerons en EMC sur les émotions (avoir froid, avoir peur, avoir mal, avoir chaud…)

Vivre l’altérité en poésie

Je n’avais encore jamais fait de poésie avec mes élèves autour de l’altérité. J’ai donc fait de nombreuses recherches pour en trouver une, afin de la poster sur le blog mais en vain. J’ai donc décidé de commenter d’abord un des travaux déjà posté, lorsque je suis tombée sur une poésie qui m’a beaucoup parlé. J’ai donc décidé de la reprendre pour mes élèves car je la trouve très parlante et explicite.

Dès les premiers vers, le cadre est posé: tous les Hommes sont les mêmes physiquement: les yeux, la bouche, les mains, les jambes. Puis les mêmes parties du corps sont reprises pour montrer ce qui nous différencie. C’est la manière dont nous nous comportons envers l’autre : nos mots (maux), notre regard, ce que nous offrons (ou prenons), notre impact sur les autres (la trace que nous laissons).
Cette poésie s’adapte parfaitement à mes élèves de CE2. Nous commencerons par travailler le vocabulaire, puis la copie de texte, l’illustration et nous l’apprendrons. . Sur cette base, en parallèle nous travaillerons en EMC sur l’acceptation de l’autre et notre impact sur les autres à travers le langage oral et nous approfondirons cela en production d’écrit. Je leur demanderai de décrire une situation dans laquelle ils ont fait preuve d’acceptation de l’autre, d’ouverture, ou bien à l’inverse, une situation dans laquelle une autre personne a fait preuve d’altérité envers eux.

La différence

Pour chacun une bouche deux yeux
deux mains deux jambes

Rien ne ressemble plus à un homme
qu’un autre homme

Alors entre la bouche qui blesse
et la bouche qui console

entre les yeux qui condamnent
et les yeux qui éclairent

entre les mains qui donnent
et les mains qui dépouillent

entre le pas sans trace
et les pas qui nous guident

où est la différence
la mystérieuse différence ?

Jean-Pierre Siméon

 

A mon bel Amour : dans un miroir

Ces vidéos intitulés « A mon bel Amour : dans un miroir » de Anne Nguyen et sa compagnie sont le reflet d’une recherche d’identité et de son rapport au regard de l’autre au cours de sa vie.

Les différents styles de danses associés à un texte apportent cette pluralité de regard, de perception et de confrontation à l’autre. Elles nous invitent à nous questionner sur notre identité et comment elle se construit. Elles nous montrent comment notre vision du monde évolue.

Ces différentes vidéos représentent le développement de notre identité et notre façon de comprendre le regard de l’autre. Chaque vidéo semble marquer une étape de vie et une évolution de notre identité.

La compagnie incarne le regard que l’on peut porter sur soi à travers celui des autres mais aussi se besoin de se détacher du regard de l’autre pour enfin s’accepter soi.

Lorsqu’ils dansent tous ensemble à la fin de la dernière vidéo on ressent cette acception de l’autre et de soi avec chacun leur propre identité.

« L’autre » Robert Gélis

Portrait de l’autre

L’Autre :
Celui d’en face, ou d’à côté,
Qui parle une autre langue
Qui a une autre couleur,
Et même une autre odeur
Si on cherche bien …

L’Autre :
Celui qui ne porte pas l’uniforme
Des bien-élevés,
Ni les idées
Des bien-pensants,
Qui n’a pas peur d’avouer
Qu’il a peur …

L’Autre :
Celui à qui tu ne donnerais pas trois sous
Des-fois-qu’il-irait-les-boire,
Celui qui ne lit pas les mêmes bibles,
Qui n’apprend pas les mêmes refrains …

L’Autre :
N’est pas nécessairement menteur, hypocrite,
vaniteux, égoïste, ambitieux, jaloux, lâche,
cynique, grossier, sale, cruel…
Puisque, pour Lui, l’AUTRE …
C’est Toi

Robert Gélis (« Poèmes à tu et à toi« )

Ce poème me semble pertinent, dans un premier temps, parce qu’il démontre l’existence de différentes cultures dans une même société. Il met également en avant le principe même de la notion d’altérité. En effet, l’altérité se définie par l’acceptation de l’autre en tant qu’être différent ainsi que son droit de se représenter tel qu’il est lui. Ce poème fait ressortir les valeurs de l’altérité, en introduisant le sujet de l’ouverture d’esprit et de l’acceptation aux différentes cultures et à leur métissage.

Ce poème peut être exploité en classe de primaire et plus particulièrement en cycle 3. L’enseignant pourrait proposer à ses élèves, après avoir étudié le poème de Robert Gélis, d’écrire eux mêmes un poème reflétant leur propre vision de qui peut être l’autre et les valeurs qu’il peut défendre. À la suite de ces écrits, les élèves pourraient illustrer leurs propos grâce à des dessins. Ils les afficheraient au tableau et pourront chacun lire leurs productions. L’enseignant pourra également afficher ces dernières dans la classe, afin que les élèves puissent se souvenir que dans ce lieu, il existe des règles de vie afin d’établir une bonne coopération entre leurs pairs.

L’altérité en poésie

J’ai choisi le poème La différence de Jean-Pierre Siméon, car je trouve qu’il est un bon support pour travailler la question de l’altérité à travers la poésie.

Ce poème représente bien la complexité de la notion d’altérité qui mêle à la fois les notions de ressemblance et de différence.

La Différence

Pour chacun une bouche deux yeux
Deux mains deux jambes

Rien ne ressemble plus à un homme
qu’un autre homme

Alors
entre la bouche qui blesse
et la bouche qui console

entre les yeux qui condamnent
et les yeux qui éclairent

entre les mains qui donnent
et les mains qui dépouillent

entre le pas sans trace
et les pas qui nous guident

Où est la différence
la mystérieuse différence ?

Jean-Pierre Siméon

SIMÉON J-P, La Nuit respire, Le Chambon-sur-Lignon, Éditions Cheyne, 1997

En classe, ce poème pourrait permettre de travailler la poésie en elle-même et sa compréhension, mais aussi la définition de la différence et son lien avec l’altérité.

Il pourrait également être le point de départ d’un projet en interdisciplinarité entre le français et l’art plastique par exemple, pour travailler sur les représentations de la différence et de l’altérité à la fois de manière écrite ou orale en français et de manière plus visuelle en art plastique.

Dans un miroir il y a ?

Que me direz vous ?

Passez le côté matériel et allons à l’essentiel ,que voyez-vous ?

Un reflet. Mais ce reflet n’apparaît pas seul, il tire sa source d’une réalité, une réalité posée face à ce miroir? C’est cette réalité que Anne Nguyen et sa compagnie proposent d’interroger. À travers les mouvements des corps, la musique, les paroles, elle explore des questions existentielles. Ici, où s’invitent le classique,le voquing,le Krum,le popping. Nous pouvons apprécier la beauté du décor, de la chorégraphie ainsi que les styles des danseurs. Mais nous pouvons aussi côtoyer l’intensité des émotions vécues par les danseurs tant dans leur langage corporel que par leurs parole. Les symboliques utilisées permettant de distinguer l’altérité et l’identité la perception sont amenées poétiquement. Ce qui ouvre le spectateur à une interprétation personnelle de la diversité permettant par la même occasion de s’interroger sur qui il est. Quelle(s) est sont/ses identités? La thématique de la relation à l’autre est encore une fois finement soulignée par les textes et les corps. La métaphore de l’ombre et la lumière, amènent une douce transition à l’idée de la perception et représentation. Que vois-je ? Comment me voit-on?

Laissez-vous happer par l’expérience poétique et philosophique du spectacle d’Anne Nguyen.

L’enseignant Médiateur

Bonjour,

Je suis actuellement enseignant de CP à Tenerife en Espagne. Mes élèves sont à 90% hispanophes et n’ont pour la plupart que trois ans de scolarisation en langue française. Par rapport au rich média qui fut présenté, la médiation que j’utilise le plus, est la médiation langagière. Les élèves se trouvant en phase d’apprentissage de la lecture, je dois m’assurer qu’ils aient une représentation correcte des termes qu’ils lisent. Pour cela, lors de la lecture de textes, il y a toujours une phase de questionnement sur les mots que les élèves ne comprennent pas. Je leur demande de me donner leur définition possible de ce mot en français et parfois en espagnol. Régulièrement leur vision du terme est totalement erronée, il faut donc les amener vers la notion correcte, soit en passant par les quelques francophones présents en classe, soit en leur faisant deviner ou bien en leur donnant directement la réponse.

Comme médiation institutionnelle, il me semble que la plus courante est celle de l’évaluation et de notation entre le système français et le système espagnol. En effet, l’école primaire espagnol utilise un système de notation numérique sur 10 points et aurait tendance à noter plus « haut » que l’ancien système numérique français. Il est donc parfois compliqué d’expliquer aux parents d’élèves l’évaluation par compétences sans notes numériques. Ils se sentent parfois perdus et me demandent si leur enfant a obtenu la moyenne ou non. Lorsqu’apparaît un « Non-acquis », cela est vécu comme un drame pour les parents.

Je pense que c’est dans la représentation de l’évaluation qu’il y a le plus d’altérité entre les deux « écoles ».

L’enseignant médiateur, c’est également être à l’écoute de chaque élève lors de situations conflictuelles en récréation ou en classe et tenter de résoudre les problèmes de façon la plus juste possible. Mais ça c’est le quotidien de tous les enseignants.

 

Samuel CHABOT-VALLÉE