Frontières, interfaces

Du plus simple …

Zone de contact entre deux milieux, deux systèmes, permettant des échanges entre eux (E.Noussis)

Au plus réfléchi …

Limite du territoire d’un Etat et de sa compétence territoriale. Par extension, limite séparant deux zones, deux régions, ou même deux entités plus ou moins abstraites (frontière linguistique, « la frontière entre le bien et le mal »). (…)

Il a été abondamment prouvé que la théorie des frontières naturelles est une construction politique et intellectuelle, élaborée à partir de considérations militaires locales et de la lecture de cartes qui surreprésentaient les rivières et des « chaînes » de montagnes parfois imaginaires. (…) Toutes les frontières, par définition, sont artificielles. « Frontière : ligne imaginaire entre deux nations, séparant les droits imaginaires de l’une des droits imaginaires de l’autre ». (A.Bierce, 1842 – 1914)

La frontière est donc une interface privilégiée entre des systèmes différents, où fonctionnent les effets de synapse (rupture, passage, relais), d’autant plus forts que le gradient entre les deux espaces séparés par la frontière est plus fort, comme la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique (…).

Brunet R., Ferras R., Théry H., Les mots de la géographie, dictionnaire critique, Reclus
La Documentation Française, 1993.

Jamais les frontières n’ont été aussi nombreuses et leur jeu aussi complexe. Ici, on cherche à construire des ensembles économiques et politiques transnationaux qui les effacent. Là, par l’effet d’un nouvel ordre mondial, elles réapparaissent ou se renforcent. Partout, des barrières culturelles et sociales fragmentent les espaces nationaux. La frontière, comme limite de territoire (de quel territoire ?), est bien au coeur des problèmes monde d’aujourd’hui.

Pendant une quarantaine d’années cette question était, en quelque sorte, restée taboue. Revenir, le cauchemar de la seconde guerre mondiale passé, sur le statut de la frontière risquait de remuer dangereusement en Europe la question des annexions, des déplacements de population, de la partition de l’Allemagne. Nul n’y tenait. Mais l’actualité pressait les géographes de rouvrir ce dossier : ils se devaient par exemple d’observer si les frontières léguées par la colonisation avaient réellement créé des espaces nationaux intégrés, et viables après les indépendances, de créer une nouvelle géographie économique pour une Europe qui supprimait peu à peu ses barrières douanières, de réfléchir sur les effets de la mondialisation des échanges, d’analyser les conflits entre nouveaux Etats.

Si la frontière comme limite séparant deux Etats a une histoire simple à écrire, relativement brève d’ailleurs, l’effet-frontière prend des visages multiples qu’il faut décrire et analyser : elle fonctionne, selon le cas et selon la conjoncture, comme barrière ou passage, ligne de défense ou zone refuge, douane protectrice ou zone franche, périphérie ou zone privilégiée de coopération, espace-pionnier ou zone de migration permanente.

La frontière était autrefois, et demeure toujours, le reflet d’un rapport de forces, politiques, économiques, culturelles, sociale.

Renard J.P et Picouet P., « Frontières et Territoires », Documentation photographique, Avril 1993, La Documentation Française.

Un Lien utile sur les cartes :

Titre du livre : Cartographies – Les Carnets du Paysage n° 20
Auteur : Collectif Éditeur : Actes Sud Date de publication : 17/11/10 N° ISBN : 2742795332

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