La Vienne antique ressuscitée

Alors que le chantier de fouilles entamé en avril dernier devait prendre fin à la mi-septembre, il a finalement été prolongé jusqu’au 15 décembre prochain. Preuve que les vestiges mis au jour sont d’une réelle importance : « la découverte la plus exceptionnelle de l’époque romaine depuis cinquante ans », selon l’archéologue Benjamin Clément, responsable scientifique de l’opération.

En effet, c’est tout un faubourg de la ville antique de Vienne, entre Rhône et Isère, qui a été découvert lors de fouilles préventives, ici effectuées avant des travaux de construction de logements (sur une ancienne friche industrielle). Localisé à Sainte-Colombe, sur la rive droite du fleuve, le site s’étend sur 7 000 m² et laisse apparaître de multiples constructions particulièrement bien conservées, sans doute grâce à des incendies successifs.

Car le feu peut, à l’occasion, avoir des vertus salvatrices : par exemple en faisant s’effondrer des étages, toits et terrasses, des parties entières de demeures sont ainsi préservées. Des couches de terre brûlées peuvent protéger un site pendant des milliers d’années.

C’est ce qui a permis en octobre 2016, dans l’Ouest du Danemark, de mettre au jour les restes d’une maison incendiée datant de l’âge du fer. « On peut voir précisément où se trouvaient les poteries avec leur contenu » ; « Sans cet incendie, nous n’aurions pas pu voir les détails. Cela a préservé la maison exactement telle qu’elle était utilisée à l’âge du fer. Les détails nous rapprochent de l’intérieur de l’habitat et de l’architecture de l’âge du fer. » (Mikkel Kieldsen, archéologue du musée danois Viborg).

Qualifiée de « petite Pompéi », la zone explorée près de Lyon fait état de luxueuses demeures d’aristocrates (appelées domus), de boutiques d’artisans et d’espaces publics datant des Ier-IIIe siècles. La fonction de certains édifices reste toutefois encore à déterminer…

Divers objets ont été retrouvés, tels des outils, amphores, cruches, portes, meubles, statues en marbre et en calcaire. Plusieurs mosaïques (près d’une vingtaine) ont également été mises au jour. Confiées aux bons soins de l’atelier du musée gallo-romain de Saint-Romain-en-Gal, elles seront restaurées.

L‘étude du site archéologique devrait permettre d’en savoir davantage sur les caractéristiques de la ville de Vienne à l’époque romaine : maisons à étages, réseaux hydrauliques, activités artisanales.

Située à un carrefour de routes entre le Rhône et la Narbonnaise (de Lyon à Arles), Vienne était alors une des grandes villes du Sud de la France.

D‘ici le mois de décembre, l’équipe d’archéologues (une vingtaine) devrait encore creuser et peut-être trouver d’autres vestiges exceptionnels.

À noter que ce site d’exception pourra être visité à l’occasion des Journées du Patrimoine les 16 et 17 septembre prochains.

En métro dans l’empire romain!

Un étudiant de Géographie de l’université de Chicago, Sasha Trubetskoy, a eu l’heureuse idée de cartographier les anciennes voies romaines façon lignes de métro.

Pour ce faire, il s’est basé sur un modèle de réseau géospatial de la Rome antique élaboré par l’université de Stanford en Californie (projet Orbis) ; sur un site d’étude sur l’antiquité (Pelagios) fournissant des ressources en ligne et un forum pour le partage de méthodes et de données pour explorer des lieux historiques ; et enfin sur le guide de voyage de la Rome antique Itinéraire d’Antonin (sorte de recueil d’étapes du début du IIIe siècle avec l’indication des distances à travers l’empire romain, peut-être à destination fiscale). Un extrait du recueil ci-dessous:

Le résultat est édifiant : l’expression « tous les chemins mènent à Rome » dit bien ce qu’elle veut dire ! Tout part de Rome et donc tout arrive à Rome (ici il s’agit de la station Roma)

Les 52 « lignes » ainsi cartographiées retracent les principales voies romaines caractérisant l’empire romain au IIe siècle. À l’époque, celui-ci est à son apogée, courant du nord de l’Europe jusqu’en Afrique du Nord via l’Asie mineure.

La carte de Sasha Trubetskoy, type plan de métro (en très grand ici), nous fait ainsi voyager à travers le temps et l’espace. Laissez-vous conduire de la Via Britannica à la Via Traiana Nova, en passant notamment par la Via Aquitania, la Via Graeca et la Via Claudia. Transportez-vous de Leptis Magna à Corduba, de Portus Namnetum à Vindonissa, de Verona à Amphipolis…Ci-dessous, l’amphithéâtre de Leptis Magna en Libye.

Même si l’auteur a pris quelques libertés en matière de dénominations (il a inventé le nom de certaines voies qui étaient dépourvues d’appellation historique), c’est tout un monde à (re)découvrir, où le latin n’était pas encore une langue ancienne (dans le meilleur des cas) ou une langue morte (dans le pire des cas)…

Quel que soit votre itinéraire, laissez votre imagination vagabonder et vous transporter, au gré des « stations », jusqu’à la première de toute : Roma !

Pompéi renaît (une nouvelle fois) de ses cendres

Alors que l’enseignement des langues anciennes (latin et grec) dans le secondaire est peut-être sur le point de disparaître en France, la cité antique de Pompéi, un temps malmenée, semble avoir retrouvé un nouveau souffle.

L’ancienne ville romaine, située au sud est de Naples (en Italie), a été fondée au -VIe siècle. Elle fut ensevelie et figée dans le temps par les cendres et lapilli (fragments de lave) du Vésuve en août 79, lors d’une éruption volcanique qui détruisit également Herculanum.

pompei-eruptionOubliée pendant plus de 1 600 ans, la ville fut redécouverte au XVIIe siècle dans un état de conservation étonnant (les 7 m de couches de cendres ont préservé le site des pillages); les fouilles révélèrent une cité prospère. Le site archéologique, qui s’étend sur pas moins de 44 hectares, est aujourd’hui le deuxième site touristique du pays derrière le Colisée de Rome, avec 2,7 millions de visiteurs en 2014.

vue de pompéi

Depuis 2012-2013, le site de la cité antique est en pleine effervescence : la rénovation de Pompéi est en cours, avec l’aide financière de l’Union européenne (des subventions avoisinant les 50 millions d’euros). Victime de glissements de terrain, d’effondrements multiples (dus à la pluie et aux ruissellements) et de vols à répétition depuis plusieurs années, le site était sérieusement délabré; au point d’être menacé en 2013 de se voir retirer de la liste du Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO où il est inscrit depuis 1997.

pompéi en 2013Un Grand Projet Pompéi a donc été lancé en 2011-2012 pour permettre la conservation de lancienne ville romaine et lui rendre tout son lustre (aussi mis à mal par des années de disette budgétaire). Car, comme dans une maison moderne, il y a en permanence des travaux à faire pour garder l’ensemble en état. Les chantiers se multiplient donc : restauration de fresques (comme celle du triclinium ou antichambre de la villa des Mystères, la plus célèbre des demeures de Pompéi), de mosaïques. Mais également des travaux pour supprimer le risque lié au ruissellement des eaux de pluie sur plusieurs centaines de bâtiments (ex: la maison du Centenaire, la nécropole de Porta di Nocera ou encore la maison de Severus) ; il est bon de rappeler que le site compte pas moins de 1 500 bâtiments. Entretenir pareil lieu n’est donc pas une mince affaire.

Revers de la médaille : le visiteur trouve souvent porte close ou doit se contenter du dos d’un ouvrier au premier plan de ses clichés, quand ce ne sont pas des bâches disgracieuses qu occultent la vue. Des maisons et des chemins sont en effet fermés aux visiteurs car les chantiers prennent du temps : aujourd’hui, moins de dix chantiers ont été achevés sur la trentaine existante. A titre d’exemples : le « grand gymnase », où les jeunes citoyens de la ville venaient faire du sport avant l’éruption volcanique, a été inauguré cette semaine (par le ministre italien de la Culture) après 7 ans de travaux ; quant à la villa des Mystères, il en a fallu deux (elle a rouvert ses portes en mars 2015).

Ceux qui travaillent à la restauration du site sont toutefois engagés dans une véritable course contre la montre. Car l’UE veut l’achèvement de tous les travaux pour fin 2015; sous peine de reprendre l’argent alloué qui n’aura pas été dépensé. Or il est matériellement impossible de respecter l’échéance. Quel avenir donc pour le site au soir du 31 décembre 2015 ? Seule certitude avancée par le surintendant du site: il n’est pas question d’abandonner le travail ; il en va quand même de l’image de l’Italie. Affaire à suivre donc… Cliquer sur l’image pour voir la vidéo (qui présente la situation au 23 juillet 2015)

travaux à pompéi

Informations pratiques ou complémentaires

Le site digitalhumanities.umass.edu propose un outil tre?s pratique pour toute personne désireuse de se rendre sur le site de Pompe?i ou de l’étudier : une carte dynamique du site antique (en anglais).

Autre initiative intéressante: Pompéi en 3D numérique. Un projet appelé Digital Pompéi, présenté fin avril 2015 à la conférence Build de Microsoft à San Francisco, a mis au point une animation 3D (réalisée par la start-up Iconem) : le survol des ruines de Pompéi, avec la possibilité de naviguer au-dessus du site archéologique. Ce projet n’est pour l’heure qu’une démonstration. L’usage définitif de ce prototype n’est pas encore clair mais une application grand public, permettant d’explorer le site dans un navigateur Web, est envisagée.

A l’occasion d’une exposition organisée au museum de Melbourne en Australie, la société Zero One Animation a reconstitué les dernières 24 heures de la ville de Pompéi, du déclenchement de l’éruption à la destruction totale du paysage, comme les spécialistes pensent que cela s’est passé. A découvrir ici.

Enfin, je renvoie au superbe docu-fiction produit par la BBC en 2003 : « Le dernier jour de Pompéi ».

Une B.D. didactique

Alcibiade Didascaux, un héros de B.D. pas comme les autres.

alcibiade egypte        alcibiade charlemagne

Suivez les aventures et mésaventures d’Alcibiade, professeur de langues anciennes (grec et latin) qui, grâce à une machine à remonter le temps (invention de son collègue de Physique-Chimie), traverse les mondes grec, égyptien, romain, gaulois… Une savoureuse épopée permettant de (re)découvrir l’Antiquité (14 tomes) et le Moyen Age (déjà 3 tomes parus).

Quelques extraits:

17.le siège d'Alésia

clovis alcibiade