Enseigner dans un établissement français à l’étranger (en Egypte) implique nécessairement de multiples échanges culturels : entre les cultures des élèves et de l’enseignant, entre la culture de l’école française et la culture de l’école du pays hôte et enfin entre les différentes langues pratiquées dans l’établissement. Dans ce contexte pluriculturel, des échanges permanents entre la culture française et de la culture égyptienne ont lieu, de manière explicite mais également de manière implicite.
En premier lieu, la culture française est objectivement dispensée dans le cadre des enseignements disciplinaires : histoire, géographie, EMC, français (étude de la langue, étude d’œuvre littéraire), arts… Pour bien prendre en compte la dimension multiculturelle de ce contexte, il est important de contextualiser fréquemment ses enseignements afin de ne pas négliger la culture des élèves. Faire des allers et retours incessants entre l’histoire de la France et l’histoire de l’Egypte, par exemple, est une marque de respect et une preuve pour les élèves que nous ne hiérarchisons pas une culture par rapport à une autre. Oui, nous sommes français dans une école française à l’étranger, mais nous devons prendre en compte et valoriser la culture locale afin d’instaurer un dialogue interculturel. L’enseignant doit en permanence se décentrer et permettre à ses élèves de le faire également. Il doit être un médiateur entre ces deux cultures.
Enseigner la culture se fait également de manière implicite avec les élèves, par simple imprégnation, notre seule présence suffit à leur transmettre des codes qui ne leur sont pas familiers au départ et qui le deviennent au fur et à mesure, notamment par le langage non verbal, l’exposition à d’autres modes de pensée, … Effectivement, avoir grandi dans un pays démocratique et laïque et grandir dans un pays musulman et nouvellement démocratique impliquent des différences mais aussi de nombreuses similitudes, et la mise en lumière de ses ressemblances doit être privilégiée par l’enseignant car le contexte culturel dans lequel nous grandissons ne résume pas notre identité, cela n’en est qu’une partie. Nous ne sommes pas déterminés par notre culture de base mais nous pouvons nous construire à partir de valeurs universelles, communes à toutes les cultures, c’est ainsi que nous pouvons enseigner une approche multiculturelle de l’être.
Enseigner la culture de l’école française passe par ses domaines disciplinaires, mais également par le mode de pédagogie proposée. Dans les écoles françaises, l’élève a une place active dans ses apprentissages, il ne s’agit d’envisager l’enseignement comme strictement descendant. L’élève apprend à raisonner, participe grâce à des échanges et des responsabilités à la vie de l’école (délégués, conseil d’école…), le travail de groupe et la coopération sont valorisés… pour en faire des citoyens engagés et responsables par la suite. Cette vision culturelle de l’école est donc transmise au quotidien à nos élèves tout en respectant le contexte culturel égyptien : lever des drapeaux égyptiens et français chaque matin en chantant l’hymne national, salle de prière à disposition des élèves qui le souhaitent, cours de religion, de langue arabe et de sciences sociales en arabe dans le temps scolaire… Un véritable modèle hybride est alors mis en place dans le respect mutuel de ces cultures de l’école.
Enfin, enseigner la culture se fait par le simple fait linguistique car la langue est une des composantes de la culture ; enseigner en langue française et enseigner la langue française constituent donc un apprentissage d’une autre culture pour les apprenants. Les différents niveaux de langage, les expressions idiomatiques, … sont autant d’apports culturels que nous transmettons à nos élèves. Mais encore une fois, il faut être vigilent et s’autoriser à avoir une approche plurielle des langues en passant par exemple par leur langue ou une autre langue (l’anglais en Egypte) pour veiller à ce que chaque élève est accès au sens et aux apprentissages.
Pour conclure, le fait d’enseigner la culture, c’est avoir une approche multiculturelle de l’enseignement qui favorise la mise en lumière, la compréhension de la culture de l’Autre et les échanges entre les différentes cultures en jeu. Les objectifs et compétences visés lorsqu’on enseigne la culture pourraient alors être de créer un réel intérêt de l’altérité chez nos élèves, de les pousser à s’interroger sans cesse sur les apports de telle ou telle culture, à être curieux et d’en faire des adultes ouverts à l’altérité, tolérants et enfin, de leur donner les clés d’un dialogue interculturel afin d’instaurer une relation intersubjective de qualité avec les autres cultures, loin des stéréotypes.